Projections sur une rémunération - Le Moniteur des Pharmacies n° 3198 du 11/11/2017 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des pharmacies n° 3198 du 11/11/2017
 
ÉCONOMIE

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Enjeux

Auteur(s) : PAR FRANÇOIS POUZAUD 

La nouvelle rémunération, qui doit se mettre en place à partir de 2018, fait d’ores et déjà l’objet de simulations. Selon une étude sur les officines issues du panel QuintilesIMS-Pharmastat, 95 % d’entre elles seraient gagnantes au terme de la réforme. Il faut toutefois se garder de toute euphorie en raison des limites de la méthode : les taux de marge ne sont pas finalisés, les futures baisses de prix et les éventuels déremboursements ne sont pas pris en compte.

La nouvelle rémunération des officines verra une montée en puissance des honoraires de dispensation à partir de 2019. Mais des changements interviendront dès l’an prochain, avec l’arrivée de nouveaux taux de marge. Ceux-ci ne seront définitivement connus que lorsqu’ils paraîtront au Journal officiel au cours des prochaines semaines, sous forme d’un arrêté ministériel.

En attendant, des simulations sont réalisées, notamment par QuintilesIMS, sur la base de l’accord conclu en juillet entre l’Assurance maladie et le syndicat USPO. A savoir, une réduction de la marge dégressive lissée (MDL) de 1,15 milliard d’euros qui basculeront en trois ans vers davantage d’honoraires de dispensation. Ceci afin de « désensibiliser » encore plus la rémunération du prix des médicaments, avec, pour accompagner ce transfert, un renfort de 215 millions d’euros. « Ces simulations sont réalisées à partir des volumes de ventes et des prix de l’année 2016 », précise Yohan Gornadha, analyste chez QuintilesIMS. Réalisées à périmètre constant, elles n’intègrent donc pas les baisses de prix de 2017, ni celles des trois prochaines années, pas plus que d’éventuels déremboursements. Premier constat : « A l’échéance 2020, les cinq honoraires, c’est-à-dire ceux appliqués à l’ordonnance et celui lié à la boîte, représenteront 77 % de la rémunération officinale », fait-il remarquer. D’après ces calculs, du fait du transfert de marge, ce ne sont pas 215 mais 217 millions d’euros supplémentaires que récolterait le réseau sur trois ans. Pas de surprise, « ces résultats sont conformes à ce que nous attendions, commente Gilles Bonnefond, président de l’USPO, signataire de l’avenant. L’objectif de cette réforme est de sortir de l’accord conventionnel de 2014 qui a fait perdre à la profession près de 300 millions d’euros de marge et de se retrouver en positif dès 2018 ».

Pour sa part, Philippe Gaertner, président de la FSPF et non signataire de l’avenant, persiste à considérer que cette réforme conduira à une évolution négative de la rémunération : « Selon Les Entreprises du médicament (LEEM), les baisses de prix s’élèveront à 1 milliard d’euros en 2018, alors qu’en 2016 et 2017, elles étaient de 840 et 850 millions d’euros. Un sixième de baisses de prix en plus, cela signifie que l’an prochain, leur impact sur le réseau officinal entraînera 120 à 130 millions d’euros de perte de marge. Or, dans les simulations de QuintilesIMS, l’apport en 2018 n’est que de 76 millions d’euros par rapport à 2016. Je ne vois donc pas comment les officines peuvent être gagnantes. »

Du point de vue de la FSPF, 2019 sera la seule année de répit et de stabilisation de l’économie de l’officine. Cette année-là, l’introduction des honoraires de dispensation et la réduction concomitante de la MDL de 49 % à 34 % permettront de dégager 110 millions d’euros supplémentaires par rapport à 2018, et donc de compenser à peu de choses près l’impact négatif des baisses de prix. A l’instar de 2018, l’année 2020 serait déficitaire, l’apport de 31 millions d’euros (soit le différentiel entre 217 millions d’euros cumulés en 2020 et 186 millions d’euros cumulés en 2019) ne couvrant que le quart de la perte de marge dans un condiv de baisses de prix durables.

