La préparation des piluliers pour le domicile - Le Moniteur des Pharmacies n° 3290 du 12/10/2019 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des pharmacies n° 3290 du 12/10/2019
 

Cahiers Formation du Moniteur

Entreprise

Auteur(s) : CAHIER RÉDIGÉ PAR MATTHIEU VANDENDRIESSCHE 

C o nstitutive de l’acte pharmaceutique, la préparation des doses à administrer (PDA) consiste, selon la définition de l’Académie nationale de pharmacie, à « préparer, dans le cas où cela contribue à une meilleure prise en charge thérapeutique du patient, les doses de médicaments à administrer, de façon personnalisée, selon la prescription, et donc par anticipation du séquencement et des moments des prises, pour une période déterminée » . Cette pratique inscrite dans le Code de la santé publique depuis 1995 s’est surtout développée en pharmacie d’officine au bénéfice des résidents des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad). Elle se met en place actuellement pour les patients au domicile dans leur usage quotidien sous la dénomination courante de « PDA ambulatoire ».

IDENTIFIER LES BESOINS


POUR QUELS PROFILS DE PATIENTS ?

Tout patient en difficulté pour prendre son traitement de manière régulière ;
Tout patient atteint par une ou plusieurs maladies chroniques qui requièrent une prise de médicaments multiple ;
Tout patient en recherche de sécurité et de praticité dans la prise de son traitement.
Ces catégories se recoupent et recouvrent la population de patients âgés vivant à leur domicile (avec ou sans perte d’autonomie) et les patients atteints par une maladie silencieuse ou complexe à gérer. La préparation des doses à administrer (PDA) peut aussi s’adresser à des enfants et des adolescents, notamment en situation de garde alternée.


COMBIEN DE PATIENTS SONT CONCERNÉS DANS VOTRE OFFICINE ?

Au cœur du besoin en pilulier, les patients qui reçoivent des ordonnances dites « complexes », c’est-à-dire comprenant au moins 5 médicaments remboursables différents. Elles représentent près de 15 % des prescriptions qui donnent lieu à une prise en charge par l’Assurance maladie, renouvellements compris. Par extrapolation, une officine desservant 3 000 patients dispose d’un potentiel d’environ 450 personnes éligibles à la PDA. Ce potentiel peut être évalué par extraction du logiciel de l’officine de données portant sur le nombre de lignes de prescription, en fonction d’une classe thérapeutique ou de l’âge des patients.

QUEL EST LE PROFIL D’OBSERVANCE DE CES PATIENTS ?

L’observance est définie comme le degré avec lequel un patient suit les recommandations médicales. Le terme d’adhésion thérapeutique, qui dénote un comportement du patient plus impliqué et du soignant davantage dans la persuasion que l’autorité, lui est actuellement préféré. Selon la définition et la méthodologie retenues, le taux d’observance est évalué entre 26 et 59 %, tout âge confondu1.
La présence d’une affection de longue durée (ALD) augmente le risque de polymédication. C’est le cas, par ordre de risque décroissant, pour l’insuffisance respiratoire, le diabète, la maladie de Parkinson, la maladie coronarienne et l’hypertension artérielle (HTA). La maladie d’Alzheimer est la moins à risque de polymédication2.
Seulement 40 % des patients souffrant d’une maladie chronique (diabète de type 2, HTA, asthme, hypercholestérolémie, etc.) suivent correctement leur traitement3.
Le manque d’observance est multifactoriel et souvent non rationnel.
L’âge ne caractérise pas la mauvaise observance. Elle est fréquente chez le sujet âgé de manière intentionnelle mais moins que chez le patient jeune.
Les patients âgés ne reconnaissent pas forcément qu’ils ne sont pas observants. Et lorsque c’est le cas, ils n’en tirent pas toujours de conséquences. Ainsi, près de 45 % d’entre eux disent avoir déjà oublié de prendre leurs médicaments au bon moment ou ne l’avoir pas pris car ils n’en voient pas l’intérêt. Mais plus de 80 % préparent et prennent leurs médicaments sans y être aidés4. 

