« Les pensions versées par   capitalisation   sont systématiquement supérieures aux prestations du régime universel » - Le Moniteur des Pharmacies n° 3309 du 22/02/2020 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des pharmacies n° 3309 du 22/02/2020
 

Temps Forts

Entretien

Auteur(s) : PROPOS RECUEILLIS PAR FRANÇOIS POUZAUD 

Arrivé en commission à l’Assemblée nationale le 3   février, le projet de loi de réforme des retraites vers un régime universel est discuté dans l’hémicycle depuis le 17   février. La Caisse d’assurance vieillesse des pharmaciens (CAVP) entend prendre toute sa place dans les négociations à venir et faire front uni avec les syndicats pharmaceutiques pour défendre le régime de retraite complémentaire par capitalisation des pharmaciens. Explications de Monique Durand, présidente de la CAVP.

Quels sont les atouts du régime de retraite complémentaire par capitalisation des pharmaciens ?

Monique Durand : Les pharmaciens libéraux possèdent un régime de capitalisation pérenne et efficient, mis en place dès 1962 pour anticiper les aléas démographiques de leur profession réglementée et sans jamais rien coûter à l’Etat. Mixant répartition et capitalisation, le modèle de retraite des pharmaciens a démontré sa robustesse. Il a de plus la faveur des jeunes générations. Car c’est un régime moderne conforme à l’architecture des systèmes de retraite européens.

Que demande la Caisse d’assurance vieillesse des pharmaciens (CAVP) ?

M. D. : La CAVP demande la juxtaposition d’un régime de retraite « socle » adapté aux spécificités des non-salariés au sein du régime universel et d’un régime de retraite complémentaire, obligatoire et solidaire, à gouvernance professionnelle, lequel sera géré par capitalisation. En clair, nous demandons que sur les 28,12 % de taux de cotisation des pharmaciens au régime universel jusqu’à un PASS [plafond annuel de la Sécurité sociale Ndlr] et sur les 12,94 % entre un et trois PASS, au moins 5 % soient affectés au financement du régime de capitalisation obligatoire des pharmaciens.

Nous demandons également que l’abattement de 33 % de l’assiette pour le calcul des cotisations, en conformité avec les engagements pris lors des négociations entre le gouvernement et les instances syndicales représentatives des libéraux, soit inscrit dans la loi. Mais aussi que les réserves de la profession soient « fléchées » à l’usage exclusif des pharmaciens.

La CAVP a été l’une des rares caisses de retraite à se prononcer en faveur du projet de loi lors du vote du conseil d’administration de la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales (CNAVPL) le 16 janvier. Pourquoi ?

M. D. : La CAVP s’est prononcée favorablement car elle n’est pas contre ce projet de réforme en tant que tel. En revanche, ce vote favorable est associé à des conditions explicites puisque nous rejetons notamment l’instauration d’un régime unique, étatique, reposant sur une assiette de cotisation de 120 000 €, supérieure au revenu professionnel de 96 % de la population active, et qui ne laisse aucune place à d’éventuels régimes complémentaires, qu’ils soient obligatoires ou facultatifs.

Les libéraux bénéficient-ils des mêmes droits et des mêmes avantages que les salariés au sein du système universel ?

M. D. : Non. La réforme ne respecte pas un principe d’égalité entre libéraux et salariés. Le taux de rendement annoncé à 5,5 % par le gouvernement est, en réalité, de 4,95 % jusqu’à un PASS en tenant compte de la cotisation de solidarité de 2,81 % non contributive de droits. Or ce rendement décroît au-delà d’un PASS, alors que le taux de cotisation des libéraux est de 20 % entre un et trois PASS et qu’il ne représente que 10 % pour les salariés. Autrement dit, les libéraux achèteront leurs points plus chers que les autres catégories d’assurés sociaux, alors qu’ils devraient pouvoir prétendre aux mêmes déductions fiscales et sociales de leurs cotisations en capitalisation que celles fixées pour les salariés du système universel.

Y a-t-il eu néanmoins des avancées notables pour les libéraux ?

