La grippe et la vaccination à l’officine - Le Moniteur des Pharmacies n° 3278 du 15/06/2019 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des pharmacies n° 3278 du 15/06/2019
 

Cahiers Formation du Moniteur

Ordonnance

Auteur(s) :

CAHIER COORDONNÉ PAR ALEXANDRA BLANC, PHARMACIENNE

LES MODALITÉS ADMINISTRATIVES DE LA VACCINATION À L’OFFICINE

Après deux années d’expérimentation dans quatre régions (Auvergne-Rhône-Alpes, Hauts-de-France, Nouvelle-Aquitaine, Occitanie), la vaccination contre la grippe saisonnière sera possible dans toutes les officines dès la prochaine campagne, à l’automne. Le feu vert a été donné le jeudi 25 avril par la parution au Journal officiel d’un décret et de trois arrêtés ministériels.

ORGANISER L’ACTIVITÉ

✔ Il est conseillé de renforcer les stocks de vaccins antigrippe en cas de mise en place de la vaccination dans l’officine. Les précommandes effectuées auprès des laboratoires en début d’année doivent prévoir un volume supplémentaire de 15 à 20 % (les précommandes pour la saison 2019/2020 sont achevées mais une commande supplémentaire est souvent possible si nécessaire).
✔ Le titulaire doit respecter le choix des pharmaciens adjoints de ne pas accomplir cet acte nouveau dans les officines.
✔ Si possible, un vaccinateur doit se trouver présent en permanence pour éviter de reporter la vaccination d’une personne. Dans le cas contraire, des rendez-vous sont organisés aux heures creuses permettant à un pharmacien de se consacrer uniquement à cette activité. Selon la taille des équipes, une mobilisation du vaccinateur « à la demande » peut désorganiser le travail au comptoir.
✔ L’entretien pré-vaccinal et l’injection du vaccin se tiennent dans un espace de confidentialité. Cet espace peut être mobilisé pour d’autres activités : entretiens pharmaceutiques, bilans partagés de médication, prise de mesure en orthopédie, etc. Il peut être utile de définir un planning d’utilisation de l’espace.
✔ En cas de prise de rendez-vous, rappeler à la personne de se munir de son carnet de santé et/ou de vaccination1.


DÉPASSER L’APPRÉHENSION

✔ L’apprentissage du geste vaccinal est réalisé sur du matériel de simulation. Pour les premières vaccinations, il peut être rassurant de s’exercer, avec leur accord, sur les membres de l’équipe officinale et sur ses proches qui entrent dans les recommandations vaccinales.
✔ Le pharmacien n’est pas tenu de vacciner une personne s’il estime que son état ou son comportement ne permet pas de le faire dans de bonnes conditions : manifestation d’un trouble physique, psychologique ou cognitif, état physiologique dégradé, angoisse importante, antécédents de malaises lors d’actes médicaux, etc. L’orientation vers un cabinet médical est alors envisagée.


SENSIBILISER ET CONVAINCRE

✔ Dans le courant du mois de septembre, la nécessité de se faire vacciner est évoquée auprès des populations ciblées par les recommandations sanitaires. Les questions « avez-vous reçu votre bon de vaccination contre la grippe ? » et « comment procédez-vous d’habitude pour vous faire vacciner ? » renseignent sur l’intérêt pour la vaccination et le recours habituel pour se faire vacciner. Le choix de la personne est respecté : elle exprime sa préférence pour une vaccination par un médecin, un infirmier ou à l’officine. Par ailleurs, les pharmaciens rappelleront aux personnes ciblées par les recommandations mais ne recevant pas de bon de l’Assurance maladie la nécessité de se faire vacciner (femmes enceintes, personnes obèses, etc.).
✔ Une affiche peut être apposée dans l’officine pour informer sur la possibilité de vaccination.
✔ Des rappels sur la grippe et sur le principe de la vaccination permettent aux officinaux d’évoquer les bénéfices attendus tant au plan individuel que collectif. Les éventuels effets indésirables après injection ne sont pas éludés.
✔ Rappeler que l’homéopathie ne constitue pas une protection vaccinale, de même que les plantes et les huiles essentielles aux vertus antivirales ou immunostimulantes.
✔ Relever les réticences et les idées reçues sur la vaccination contre la grippe.
✔ Sans générer d’anxiété, il faut évoquer pour chacun dans sa vie personnelle les inconvénients à ne pas se faire vacciner : personne âgée non accompagnée (risque de perte d’autonomie par exemple), embauche récente, vacances d’hiver, proche en traitement de chimiothérapie, etc. ●

1 Un carnet de vaccination édité par Santé publique France est disponible gracieusement sur simple demande sur le site internet cespharm.fr.

