Cahiers Formation du Moniteur
Ordonnance
Auteur(s) : CAHIER COORDONNÉ PAR NATHALIE BELIN ET ALEXANDRA BLANC , PHARMACIENNES, SOUS LA RESPONSABILITÉ DE FLORENCE BONTEMPS , DIRECTRICE SCIENTIFIQUE.
PAUL, 20 ANS, DÉBUTE UN TRAITEMENT PAR SIMPONI
RÉCEPTION DE L’ORDONNANCE
POUR QUI ?
Paul V., 20 ans.PAR QUEL MÉDECIN ?
Le gastro-entérologue de l’hôpital.LES ORDONNANCES SONT-ELLES CONFORMES À LA LÉGISLATION ?
Oui. Le golimumab est un médicament d’exception soumis à prescription initiale hospitalière annuelle. La prescription et le renouvellement sont réservés aux spécialistes, notamment en gastro-entérologie.QUEL EST LE CONdiv ?
QUE SAVEZ-VOUS DU PATIENT ?
Paul est étudiant en droit. Sa maladie a été diagnostiquée il y a un an à la suite de douleurs abdominales et de diarrhées sanglantes. Malgré le traitement initial par mésalazine, de nouvelles poussées sont survenues conduisant à la prescription de plusieurs cures de corticothérapie puis, il y a 4 mois, d’azathioprine.QUEL ÉTAIT LE MOTIF DE LA CONSULTATION ?
Paul a consulté le médecin il y a 15 jours car il présente encore des épisodes de diarrhée qui l’angoissent et perturbent son quotidien. Le gastro-entérologue a alors décidé d’un traitement par anti-TNF-alpha. En attendant les résultats de recherche d’une tuberculose latente (test de détection de l’interféron gamma, préféré à l’intradermoréaction à la tuberculine pour sa fiabilité, et radiographie des poumons), le spécialiste a à nouveau instauré une corticothérapie pour soulager le patient.QUE LUI A DIT LE MÉDECIN ?
L’anti-TNF-alpha, Simponi, associé à l’azathioprine, doit permettre de diminuer l’inflammation, d'arrêter la corticothérapie tout en permettant une rémission prolongée. Paul pourra réaliser lui-même les injections après apprentissage par l’infirmière, mais il devra être bien observant pour garantir l’efficacité du traitement. Le médecin a incité le patient à être très vigilant face à tout signe infectieux.VÉRIFICATION DE L’HISTORIQUE DU PATIENT
Le DP indique des délivrances de prednisolone et d’azathioprine.LA PRESCRIPTION EST-ELLE COHÉRENTE ?
QUE COMPORTE LA PRESCRIPTION ?
Golimumab : anticorps monoclonal neutralisant le TNF alpha et l’empêchant d’exercer son action inflammatoire. Présenté en seringue et stylo préremplis à 50 ou 100 mg, il est notamment indiqué dans la rectocolite hémorragique de l’adulte lorsque les patients ne répondent pas aux traitements conventionnels (corticoïdes, azathioprine).EST-ELLE CONFORME AUX RÉFÉRENTIELS ?
Oui, en cas d’inefficacité des dérivés salicylés puis des corticoïdes (corticodépendance), un traitement par azathioprine est généralement proposé. En cas d’échec, un anti-TNF-alpha est indiqué seul ou le plus souvent en association à l’azathioprine (on parle de « combothérapie »), ce qui permet une meilleure action anti-inflammatoire et diminue le risque d’immunisation contre l’anticorps monoclonal (effet immuno-suppresseur de l’azathioprine).Y A-T-IL DES MÉDICAMENTS À MARGE THÉRAPEUTIQUE ÉTROITE ?
Non.Y A-T-IL DES CONTRE-INDICATIONS POUR LE PATIENT ?