Face à ce discours alarmiste, Gilles Bonnefond réfute l’idée d’une diminution des ressources de la pharmacie d’officine sur les trois années à venir liée aux baisses de prix. « Cette réforme a un double effet : une réduction de la marge commerciale elle-même – dont la partie correspondante sera transférée vers une zone sécurisée, les honoraires – et une réduction de l’impact des baisses de prix sur la marge. En effet, selon nos calculs, celui-ci sera atténué de 20 % en 2018, de 50 % en 2019 et de 25 % en 2020. »

Alors qui croire ? Sans prendre parti, Yohan Gornadha confirme que « le passage à 2020 sera plus compliqué » que les deux premières étapes de la réforme. Il constate aussi qu’avec la réduction des écarts de taux entre les quatre premières tranches, le taux de marge moyen tend à se rapprocher de 6 % en 2020, soit le taux unique que réclame la FSPF (sauf pour la tranche supérieure à 1 500 euros) dans le cadre de sa proposition d’abandonner définitivement la MDL. De son côté, Gilles Bonnefond affirme toujours que « la structure de la nouvelle marge aboutira quasiment à une relinéarisation de celle-ci ».

5% de perdants

Comme lors des deux précédentes simulations réalisées par Offisanté et QuintilesIMS circonscrites aux seuls impacts sur 2018, une nouvelle analyse intégrant cette fois les honoraires liés à l’acte de dispensation fait ressortir aussi des résultats prometteurs : une augmentation de la marge pour 95 % des officines, de 9 800 € en moyenne, entre 2016 et 2020, à périmètre constant. Autre point commun : le gain augmente mécaniquement avec la taille de l’officine. « La nouvelle rémunération permettra même de rattraper une partie des pertes de l’année 2017 qui sont du ressort de la précédente convention », affirme Gilles Bonnefond. Quant aux 5 % d’officines perdantes, dont la rémunération baisserait en moyenne de 3 800 € à périmètre constant, « elles bénéficieront de la clause de sauvegarde et obtiendront une compensation de sorte qu’elles ne subiront aucun impact négatif de la réforme », rappelle-t-il, et les dernières modifications de marge envisagées se traduiraient par une légère amélioration de la rémunération.

Des honoraires à ajuster

La négociation conventionnelle n’étant pas figée, les deux syndicats souhaitent repartir rapidement au front pour faire valoir d’autres propositions sur les honoraires. « Il faudra revenir sur l’honoraire à la boîte, grignoter une partie du 1 € pour la redistribuer ailleurs, ainsi que sur l’honoraire pour ordonnance complexe dont j’ai accepté à contrecœur la revalorisation en fin de négociation », confesse Gilles Bonnefond. En effet, avec l’encadrement des prescriptions, les ventes de médicaments remboursables ont baissé en unités de 1,31 % et le nombre d’ordonnances complexes de 2,40 % entre janvier 2015 et septembre 2017. « Il est contradictoire de doubler en 2020 l’honoraire lié aux ordonnances de cinq lignes et plus et en même temps de rémunérer des bilans de médication destinés à lutter contre le risque iatrogène », explique-t-il.

Même si ce dernier honoraire est en perte de vitesse, « il est vital de le valoriser pour éviter le déséquilibre entre les officines et de pénaliser celles ayant une activité importante dans la prise en charge des patients chroniques », maintient Philippe Gaertner. Par ailleurs, la FSPF propose le rehaussement de l’honoraire à l’ordonnance de 0,50 à 1 € au minimum pour deux bonnes raisons : le volume stable des ordonnances (- 0,13 % selon le bilan de la convention entre 2015 et 2017) et la quasi disparition de l’effet de structure (transfert des prescriptions de médicaments peu onéreux vers des références plus chères) qui ne compense plus l’impact des baisses de prix sur l’activité. 

À RETENIR


•   Selon les projections de QuintilesIMS, sur les bases de l’accord signé en juillet, 95 % des officines verraient leur marge progresser du fait de la nouvelle rémunération.

•   Le report de la marge vers des honoraires s’accompagnerait d’un supplément de 217 millions d’euros sur les trois prochaines années, mais de manière non équilibrée. L’année 2019 verrait un afflux de 110 millions d’euros et 2020 de seulement 31 millions d’euros.

REPÈRES 

LE BASCULEMENT VERS DE NOUVEAUX HONORAIRES

Par Matthieu Vandendriessche - Infographie : Franck L'Hermitte

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