L’ulcère gastroduodénal - Le Moniteur des Pharmacies n° 3212 du 17/02/2018 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des pharmacies n° 3212 du 17/02/2018
 

Cahiers Formation du Moniteur

Ordonnance

ANALYSE D’ORDONNANCE 

M. L., 58 ANS, A UN ULCÈRE

Le cas : M. L., 58 ans, vient régulièrement à la pharmacie acheter des antiacides. Ces demandes répétées ont mené le pharmacien à lui conseiller de consulter son généraliste. Ce dernier, devant ses symptômes typiques d’ulcère, l’a orienté vers un gastroentérologue qui a réalisé une gastroscopie confirmant l’existence d’un ulcère duodénal et révélant une infection à Helicobacter pylori. M. L. étant allergique à l’amoxicilline, le spécialiste lui prescrit une quadrithérapie avec bismuth.

RÉCEPTION DE L’ORDONNANCE


POUR QUI ?

Robert L., 58 ans.


PAR QUEL MÉDECIN ?

Le gastroentérologue.


L’ORDONNANCE EST-ELLE RECEVABLE ?

Oui.


QUEL EST LE CONdiv DE L’ORDONNANCE ?


QUE SAVEZ-VOUS DU PATIENT ?

M. L., est un patient en relativement bonne santé. Néanmoins, il fume un paquet de cigarettes par jour depuis plus de 30 ans. Commercial, souvent en déplacement, il vit seul.
En ce moment, il traverse une période assez stressante à son travail, qu’il considère comme étant à l’origine de ses douleurs d’estomac.


QUEL ÉTAIT LE MOTIF DE LA CONSULTATION ?

M. L. souffre de douleurs épigastriques à type de crampes qui se manifestent par poussées depuis quelques mois. Manger lui apporte un certain soulagement temporaire, mais les crises reviennent de façon récurrente, par poussées.

QUE LUI A DIT LE MÉDECIN ?

Les résultats de la gastroscopie associée à une biopsie ont permis de confirmer le diagnostic d'ulcère et préciser son emplacement au niveau duodénal. Le gastroentérologue a informé M. L. qu’une infection par une bactérie Helicobacter pylori avait été mise en évidence. Fréquemment associée à cette pathologie, elle justifie l'initiation d'un traitement antibiotique.


VÉRIFICATION DE L’HISTORIQUE PATIENT

Le dossier pharmaceutique de M. L. montre plusieurs dispensations d’antalgiques (paracétamol, ibuprofène). M. L. est allergique aux pénicillines.


LA PRESCRIPTION EST-ELLE COHÉRENTE ?


QUE COMPORTE LA PRESCRIPTION ?

Pyléra est une association de trois molécules : du sous-citrate de bismuth potassique, du métronidazole et du chlorhydrate de tétracycline. Il est indiqué dans l'éradication de Helicobacter pylori en association avec l'oméprazole (quadrithérapie avec bismuth).
L’oméprazole est un inhibiteur de la pompe à protons (IPP) réduisant la sécrétion acide au niveau de l’estomac.
Hélikit est un test respiratoire de diagnostic de l’infection à H. pylori. L’examen est réalisé au laboratoire de biologie médicale. Le patient doit donc se rendre au laboratoire muni d’Hélikit.


EST-ELLE CONFORME À LA STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE DE RÉFÉRENCE ?

Oui, en cas d’ulcère associé à une infection à H. pylori, une antibiothérapie doit être instaurée. L’éradication de H. pylori favorise la cicatrisation et prévient la récidive des ulcères. Le traitement de première intention est une trithérapie à base d’amoxicilline. En cas d’allergie à l’amoxicilline, la quadrithérapie avec bismuth est prescrite.


Y A-T-IL DES MÉDICAMENTS À MARGE THÉRAPEUTIQUE ÉTROITE ?

Non.


Y A-T-IL DES CONTRE-INDICATIONS POUR CE PATIENT ?

Non.


LES POSOLOGIES SONT-ELLES COHÉRENTES ?

Oui. Il manque cependant le délai de réalisation du test respiratoire pour le contrôle de l’éradication de H. pylori (Hélikit).


Y A-T-IL DES INTERACTIONS ?

Non.


LE TRAITEMENT NÉCESSITE-T-IL UNE SURVEILLANCE PARTICULIÈRE ?

Oui, il nécessite la surveillance de l’éradication de la bactérie. Le médecin a prescrit le test Hélikit nécessaire à sa vérification.


QUELS CONSEILS DE PRISE DONNER ?


QUELLES SONT LES MODALITÉS DE PRISE ?

Les gélules de Pyléra sont à prendre après les trois repas et au coucher, de préférence après une collation pour augmenter le temps de contact du bismuth avec la bactérie. Les gélules doivent être avalées avec un grand verre d’eau en particulier au coucher, afin de réduire le risque d’œsophagite et d’ulcération œsophagienne lié à la tétracycline. Il est également recommandé de ne pas s’allonger dans la demi-heure qui suit la prise en raison de la présence de la cycline.
L'absorption de la tétracycline est réduite par les antiacides contenant de l'aluminium, du calcium ou du magnésium, les supplémentations à base de fer, de zinc ou de bicarbonate de sodium et les produits laitiers. Il faudra donc conseiller au patient de prendre les produits laitiers à distance du traitement, voire de les éviter complètement pendant la durée du traitement, étant donné le nombre de prises élevé chaque jour et d’arrêter la prise d’antiacides.
Les gélules d’oméprazole sont à prendre matin et soir, en même temps que Pyléra.
Pour réaliser le test Hélikit, le patient doit être à jeun depuis la veille (minuit environ), et ne pas avoir bu (même de l’eau) car cela pourrait fausser le test. Malgré certaines indications des laboratoires de biologie médicale, le brossage des dents n’interfère pas, puisque l’eau est ensuite recrachée. Dans la notice, il est recommandé de ne pas avoir fumé depuis la veille mais, en pratique, les laboratoires tolèrent en général un intervalle d’au moins 4 heures entre la dernière cigarette et la réalisation du test, ce qui est plus accessible pour les fumeurs très dépendants.


