Derniers déblayages pour que votre rémunération tienne la route en 2019 - Le Moniteur des Pharmacies n° 3249 du 29/11/2018 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des pharmacies n° 3249 du 29/11/2018
 
ÉCONOMIE

Temps Forts

Enjeux

Auteur(s) : PAR FRANÇOIS POUZAUD 

Terrain glissant. Les pharmaciens vont devoir communiquer auprès de leurs patients pour calmer le jeu sur le possible reste à charge lié aux honoraires sur les médicaments à 15   %, largement commenté dans la presse. Ce ne sera pas la seule piste à déblayer pour que la réforme de la rémunération file droit.

Au lendemain d’un nouveau week-end de colère des Gilets jaunes, c’est un article publié dans Le Parisien le 26 novembre qui risque d’accentuer la crise autour de la question récurrente du pouvoir d’achat. Le papier en question, intitulé «   Certains médicaments pourraient vous coûter plus cher en janvier   », reprend les exemples développés par la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) pour alerter sur un possible reste à charge sur les honoraires de dispensation en présence de médicaments pris en charge à 15 %. Inquiétude légitime des patients, notamment de ceux directement concernés, à savoir les porteurs d’une ordonnance ne comprenant que des médicaments à 15 % non remboursés par leur complémentaire santé.

Consterné par cette nouvelle polémique, Gilles Bonnefond, président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO) compte sur ses confrères pour relativiser la probabilité de ce reste à charge… en attendant de trouver une solution avec les complémentaires santé. «   Cette situation ne concerne que 1,55   % des 600   millions d’ordonnances délivrées à l’année. Les assurés ont déjà l’habitude de régler 85   % du prix de ces médicaments, précise-t-il. Lorsque la complémentaire ne rembourse rien sur une ordonnance, elle ne rembourse pas les 30   % revenant aux honoraires (soit, dans le cas de l’honoraire lié à l’acte de délivrance, un reste à charge de 15   centimes). Ils seront néanmoins pris en charge à 70   % par l’Assurance maladie.   »

Les syndicats ont objectivement d’autres problèmes à régler sur décembre, avec l’apparition au 1er janvier 2019 de trois nouveaux honoraires, dont l’un en particulier – l’honoraire de dispensation des médicaments spécifiques - pourrait être à l’origine de nouveaux dysfonctionnements (refus de paiement dus à une base des prix des médicaments non à jour). Comme en début d’année 2018, lors de la mise en place de la première étape de la réforme.

Une liste spécifique et imparfaite

«   Bien passer le cap des premiers jours de janvier est l’enjeu de cette fin d’année   », reconnaît Philippe Gaertner, président de la FSPF. En effet, la capacité à facturer cet honoraire à l’Assurance maladie et aux complémentaires santé nécessite une évolution des logiciels de gestion officinale (LGO) et une stabilisation de la liste de ces produits. Car les médicaments « spécifiques » représentent 36 % des dispensations d’ordonnances.

«   Il reste encore un peu de travail afin que les bases de données du Comité économique des produits de santé (CEPS) du ministère soient prêtes pour être intégrées à temps dans l’informatique de l’Assurance maladie   », indique Philippe Gaertner. C’est, selon lui, le principal point sur lequel il faut être vigilant. Le principal car, compte tenu de la baisse des taux de la marge dégressive lissée (MDL) en 2019, «   il devrait y avoir moins de problèmes liés au changement de prix des boîtes pour l’officine car je ne pense pas que nous soyons confrontés à beaucoup de hausses   », affirme-t-il.

Ayant passé au peigne fin la liste des médicaments spécifiques communiquée par l’Assurance maladie, la FSPF a pointé beaucoup de manquants (plus d’une centaine) et des écarts importants, notamment sur les antibiotiques (les collyres anti-infectieux comme Rifamycine Chibret ou Tobrex sont tout bonnement absents), avec la liste Meddispar des médicaments à dispensation particulière à l’officine de l’Ordre national des pharmaciens.

«   Nous travaillons avec le CEPS pour mettre en place cette liste et pour que cette fonctionnalité soit intégrée dans le LGO de manière totalement invisible, il faut aussi que les procédures de mise à jour de cette liste soient automatiques   », précise Gilles Bonnefond.

