Licencier un salarié qui saisit les prud’hommes, c’est nul ! - Le Moniteur des Pharmacies n° 3262 du 02/03/2019 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des pharmacies n° 3262 du 02/03/2019
 
ÇA N’ARRIVE PAS QU’AUX AUTRES

Stratégies

Vos droits

Auteur(s) : Anne-Charlotte Navarro

Par deux décisions en date du 21 novembre et du 5 décembre 2018, la Cour de cassation a rappelé que le licenciement d’un salarié en réaction à son action en justice est nul. Cette rupture du contrat méconnaît la liberté fondamentale d’agir en justice, liberté garantie par la Constitution.

LES FAITS

Dans l’affaire du 21 novembre, le salarié avait signalé par courrier à son employeur un possible recours au juge pour faire valoir ses droits. En réponse, le salarié, M. Y, reçoit une lettre de licenciement. Dans l’affaire du 5 décembre, M. X, salarié de la société C depuis le 21 mars 1995, se plaint d’une différence de traitement dans son évolution professionnelle par rapport à ses collègues. Le 7 février 2013, il saisit le conseil de prud’hommes pour discrimination et différence de traitement. Le 28 mars 2013, la société C lui fait parvenir une lettre de licenciement pour insuffisance professionnelle. Estimant leur licenciement fondé sur un mauvais motif, les deux salariés saisissent le juge.

LE DÉBAT

Le Code du travail impose à l’employeur de justifier le licenciement par un motif réel et sérieux. Ce motif doit être expliqué dans la lettre de licenciement reçue par le salarié après l’entretien préalable. Dans les deux affaires, les cours d’appel considèrent que le licenciement du salarié est nul. En cas de contestation du motif du licenciement, le juge peut déclarer ce dernier injustifié, c’est-à-dire sans cause réelle et sérieuse. Le juge estime que le motif évoqué par l’employeur n’est pas suffisant. Il peut également dire que le licenciement est irrégulier. Dans ce cas, le juge constate que la procédure de licenciement n’a pas été correctement suivie. Enfin, le magistrat peut prononcer la nullité du licenciement, comme en l’espèce quand une liberté fondamentale est violée. Le juge demande alors la réintégration du salarié à son ancien poste et condamne l’employeur au versement des salaires que le collaborateur aurait dû percevoir depuis son départ de l’entreprise. Si cette réintégration n’est pas possible, le salarié a droit à des indemnités calculées sans référence au barème prévu par les ordonnances du 23 septembre 2017, dites Macron. Ces indemnités sont évaluées au cas par cas par le juge. Les employeurs de MM. Y et X contestent la nullité du licenciement. L’employeur de M. Y fait notamment valoir qu’à la date de licenciement, M. Y n’avait pas engagé de procédure.

LA DÉCISION

La Cour de cassation décide de prononcer la nullité de ces deux licenciements. Dans la première affaire, elle retient que la menace d’une action en justice suffit pour déclarer nul le licenciement. Dans la seconde, la cour d’appel note que le motif du licenciement était l’action en justice du salarié, car le licenciement est intervenu deux mois après la saisie du juge, et que l’employeur ne rapportait pas la preuve de l’insuffisance du salarié. Cette interprétation est validée par la Cour de cassation. Ainsi, les juges semblent appliquer un aménagement de la charge de la preuve, en considérant qu’en l’absence de cause réelle et sérieuse du licenciement suivant de peu une action en justice du salarié, ce licenciement serait présumé justifié par l’action en justice et donc nul. Il reviendrait à l’employeur de rapporter la preuve que le licenciement est motivé par une autre cause. Cette méthode de preuve s’applique déjà en matière de discrimination. 

Source : Cour de cassation chambre sociale, 21 novembre 2018, n° 17-11122, et 5 décembre 2018, n° 17-17687.

À RETENIR


•   Le licenciement d’un salarié en raison d’une action en justice (ou d’une menace d’action) à l’encontre de l’employeur est nul.

•   Devant le juge, l’employeur doit prouver que le licenciement est justifié par un autre motif.

•   Le licenciement nul a pour conséquence la possible réintégration du salarié dans l’entreprise, le versement des salaires non perçus et le remboursement auprès de Pôle emploi des indemnités déjà obtenues. Si le salarié n’est pas réintégré, l’employeur devra lui verser des dommages-intérêts évalués au cas par cas par le juge.

Vous sentez-vous régulièrement en insécurité dans vos officines ?


Décryptage

NOS FORMATIONS

1Healthformation propose un catalogue de formations en e-learning sur une quinzaine de thématiques liées à la pratique officinale. Certains modules permettent de valider l'obligation de DPC.

Les médicaments à délivrance particulière

Pour délivrer en toute sécurité

Le Pack

Moniteur Expert

Vous avez des questions ?
Des experts vous répondent !