1 Lacaille S. Observance des traitements médicamenteux, thèse, CHU Bichat, Paris, 2002.
2 Questions d’économie de la santé, Institut de recherche et documentation en économie de la santé (IRDES), n° 213, octobre 2015.
3 Etude menée auprès de 170 000 patients dans 6 400 pharmacies françaises, IMS Health France-Crip, novembre 2014.
4 Etude IPOP (Investigation des prescriptions délivrées en officine sur les personnes âgées) menée dans 81 pharmacies auprès de 900 patients de 65 ans et plus et prenant au moins 3 médicaments, 2016.

CADRER L’ACTIVITÉ


QUE DIT LA RÉGLEMENTATION ?

Le Code de la santé publique (article R. 4235-48) mentionne la « préparation éventuelle des doses à administrer » comme composante de l’acte pharmaceutique. A ce jour, la pratique est donc légale, mais pas totalement encadrée au plan réglementaire. Trois projets de divs (décret PDA, bonnes pratiques de préparation et convention-type entre officine et établissement médicosocial) sont en attente de parution officielle.
Sans être citée, la PDA figure de manière implicite parmi les « actions de suivi et d’accompagnement pharmaceutique » dans le décret « conseils et prestations » du 3 octobre 2018. Elle est mentionnée dans la convention nationale pharmaceutique. Les bonnes pratiques de dispensation parues en novembre 2016 s’appliquent à ce type de préparation.
Le déconditionnement consiste à extraire chaque unité de prise de son blister. Largement pratiqué dans la PDA, il n’est ni explicitement autorisé ni interdit.
A ce jour, un pharmacien n’est pas tenu de solliciter l’autorisation de l’agence régionale de santé (ARS) pour exercer l’activité de PDA, ni même de la déclarer. Plusieurs ARS1 ont mis en ligne un guide sur la sécurisation du circuit du médicament en Ehpad. Ces guides proposent une procédure sur le mode opératoire, les contrôles et la traçabilité de l’opération. Ces recommandations sont non opposables et peuvent légèrement différer selon les ARS.


QUELS SONT LES RISQUES ENCOURUS ?

Si les règles de dispensation ne sont pas respectées et/ou que la préparation du pilulier conduit à une erreur médicamenteuse, le pharmacien s’expose à des poursuites de nature ordinale, administrative, pénale et civile (cette dernière se déclenche à l’initiative du plaignant).

FAUT-IL UNE ASSURANCE SPÉCIFIQUE ?

Dans le cadre d’un contrat multirisque professionnel (et plus spécifiquement au titre de la garantie responsabilité civile), l’activité de PDA est généralement couverte sans majoration de prime. C’est le cas pour la MADP et la MACSF. Cette dernière demande toutefois au pharmacien de lui déclarer l’activité. Renseignez-vous auprès de votre assureur.


QUELS SONT LES RISQUES SI L’ON DÉCONDITIONNE ?

Après déconditionnement, la date limite d’utilisation (DLU) n’est plus opposable au fabricant, le pharmacien engage sa responsabilité sur la stabilité du principe actif. Une PDA pour une durée minimale (7 jours) est privilégiée. Elle sera de 28 jours au maximum si le conditionnement d’origine est conservé. Il est recommandé de ne déconditionner qu’au moment de la préparation et une seule spécialité d’un même lot à la fois.
La traçabilité d’un médicament est portée par son code Datamatrix. Celui-ci associe au code CIP une date de péremption et un numéro de lot, lui permettant d’être rappelé en cas d’alerte sanitaire. Ces informations sont reportées sur le pilulier. La traçabilité doit également s’appliquer si le pilulier est rempli avec une même spécialité provenant de lots différents. 

1 Ile-de-France, Bourgogne-Franche-Comté, Auvergne-Rhône-Alpes, Provence-Alpes-Côte d’Azur, Pays-de-la-Loire et Normandie.

LE PÉRIMÈTRE D’ACTION DES INFIRMIERS

Le périmètre d’action des infirmiers
Selon le Code de la santé publique, les infirmiers ont, parmi leurs missions, l’aide à la prise des médicaments, qui peut requérir la préparation du semainier « en dur ». Ils interviennent à la suite d’une prescription médicale :

•  Lors de l’administration d’un traitement oral au domicile des patients présentant des troubles psychiatriques. Cette prise en charge sera étendue aux patients atteints de troubles cognitifs à partir du 1er décembre. Elle était déjà pratiquée par certaines caisses primaires.