LA GRIPPE ET LA VACCINATION À L’OFFICINE 

La vaccination à l’officine ne peut se pratiquer qu’après une formation spécifique agréée pour le développement professionnel continu (DPC), intégrant une formation en présentiel à la pratique du geste technique.

LOCAL ET MATÉRIEL

Pour mettre en œuvre la vaccination, l’officine doit disposer de locaux adaptés, comprenant un espace de confidentialité. Celui-ci doit être clos et accessible depuis la zone de clientèle, sans accès possible aux médicaments.
Les équipements requis sont : une table ou un bureau, une chaise et/ou un fauteuil pour installer la personne, un point d’eau pour le lavage des mains ou une solution hydroalcoolique, une enceinte réfrigérée pour le stockage des vaccins, le matériel nécessaire pour injecter le vaccin, une trousse de première urgence (contenant une seringue d’adrénaline, une solution de Dakin, quelques morceaux de sucre, etc.) et un conteneur d’élimination des seringues1.


L’ACTE DE VACCINATION


INTERROGER LA PERSONNE

Les personnes qui présentent des antécédents de réactions allergiques sévères à l’ovalbumine (protéine de l’œuf) ou à une vaccination antérieure doivent être identifiées et orientées vers leur médecin traitant.
La vaccination doit être différée en cas de fièvre. Une vaccination par voie sous-cutanée (SC) est recommandée pour les patients sous anticoagulants, hémophiles et thrombocytopéniques (la vaccination en intramusculaire, ou IM, est possible pour les patients sous antiagrégants plaquettaires).


SE PRÉPARER À LA VACCINATION

- Sortir le vaccin de l’enceinte réfrigérée 10 minutes environ avant l’injection pour l’amener à température ambiante.
- Contrôler la date de péremption.
- Installer la personne sur une chaise ou un fauteuil.
- Faire signer un consentement2.
- Demander à la personne de rendre accessible une de ses épaules (bras opposé au bras directeur de préférence). Repérer la zone d’injection.


APPLIQUER LES MESURES D’HYGIÈNE

- Se laver les mains à l’eau et au savon.
- Rassembler le matériel nécessaire (solution hydroalcoolique, gants, cotons, pansements, vaccin et collecteur d’aiguilles).
- Se frictionner les mains avec une solution hydroalcoolique.
- Mettre des gants (à usage unique, non stériles).
- Préparer des cotons imbibés d’antiseptique.


PROCÉDER À L’INJECTION

Il existe plusieurs techniques de vaccination. Ce mode opératoire est réalisé d’après le protocole proposé par le service Icap de l’université Claude-Bernard Lyon 1 (Rhône) :
- Sortir le vaccin de l’emballage. Agiter avant emploi. Vérifier la limpidité du vaccin. Il ne doit pas être utilisé si des particules sont présentes dans la suspension.
- Désinfecter la zone à piquer. Prendre un coton et l’imprégner d’un antiseptique non coloré (type Biseptine) ou d’alcool à 70°. Partir du centre de la zone d’injection et s’en éloigner progressivement par un mouvement circulaire. Ne jamais repasser au même endroit. Attendre le séchage.
- Oter l’embout. Pour limiter le risque de piqûre, bien tenir la seringue à l’horizontale.
- Piquer en enfonçant l’aiguille jusqu’à la butée (SC ou IM).
- Retirer et jeter le vaccin dans un collecteur d’aiguilles sans recapuchonner.
- Essuyer avec un coton et placer un pansement sur le point d’injection.
- Garder quelques minutes le patient sous surveillance.
A noter : la seringue contenant le vaccin peut être purgée en partie en faisant attention à ne pas faire sortir de solution à l’extrémité de l’aiguille (source : infovac.fr).