Non. Paul ne présente pas d’infection ni d’insuffisance cardiaque qui contre-indiqueraient la prescription de l’anti-TNF-alpha. Ses vaccinations sont à jour, et les sérologies VIH, VHB et VHC, vérifiées dès le début de la maladie se sont révélées négatives (ces maladies pouvant se réactiver sous immunosuppresseurs). A cette occasion, il a été vacciné contre l’hépatite B et le pneumocoque et récemment contre la grippe saisonnière. Paul a eu la varicelle petit (sinon la vaccination contre la varicelle aurait aussi été indiquée).LES POSOLOGIES SONT-ELLES COHÉRENTES ?
Concernant l’anti-TNF-alpha. Chez les patients de moins de 80 kg, cas de Paul, le golimumab est instauré à la dose de 200 mg suivi de 100 mg 2 semaines plus tard. Il est ensuite poursuivi à raison de 50 mg toutes les 4 semaines. La 1re délivrance comportera 3 stylos à 100 mg puis les suivantes 1 stylo à 50 mg.Y A-T-IL DES INTERACTIONS ?
Non, en dehors du risque infectieux particulièrement augmenté lors de l’association de plusieurs immunosuppresseurs.LA PRESCRIPTION POSE-T-ELLE UN PROBLÈME ?
Non.LE TRAITEMENT NÉCESSITE-T-IL UNE SURVEILLANCE PARTICULIÈRE ?
Sous azathioprine, une surveillance hématologique et hépatique régulière est nécessaire.QUELS CONSEILS DE PRISE DONNER ?
CONCERNANT L’ANTI-TNF ALPHA
Il convient d’en préciser les modalités d’administration, même si celles-ci seront expliquées par l’infirmière.UTILISATION
La dose initiale nécessite 2 administrations de 100 mg en 2 points d’injection différents (cuisses, abdomen ou extérieur des bras). En entretien, les administrations sont réalisées toutes les 4 semaines. Proposer de créer un agenda électronique rappelant le jour de l’administration. En pratique : le stylo doit être stocké au réfrigérateur. Fournir l’alcool modifié et les compresses pour désinfecter le site d’injection (peau saine sans cicatrices). Placer le stylo à 90 degrés contre la peau, presser le bouton déclencheur (1er clic), puis maintenir le stylo contre la peau jusqu’au 2e clic. Un indicateur jaune signale que l’injection s’est correctement déroulée.QUE FAIRE EN CAS D’OUBLI ?
Il faut réaliser l’injection au plus vite. Si le retard est inférieur à 2 semaines par rapport au jour habituel, le patient peut poursuivre le calendrier initial. Sinon, il faut établir un nouveau calendrier en prévoyant la prochaine injection 4 semaines plus tard.LE PATIENT POURRA-T-IL JUGER DE L’EFFICACITÉ DU TRAITEMENT ?
Une amélioration des symptômes peut être constatée après 4 à 6 semaines de traitement. Un examen endoscopique réalisé généralement après 3 mois de traitement confirme son efficacité.QUELS SONT LES PRINCIPAUX EFFETS INDÉSIRABLES ?
Outre un risque accru d’infections, il s’agit de réactions locales transitoires (douleur, rougeur, gonflement) après l’injection. Parfois des céphalées, des réactions cutanées (urticaire…), des douleurs musculo-articulaires surviennent quelques jours après l’injection. Des cas d’aggravation d’insuffisance cardiaque sont signalés.QUELS SONT CEUX GÉRABLES À L’OFFICINE ?
Appliquer une poche de froid avant l'injection et sortir le stylo du réfrigérateur au moins 30 minutes avant l’injection permettent de limiter les douleurs liées à l’injection.QUELS SIGNES NÉCESSITERAIENT D’APPELER LE MÉDECIN?