QUAND COMMENCER LE TRAITEMENT ?

Au prochain repas, le plus tôt possible.


QUE FAIRE EN CAS D’OUBLI ?

En cas d’oubli, ne pas doubler les doses de Pyléra. Néanmoins il est possible de prolonger le traitement au-delà des 10 jours recommandés jusqu’à la prise totale de tous les médicaments prévus. Si le patient oublie plus d’un ou deux jours de traitement, le prescripteur devra être contacté pour évaluer la conduite à tenir.


LE PATIENT POURRA-T-IL JUGER DE L’EFFICACITÉ DU TRAITEMENT ?

Le patient ressentira surtout l’effet du traitement antisécrétoire. L’efficacité du traitement antibiotique sera mise en évidence lors du test d’éradication de la bactérie.


QUELS SONT LES PRINCIPAUX EFFETS INDÉSIRABLES ?

Les effets indésirables de Pyléra sont liés à chacune des molécules le composant. On retrouve principalement : des selles noires, une diarrhée, des nausées et une dysgueusie (avec goût métallique). Egalement fréquents, une chromaturie (coloration sombre des urines) probablement liée au métronidazole.
La présence de métronidazole peut être responsable d’un effet antabuse (crampes abdominales, nausées, vomissements, céphalées, rougeurs faciales) en cas de prise d’alcool durant le traitement. La tétracycline peut être responsable de réactions de photosensibilité rares.
Les IPP sont bien tolérés. Les effets indésirables les plus fréquents (entre 1 et 10 %) sont des troubles gastro-intestinaux (nausées, diarrhées ou constipation) des céphalées ou des étourdissements, et des troubles cutanés (urticaire, prurit…). Plus rarement sont signalées des arthralgies et des myalgies.


QUELS SONT CEUX GÉRABLES À L’OFFICINE ?

Les diarrhées bénignes peuvent être prises en charge par des flores de substitution.
En raison des risques de photosensibilisation, il est conseillé d'éviter toute exposition directe au soleil et aux UV pendant le traitement. Celui-ci doit être interrompu en cas d'apparition de manifestations cutanées (érythème).
Le risque d’œsophagite peut être prévenu en prenant le traitement avec un grand verre d’eau et en évitant de s’allonger dans la demi-heure qui suit la prise.
Afin de prévenir la survenue d’un effet antabuse, la prise d’alcool doit être évitée pendant et jusqu’à 24 heures au moins après la fin du traitement.


QUELS SIGNES NÉCESSITERAIENT D’APPELER LE MÉDECIN ?

Des réactions cutanées rares mais graves telles qu’un syndrome de Stevens-Johnson et un syndrome de Lyell ont été rapportées avec le Pyléra. Elles imposent un arrêt immédiat du traitement et une prise en charge médicale.
La survenue de signes neurologiques anormaux (liés au bismuth) nécessiterait un arrêt immédiat du traitement par Pyléra.


CONSEILS COMPLÉMENTAIRES

Le tabac augmente la sécrétion d’acide gastrique, retarde la cicatrisation et diminue par deux l’efficacité du traitement. Proposer au patient de faire un test de motivation et de dépendance au tabac puis de l’accompagner dans un éventuel sevrage.
Concernant le traitement anti-ulcéreux, une observance rigoureuse pendant les 10 jours de traitement est essentielle pour une efficacité optimale.


UN MOIS PLUS TARD

Les anti-inflammatoires ne sont pas contre-indiqués chez les patients ayant un antécédent d’ulcère. En revanche, si leur recours ne peut être évité, il faudra que l’anti-inflammatoire soit à la dose minimale efficace et associé avec un IPP. Les IPP sont alors prescrits à demi dose (une prise par jour), sauf pour l’oméprazole qui est recommandé à pleine dose.
Il est donc préférable de recommander à M. L. la prise de paracétamol et de consulter un médecin pour prendre en charge ses douleurs si elles persistent.
Mettre en garde sur l’automédication et sur la nécessité de limiter au maximum la prise d’anti-inflammatoires non stéroïdiens disponibles sans ordonnance incluant les formes à sucer (flurbiprofène). 
   Par Caroline Bouhala , pharmacienne

qu’en pensez-vous ?

Il faut conseiller au patient de réaliser son test Hélikit :

1) dès la fin du traitement antibiotique 2) 15 jours après la fin de son traitement 3) 1 mois après la fin de l’antibiotique

Réponse :Le contrôle de l’éradication doit être systématique après au moins 4 semaines d’arrêt de l’antibiothérapie et 15 jours d’arrêt des inhibiteurs de la pompe à protons. Cet intervalle est recommandé afin de limiter le risque de faux négatifs, les inhibiteurs de la pompe à protons et les antibiotiques diminuant la densité bactérienne et donc la sensibilité du test. Il fallait choisir la troisième proposition.

qu’en pensez-vous ?

Le patient doit-il suivre un régime particulier désormais ?

1) Oui, les aliments acides ou favorisant la sécrétion acide sont à exclure (ex : café, épices...) 2) Aucune exclusion alimentaire n’est nécessaire

Réponse : L’alimentation n’a pas d’impact sur la pathologie. Avant de découvrir le rôle de la bactérie dans la maladie, l’origine de la maladie ulcéreuse était assez mystérieuse. Face à cette maladie récurrente, il était conseillé, par mesure de précaution, d’éviter les aliments favorisant la production d’acide au niveau de l’estomac. Mais depuis la découverte du rôle de la bactérie H. pylori dans la maladie, aucune restriction alimentaire n’est recommandée. Il fallait choisir la deuxième proposition.