LES SITUATIONS À RISQUE

Il n’est pas recommandé de vacciner dans un membre :
- en présence d’une inflammation, d’une démangeaison ;
- en présence de cicatrice, de nodule, de sensibilité, d’induration, de douleur ;
- s’il est paralysé ou inactif ;
- s’il est affecté par un trouble du système lymphatique, par exemple lymphœdème ou mastectomie avec évidement ganglionnaire.
Il est possible d’injecter un vaccin en IM ou par voie SC sur un tatouage. Mais il est préférable de le faire dans une zone sans pigment.

PHARMACOVIGILANCE

Les éventuels effets indésirables sont notifiés sur un formulaire à compléter et à transmettre en ligne sur le site internet signalement.social-sante.gouv.fr. ●

1 La prise en charge des seringues des vaccins antigrippaux administrés à l’officine par l’organisme collecteur Dastri est en cours de négociation.
2 Un modèle type est téléchargeable sur le site lemoniteurdespharmacies.fr/formations, dans la rubrique Bibliographies des cahiers formation.

CONDUITE À TENIR EN CAS D’ACCIDENT D’EXPOSITION AU SANG (AES)

Conduite à tenir en cas d’accident d’exposition au sang (AES)
✔En cas de piqûre : ne pas faire saigner, nettoyer immédiatement la zone cutanée à l’eau et au savon puis rincer. Procéder à une antisepsie pendant au moins 5 minutes avec un dérivé chloré (Dakin ou eau de Javel à 2,6 % de chlore actif diluée au 1/5e) ou à défaut de la polyvidone iodée en solution dermique ou de l’alcool à 70°.
✔Prendre un avis médical dans l’heureafin d’évaluer le risque infectieux (notamment VIH, VHB et VHC) en fonction du statut sérologique de la personne source (notamment vis-à-vis du VIH par test rapide), du type d’exposition et de l’immunité de la personne exposée (hépatite B). Les pharmaciens habilités à vacciner doivent connaître leur statut vaccinal pour l’hépatite B.
✔Recevoir éventuellement un traitement post-exposition le plus tôt possible et au mieux dans les 4 heures qui suivent l’accident.
Source : Institut national de recherche et de sécurité.

QUE FAIRE EN CAS D’ANAPHYLAXIE ?

Que faire en cas d’anaphylaxie ?

Dans la plupart des cas, la réaction anaphylactique se manifeste dans les 15 minutes qui suivent l’injection par des signes tels qu’une urticaire prurigineuse, un œdème indolore et croissant au niveau du visage et de la bouche, des signes respiratoires (éternuements, toux, respiration sifflante et laborieuse), une hypotension évoluant parfois vers l’état de choc et le collapsus cardiovasculaire. Parfois, des signes digestifs peuvent être associés. Les signes sont d’apparition brutale et rapidement progressifs.
Un choc anaphylactique est une urgence médicale absolue. Il est pris en charge par l’injection d’adrénaline au moyen des présentations d’auto-injection Anapen, Epipen, Jext ou Emerade.
Le pharmacien doit maîtriser la manipulation du dispositif (localisation et technique d’injection). Pour cela, il convient de lire la notice avant la période de vaccination ou de commander un stylo factice auprès du laboratoire. La dose à délivrer est de 300 µg pour l’adulte à renouveler au bout de 10 minutes éventuellement.
L’injection de l’adrénaline se fait sur préconisation du Samu (sauf si impossibilité pour le pharmacien de le joindre).

LA GRIPPE ET LA VACCINATION À L’OFFICINE 

LA GRIPPE ET LA VACCINATION À L’OFFICINE 

Très contagieuse, la grippe est une infection respiratoire aiguë d’origine virale, souvent considérée comme bénigne. Elle peut toutefois être à l’origine de complications sévères chez les nourrissons, les femmes enceintes, les personnes âgées ou celles fragilisées par une pathologie sous-jacente.