Tout signe d’infection, des éruptions cutanées ou de douleurs musculaires ou articulaires importantes.CONCERNANT LES AUTRES MÉDICAMENTS
Azathioprine : vérifier la tolérance digestive (nausées, douleurs abdominales surtout en début de traitement), améliorée par une prise au cours du repas. Demander à quand remonte la dernière NFS (tous les 3 mois en entretien du fait du risque hématotoxique).CONSEILS COMPLÉMENTAIRES
Le surrisque potentiel de cancer cutané sous golimumab et azathioprine implique de se protéger du soleil (vêtements protecteurs, protection solaire d’indice élevé). Un suivi dermatologique annuel est d’ailleurs recommandé.
qu’en pensez-vous ?
Paul est sous azathioprine et anti-TNF alpha depuis 2 mois. Il se présente à la pharmacie car il a mal à la gorge et souhaite des pastilles « efficaces ». Il n’a pas de fièvre. Il en profite pour renouveler Simponi dont la prochaine injection est prévue pour demain. Quelle est votre réaction ?
1) Comme Paul n’a pas de fièvre, il peut réaliser son injection demain
2) Vous délivrez l’ordonnance mais indiquez à Paul de réaliser l’injection quand il ira mieux
3) Vous recommandez à Paul de consulter son médecin
Réponse : sous anti-TNF-alpha, et d’autant plus en cas d’association à l’azathioprine, tout signe infectieux même en l’absence de fièvre impose la plus grande prudence. Paul doit voir un médecin qui jugera de la nécessité de prescrire une antibiothérapie. En attendant, il ne doit pas réaliser l’injection de Simponi. La bonne réponse est donc la troisième proposition.
qu’en pensez-vous ?
Paul projette un voyage au Pérou avec un ami. Il se demande si, compte tenu de son traitement, il pourra bien effectuer la vaccination contre la fièvre jaune, obligatoire pour cette destination.
1) Oui, sans problème
2) Non
Réponse : les vaccins vivants atténués dont la fièvre jaune sont contre-indiqués avec la prise d’immunosuppresseurs. Ils doivent être effectués 3 semaines au moins avant le début du traitement ou ne peuvent être administrés que 3 mois après leur arrêt. La réponse 2 est donc la bonne. Paul doit choisir une autre destination de vacances. Il est par ailleurs préférable d’attendre que la maladie soit en rémission complète pour voyager.
LES MICI EN 5 QUESTIONS
1 QU’EST-CE QUE LES MICI ?
Les MICI (prononcer « miki ») sont essentiellement représentées par la maladie de Crohn et la rectocolite hémorragique (RCH). Il existe aussi des formes de MICI indéterminées.2 QUELS SONT LES SIGNES CLINIQUES ?
Ils varient selon la localisation et l’étendue de l’inflammation.SYMPTÔMES DIGESTIFS
Les douleurs abdominales et la diarrhée sont les symptômes les plus fréquents au cours des poussées. Les diarrhées se caractérisent par des selles plus ou moins fréquentes, plus ou moins liquides, parfois glairo-sanglantes (surtout dans la RCH) avec difficulté à se retenir, voire une incontinence fécale.MANIFESTATIONS NON DIGESTIVES
De type général : asthénie quasi-systématique, amaigrissement dans les formes sévères (lié à une réduction des apports pour éviter les douleurs, à un manque d’appétit et à un hypermétabolisme), fièvre fréquente au cours des poussées.CHEZ L’ENFANT
Le début de la maladie de Crohn est le plus souvent insidieux d’où un retard fréquent de diagnostic. Une stagnation ou une perte de poids, puis un ralentissement de la croissance staturale, sont fréquents. La RCH survient le plus souvent de façon aiguë, avec une diarrhée souvent sanglante accompagnée d’un syndrome rectal.3 QUELS SONT LES FACTEURS DE RISQUE ?
Des gènes de susceptibilité sont identifiés (essentiellement NOD2 sur le chromosome 16).4 COMMENT SE FAIT LE DIAGNOSTIC ?
Le diagnostic est évoqué devant les symptômes digestifs ou parfois une complication.5 QUELLES SONT LES COMPLICATIONS ?