M. D. : Oui. Avec la réintégration de la CSG versée par les pharmaciens à l’assiette des cotisations sociales donnant droit à la retraite, le taux de cotisation retraite du régime universel baissera de quatre à cinq points, retrouvant un niveau plus compatible avec les capacités contributives du pharmacien dans un régime de capitalisation. Dans ces conditions, avec un taux de 28,12 % jusqu’à un PASS dont 5 % fléchés en capitalisation, cela devient jouable !

Une autre avancée concerne un point important sur lequel il nous paraissait essentiel de ne pas transiger : la sanctuarisation des réserves constituées par l’effort de cotisation des pharmaciens pour équilibrer nos régimes complémentaires.

Quelles sont vos relations avec les syndicats de pharmaciens ?

M. D. : Les syndicats professionnels ont été reçus à plusieurs reprises par le Haut-commissariat aux retraites (HCR), alors que la CAVP, organisme gestionnaire et compétent des régimes de retraite des pharmaciens, n’a pas voix au chapitre. Nous n’avons donc pas été destinataires des simulations du HCR, mais actuellement, nous travaillons de concert avec les syndicats pour leur apporter toute l’expertise technique de la CAVP.

Justement, dans le cadre de ce rapprochement avec les syndicats, vous avez eu en main ces simulations. Que retirez-vous de vos analyses ?

M. D. : Nous avons procédé à une analyse objective des simulations réalisées sur trois cas-types par le HCR. À partir de ceux-ci, nous avons comparé les performances du régime universel et du régime complémentaire par capitalisation des pharmaciens. Les résultats des simulations du HCR sont difficiles à appréhender du fait d’hypothèses de calcul incontestablement favorables au régime universel. En effet, le HCR lui applique un avantage qu’il n’applique pas au régime actuel des pharmaciens.

Ainsi, les écarts de pension sont respectivement de 17 %, 30 % et 20 % en faveur du régime universel, respectivement pour un, deux et trois PASS. Alors que nos propres analyses montrent que les pensions versées par le régime complémentaire par capitalisation sont dans tous les cas supérieures aux prestations du régime universel.

Les syndicats demandent que les pharmaciens d’officine puissent, comme les autres professionnels de santé percevant des honoraires conventionnels, bénéficier de l’Avantage social vieillesse (ASV). Est-ce une bonne idée ?

M. D. : Les pharmaciens d’officine tireront bientôt des revenus sur le médicament remboursable composés à 75 % d’honoraires. Par conséquent, une telle revendication paraît intellectuellement légitime et logique mais l’expérience de l’ASV chez les pharmaciens biologistes montre que ce régime a connu quelques difficultés financières qui appellent donc à la prudence. Le système des retraites ne se gère pas comme un projet de loi de financement de la Sécurité sociale, les règles ne peuvent changer tous les ans et doivent, au contraire, être pérennes pour ne pas remettre en cause en permanence les stratégies des pharmaciens en matière de retraite. L’ASV mérite une vraie réflexion et sa mise en place ne peut se concevoir que dans le temps, et non pas en quelques semaines.

Si je comprends bien, vous êtes déterminée à ne rien lâcher dans les négociations avec l’Etat ?

M. D. : 2020 sera une année charnière pour l’avenir de notre régime de retraite. Notre détermination est sans faille pour défendre l’avenir de ce modèle exemplaire auquel les pharmaciens libéraux sont attachés. La question de la gouvernance est donc pour nous essentielle. Les administrateurs de la CAVP sont prêts à travailler, main dans la main, avec les syndicats pharmaceutiques, pour définir ensemble une ligne commune de défense des intérêts de nos confrères. 

BIO EXPRESS DE MONIQUE DURAND

Depuis 2017  :  Présidente de la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales (CNAVPL).
Depuis 2015  :  Présidente de la Caisse d’assurance vieillesse des pharmaciens (CAVP).
Depuis 1987  :  Pharmacienne d’officine, titulaire à Champigneulles (Meurthe-et-Moselle).

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