1 QUELS SONT LES SIGNES CLINIQUES ?

Les signes cliniques varient selon l’immunité de l’individu, son âge et ses comorbidités et dépendent aussi de caractéristiques propres au virus.


FORME CLASSIQUE CHEZ L’ADULTE SAIN

- Le début est brutal avec frissons, fièvre souvent élevée (≥ 39 °C), myalgies, céphalées, malaise générale. Puis rapidement apparaissent des signes respiratoires avec catarrhe des voies aériennes supérieures, toux sèche notamment et, parfois, d’autres signes ORL (douleurs pharyngées, dysphonie). La fatigue est importante et le syndrome algique marqué.
- L’évolution est le plus souvent favorable en quelques jours. La fièvre décroit classiquement après 3 à 4 jours mais remonte parfois de façon transitoire avant la guérison (« V grippal »). La fatigue et la toux peuvent persister plusieurs semaines.
- Il existe des formes peu ou pas symptomatiques, passant inaperçues.


CHEZ L’ENFANT

Avant 5 ans, la symptomatologie est souvent moins bruyante que chez l’adulte. Des signes digestifs (vomissements, diarrhées) et une somnolence sont fréquents.
Les enfants les plus à risque de complications sont ceux de moins de 2 ans et surtout les nourrissons de moins de 6 mois, avec un risque de déshydratation (lié à la fièvre, aux troubles digestifs) et de convulsions. La fragilité pulmonaire expose à un risque de détresse respiratoire.


CHEZ LE SUJET ÂGÉ

Les signes peuvent être trompeurs, la fièvre et les douleurs n’étant pas au premier plan. A l’inverse, les signes respiratoires peuvent être plus marqués (toux, dyspnée, etc.) et associés à une confusion mentale, des troubles digestifs, une déshydratation. Les défaillances respiratoires, cardiaques, rénales ou métaboliques sont plus fréquentes, notamment du fait de troubles associés.


CHEZ LA FEMME ENCEINTE

De nombreuses études ont montré que la grossesse rend plus à risque de contracter une forme sévère de grippe (diminution des capacités cardiorespiratoires), même en l’absence de troubles associés. Il existe par ailleurs un risque accru de fausse couche et d’accouchement prématuré.


2 COMMENT SE TRANSMET L’INFECTION ?

- Elle est interhumaine, directe, via les sécrétions respiratoires d’un sujet infecté. La contamination indirecte par des objets souillés est possible : le virus persiste entre 5 et 30 minutes sur les mains mais plusieurs heures sur les surfaces inertes.
- Les lieux confinés et très fréquentés (transports en commun, collectivités, etc.) sont propices à la transmission du virus. Les enfants sont particulièrement touchés en raison de l’absence d’immunité « spontanée » (acquise au cours d’une grippe antérieure) et du fait d’une période de contagion plus longue.
- Rarement, un virus grippal animal peut infecter l’homme (ex : grippe aviaire). L’infection est alors généralement plus grave mais le risque de transmission interhumaine très faible.


3 COMMENT SE FAIT LE DIAGNOSTIC ?

- En période d’épidémie de grippe, l’apparition brutale des symptômes suffit à suspecter le diagnostic. De nombreux virus voire bactéries sont cependant susceptibles de provoquer des symptômes très proches de ceux de la grippe (virus respiratoire syncytial, adénovirus, coronavirus, Mycoplasma pneumoniae, Streptococcus pneumoniae, etc.) mais en général, leur apparition est plus progressive.
- Le diagnostic virologique de référence repose sur la détection du génome viral par PCR après écouvillonnage nasal ou aspiration des sécrétions nasopharyngées. Il est surtout réalisé dans un but épidémiologique (réseau Sentinelles) ou chez des patients hospitalisés ou à risque de complication.
- Le test rapide d’orientation diagnostique (TROD) de la grippe donne un résultat en quelques minutes mais sa sensibilité est inférieure au test réalisé en laboratoire. Le TROD peut être proposé aux patients présentant des symptômes grippaux apparus depuis moins de 48 heures (au-delà, la sensibilité du test est nettement diminuée).