•  Lors d’une séance hebdomadaire de surveillance clinique. Le pilulier va faciliter la prise des médicaments pour le patient, son aidant ou l’aide à domicile pendant la semaine. La préparation du pilulier par l’infirmier n’est pas, en elle-même, un acte codé et rémunéré.
Les infirmiers peuvent prodiguer des soins quotidiens ou pluriquotidiens dans le cadre d’un service de soins infirmiers à domicile (SSIAD). Celui-ci s’adresse notamment aux personnes âgées de 60 ans et plus, malades et/ou dépendantes. Le SSIAD fait appel à des intervenants extérieurs liés par une convention (voir la convention-type SSIAD-officine sur le site internet medissimo.fr/pro).

SE LANCER DANS L’ACTIVITÉ


CETTE ACTIVITÉ SERA-T-ELLE RENTABLE ?

Elle peut être réalisée quels qu’en soient l’implantation, la taille et le volume d’activité. La participation financière du patient est requise mais il doit être envisageable de travailler à perte au départ du fait de faibles volumes. Ensuite, si l’investissement et les coûts inhérents aux consommables et à la préparation elle-même sont couverts, l’activité devient surtout rentable par la fidélisation de patients polymédiqués et avec l’appui de la substitution. L’activité est régulièrement évaluée, notamment par un suivi dans le logiciel métier.


EXEMPLE DE PLAN FINANCIER


SUR LA BASE DE 100 PATIENTS PAYANTS PAR MOIS.

Tarif appliqué : 5 € HT par semaine.
Chiffre d’affaires annuel : 100 x 5 x 52 = 26 000 € HT.
Investissements :
➜ Prix de revient consommables et logiciel : 6 € HT par patient et par mois. Soit 6 x 12 / 52 = 1,38 € HT par patient et par semaine.
Coût annuel : 1,38 x 100 x 52 = 7 200 € HT.
➜ Frais d’installation et coût du matériel (production semi-automatisée) : 6 000 € amortis sur 3 ans, soit 2 000 € par an.
Temps de préparation :
Le temps nécessaire à l’élaboration, au remplissage, au contrôle et au scellement des piluliers sécurisés est évalué à 6 minutes par pilulier par semaine en moyenne, soit environ 24 minutes par patient et par mois pour un préparateur expérimenté. Sa rémunération horaire est de 19,50 € brut avec charges. Pour 100 piluliers par mois, sa rémunération horaire sera de 100 x 19,50 x 24 / 60 = 780 € brut.
Coût annuel du temps de préparation : 780 x 12 = 9 360 € brut.
Coût annuel total : 7 200 + 2 000 + 9 360 = 18 560 €.
Bénéfice annuel : 26 000 – 18 560 = 7 440 €.
Plan financier effectué avec la société d’expertise-comptable Conseils et auditeurs associés, sur la base d’une projection réalisée par Pharma Système Qualité en février 2019.


QUELS SONT LES DIFFÉRENTS SYSTÈMES DE PRÉPARATION ?

Le semainier « en dur » persiste chez de nombreux patients. Il est simple d’utilisation mais n’est pas sécurisé et nécessite un entretien régulier.
Le conditionnement en sachets présente de nombreux avantages et peut convenir à des patients chroniques et nomades de même qu’aux soignants au domicile. Mais outre de lourds investissements, il n’est pas le mieux adapté pour une prise en main par les personnes âgées elles-mêmes.
Le pilulier jetable présenté sous forme de cartes blistérisées reprend les codes du semainier traditionnel. Il fait appel à une production manuelle ou semi-automatisée (manuelle guidée par un logiciel de préparation). La répartition des traitements se fait sans déconditionner les médicaments (présentations de génériques adaptées ou par découpage des blisters) ou en plaçant les unités déconditionnées dans des alvéoles monodoses ou multidoses.
Quelle que soit la méthode de préparation choisie, des procédures de sécurité, de traçabilité et de contrôle s’appliquent.


COMMENT REMPLIR LE PILULIER ET LE CONTRÔLER ?

Selon le mode semi-automatisé, le remplissage des piluliers s’effectue manuellement par guidage avec les cases représentées sur l’écran ou par éclairage lumineux de la case à remplir. Le contrôle consiste à comparer le contenu des alvéoles avec l’ordonnance et les indications de l’étiquette qui va ensuite recouvrir le pilulier. Un second contrôle est effectué en s’assurant du nombre d’unités conditionnées et en s’appuyant aussi sur leur taille, leur forme et leur couleur. La comparaison est possible avec une photothèque mise à disposition par le fournisseur de matériel ou avec les descriptions répertoriées par une base sur les médicaments (base Claude Bernard, Vidal).