PATHOLOGIE 

L’ULCÈRE GASTRODUODÉNAL EN 6 QUESTIONS

L’ulcère gastroduodénal est défini par une perte de substance plus ou moins profonde de la muqueuse de l’estomac ou de la partie initiale de l’intestin grêle, le duodénum. Il s’agit d’une maladie évolutive et récidivante. En France, on estime que 5 à 10 % de la population en souffre au cours de sa vie.

1 QUELS SONT LES SIGNES CLINIQUES ?

Dans sa forme typique, le syndrome ulcéreux est caractérisé par une douleur dans la région épigastrique sans irradiation, à type de crampe, de brûlure ou de faim douloureuse.
Cette douleur est calmée par la prise d’aliments ou de médicaments antisécrétoires gastriques. Elle est rythmée par les repas, en apparaissant 1 à 4 heures après la prise alimentaire.
Ces signes durent en général quelques jours et reviennent périodiquement.
Souvent, le tableau est atypique et peu évocateur. La douleur peut être différemment localisée (zone sous-costale droite ou gauche) ou absente (20 % des cas). Le rythme prandial peut aussi manquer.
Des nausées, des vomissements, des troubles digestifs peuvent être associés.


2 QUELLES SONT LES CAUSES ?

La maladie ulcéreuse est multifactorielle : terrain génétique, âge, groupe sanguin, environnement (tabac)...
Les deux principaux facteurs responsables des ulcères gastroduodénaux sont :
- Helicobacter pylori, bactérie contractée le plus souvent dans l’enfance par voie buccale. Elle provoque une gastrite chronique le plus souvent sans manifestation particulière. Elle est résistante à l’acidité gastrique et peut donc infecter l’estomac. Elle prolifère tout au long de la vie en l’absence de traitement adapté.
- Les anti-inflammatoires non stéroïdiens. Leur toxicité gastroduodénale est liée à l’inhibition de la synthèse des prostaglandines dans la muqueuse digestive et à une réduction de la production de mucus.
Il existe d’autres causes liées à des pathologies spécifiques : syndrome de Zollinger-Ellison, maladie de Crohn…


3 COMMENT SE FAIT LE DIAGNOSTIC ?

Le diagnostic est confirmé par une endoscopie digestive, réalisée par un gastro-entérologue sous anesthésie locale ou générale. L’endoscopie permet de localiser l’ulcère et de réaliser des biopsies. L’ulcère apparaît comme un cratère à bords réguliers creusé dans la muqueuse. Les biopsies permettent d’identifier des lésions prénéoplasiques et de mettre en évidence une infection à H. pylori par différentes techniques : histologie, mise en culture ou PCR.
La recherche de l’infection par H. pylori est également possible par sérologie. La recherche d’anticorps dans le sang détecte les IgG spécifiques dirigées contre H. pylori. Elle n’est pas influencée par la prise d’antisécrétoires ou d’antibiotiques. Cette méthode est proposée surtout dans certains cas particuliers : ulcère hémorragique, atrophie gastrique ou suite à la prise récente de traitements antibiotiques ou des inhibiteurs de la pompe à protons.


4 QUELLES SONT LES COMPLICATIONS ?

Des complications surviennent dans 3 à 5 % des cas.
L’hémorragie digestive est la complication la plus fréquente des ulcères gastroduodénaux. Le risque est augmenté par la prise d’anti-inflammatoires non stéroïdiens. La gravité du saignement est accentuée par la prise d’anticoagulants ou d’antiagrégants plaquettaires. L’hémorragie peut être minime et se traduire par l’installation progressive d’une anémie. Elle peut être abondante et entraîner un choc hypovolémique. La mortalité des hémorragies ulcéreuses est de 10 %.
La perforation digestive est une complication plus rare mais grave. Elle est favorisée par la prise de médicaments anti-inflammatoires. Elle se caractérise classiquement par un tableau de péritonite associant douleur intense et brutale au niveau épigastrique. La douleur s’étend rapidement à l’ensemble de l’abdomen. Des nausées, des vomissements et de la fièvre peuvent être associés.
La sténose pylorique est une complication très rare des ulcères (2 % des cas). Elle survient en cas d’ulcère situé au niveau du pylore ou du duodénum. Elle se traduit par un rétrécissement du sphincter situé entre l'estomac et le duodénum. Le patient se plaint de douleurs au niveau épigastrique calmées par des vomissements post-prandiaux tardifs. La répétition de ces vomissements peut provoquer une déshydratation et des troubles électrolytiques.
Enfin, pour l’ulcère gastrique, le risque de dégénérescence vers un cancer existe. Il peut apparaître sur les berges d’un ulcère initialement bénin. Même si le risque est faible (inférieur à 1 %), tous les ulcères gastriques doivent être contrôlés par une gastroscopie et des biopsies. Un ulcère duodénal ne se transforme jamais en cancer.


5 QUELS SONT LES DIAGNOSTICS DIFFÉRENTIELS ?

Avant de réaliser une endoscopie, un interrogatoire précis et un examen clinique permettent d’écarter toute autre cause de douleurs épigastriques : cardiaque (par exemple un infarctus du myocarde), œsophagienne (reflux gastro-œsophagien), pancréatique (pancréatite), biliaire (colique hépatique) ou bien aortique (rupture d’anévrisme)....
L’endoscopie doit permettre de distinguer les causes d’ulcère spécifiques :
- le syndrome de Zollinger-Ellison, les ulcères sont récidivants, souvent multiples. Ils sont liés à une hypersécrétion acide induite par une tumeur pancréatique ou duodénale ;
- les localisations hautes de la maladie de Crohn : les ulcères sont généralement associés à des ulcérations multiples gastriques ou duodénales.