Vigilance sur les achats de médicaments chers

Avant de songer à bien commencer l’année 2019, il faut déjà penser à bien finir 2018. Une série de tarifs forfaitaires de responsabilité (TFR) concernant des médicaments chers, à l’instar de Glivec, Vfend ou Rovalcyte, est entrée en application le 1er novembre dernier. Dès la confirmation de l’alignement des prix des princeps sur ceux des TFR, la FSPF a alerté, fin octobre, les pharmaciens contre les risques de revente à perte, les appelant à être extrêmement vigilants dans la gestion de leurs commandes. Et à avoir bien à l’esprit les délais habituels d’écoulement des stocks aux anciens prix, en l’occurrence 20 jours pour les répartiteurs et 50 jours pour les pharmaciens. En pratique si, le 19 novembre, un pharmacien achète au prix fort une boîte de Glivec, soit 1 706,97 €, prix grossiste HT (1 676,91 €, prix fabricant HT, + 30,06 €, marge grossiste), et qu’il délivre cette boîte le 22 décembre à un patient, il la lui vendra 945,77 € TTC, soit 926,32 € HT. Il réalisera donc une marge négative de 780,65 € (926,32 – 1 706,97).

Le risque d’indu lié à des changements de prix, amplifié ici avec les médicaments chers, doit être réglé une bonne fois pour toutes, estime Gilles Bonnefond. «   Les pharmaciens doivent pouvoir disposer, dans leur LGO, d’informations plus visibles sur les changements de prix, la date d’application du nouveau prix et la date limite d’écoulement des stocks à laquelle est tenu le grossiste.   » Il réclame ainsi l’intégration d’un système d’alerte par les éditeurs de logiciels facilitant la gestion des stocks des pharmacies.

25 millions d’euros de ROSP génériques repris en 2019

Sous prédiv d’un « trop » bon rendement de la rémunération sur objectifs de santé publique (ROSP) 2017, lié notamment au travail de substitution sur la rosuvastatine, Nicolas Revel, directeur de l’Assurance maladie, veut récupérer un excédent de 25 millions d’euros, sur la ROSP 2019. «   Dans un condiv de baisse des prix et des volumes, cette intention d’aller rechercher cette somme, fruit du labeur des pharmaciens, est déplacée et injustifiée   », condamne Philippe Gaertner. Dans ce cas, la ROSP 2019 subirait une double peine, puisqu’il est déjà prévu conventionnellement une baisse de 15 millions d’euros, la faisant chuter à 100 millions d’euros en 2019. Ce serait donc sur une base de 75 millions d’euros que s’ouvriraient les négociations.

Pour Gilles Bonnefond, cette « sortie » de Nicolas Revel n’est qu’un prédiv en lien avec une négociation de la rémunération jugée après-coup trop favorable par les pouvoirs publics. Pour autant, le président de l’USPO propose d’abroger l’article 43 du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2019 (PLFSS) sur l’utilisation de la mention « Non substituable », qui a provoqué la fronde des médecins et des pharmaciens, et de laisser ces professionnels de santé se charger de réaliser des économies supplémentaires à partager avec l’Assurance maladie. «   Les 25   millions d’euros, la profession peut les récupérer par ce biais   », assure-t-il. Par ailleurs, il souhaite dresser en fin d’année un bilan sur la baisse du nombre d’ordonnances dispensées, l’Assurance maladie et les syndicats présentant des chiffres discordants. Alors que ceux de Nicolas Revel affichent une stabilité, ceux fournis par Iqvia Pharmastat ressortent à - 3,36 %. Cette tendance n’étant pas près de s’inverser, les ressources liées à l’introduction de l’honoraire généralisé sur l’ordonnance seront forcément plus faibles que prévu. De quoi justifier le maintien du boni de 25 millions d’euros sur la ROSP pour compenser l’impact de la baisse du nombre des ordonnances.§

LAMICTAL POUR COURONNER LE TOUT

Depuis le 1er novembre, la Lamotrigine s’est vu coller un TFR. Sauf que le princeps Lamictal ne s’est pas aligné, d’où un reste à charge pour les patients. L’application d’un TFR sur cette molécule n’exclut cependant pas l’avance pharmaceutique. En effet, l’application du dispositif « tiers payant contre génériques » ne s’applique pas pour les médicaments à marge thérapeutique étroite.

À RETENIR


•      De nouveaux honoraires sont prévus en 2019, dont celui pour médicaments spécifiques qui représentent 36 % des dispensations. Les syndicats alertent sur une liste à ce jour imparfaite.

•      Un conseil de vos syndicats : bien vérifier vos stocks de médicaments chers sous TFR, pour ne pas les revendre à perte.

•      La FSPF alerte sur les différents honoraires qui vont être accolés aux médicaments à 15 %. Sans mutuelle, ils ne seront pas pris en charge. L’USPO précise que cela ne concerne que 1,55 % des ordonnances.

REPÈRES 

LES OBJECTIFS À ATTEINDRE SUR LA SUBSTITUTION D’ICI À LA FIN DE L’ANNÉE 2018

PAR FRANÇOIS POUZAUD – INFOGRAPHIE : laurence krief

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