4 QUELLES SONT LES COMPLICATIONS ?

Les complications de la grippe sont liées à la fragilité de certains patients (système immunitaire moins performant, fragilité de la fonction respiratoire ou d’autres organes à risque de défaillance) mais aussi aux caractéristiques et à la virulence du virus lui-même.


COMPLICATIONS RESPIRATOIRES

Ce sont les plus fréquentes.
Pneumonie virale aiguë : cette forme maligne de grippe, rare, peut survenir même chez des personnes a priori en bonne santé. Directement liée au virus qui entraîne des lésions pulmonaires, elle est à l’origine d’une insuffisance respiratoire évoluant rapidement vers une détresse respiratoire aiguë potentiellement mortelle.
Surinfections bactériennes : les dommages créés par les virus grippaux au niveau de la muqueuse respiratoire favorisent d’autres infections. Il s’agit notamment de pneumonies bactériennes, surtout chez les personnes âgées. Il peut s’agir aussi de sinusites, de bronchites, d’otites moyennes aigës ou de bronchiolites chez les enfants.


COMPLICATIONS EXTRA-PULMONAIRES

- Rares, elles sont liées au type de virus infectant qui peut gagner d’autres organes : méningites, encéphalites, atteintes cardiaques (péricardite, myocardite), myosite virale aiguë chez l’enfant.
- Le syndrome de Reye est une grave encéphalite aiguë avec atteinte simultanée du foie. Survenant essentiellement chez l’enfant, il est favorisé par la prise d’aspirine au cours d’un épisode viral aigu. ●

CARTE D’IDENTITÉ DE LA GRIPPE

Carte d’identité de la Grippe
Agent : Myxovirus influenzae souvent appelé influenzae
Situation géographique : le monde entier
Période épidémique : entre novembre et mars-avril, dans l’hémisphère nord
Durée de l’épidémie : 9 semaines en moyenne
Victimes : entre 2 et 6 millions de personnes atteintes chaque année en France métropolitaine : 9 500 décès (7 700 pour la saison 2018-2019) dont 90 % chez les plus de 65 ans
Mode de contamination : sécrétion respiratoire
Incubation : 1 à 3 jours
Contagiosité : 1 jour avant et 6 jours après l’apparition des symptômes en moyenne (maximale les 3-4 premiers jours)

ZO OM SUR L’AGENT INFECTIEUX

Zoom sur l’agent infectieux
Les virus de la grippe sont des virus à ARN, enveloppés, se répartissant en trois types : A, B et C. Seuls les types A et B sont responsables d’épidémies chez l’homme, voire de pandémies pour le type A, le plus fréquent. Le type C est peu ou pas pathogène.
Caractéristiques
Les virus de type A comportent à leur surface 2 types de glycoprotéines antigéniques (protéines de surface) : l’hémagglutinine et la neuraminidase, enzymes facilitant la pénétration des particules virales dans la cellule de l’hôte et leur libération. On connaît à ce jour 18 types d’hémagglutinine et 11 types de neuraminidase qui définissent des sous-types de virus (H1N1, H1N2, H2N2, etc.).
Concernant le virus de type B, deux « lignées » circulent chez l’homme : Victoria et Yamagata.
Mutations à l’origine de nouveaux variants
Les virus grippaux mutent spontanément ce qui aboutit à des modifications génotypiques fréquentes. Ces modifications surviennent selon 2 types de mécanisme : les glissements antigéniques (mutations de gènes entraînant des modifications mineures) et les cassures antigéniques (mélange de gènes de virus différents entraînant des modifications majeures).
Glossaire
PCR (Polymerase chain reaction) :technique de détection et de quantification du matériel génétique.
Pandémie :épidémie caractérisée par une diffusion rapide et géographiquement très étendue (plusieurs continents voire le monde entier) de l’agent infectieux. Pour la grippe, elle est liée à un nouveau sous-type de virus pour lequel l’immunité de la population est faible voire nulle.
Myosite virale aiguë :apparition soudaine et le plus souvent spontanément résolutive de symptômes musculaires (fatigue, douleur voire impossibilité de marcher).