6 QUELLE EST L’ÉVOLUTION ?

En l’absence de traitement, la maladie ulcéreuse gastroduodénale a une évolution cyclique. La lésion anatomique qui caractérise la maladie est une perte de substance creusante de la paroi gastrique ou duodénale qui récidive au même site à chaque poussée.
En l’absence de traitement, le risque spontané de rechute après cicatrisation est de l’ordre de 75 % à 1 an pour un ulcère duodénal et de 50 % à 1 an pour l’ulcère gastrique.
Les traitements actuels ont radicalement modifié l’évolution naturelle de la maladie. Ils accélèrent la cicatrisation des ulcères et réduisent, voire suppriment, le risque de récidives (la recontamination étant exceptionnelle) ou de complications.  Région épigastrique
Région supérieure et médiane de l’abdomen déprimée en un creux.
PCR
L’amplification en chaîne (polymerase chain reaction) par une enzyme, la polymérase, est une technique de réplication in vitro de l’ADN. Elle permet d'obtenir, à partir d'un échantillon peu abondant, d'importantes quantités d'un fragment d'ADN spécifique et de longueur définie.
Syndrome de Zollinger-Ellison
Affection rare caractérisée par la présence d’ulcères multiples et récidivants dans l’estomac et surtout dans le duodénum

Par Caroline Thoby , pharmacienne

en chiffres

20 à 50 % des adultes sont inféctés par H. pylori.

H. pylori est impliqué dans 70 % des ulcères gastriques et plus de 90 % des ulcères duodénaux.

6 % à 10 % des malades infectés développent un ulcère et 1 % un adénocarcinome gastrique après plusieurs décennies.

L’ulcère gastrique est 2 à 4 fois moins fréquent que l’ulcère duodénal.

L’ulcère gastrique est peu fréquent avant 40 ans.

Physiopathologie de l’ulcère gastroduodénal


• L’ulcère gastroduodénal résulte d’une inflammation chronique de la paroi interne de l’estomac ou du duodénum.


• A l’état normal il existe un équilibre entre les facteurs d’agression (sécrétion acide de l’estomac) et les facteurs protecteurs (barrière mucus, bicarbonates) de la muqueuse gastroduodénale.


• Lorsque l’équilibre est rompu, l’inflammation de la muqueuse peut conduire à la formation d’un ulcère.


• L’ulcère gastrique est souvent localisé au niveau de la petite courbure ou de l’antre de l’estomac.


• L’ulcère duodénal est généralement de siège bulbaire.

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test respiratoire de contrôle d’Éradication de H. pylori


• Le test respiratoire (Hélikit) à l’urée marquée permet de contrôler l’éradication de l’infection à H. pylori (Hp) après le traitement. Il détecte l’activité de l’uréase de la bactérie.


• Il doit être réalisé dans un laboratoire d’analyses médicales chez un sujet à jeun depuis la veille (sans boire, ni manger, ni fumer).


• Le test consiste à faire ingérer au patient une solution d’urée marquée au carbone 13 puis à analyser dans l’air expiré la proportion de dioxyde de carbone (C02) marqué.

La présence de H. pylori se traduit par une présence de C02 marqué dans l’air expiré.


• En pratique le patient ingère dans un premier temps une solution d’acide citrique, pour ralentir la vidange gastrique, puis une solution d’urée marquée au carbone 13. Le patient doit expirer pendant 15 secondes au travers d’une paille dans des tubes à essai juste avant la prise de l’urée marquée puis 30 minutes après.

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THÉRAPEUTIQUE 

COMMENT TRAITER L’ULCÈRE GASTRODUODÉNAL ?

L’éradication de la bactérie Helicobacter pylori, lorsque la bactérie est présente, modifie l’histoire naturelle de la maladie ulcéreuse et réduit le risque de récidive de l’ulcère. Le traitement repose sur une tri - ou quadrithérapie associant un inhibiteur de la pompe à protons (IPP) et des antibiotiques. Il est suivi du contrôle systématique de l’éradication.

STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE

La prise en charge de l’ulcère gastrique ou duodénal inclut la suppression rapide des symptômes, la cicatrisation des lésions et la prévention des récidives et des complications.
La stratégie thérapeutique dépend des caractéristiques de l’ulcère (gastrique ou duodénal, complications…) et surtout de la présence d’une infection à H. pylori.


EN L’ABSENCE DE H. PYLORI

Un inhibiteur de la pompe à protons (IPP) à pleine dose est indiqué pendant 4 à 8 semaines en cas d’ulcère gastrique, 4 semaines en cas d’ulcère duodénal. En cas d’ulcère gastrique, un contrôle endoscopique est systématique en fin de traitement pour s’assurer de la cicatrisation, le traitement par IPP devant être poursuivi jusqu’à cicatrisation complète. Si besoin, un traitement au long cours réduit la fréquence des récidives et des complications.
Si la prise d’un anti-inflammatoire non stéroïdien est en cause et qu’il doit être poursuivi, l’association à un IPP est de rigueur. La prise en charge repose aussi sur le contrôle de la maladie causale si elle est retrouvée (syndrome de Zollinger-Ellison, maladie de Crohn…).


EN PRÉSENCE DE H. PYLORI

Les dernières recommandations européennes (Maastricht V, 2016), de la Haute Autorité de santé (HAS) et du Groupe d’études français des Helicobacter (GEFH) en 2017 ont apporté des modifications majeures à la prise en charge d’une infection à H. pylori. Le traitement n’est pas urgent et doit être guidé de préférence par la sensibilité de la bactérie aux antibiotiques.