QUELLE PLACE POUR LES MÉDICAMENTS GÉNÉRIQUES ?

Les génériques semblent mieux acceptés lorsqu’ils sont intégrés à des piluliers (pas de refus lié à la boîte et à la marque). Plusieurs laboratoires de génériques développent des gammes de blisters prédécoupés et blisters unitaires découpés (BUD). Directement intégrés au pilulier, ils comportent pour chaque unité de médicament la mention de la spécialité, du dosage, du numéro de lot et de la date limite d’utilisation (DLU). D’autre part, sont disponibles des flacons de 28 ou 30 unités de prise, dont le contenu est réparti dans les alvéoles. Pour être commercialisé, le médicament subit des études de stabilité en lien avec l’ouverture du flacon. Mylan propose ainsi une cinquantaine de dénominations communes internationales (DCI), soit 72 présentations en flacon. Pour Biogaran, l’offre totalise 53 DCI et 105 dosages.
Les génériqueurs octroient généralement des conditions commerciales équivalentes à celles qui s’appliquent aux présentations classiques. Dans une logique de services aux pharmaciens et à leurs patients, certains laboratoires nouent un partenariat avec un fournisseur de matériel : Teva avec Mdose, Biogaran avec Oréus ou encore Sandoz avec Praticima. 

LE PLANIFICATEUR, MODE D’EMPLOI

Le planificateur, mode d’emploi
Le planificateur ou logiciel de PDA commande la préparation. Il peut être ou ne pas être interfacé avec le logiciel de l’officine (LGO). Après analyse de l’ordonnance et facturation (pour 1 mois lors de la première préparation hebdomadaire), les lignes de prescription sont importées depuis le LGO ou saisies dans le planificateur. Les médicaments, leur posologie, leur numéro de lot et leur date limite d’utilisation (DLU) sont reliés au patient (pour lequel est créé un code QR) et aux informations contenues dans sa carte Vitale. Si pour remplir un même pilulier 2 boîtes d’un médicament sont nécessaires et ne portent pas le même numéro de lot, les 2 numéros sont enregistrés mais il ne sera pas possible de distinguer les médicaments de chaque lot en cas de rappel. Lors du renouvellement du pilulier, le code QR du patient est scanné, les données se reportent automatiquement et peuvent être modifiées (ajout, nouvelle posologie, changement de marque de génériques, etc.). Le remplissage des alvéoles est guidé par le logiciel sur l’écran ou par indication lumineuse du cadran de préparation. Le contenu des alvéoles est vérifié une première fois visuellement avant l’édition des étiquettes qui vont sceller le pilulier. Selon les fournisseurs, des étiquettes peuvent être apposées sur les boîtes hors pilulier. Les médicaments non délivrés ou « rompus », qui sont affectés à chaque patient (étiquetage avec son code QR), sont enregistrés dans le logiciel de PDA. Le même logiciel peut être utilisé pour différents types de piluliers commercialisés par le même fournisseur.

PDA : CEUX QUI N’EN SONT PAS

PDA : ceux qui n’en sont pas
Les formes orales sèches et solides peuvent entrer en pilulier. Pour des raisons pratiques et de sécurité, n’y sont pas inclus :

•  Les médicaments requérant des conditions particulières de conservation (humidité, air, lumière) ou de manipulation (risque pour le personnel) ;

•  Les médicaments à conserver au réfrigérateur ;

•  Les médicaments nécessitant des adaptations de posologie (antivitamines K, antalgiques) ;

•  Les prescriptions conditionnelles (« si besoin », « à la demande ») ;

•  Les capsules molles ;

•  Les formes orodispersibles et effervescentes ;

•  Les formes multidoses ;

•  Les sirops, collyres, sachets* et ampoules buvables* (* sauf pilulier sans déconditionnement) ;

•  Les formes stériles ;

•  Les stupéfiants ;

•  Les antibiotiques en traitement aigu ;

•  La clozapine (suivi biologique), les médicaments hormonaux (finastéride, dutastéride, anastrozole) et les biphosphonates (conditions d’administration strictes).
Source : « Fiches pratiques pour la préparation des doses à administrer (PDA) en établissements médicosociaux », agence régionale de santé (ARS) Provence-Alpes-Côte d’Azur, avril 2018.