Pour la RCH, la complication la plus redoutée (15 % des patients) est la colite aiguë grave (au moins six évacuations glairo-sanglantes par jour, fièvre, tachycardie) avec risque d’hémorragie et de colectasie.
en chiffres
Sur les 200 000 à 250 000 personnes atteintes d’une MICI en France, 110 000 à 130 000 présentent une maladie de Crohn (MC), environ 100 000 une rectocolite hémorragique (RCH), et les autres une MICI inclassée. 2 000 à 3 000 enfants sont concernés.
Age moyen de survenue : 17-35 ans. 25 ans pour la MC et 35 ans pour la RCH.
MC : plus fréquente chez la femme (sex-ratio F/H de 1,3) ; RCH : légèrement plus fréquente chez l’homme (sex-ratio F/H de 0,9).
PHYSIOPATHOLOGIE DES MICI
Dans la maladie de Crohn, l’inflammation peut toucher toutes les zones du système digestif, de la bouche à l’anus mais avec une localisation préférentielle au niveau de l’intestin : forme iléale ou colique. Dans la rectocolite hémorragique, l’inflammation touche le rectum et une partie plus ou moins étendue du côlon.
Des anomalies qualitatives et quantitatives du microbiote (on parle de dysbiose) sont observées chez les patients atteints de MICI. Cette dysbiose pourrait participer à une activation excessive du système immunitaire local avec augmentation de cytokines pro-inflammatoires et stimulation des cellules de l’inflammation : lymphocytes T, macrophages...
COMMENT TRAITER LES MICI ?
STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE
L’objectif est d’obtenir une rémission clinique et une cicatrisation muqueuse endoscopique afin de maintenir la qualité de vie et de prévenir les rechutes et les complications.TRAITEMENT DES POUSSÉES
RECTOCOLITE HÉMORRAGIQUE
Dans les formes légères à modérées, les aminosalicylés sont le traitement de référence par voie orale ou, dans les formes distales, par voie locale. En cas d’échec, une corticothérapie est préconisée par voie orale (3 à 4 mois maximum), ou éventuellement locale selon la localisation des lésions.MALADIE DE CROHN
La corticothérapie est le traitement de référence après une première poussée. Dans les formes légères à modérées iléales ou du colon ascendant, le budésonide, corticoïde per os d’action locale, peut être utilisé en première intention.TRAITEMENT D’ENTRETIEN
RECTOCOLITE HÉMORRAGIQUE
En traitement de fond (dose réduite), les aminosalicylés peuvent suffire à espacer les poussées et éviter le recours à un traitement plus agressif. En cas d’échec, c'est-à-dire récidives fréquentes ou évolution vers une corticodépendance, on a recours à l’azathioprine (ou à la 6-mercaptopurine hors AMM) puis aux anti-TNF alpha.MALADIE DE CROHN
L’instauration d’un traitement de fond est souvent nécessaire pour prévenir les rechutes : l’azathioprine (ou le méthotrexate hors AMM) est généralement proposée en première intention. En cas de corticorésistance, un anti-TNF alpha est prescrit.FORMES RÉFRACTAIRES
En cas d’échec de l’azathioprine ou des anti-TNF-alpha, d’autres immunosuppresseurs sont utilisés : le védolizumab (à l’hôpital) dans la rectocolite hémorragique, et l’ustékinumab dans la maladie de Crohn.AUTRES TRAITEMENTS
Les complications, telles que les abcès et les fistules, font appel à un drainage et une antibiothérapie (quinolone, métronidazole), parfois avant une intervention chirurgicale.PROFILS PARTICULIERS