TRAITEMENT GUIDÉ PAR L’ANTIBIOGRAMME

Le traitement recommandé est une trithérapie associant un IPP et deux antibiotiques choisie en fonction de l’antibiogramme. En cas de sensibilité à la clarithromycine, cet antibiotique sera utilisé (500 mg, matin et soir) en association avec de l’amoxicilline (1 g, matin et soir) et de préférence un IPP choisi entre l’ésoméprazole (20 ou 40 mg matin et soir) et le rabéprazole (20 mg, matin et soir), pour une durée de 10 jours (HAS) ou 14 jours (GEFH). On parle de trithérapie optimisée. En cas de résistance à la clarithromycine et de sensibilité à la lévofloxacine, cet antibiotique peut être utilisé en remplacement (500 mg en une prise) pendant 10 jours. Une quadrithérapie associant oméprazole 20 mg matin et soir et sel de bismuth, tétracycline, métronidazole (Pyléra, 3 gélules 4 fois par jour) sur 10 jours est également possible.
En cas d’échec, le recours à un avis spécialisé est recommandé.


TRAITEMENT PROBABILISTE

Si la sensibilité de la bactérie aux antibiotiques ne peut être recherchée, une quadrithérapie probabiliste associant un IPP (même posologie que pour le traitement guidé) et trois antibiotiques est recommandée. Deux options existent :
- soit une quadrithérapie concomitante, de 14 jours : IPP + amoxicilline 1 g + clarithromycine 500 mg + métronidazole 500 mg, matin et soir.
- soit une quadrithérapie avec bismuth, de 10 jours : oméprazole 20 mg matin et soir et une association sel de bismuth 140 mg + tétracycline 125 mg + métronidazole 125 mg (Pyléra), 3 gélules 4 fois par jour (matin, midi, soir, coucher). Cette option est privilégiée en cas de prise antérieure de macrolide ou d’allergie à l’amoxicilline.

EN CAS D’ÉCHEC DU TRAITEMENT PROBABILISTE

La résistance aux antibiotiques prescrits et/ou une mauvaise observance du traitement sont les deux facteurs principaux de risque d’échec du traitement.
Les antibiotiques déjà employés dans les précédentes associations thérapeutiques ne doivent pas être réutilisés (en particulier la clarithromycine). Si le traitement précédent comportait de la clarithromycine, une quadrithérapie à base de bismuth est alors recommandée pendant 10 jours. Cette association se montre le plus souvent efficace, la résistance à la tétracycline étant exceptionnelle. En revanche, elle peut exposer à des problèmes de tolérance et/ou d’observance (elle nécessite la prise de 14 comprimés par jour) qui doivent être prévenus par une bonne information du patient.
Le traitement chirurgical est devenu exceptionnel en l’absence de complications.


CONTRÔLE DE L’ÉRADICATION

Un contrôle de l’éradication doit être réalisé systématiquement après chaque ligne de traitement. Il s’effectue au moins 4 semaines après l’arrêt de l’antibiothérapie et 15 jours après l’arrêt des IPP. Si elle réussit, l’éradication dispense d’un traitement au long cours par IPP.


PRÉVENTION DES LÉSIONS DIGESTIVES INDUITES PAR LES AINS

La prescription d’un IPP en association aux AINS, pour prévenir la survenue de lésions est justifiée chez les sujets de plus de 65 ans, en cas d’antécédent d’ulcère gastroduodénal, en cas d’association d’un AINS à un antiagrégant plaquettaire (aspirine à faible dose chez des patients ayant déjà eu une hémorragie digestive sous aspirine et clopidogrel) et/ou à un traitement anticoagulant ou à un corticoïde. Les IPP sont alors utilisés à demi-dose sauf l’oméprazole à pleine dose durant toute la durée du traitement par AINS.


PROFILS PARTICULIERS


CHEZ LA FEMME ENCEINTE ET ALLAITANTE

Le traitement doit être différé.


CHEZ L’ENFANT*

En cas d’infection par H. pylori, un traitement est envisagé en fonction de l’antibiogramme. Il associe un IPP (l’ésoméprazole de préférence) et deux antibiotiques : amoxicilline + clarithromycine ou amoxicilline + métronidazole matin et soir pendant 14 jours. La posologie dépend du poids de l’enfant. Chez le jeune enfant, la dose par kilo efficace d’IPP est plus importante que chez l’adolescent et l’adulte (40 mg/j entre 15 et 24 kg, 60 mg/j entre 25 et 34 kg et 80 mg/j si > 35 kg). L’IPP en monothérapie peut être poursuivie 2 à 4 semaines supplémentaires. La quadrithérapie avec bismuth de 10 jours associant IPP et sel de bismuth + tétracycline + métronidazole (Pyléra) est utilisable, bien que non conseillée, chez l’adolescent de 15 à 18 ans en traitement probabiliste. Elle est contre-indiquée chez l’enfant de moins de 12 ans. En l'absence d'infection à H. pylori, un IPP est recommandé (hors AMM) pendant 4 à 6 semaines.


TRAITEMENTS


LES ANTIBIOTIQUES


AMOXICILLINE (PÉNICILLINE)

Effets indésirables : troubles digestifs (dyspepsie, nausées, vomissements, diarrhées) et candidoses buccales. Risque de colite pseudomembraneuse très rare. L’amoxicilline peut induire des réactions allergiques (prurit, urticaire, œdème de Quincke, gêne respiratoire, voire syndrome de Lyell ou de Stevens Johnson).
Principales interactions : son association au méthotrexate est déconseillée en raison du risque d’augmentation de la toxicité hématologique du méthotrexate.