MODES DE PRÉPARATION


AVANTAGES


INCONVÉNIENTS

Sans déconditionner
Conservation du numéro de lot et de la date limite d’utilisation (DLU) si le conditionnement primaire le permet

•  Préparation chronophage

•  Perte du numéro de lot et de la DLU sur certains blisters découpés à la main

•  Encombrement

•  Déblistérisation fastidieuse pour le patient et le personnel soignant

•  Risque d’ingestion de blisters découpés par le patient
Système monodose
(un médicament par alvéole)
Identification immédiate du médicament ➜ si modification de traitement ou retrait de lot, surcoût limité aux seuls médicaments concernés

•  Déblistérisation chronophage pour l’officine

•  Système de traçabilité indispensable

•  Responsabilité pharmaceutique engagée par le déconditionnement
Système multidose
(plusieurs médicaments par alvéole)
Peu encombrant

•  Déblistérisation chronophage pour l’officine

•  Perte d’identification des comprimés ➜ système de traçabilité indispensable

•  Responsabilité pharmaceutique engagée par le déconditionnement

•  Surcoût si modification de traitement ou retrait de lot (sauf si possibilité d’identifier les médicaments par leur photographie sur le blister)

•  Probable risque d’interactions physicochimiques entre médicaments au-delà de 7 jours
Source : « Guide pour la PDA aux résidents en établissement médicosocial », agence régionale de santé (ARS) Provence-Alpes-Côte d’Azur, mars 2017.

ORGANISER L’ACTIVITÉ


COMMENT IMPLIQUER L’ÉQUIPE ?

La préparation des piluliers fait partie intégrante du projet d’entreprise. C’est ainsi que le titulaire la présente à ses collaborateurs lors d’une réunion d’équipe, en mettant en évidence des situations précises de patients qui gagneraient à en bénéficier. Parfois considérée comme peu valorisante et routinière, la PDA peut intéresser pharmaciens (et étudiants à partir de la troisième année) et préparateurs qui souhaitent se tenir moins au contact des patients et/ou sont désireux d’intégrer des procédures de fabrication. C’est en ce sens que cette activité, qui requiert de la rigueur, doit être valorisée par le chef d’entreprise.
L’équipe peut s’organiser d’elle-même, des collaborateurs se portent volontaires. Sinon, l’activité est organisée à tour de rôle. Lors d’un entretien individuel, l’intérêt réel du collaborateur pour l’activité est évalué.
Si les conditions le permettent, un binôme composé d’un préparateur et d’un pharmacien est constitué pour assurer les étapes de préparation et du contrôlepharmaceutique. Il est responsable de la rédaction et de la mise à jour de procédures de fabrication qualitative, auxquelles d’autres collaborateurs pourront se reporter.
Dès l’embauche, le contrat peut préciser une éventuelle PDA ou simplement mentionner pour les préparateurs « toutes activités du préparatoire ». Les bonnes pratiques de préparation ne disposent pas de volet spécifique pour la PDA mais cette dernière s’y rattache.
La mise en place de la PDA s’accompagne de la formation des collaborateurs impliqués (souvent en e-learning pour le semi-automatique) et de l’application de procédures écrites. L’association Pharma Système Qualité a rédigé un guide sur la PDA dans le cadre de la démarche ISO 9001-QMS Pharma qu’elle propose aux officines.

QUAND PRÉPARER ?

Pour une PDA semi-automatisée, le temps moyen observé est environ de 6 minutes et 30 secondes par pilulier. Cela ne comprend pas l’analyse de l’ordonnance, la facturation, le contrôle de la réalisation, une éventuelle livraison, etc.
Une production réalisée au fil de l’eau risque de désorganiser l’officine. Le patient doit comprendre qu’un pilulier ne peut pas être préparé dans la précipitation du fait des différentes étapes. Des plages horaires creuses sont dégagées pour cette préparation (à partir des données de fréquentation issues du logiciel de l’officine) et à répartir entre les différents usages du préparatoire. Il peut être décidé de ne faire des piluliers que 1 à 2 fois par semaine.