FEMMES ENCEINTES. LA CORTICOTHÉRAPIE SYSTÉMIQUE EST POSSIBLE MAIS DOIT ÊTRE LIMITÉE POUR ÉVITER LE RISQUE DE RETARD STATURO-PONDÉRAL FŒTAL. SELON LES EXPERTS ET LE CRAT , L’AZATHIOPRINE PEUT ÊTRE POURSUIVIE SI BESOIN (BIEN QUE L’AMM RECOMMANDE UNE SUSPENSION DU TRAITEMENT). CONCERNANT LES ANTI-TNF-ALPHA, LES ÉTUDES MONTRENT QU’IL N’Y A PAS DE SUR-RISQUE PARTICULIER EN TERME DE PRÉMATURITÉ, DE MALFORMATIONS ET D’INFECTIONS NÉONATALES. EN PRATIQUE, ILS SONT MAINTENUS SI LA MICI EST ACTIVE ET ARRÊTÉS EN CAS DE MICI QUIESCENTE. CHEZ LES ENFANTS EXPOSÉS AUX ANTI-TNF-ALPHA DURANT LA GROSSESSE, L’ADMINISTRATION DE VACCINS VIVANTS ATTÉNUÉS SERA RETARDÉE (PAS AVANT UN AN). EN L’ABSENCE DE DONNÉES, L’USTÉKINUMAB ET LE VÉDOLIZUMAB DOIVENT ÊTRE STOPPÉS (AU MOINS 3 MOIS AVANT LA GROSSESSE). LE MÉTHOTREXATE (HORS AMM) EST FORMELLEMENT CONTRE-INDIQUÉ.
ENFANTS. MÉSALAZINE, CORTICOTHÉRAPIE (SUR LA DURÉE LA PLUS COURTE POSSIBLE), AZATHIOPRINE, INFLIXIMAB ET ADALIMUMAB SONT UTILISÉS.
TRAITEMENTS
AMINOSALICYLÉS
Ils constituent le traitement de 1re intention de la rectocolite hémorragique, mais sont peu efficaces dans la maladie de Crohn. Dérivant en majorité de l’acide 5-amino-salicylique (ou 5-ASA ou mésalazine), ils s’utilisent par voie orale (comprimés, granulés) ou rectale (lavements, suppositoires) dans les formes distales.CORTICOÏDES
D’ACTION SYSTÉMIQUE
En raison de leurs effets indésirables et du risque de corticodépendance et/ou corticorésistance, ils sont utilisés en cures courtes lors des poussées, avec arrêt progressif du traitement pour éviter un effet rebond et le risque d’insuffisance surrénalienne. La posologie habituelle est de 1 mg/kg/jour d’équivalent prednisone (Cortancyl) ou prednisolone (Solupred).D’ACTION LOCALE
Le budésonide est une alternative à la corticothérapie classique. L’enrobage gastrorésistant permettant une libération du corticoïde au niveau de l’iléon et du début du côlon.IMMUNOSUPPRESSEURS
AZATHIOPRINE
Traitement d’entretien de la maladie de Crohn et de la rectocolite hémorragique, son efficacité n’apparaît qu’après quelques semaines. voire quelques mois. La 6-mercaptopurine (Purinethol), métabolite actif de l’azathioprine, est parfois utilisée hors AMM.AUTRES
Le méthotrexate est parfois utilisé hors AMM par voie injectable en cas d’échec des thiopurines, avec une réponse souvent assez lente. Une surveillance hépatique, hématologique et rénale est nécessaire ainsi qu’une contraception efficace, y compris pour la partenaire d’un homme traité jusqu’à 3 mois après l’arrêt du traitement (d’après le CRAT).ANTICORPS MONOCLONAUX
ANTI-TNF-ALPHA
Ils permettent l’arrêt de la corticothérapie et la cicatrisation des lésions endoscopiques. Leur efficacité est d’autant plus importante que les lésions ne sont pas encore compliquées et qu’ils sont associés à l’azathioprine. De fait, ils sont utilisés de plus en plus précocement dans l’évolution des MICI. L’infliximab (à l’hôpital, Remicade et biosimilaires : Remsima, Inflectra, Flixabi) et l’adalimumab (Humira) ont une AMM dans la maladie de Crohn et la rectocolite hémorragique. Le golimumab (Simponi)n’est indiqué que dans la rectocolite hémorragique.AUTRES
L’ustékinumab (Stelara, inhibiteur d’interleukines) est indiqué dans la maladie de Crohn après échec des traitements conventionnels et d’au moins un anti-TNF-alpha.EFFETS INDÉSIRABLES COMMUNS
Le principal risque est infectieux avec une plus grande fréquence d’infections virales ou bactériennes, incluant des infections opportunistes, notamment une pneumocystose justifiant une antibiothérapie préventive par cotrimoxazole en cas d’association d’au moins trois immunosuppresseurs. Le dépistage d’une tuberculose latente et la recherche d’une infection virale susceptible de se réactiver (VHB, VIH, herpès...) sont réalisés avant la mise en route du traitement.PERSPECTIVES
Des études de phase III sont en cours pour l’ozanimod (modulant la réponse des lymphocytes) dans la rectocolite hémorragique. Ce traitement s’utilise par voie orale.