CLARITHROMYCINE (MACROLIDE)

Effets indésirables : troubles digestifs et candidoses buccales. Risque de colite pseudomembraneuse très rare. La clarithromycine allonge l’intervalle QT et peut favoriser des troubles du rythme. Des cas d’acouphène et d’hypoacousie, généralement réversibles à l’arrêt du traitement, sont rapportés pour des doses supérieures ou égales à 1 g/jour sur des durées prolongées.
Principales interactions : la clarithromycine est un inhibiteur du CYP450 3A4 et une molécule susceptible d’allonger le QT d’où de nombreuses interactions contre-indiquées (voir tableau ci-dessous). D’autres associations sont déconseillées ou à éviter : alcaloïdes de l’ergot de seigle dopaminergiques (bromocriptine, cabergoline, lisuride, pergolide), atorvastatine, disopyramide, immunosuppresseurs (ciclosporine, tacrolimus…), rivaroxaban, inhibiteurs de tyrosine kinase (imatinib, nilotinib, dasatinib…), vérapamil, digoxine, ébastine...


LÉVOFLOXACINE (FLUOROQUINOLONE)

Effets indésirables : les fluoroquinolones exposent notamment à des tendinopathies et à des photosensibilisations. Elles peuvent abaisser le seuil épileptogène. Des neuropathies périphériques et des troubles neuropsychiques sont décrits.
Principales interactions : les sels de fer, zinc, magnésium, calcium sont à prendre à au moins deux heures de distance des quinolones.


MÉTRONIDAZOLE (NITRO-IMIDAZOLÉ)

Effets indésirables : Il expose à un effet antabuse et une dysgueusie (notamment goût métallique) ainsi qu’une coloration brun-rouge des urines fréquentes. Des réactions d’hypersensibilité sont rapportées ainsi que, rarement, des troubles neurologiques (confusion, convulsions, neuropathies périphériques, encéphalopathie) ou psychiatriques (hallucinations, délires…) imposant l’arrêt du traitement. Des troubles visuels (vision trouble) et, essentiellement lors de traitement prolongés, des troubles hématologiques (neutropénie, agranulocytose) sont possibles.
Principales interactions : la prise de boissons alcoolisées ou de médicaments renfermant de l’alcool est déconseillée, de même que l’association au busulfan et au disulfirame (risque d’épisodes de psychose aiguë). Le métronidazole augmente l’activité des AVK.


ASSOCIATION BISMUTH, MÉTRONIDAZOLE, TÉTRACYCLINE

Le patient doit être averti de la lourdeur du traitement (3 gélules 4 fois par jour pendant 10 jours) .
Effets indésirables
Fréquemment : selles noires (liées au bismuth), diarrhées, douleurs abdominales, goût métallique, effet antabuse. Moins fréquemment : candidoses, céphalées, vertiges, vision trouble, paresthésie, éruptions cutanées, anxiété, dépression. Rarement, réactions cutanées sévères (type syndrome de Stevens Johnson, syndrome de Lyell). Spécifiques à la tétracycline, réactions de photosensibilité possible et risque d’œsophagite et d’ulcérations œsophagiennes imposant une prise avec un grand verre d’eau.
Une surveillance est nécessaire en raison de cas d’encéphalopathies parfois mortelles observées avec le bismuth et qui ont conduit à son retrait du marché dans les années 1970. Elles avaient toutefois été observées avec des dosages plus élevés, des durées de traitement plus longues et des sels différents de celui utilisé dans Pyléra. Les premiers signes d’alerte étaient des troubles de la marche, de l’écriture et de la parole, parfois suivis de troubles de la conscience voire d’un coma. Aucune encéphalopathie n’a été observée jusqu’à présent sous Pyléra.
Principales interactions
Ce sont celles du métronidazole et de la tétracycline. L’absorption de la tétracycline est réduite par les sels de fer, de magnésium, calcium, aluminium et zinc qui sont à prendre à au moins deux heures de distance de la cycline. Eviter la consommation des produits laitiers en même temps que la prise des gélules. La prise de boissons alcoolisées ou de médicaments renfermant de l’alcool est déconseillée, de même que l’association au busulfan et au disulfirame.


ANTISÉCRÉTOIRES GASTRIQUES


INHIBITEURS DE LA POMPE À PROTONS (IPP)

Les IPP sont utilisés pour augmenter l’activité des antibiotiques. Ils ont une action antisécrétoire puissante, dose-dépendante, avec un plateau atteint entre le 3e et le 5e jour de traitement. L'effet se maintient lors des traitements prolongés. Une prise avant le premier repas de la journée permet d’obtenir une action antisécrétoire maximale. En pratique, dans le cadre de l’éradication de H. pylori, une double dose de l’IPP est utilisée (pleine dose matin et soir) car elle est associée à un meilleur taux d’éradication de la bactérie. En effet, la plupart des antibiotiques ont leur maximum d’activité à pH neutre. Les antibiotiques, sauf la tétracycline, agissent moins bien à pH acide.
Effets indésirables : peu fréquents et bénins (céphalées, troubles digestifs, cutanés).
Principales interactions : les IPP diminuent l’absorption digestive de certains médicaments lorsqu’elle dépend du pH (certains inhibiteurs de tyrosine kinase, certains antiviraux ou antifongiques imidazolés…).


ANTIHISTAMINIQUES H 2

En raison d’un effet antisécrétoire plus bref et plus modéré que les IPP, les anti-H2 ne sont plus employés dans le traitement de l’ulcère gastroduodénal sauf exceptionnelle intolérance aux IPP.