QUELLES PRÉCAUTIONS POUR LA PRÉPARATION ?

En cas de PDA manuelle ou semi-automatisée, le préparatoire peut être utilisé comme zone de préparation, dès lors qu’aucune autre activité n’y est réalisée simultanément (article R. 5125-10 du Code de la santé publique). Un espace doit être aménagé pour les préparations magistrales et un autre pour la PDA. Dans le cas contraire, les 2 activités doivent être pratiquées de manière alternative.
La zone de préparation doit être suffisamment spacieuse, éclairée et organisée pour éviter tout risque de contamination ou de confusion.
L’opérateur doit respecter la propreté du local, de sa tenue vestimentaire et assurer l’hygiène de ses mains. Il est recommandé le port de gants et d’une charlotte. Il n’est pas autorisé d’introduire et de consommer des denrées alimentaires dans la zone de préparation. 

Sources : Brigitte Defoulny, directrice de la société de conseil et de formation Héliotrope, et Christel Leclercq, formatrice et consultante, présidente de la société Prépa’Forma ; « Guide pour la PDA aux résidents en établissement médicosocial », agence régionale de santé (ARS) Provence-Alpes-Côte d’Azur, mars 2017.

CONVAINCRE ET COMMUNIQUER


QUELLES SITUATIONS SERAIENT AMÉLIORÉES PAR UN PILULIER ?

Au comptoir, ou plus encore à l’occasion d’un bilan partagé de médication, le besoin d’une organisation pour la prise des médicaments peut être détecté lors des situations suivantes :
Incapacité ou doute sur la capacité du patient à prendre son traitement et/ou à préparer soi-même son pilulier ;
Sentiment d’être dépassé par trop de médicaments ou de prises journalières ;
Présence de signes de fragilité (perte de poids, difficulté à la marche, etc.) et facteurs associés (psychologiques, sociaux, économiques, comportementaux) ;
Consultation de plusieurs médecins ;
Changement de traitements (notamment après une hospitalisation) ;
Difficulté dans la prise du traitement, notamment si 2 conditionnements de génériques se ressemblent, si 2 noms commerciaux de médicaments ou 2 comprimés différents sont quasiment identiques ;
Mauvaise compréhension des posologies et des modes d’administration ;
Déficits fonctionnels : perte de la dextérité manuelle (arthrite, maladie de Parkinson), troubles de la vision et de l’audition.


COMMENT METTRE EN PLACE LA PDA ?

La présentation du traitement sous forme de semainier est pratiquée de longue date au domicile par les patients ou leurs proches mais le service proposé en officine est encore méconnu. Or près d’un tiers des Français se déclarent favorables à la préparation des doses à administrer (PDA)1. Un patient sur 3 estime qu’un pilulier préparé par un pharmacien l’aiderait à améliorer l’observance2.
Le service de préparation d’un pilulier ne peut pas être assimilé en lui-même à de la sollicitation de clientèle dès lors qu’il est proposé aux patients de l’officine et que sa promotion est faite dans l’espace de vente. Il n’est donc pas possible de distribuer des tracts dans la rue, ni de prévoir un affichage publicitaire sur l’officine.
L’activité de PDA de l’officine est rendue visible par le biais d’outils de communication (affiches, brochures, etc.). Le patient (ou son proche) évoque lui-même le sujet ou l’équipe officinale, qui dispose du même niveau d’information sur cette activité, la met en avant.
Le test d’évaluation de l’observance de Girerd est établi sur 6 questions fermées. Tout en se l’appropriant, il est préférable d’opter au cours de l’échange pour des questions ouvertes telles que : « Qu’est-ce qui vous semble difficile pour prendre chaque jour vos médicaments ? » ; « Quels sont les médicaments qui vous posent le plus de problèmes ? » ; « Quels sont les horaires de prise qui vous dérangent le plus ? ».
« Plus le patient est impliqué et s’approprie les outils, plus il a de chances d’être observant. De plus, il n’aura pas l’impression de perdre en autonomie », indique Vanida Brunie, pharmacienne à l’hôpital Emile-Roux (Val-de-Marne). Ainsi, au préalable, il est essentiel que le patient remplisse lui-même son plan de prise, en lien avec le pharmacien qui pourra valider l’adéquation entre mode de vie et pharmacocinétique des médicaments.
Le patient doit être convaincu de la sécurité et de la praticité d’une prise à l’unité. Argumentez tout en lui présentant et lui mettant en main un pilulier factice rempli et étiqueté. La discrétion du pilulier de même que son esthétique peuvent entrer en ligne de compte dans son acceptation.
Il peut être proposé de préparer un pilulier au terme d’un bilan partagé de médication où le patient aura apporté ses boîtes de médicaments.
Un contrat avec le patient ou son proche précise le contenu de cette prestation de services : délai pour la mise à disposition de la préparation, coût, éventuelle livraison à domicile, etc.