CE QUI A CHANGÉ
Juin 2014 : remboursement de Simponi (golimumab, anti-TNF-alpha) dans la rectocolite hémorragique (RCH).
Septembre 2014 : Entyvio (védolizumab, à l’hôpital), inhibiteur d’intégrine (protéine présente sur certains lymphocytes T et impliquée dans leur activation au site digestif de l’inflammation) indiqué dans la RCH et la maladie de Crohn. Non remboursé dans la maladie de Crohn.
Novembre 2016 : Stelara (ustékinumab), inhibiteur d’interleukine, indiqué dans la maladie de Crohn.
Remboursé depuis fin septembre 2017.
Juillet 2017 : Cortiment (budésonide), corticoïde per os d’action locale indiqué dans la RCH.
vigilance !
Les principales contre-indications sont les suivantes :
Aminosalicylés : allergie à l’aspirine (par prudence, réactions croisées), insuffisance rénale et/ou hépatique sévères. Et pour la sulfasalazine : allergie aux sulfamides.
Corticoïdes : état infectieux en évolution, états psychotiques non contrôlés. Et par voie rectale : ulcère gastroduodénal évolutif, obstruction, abcès, perforation, péritonite, fistule.
Adalimumab, golimumab : tuberculose ou autres infections sévères, insuffisance cardiaque modérée à sévère.
Ustékinumab : infection active cliniquement importante.
Pointdevue
Pr Laurent Beaugerie, gastro-entérologue, Hôpital Saint-Antoine, à Paris
« La transplantation fécale pourrait être un traitement suspensif de la maladie »
Où en est la transplantation fécale dans le cadre des MICI ?
Pour l’instant, au stade d’études. Les résultats des premiers essais cliniques commencent à être communiqués. En modulant la flore intestinale, la transplantation fécale pourrait être un traitement suspensif de la maladie. Elle est à ce jour indiquée en cas d’infections récidivantes à Clostridiumdifficile, y compris chez des patients atteints de MICI, et donne de bons résultats dans ce condiv.
Avec 15 ans de recul, quel bilan peut-on tirer des anti-TNF-alpha ?
C’est un traitement majeur qui donne le plus souvent de bons résultats, mais certains patients y répondent mal ou présentent à un moment donné une perte de réponse ou des complications infectieuses. On peut alors essayer un autre anti-TNF-alpha ou se tourner vers les nouvelles biothérapies (ustékinumab, védolizumab). Concernant le risque de cancer, on est globalement rassuré mais la prudence s’impose chez des patients qui ont eu un mélanome malin. Concernant l’azathioprine, seul ou associé à un anti-TNF-alpha, le risque de lymphome est désormais bien connu. Il concerne deux types de patients : les hommes de plus de 65 ans et les adolescents qui n’ont pas eu la mononucléose infectieuse (le lymphome est alors induit par une primo-infection à virus Epstein-Barr).