PERSPECTIVES

De nombreuses tentatives ont déjà été effectuées pour mettre au point un vaccin contre H. pylori. Un nouveau vaccin oral, testé sur des enfants non infectés par la bactérie (phase III), montre une efficacité vaccinale encourageante après 3 ans de suivi.

Par Nathalie Belin , pharmacienne

CE QUI A CHANGÉ

La thérapie séquentielle sur 10 jours a été abandonnée dans les recommandations européennes de 2016 au profit d’une quadrithérapie concomitante, en raison d’une meilleure efficacité.

Médicaments apparus

Pyléra, en 2012, associant bismuth, métronidazole et tétracycline.

vigilance !

Certaines contre-indications des traitements sont à connaitre.


• Amoxicilline : allergie aux antibiotiques de la famille des bêtalactamines.


• Antibactériens imidazolés : hypersensibilité à une molécule de la famille des imidazolés.


• Association bismuth, métronidazole, tétracycline : enfants de moins de 12 ans (déconseillé entre 12 et 18 ans), grossesse et allaitement, insuffisance rénale, hypersensibilité aux imidazolés.

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ACCOMPAGNER LE PATIENT 

RÉGIS, 60 ANS, MÉDECIN ORTHOPÉDISTE À LA RETRAITE

Je fais pas mal de sport. Il y a 2 ans, pour soulager des fortes courbatures, j’ai pris du naproxène 750 mg. J’avais l’habitude de le prescrire à mes patients. Mon utilisation étant très occasionnelle, peut être deux fois par semaine, je n’ai pas pris d’inhibiteur de la pompe à protons… bêtement ! Je supportais très bien l’AINS. Pourtant, un matin, j’ai eu des vertiges. Le bilan sanguin a montré une chute des globules rouges. J’ai été hospitalisé en urgence et j’ai été transfusé. L’endoscopie a mis en évidence un ulcère antral hémorragique. L’ucère a cicatrisé après traitement. En revanche, je ne prends plus aucun anti-inflammatoire. Si un jour j’en avais vraiment besoin, je pourrais en reprendre avec un protecteur gastrique, mais j’évite pour l’instant.

L’ULCÈRE VU PAR LES PATIENTS


IMPACT PHYSIQUE

L’ulcère est une maladie plus ou moins symptomatique.
Dans la majorité des cas, il est source de douleurs qui peuvent être relativement fortes et évoluant par poussées de durée et de fréquence variables dans l’année, voire dans la même journée. Face à cette périodicité des symptômes, le patient peut avoir tendance à repousser la consultation en pensant que cela va finir par passer.
L’ulcère peut fortement impacter la qualité de vie des patients lorsque les troubles sont très intenses. Des arrêts de travail peuvent parfois être nécessaires.
Les douleurs étant atténuées par l’alimentation, les patients ont souvent tendance à grignoter pour être soulagés.
Inversement, chez 20 à 25 % des patients, l’ulcère est silencieux et est découvert de façon fortuite, à la suite d’un contrôle ou d’une complication.


À DIRE AUX PATIENTS


A PROPOS DE LA PATHOLOGIE

Expliquer au patient que l’ulcère est une maladie qui se soigne généralement bien et pour laquelle le traitement permet d’éviter de nombreuses complications.
Contrairement aux idées reçues, l’alimentation n’est pas un facteur favorisant de l’ulcère. Aucune restriction alimentaire n’est nécessaire. En revanche, il est possible d’avoir un ulcère associé à d’autres maux d’estomac pour lesquels les aliments favorisant la sécrétion acide sont à éviter (ex : reflux gastro-œsophagien).
Un sevrage tabagique est fortement recommandé. Le tabac augmente l’incidence de la maladie ulcéreuse, les complications, les récidives et retarde la cicatrisation de l’ulcère. De plus, le tabac diminue l’efficacité des traitements.


A PROPOS DU TRAITEMENT

Le traitement a pour but la cicatrisation de l’ulcère, ce qui permet de supprimer les symptômes et prévenir le risque de complications. Dans le cas d’un ulcère lié à H.pylori, le traitement a également pour intérêt de limiter très efficacement les récidives, supprimer l’inflammation de l’estomac et rétablir la physiologie gastrique normale.
Une bonne observance est indispensable à l’efficacité du traitement. Or, avec un plan de prise compliqué et de potentiels effets indésirables associés, le protocole de traitement est parfois mal suivi. Pour favoriser l’observance, le patient doit connaître les possibles effets indésirables qu’il peut rencontrer et la manière de les prendre en charge. Les effets indésirables les plus fréquents sont des troubles digestifs, céphalées et vertiges. Ils nécessitent rarement l’arrêt du traitement.
Eviter la prise d’alcool pendant un traitement par métronidazole et jusqu’à 24 heures après l’arrêt en raison d’un effet antabuse. Le traitement peut entrainer une coloration brun-rougeâtre des urines qui ne doit pas inquiéter le patient. Toute exposition aux UV doit être évitée avec la lévofloxacine et la tétracyclique.
Insister sur l’importance de respecter chaque prise et de poursuivre le traitement jusqu’à son terme.


SUIVI DE LA MALADIE

Le contrôle de l’éradication de la bactérie est indispensable, étant donné le niveau de résistance élevé de la bactérie aux antibiotiques. Il s’effectue au moins un mois après la fin du traitement soit par endoscopie dans les cas d’ulcère duodénal compliqué ou d’ulcère gastrique, soit par un test respiratoire (Hélikit) dans les autres cas, à réaliser au laboratoire de biologie médicale. Rappeler les conditions pour effectuer le test : être à jeun depuis la veille (au moins depuis minuit), ne pas avoir fumé depuis la veille (depuis au moins 4 heures pour les gros fumeurs), pas d’antibiotiques depuis un mois, pas d’inhibiteurs de la pompe à protons depuis 2 semaines ni de pansements gastriques depuis 48 heures. Bien expliquer au patient qu’il n’y a aucune urgence pour faire le test d’éradication.
L’endoscopie permet également de s’assurer de la cicatrisation des ulcères gastriques (en raison du risque de confusion avec une lésion cancéreuse). Un contrôle endoscopique est également indiqué dans les cas d’ulcère duodénal compliqué.