LA GRIPPE ET LA VACCINATION À L’OFFICINE 


VACCINATION ANTIGRIPPALE

Elle constitue la première mesure de prévention recommandée pour se protéger de la grippe. Elle vise à protéger les personnes chez qui la grippe peut être grave en limitant le risque d’acquisition du virus et les complications qui en découlent.

STRATÉGIE VACCINALE

La vaccination contre les virus grippaux saisonniers concerne les personnes fragiles et à risque de complications, notamment les personnes âgées, celles atteintes de certaines maladies chroniques, les femmes enceintes et les personnes obèses (voir encadré p. 3). Chez la femme enceinte, la vaccination permet de protéger la mère mais aussi le nouveau-né durant les 6 premiers mois de sa naissance, période durant laquelle la vaccination antigrippale est contre-indiquée.
Chez le voyageur : La grippe est considérée comme la plus fréquente des maladies à prévention vaccinale du voyageur. La vaccination antigrippale n’est pas recommandée chez les voyageurs en dehors de ceux pour lesquels cette mesure est normalement conseillée par le calendrier vaccinal. Les problèmes de délivrance du vaccin hors saison grippale et l’inadéquation potentielle entre les souches vaccinales incluses dans le vaccin disponible et celles circulant dans l’hémisphère opposé peuvent rendre la vaccination compliquée.

EFFICACITÉ

- Les modifications constantes des virus imposent d’ajuster chaque année la composition du vaccin pour y introduire les souches les plus récentes en circulation : l’efficacité du vaccin antigrippal est donc notamment conditionnée par la similitude entre les souches utilisées dans le vaccin et celles circulant. La composition des vaccins est fixée chaque année par l’OMS, sur les bases des informations recueillies par les réseaux de surveillance de la grippe, pour l’hémisphère Nord et l’hémisphère Sud (les souches circulantes n’étant pas forcément les mêmes, la composition des vaccins diffère). Les vaccins tétravalents renfermant 2 souches virales de type A et 2 de type B (une de la lignée Victoria, l’autre Yamagata) remplacent désormais les vaccins trivalents (composées de 3 souches de virus : 2 de type A et 1 de type B). L’introduction d’une deuxième souche virale de type B permet d’élargir la protection.
- L’efficacité du vaccin dépend aussi du patient lui-même : il est moins efficace chez les personnes présentant un affaiblissement de leur système immunitaire, dont les personnes âgées.

VACCINS ANTIGRIPPAUX

Les vaccins injectables antigrippaux sont des vaccins inactivés contenant des antigènes issus des souches retenues en circulation, sans adjuvants et dénués de conservateurs, cultivés sur œufs embryonnés de poule.
Un vaccin vivant atténué (Fluenz Tetra), par voie nasale, a été développé mais n’est actuellement pas disponible en France. Il est indiqué chez l’enfant entre 2 et 18 ans et est recommandé en particulier en primovaccination grippale.
Effets indésirables : fréquemment, réactions locales au point d’injection (rougeur, gonflement) et réactions générales (céphalées, sueurs, myalgies, arthralgies) survenant en général dans les 3 jours suivant la vaccination et spontanément résolutives. Rarement des effets indésirables sévères sont rapportés : hypersensibilité (rash ou érythème généralisé), syndrome de Guillain-Barré (fréquence estimée à 1 cas par million de doses), névralgie, convulsions fébriles notamment. Le risque de convulsions fébriles est accru notamment chez l’enfant en cas de coadministration avec d’autres vaccins et en particulier le vaccin pneumococcique conjugué.
Précautions : la vaccination doit être différée en cas de pathologie fébrile modérée ou sévère ou d’infection aiguë. La principale contre-indication mentionnée dans les RCP est l’hypersensibilité aux composants, dont l’œuf (ovalbumine). En pratique toutefois, les quantités d’ovalbumine présentes dans les vaccins étant très faibles, ces derniers sont tolérés par la quasi-totalité des patients allergiques à l’œuf. Des antécédents d’accidents allergiques graves à l’œuf sont en revanche une contre-indication. Selon le cas, la vaccination des personnes allergiques à l’œuf sera réalisée sous surveillance à l’hôpital.
Protection : Il faut une quinzaine de jours pour que l’immunité conférée par le vaccin s’établisse et que la personne soit protégée. Il est donc recommandé de se faire vacciner dès que le vaccin est disponible. Les anticorps persistent 6 à 8-9 mois selon les patients (plus chez les jeunes).