1 Enquête de Pharma Système Qualité, mai 2016.
2 Séminaire PDA Pharma, décembre 2017.

COMBIEN ET COMMENT FAIRE PAYER LA PDA ?

Il revient à chaque officine de fixer le tarif de ce service. La confection du pilulier est généralement facturée de 5 à 7 € TTC par semaine (la TVA applicable est de 20 %). Le tarif acceptable pour un service complet (préparation, livraison au domicile, service personnalisé) peut aller jusqu’à 13 € (selon Pharma Système Qualité, Journées qualité 2018).
Avant d’annoncer le tarif, rappelez les différents avantages qui justifient cette dépense : praticité, sécurité de la préparation et du transport, gain de temps, etc. Insistez sur l’aspect « serviciel » plutôt que sur l’amélioration de l’observance : les patients ne sont pas enclins à payer pour un suivi qui s’inscrit dans la mission pharmaceutique. A étudier : la mise en place d’une courte phase de test gratuite, un dispositif de prélèvement bancaire automatique, etc.

Différentes objections peuvent surgir lorsque vous annoncez le tarif de ce service. Il ne s’agit pas de renoncer à le faire rémunérer dès la première remarque. Emettre une objection ne veut pas dire que l’on n’accepte pas de payer ! Voici quelques propositions pour répondre à ces arguments :
« C’est cher ! » : « La participation qui vous est demandée est modique au regard du service rendu. Elle couvre le coût du pilulier lui-même. La préparation ne vous est pas facturée. »
« Ce n’est pas remboursé par la Sécu ? » : « L’Assurance maladie est de plus en plus sélective dans ce qu’elle prend en charge. Cela pourrait l’être à l’avenir dans le cas de patients très âgés vivant à leur domicile. Renseignez-vous cependant auprès de votre complémentaire santé. Il semble que certaines mutuelles envisagent la mise à disposition d’un pilulier dans leurs forfaits de soins. »
« J’ai entendu dire que les infirmières le font gratuitement… » : « En effet, la préparation d’un pilulier réutilisable peut être effectuée par les infirmières au domicile dans un cadre restrictif qui ne vous concerne pas. »
« Je suis un bon client de cette pharmacie… » : « C’est pour cela que nous vous proposons de tester gratuitement ce service pendant 1 mois. Dans un premier temps, voyez comment cela se présente. C’est seulement si vous adhérez au concept que nous vous demanderons une participation. »
« Votre concurrent, lui, ne fait pas payer ! » : « Certaines autres pharmacies ont fait le choix d’une stratégie commerciale en offrant ce service. Sachez qu’il représente un réel coût, qu’il requiert du temps, de la rigueur et le même niveau de qualité que celui de nos conseils et de notre accompagnement. »

Propositions de réponses élaborées avec Brigitte Defoulny, directrice de la société de conseil et de formation Héliotrope.
Source : Pharma Système Qualité, Journées qualité 2018.

QUELLE DÉMARCHE VIS-À-VIS DES PROFESSIONNELS DE SANTÉ ?

Quelle démarche vis-à-vis des professionnels de santé ?

•  Identifiez médecins et infirmiers les plus proches de votre officine.

•  Par prise de contact directe ou lors d’un rendez-vous à votre initiative, informez-les de l’intérêt du service pour le patient et de sa mise en œuvre. Indiquez le contact de l’interlocuteur de l’officine pour la PDA.

•  Prenez contact en priorité avec les professionnels infirmiers qui pratiquent la préparation et rassurez-les sur leurs prérogatives et leur rémunération. Ils doivent percevoir l’intérêt de la PDA pour eux-mêmes : gain de temps, sécurisation de la préparation, etc.