PRÉVENTION

La recherche et l’éradication de H. pylori sont recommandées chez les personnes asymptomatiques à risque de cancer gastrique, notamment les sujets ayant des antécédents familiaux au premier degré de cancer gastrique et chez celles nécessitant un traitement par anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) ou aspirine à faible dose en cas d’antécédent d’ulcère gastrique ou duodénal.
Pour prévenir les ulcères dus à la prise d’AINS, vérifier la prescription conjointe d’un inhibiteur de la pompe à protons dans les situations à risque :
- patients de plus de 65 ans ;
- antécédent d’ulcère gastrique ou duodénal, compliqué ou non compliqué ;
- association à un antiagrégant plaquettaire, notamment l’aspirine à faible dose et le clopidogrel et/ou les corticoïdes et/ou un anticoagulant.
Toute délivrance d’anti-inflammatoires à l’officine doit s’accompagner de questions sur l’état de santé du patient et la recherche de facteur de risque.
   Par Caroline Bouhala , pharmacienne

question de patient Je suis porteuse de la bactérie. Est-ce que je risque de contaminer les membres de ma famille ?

«Oui, mais le risque est faible. La transmission se fait via les sécrétions gastriques (vomissements, régurgitations, salive) et éventuellement par voie féco-orale, elle est favorisée par de mauvaises conditions d’hygiène. Le risque concerne surtout les membres de la famille et particulièrement les enfants de moins de 5 ans. »

question de patient J’ai une vie stressante. J’ai peur que mon ulcère revienne…

«Contrairement à une idée reçue, l’anxiété n’est pas un facteur de risque de l’ulcère. Il existe des ulcères dénommés « ulcères de stress » observés chez les patients en réanimation, notamment en cas de polytraumatisme mais qui sont la conséquence d’un mauvais état général et non de l’anxiété.»

DÉLIVRERIEZ-VOUS CES ORDONNANCES   ? 

MÉMO DÉLIVRANCE

La posologie est-elle correcte ?
En l’absence d’éradication deH. pylori :
Inhibiteur de la pompe à protons (IPP) à dose pleine (lansoprazole 30 mg, oméprazole 20 mg, pantoprazole 40 mg, rabéprazole 20 mg, ésoméprazole 20 mg ou 40 mg selon les recommandations), une fois par jour pendant 4 à 8 semaines en cas d’ulcère gastrique, 4 semaines en cas d’ulcère duodénal.
En présence deH. pylori, une trithérapie est recommandée pendant 10 jours (ou 14 jours selon le GEFH) ou une quadrithérapie pendant 14 jours, associant un IPP (une dose pleine matin et soir) et des antibiotiques : amoxicilline (1 g matin et soir), clarithromycine (500 mg matin et soir), lévofloxacine (500 mg en une prise), métronidazole (500 mg matin et soir) ou Pyléra (3 gélules, 4 fois par jour) associé à l’oméprazole 20 mg matin et soir pendant 10 jours.

Le patient connaît-il les principaux effets indésirables ?
Les antibiotiques peuvent induire des troubles digestifs transitoires, éventuellement atténués par la prise de flores de substitution.
La lévofloxacine (fluoroquinolone) expose à un risque de tendinopathie et à des photosensibilisations.
Le métronidazole expose à un effet antabuse en cas de prise d’alcool et une dysgueusie ainsi qu’une coloration brun-rouge des urines.
Pyléra (bismuth, métronidazole, tétracycline) expose aux effets indésirables du métronidazole. Le bismuth peut être à l’origine de selles noires et la tétracycline d’une photosensibilisation et d’ulcérations œsophagiennes imposant une prise avec un grand verre d’eau.

A-t-il bien compris l’intérêt du traitement et de l’observance ?
Le traitement a pour but de supprimer les symptômes, prévenir le risque de récidive et de restaurer les fonctions de l’estomac.
La prise de nombreux comprimés sur une durée relativement longue peut être compliquée. Insister sur l’importance de respecter chaque prise et de poursuivre le traitement jusqu’à son terme. En cas d’oubli de prise plus d’un ou deux jours, le prescripteur doit être contacté pour évaluer la conduite à tenir.

Le patient sait-il quand réaliser le test de contrôle d’éradication de H. pylori ?
Le contrôle de l’éradication est indispensable. Il s’effectue par test respiratoire à l’urée marquée, au moins un mois après tout traitement antibiotique et deux semaines après l’arrêt des médicaments antisécrétoires.

Quels conseils donner aux patients ?
L’arrêt du tabac est fortement recommandé.
Au cours d’un traitement pas AINS, chez les personnes de plus de 65 ans et celles ayant un antécédent d’ulcère, la prescription conjointe d’un IPP permet de prévenir la survenue d’ulcères.

oui, mais il faudra contacter le médecin à propos de la posologie du rabéprazole qui doit être de 20 mg deux fois par jour, matin et soir, et non 20 mg par jour (qui est la posologie de la prévention des ulcères liés aux AINS).

oui, mais il faudra prévenir la patiente de la nécessité de repousser la réalisation du test respiratoire d’éradication de Helicobacter pylori. Un intervalle d’un mois doit être respecté entre la prise d’un antibiotique et le test, quel que soit l’antibiotique.

Source : medicaments.gouv.fr ; S : substituable.

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