MESURES BARRIÈRES DE PROTECTION

Les mesures barrières de prévention sont complémentaires à la vaccination. Même si elles ne constituent pas des protections parfaites, elles permettent au cours d’épidémies de grippe de limiter la dissémination du virus et le nombre de personnes touchées.


QUATRE MESURES SONT PARTICULIÈREMENT RECOMMANDÉES.

- Se laver fréquemment les mains à l’eau et au savon, pendant 30 secondes : après s’être mouché, avant la préparation d’un repas, avant de s’occuper d’un nourrisson, en arrivant à son domicile ou lieu de travail, etc. En l’absence de point d’eau, une solution hydroalcoolique peut être utilisée (mains sans plaies et non souillées).
- Se couvrir le nez et la bouche en cas de toux et d’éternuement : en utilisant un mouchoir ou le pli du coude. Les virus présents dans les gouttelettes émises lors de la toux et des éternuements du malade se transmettent de manière directe (inhalation ou par les mains contaminées du patient) ou indirecte (par le biais d’objets contaminés). Eviter dans la mesure du possible de serrer les mains en période d’épidémie. Les objets couramment utilisés par le malade (poignées de porte, tablette, clavier d’ordinateur, etc.) peuvent être nettoyés à l’alcool à 90 °C ou à l’aide de solutions désinfectantes (Baccide, etc.).
- Se servir de mouchoirs jetables, à jeter dans une poubelle fermée.
- Utiliser un masque chirurgical. Son efficacité n’est pas totale et dépend notamment de sa bonne pose (mouler le renfort rigide du haut du masque sur la racine du nez et abaisser le bas sous le menton). Il est néanmoins recommandé au malade pour limiter la diffusion directe des virus, surtout si ce dernier est en contact avec des personnes fragiles. Il peut aussi être porté par une personne non malade rendant visite à un patient grippé par exemple.


AUTRES GESTES COMPLÉMENTAIRES :

- aérer la chambre du patient (au moins 10 minutes par jour) et/ou les pièces où il est passé ;
- se tenir aussi éloigné que possible de lui (au moins 1 mètre) ;
- ne pas partager sa vaisselle (couverts, verres, etc.) ni son linge de toilette.
Il est par ailleurs recommandé d’éviter les lieux à forte concentration de population (transports en commun, centres commerciaux, salles de spectacle, etc.) en période d’épidémie intense de grippe, notamment pour les personnes à risque. Dans tous les cas, il est conseillé aux patients grippés d’éviter tout contact avec des personnes à risque.


SOLUTIONS COMPLÉMENTAIRES NON MÉDICAMENTEUSES


HOMÉOPATHIE

Les médicaments homéopathiques traditionnellement utilisés pour prévenir la grippe ne peuvent en aucun cas constituer une protection suffisante vis-à-vis de la grippe et, surtout, remplacer le vaccin antigrippal chez les personnes à risque. L’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) rappelle régulièrement que si les vaccins ont une efficacité modeste et variable, elle est réelle et mesurée, contrairement aux médicaments homéopathiques. Les autorisations de mise sur le marché des médicaments homéopathiques reposent sur la tradition et ne nécessitent pas l’existence de preuves scientifiques.
Des études cliniques sont toutefois disponibles. Les résultats d’une méta-analyse Cochrane de 2015 recensant les essais randomisés Oscillococcinum (extraits de foie et de cœur de canard de barbarie à la dilution 200K) versus placebo ne permettent pas de conclure à l’efficacité de la spécialité homéopathique en prévention de la grippe ou en traitement.
Il en est de même pour le médicament homéopathique Influenzinum 9 CH (Homéomunyl, dilution du vaccin antigrippal de l’année en cours), appelé à tort « vaccin homéopathique », qui ne permet pas d’acquérir des anticorps, tout comme le médicament Sérum de Yersin (fabriqué à partir de dilutions de sérums d’animaux auxquels a été inoculé le bacille de la peste).