QUID DE L’ENVIRONNEMENT ?

Quid de l’environnement ?
La fabrication des consommables en France limite leur impact environnemental. Ils sont idéalement composés de PET (polytéréphtalate d’éthylène), un polymère vierge ou recyclé à partir de l’industrie alimentaire (bouteilles d’eau et de sodas, etc.).

PROPOSER DES SERVICES ASSOCIÉS


FAIRE APPEL À LA LIVRAISON AU DOMICILE

Le Code de la santé publique distingue clairement la dispensation à domicile de la livraison. La dispensation à domicile consiste pour un pharmacien à se rendre chez son patient au cas où celui-ci serait en incapacité de se déplacer du fait de son état de santé, de son âge et de situations géographiques particulières. Dans ce cadre, comme au comptoir, les conseils de bon usage du médicament doivent être donnés au patient.
Pour la livraison au domicile, les conditions sont les suivantes :
– Remise à un tiers d’un paquet scellé avec nom et adresse ;
– Mise à disposition du patient des explications nécessaires ;
– Remise directe au patient, sans étape de stockage.
Ce service est assuré par différents prestataires à la demande du patient lui-même ou du pharmacien (qui peut en répercuter le coût au patient). La livraison de médicaments sous forme de pilulier est possible. La commande est effectuée par le patient auprès d’une officine partenaire via une application mobile. Certains groupements comme Aprium Pharmacie ou Pharmabest ont développé ce service au bénéfice de leurs adhérents en partenariat avec La Poste. Après une collaboration expérimentale avec cette dernière, le groupe PHR s’est tourné vers un partenariat avec Tessan. A noter que la livraison au domicile peut être comprise dans le forfait santé de certaines complémentaires.

«   LES PILULIERS CONNECTÉS DOIVENT APPORTER LA PREUVE DE LEUR UTILITÉ   »

« Les piluliers connectés doivent apporter la preuve de leur utilité »
Des piluliers connectés (Medissimo, Pharmagest, Robotik Technology) sont disponibles mais pas encore très utilisés par les patients. Leur intérêt est de signaler à leur utilisateur l'administration d’un traitement et d’informer un tiers de la prise ou non de celui-ci. Analyse du phénomène par Alexandre Faure, consultant en « silver économie » et fondateur du blog « Sweet Home ».

LES PILULIERS CONNECTÉS NE SUSCITENT PAS À CE JOUR UN FORT INTÉRÊT DE LA PART DES USAGERS. POUR QUELLES RAISONS SELON VOUS ?

Cela vaut pour tous les objets connectés : ils doivent apporter la preuve de leur utilité et répondre à un besoin pour les utilisateurs. Qu’est-ce que le fait d’être connecté apporte à l’usage d’un pilulier ? Dans le cas présent, ce sont moins les patients que leurs aidants qui sont demandeurs. Pour développer de telles solutions, il faut se concentrer sur la réponse à des problèmes connus et récurrents, comme le passage aux urgences des personnes âgées du fait de l’iatrogénie médicamenteuse.


A QUEL PROFIL DE PATIENTS PEUT-ON LES PROPOSER ?

C’est à l’objet de s’adapter à son utilisateur et non l’inverse. Sur ce principe, il est possible de créer des piluliers connectés pour tous les profils de patients. Pourra-t-on créer un pilulier universel qui résolve tous les problèmes de tous les patients et soit adapté à tous les usages ? Ce n’est pas sûr. Peut-être faudrait-il commencer par s’intéresser à un type de patients, valider que le besoin est satisfait puis élargir l’offre à d’autres types, plus rares, plus complexes.


PAR QUELS LEVIERS CET OUTIL POURRAIT-IL S’INSÉRER DANS LE QUOTIDIEN DES PATIENTS ?

Une fois qu’il a démontré son intérêt pour la santé et l’autonomie du patient, il faut identifier le prescripteur qui aura autorité et légitimité pour le convaincre de l’utiliser. Est-ce le rôle de l’officine ? Quel est l’intérêt pour le pharmacien de le proposer ? N’est-il pas plus pertinent pour une société de télésurveillance d’inclure ce service dans son offre ? Dans tous les cas, il est plus facile d’essayer de vendre un produit que des clients sont prêts à acheter que d’essayer de nouer des partenariats avec des mutuelles pour le faire prendre en charge.

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