CHRISTINE, MAMAN D’AUDRIC, 15 ANS
LES MICI VUES PAR LES PATIENTS
IMPACT PSYCHOLOGIQUE
Même si les MICI sont désormais mieux connues du grand public, les symptômes gênants font peser un certain tabou : les patients hésitent à révéler leur maladie ou les difficultés rencontrées. L’acceptation de la maladie est souvent difficile d’autant qu’elle touche des sujets jeunes. Les formes sévères dont l’évolution peut faire craindre des complications à moyen ou long terme sont très anxiogènes.IMPACT SOCIAL, PROFESSIONNEL ET SEXUEL
Le handicap fonctionnel est important mais souvent sous-évalué. Fatigue, absences répétées, nécessité d’aller urgemment aux toilettes…Certains patients ont une qualité de vie très altérée en période de poussées, avec des répercussions importantes sur la vie sociale, professionnelle ou scolaire, et les loisirs. Les MICI perturbent la vie de couple, notamment chez les jeunes adultes.À DIRE AUX PATIENTS
A PROPOS DES MICI
L’évolution est imprévisible. Selon les patients, les poussées sont plus ou moins sévères et plus ou moins fréquentes. Toutefois, il est aujourd’hui possible de stabiliser la maladie, voire d’obtenir des rémissions prolongées et de diminuer le recours à la chirurgie. L’espérance de vie est similaire à celle de la population générale. Après plusieurs années d’évolution de la maladie, le dépistage par coloscopie d’un cancer colorectal (risque augmenté au cours des MICI) est recommandé.A PROPOS DU TRAITEMENT
L’observance du traitement de fond est essentielle pour contrôler l’inflammation.
question de patient Les probiotiques sont-ils utiles ?
«Certains patients rapportent une amélioration de leur symptômes sous probiotiques. Toutefois, leur intérêt n’est pas démontré sauf pour certains (non disponibles en France) : notamment la préparation VSL#3 (associant 8 souches) utilisée au cours de la rectocolite hémorragique dans le cas particulier de la pochite.»
question de patient Ma fille espère tomber enceinte. Est-ce bien raisonnable avec sa maladie ?
«Les avortements spontanés, le risque de prématurité et d’hypotrophie fœtale sont plus fréquents si la maladie est active. Il est donc fortement conseillé de planifier le projet de grossesse et de ne pas envisager de conception tant que la maladie est évolutive. La plupart des traitements peuvent être poursuivis au cours de la grossesse (y compris les anti-TNF-alpha les deux premiers trimestres).»
EN SAVOIR PLUS
CREGG(club de réflexion des cabinets et groupes d’hépatogastro-entérologie)
cregg.org Des informations pour les patients et des fiches « mémo » pour les professionnels de santé.
GETAID(groupe d'étude thérapeutique des affections inflammatoires du tube digestif)
getaid.org Notamment, des fiches synthétiques sur les différents traitements des MICI.
MÉMO DÉLIVRANCE
LA PRESCRIPTION COMPORTE DES AMINOSALICYLÉS
Pas d’allergie connue à l’aspirine ?UN OU DES IMMUNOSUPPRESSEURS SONT PRESCRITS
Il peut s’agir d’une corticothérapie (≥ 10 mg/jour d’équivalent prednisone plus de 2 semaines), d’un traitement par azathioprine (ou 6-mercaptopurine, voire méthotrexate hors AMM), anti-TNF-alpha (infliximab à l’hôpital ; adalimumab, Humira ; golimumab, Simponi) ou inhibiteur d’interleukines (ustékinumab, Stelara).CONSEILS
Sevrage tabagique impératif dans la maladie de Crohn. Alimentation aussi diversifiée que possible. Pas d’AINS au long cours (susceptibles de favoriser les poussées).Pourrez-vous respecter la minute de silence en mémoire de votre consœur de Guyane le samedi 20 avril ?
1Healthformation propose un catalogue de formations en e-learning sur une quinzaine de thématiques liées à la pratique officinale. Certains modules permettent de valider l'obligation de DPC.
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