VITAMINES ET MINÉRAUX

Ils contribuent au bon fonctionnement général de l’organisme et certains en particulier au fonctionnement du système immunitaire (allégation reconnue notamment pour les vitamines A, C et D, le cuivre, le fer, le zinc). Si des carences ou même un déficit sont des facteurs de risque d’infections, aucun n’a d’efficacité démontrée en prévention de la grippe.

PLANTES ET HUILES ESSENTIELLES

- De nombreuses plantes à visée immunostimulantes et/ou anti-infectieuses sont traditionnellement utilisées pour stimuler les défenses immunitaires et prévenir les infections hivernales, rhumes, grippe ou autres infections respiratoires : échinacées, éleuthérocoque, ginseng, sureau noir, etc. Certaines ont fait l’objet de nombreuses études cliniques (échinacées notamment, ginseng, éleuthérocoque) dans ces indications mais aucune ne prouve spécifiquement son efficacité en prévention de la grippe. Il en est de même pour les huiles essentielles (ravintsara, niaouli, eucalyptus radié, tea tree, etc.).
- Les plantes sont déconseillées pendant la grossesse. Les échinacées sont en outre déconseillées avant 12 ans, en cas de troubles du système immunitaire (maladies auto-immunes, leucémies, etc.) et s’utilisent avec précaution chez les personnes allergiques ; l’éleuthérocoque et le ginseng sont déconseillés chez les moins de 12 ans ou 18 ans pour le ginseng ainsi qu’en cas d’hypertension artérielle (HTA) sévère ou mal équilibrée.
Les huiles essentielles sont contre-indiquées chez la femme enceinte et s’utilisent avec prudence chez le jeune enfant. Vigilance également en cas d’antécédents de convulsion ou de terrain allergique (asthme en particulier).


PROBIOTIQUES

Le rôle du microbiote intestinal dans le développement et la modulation du système immunitaire est bien établi. Les probiotiques peuvent aider à restaurer et rééquilibrer ce microbiote, renforçant ainsi sa capacité à interagir avec le système immunitaire. Certaines études suggèrent que la prise de probiotiques pourrait limiter l’incidence des infections hivernales, mais aucune ne concerne spécifiquement la grippe. ●

COUVERTURE VACCINALE EN CHIFFRES

Couverture vaccinale en chiffres
✔Depuis 2011-2012, la couverture vaccinale moyenne est de 19 % chez les moins de 65 ans présentant au moins un facteur de risque de complications, 32 % chez les 65-74 ans, 42 % chez les 75 ans et plus.

✔Couverture vaccinale chez les personnes à risque pour la saison 2018-2019 : 46,8 %, dont 51 % chez les plus de 65 ans mais seulement 29,2 % chez les moins de 65 ans.

✔Selon des études de l’Institut de veille sanitaire, une couverture vaccinale moyenne de l’ordre de 50 % permettrait d’éviter 2 000 décès environ chaque hiver chez les patients âgés de 65 ans et plus.

LES CAMPAGNES DE COMMUNICATION

Les campagnes de communication
Chaque année, Santé publique France lance une campagne de promotion des mesures de prévention de la grippe et des infections respiratoires hivernales sous forme d’affiches, de brochures et de spots télévisé et radio.
Les affiches et brochures peuvent être commandées gratuitement sur le site internet inpes.santepubliquefrance.fr

LA GRIPPE ET LA VACCINATION À L’OFFICINE 

LA PRISE EN CHARGE DU PATIENT GRIPPÉ

La prise en charge de la grippe a pour objectif de limiter la dissémination de la maladie, de protéger contre les complications et les formes graves et de réduire l'intensité et la durée des symptômes.

VACCINATION ANTIGRIPPALE À L’OFFICINE, MODE OPÉRATOIRE

La mise à jour Ségur de votre LGO a-t-elle été installée ?


Décryptage

NOS FORMATIONS

1Healthformation propose un catalogue de formations en e-learning sur une quinzaine de thématiques liées à la pratique officinale. Certains modules permettent de valider l'obligation de DPC.

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