Pilule et contraception d’urgence orale cas pratiques - Le Moniteur des Pharmacies n° 3145 du 06/10/2016 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des pharmacies n° 3145 du 06/10/2016
 

Cahiers Formation du Moniteur

Formation Iatrogénie

Auteur(s) :

PAR EVA BINIGUER, PHARMACIENNE.

CAHIER COORDONNÉ PAR ALEXANDRA BLANC, PHARMACIENNE, SOUS LA RESPONSABILITÉ DE FLORENCE BONTEMPS, DIRECTRICE SCIENTIFIQUE.

NOUS REMERCIONS POUR SA PARTICIPATION LE Dr FRANÇOISE SALAUNE, GYNÉCOLOGUE AU SERVICE ORTHOGÉNIE DU CHU DE CAEN ET LE Dr FRANÇOISE TOURMEN, GYNÉCOLOGUE À ANGERS POUR SON AIMABLE RELECTURE.

CAS  1  EFFETS INDÉSIRABLES 

CHLOÉ A MAL À LA POITRINE

Chloé, 18 ans, a commencé une contraception estroprogestative le mois dernier. Son médecin traitant lui a prescrit Trinordiol (éthinylestradiol et lévonorgestrel) pendant 3 mois à l’issue desquels un nouveau rendez-vous a été programmé pour faire le point. En attendant de revoir le médecin le mois prochain, Chloé vient à la pharmacie pour interroger son pharmacien : « J’ai les seins gonflés et douloureux. Je ne peux plus dormir sur le ventre ! Est-ce que cela peut être lié à ma pilule ? ».

ANALYSE DU CAS

Les hormones stéroïdes jouent un rôle important dans le développement cyclique de la glande mammaire. Les estrogènes entraînent la croissance des tissus épithéliaux et augmentent la perméabilité des vaisseaux sanguins, avec pour conséquence un gonflement du sein. La progestérone, par son action anti-estrogène, atténue ces effets.
La prise d'un contraceptif estroprogestatif peut être responsable d’un déséquilibre hormonal à l'origine des douleurs mammaires : l’effet du progestatif n'est pas toujours en mesure de contrecarrer l'action de l’estrogène synthétique. Une congestion de la poitrine peut alors survenir et provoquer une mastodynie hormonale, plus ou moins prononcée selon les stéroïdes utilisés et leurs dosages.
Trinordiol est une pilule combinée triphasique. Comparativement à d’autres pilules estroprogestatives, Trinordiol apporte des doses d’éthinylestradiol relativement élevées : 0,030 à 0,040 mg selon les phases.


ATTITUDE À ADOPTER

Le pharmacien explique à Chloé que les douleurs mammaires bilatérales qu’elle décrit sont effectivement très probablement liées à la prise du contraceptif.
Le pharmacien rassure également la jeune fille : les mastodynies hormonales sont bénignes et s’améliorent le plus souvent spontanément après quelques mois.
En attendant la prochaine consultation médicale, Chloé peut prendre du paracétamol voire de l’ibuprofène ponctuellement pour soulager ses douleurs et également appliquer des poches froides sur la poitrine.
Si le problème persiste, son médecin traitant pourra envisager la prescription d’une pilule moins dosée en estrogènes.
À retenir
La mastodynie est un effet indésirable fréquent des contraceptifs estroprogestatifs du fait de l’action des estrogènes sur la glande mammaire.

PREMIÈRE CONTRACEPTION ORALE CHEZ LA JEUNE FILLE

Première contraception orale chez la jeune fille

• Entre 15 et 19 ans, plus de 90 % des jeunes filles sexuellement actives utilisent une contraception. Les méthodes de premier choix pour les adolescentes sont le préservatif masculin et la contraception hormonale. 79 % des jeunes filles sexuellement actives prennent une contraception hormonale. Celle-ci présente l’avantage d’avoir des effets bénéfiques en cas de dysménorrhée, de syndrome prémenstruel, de ménorragie et d’acné.

• Le choix de la méthode contraceptive doit tenir compte des contre-indications médicales, mais aussi de la demande, des besoins et des craintes de la jeune fille. Lorsque le choix s’oriente vers une contraception hormonale, une pilule estroprogestative de 2e génération monophasique minidosée est privilégiée en première intention. La première plaquette est commencée idéalement le 1er jour des règles, la contraception est alors immédiatement efficace. Il est également possible de débuter le contraceptif sans attendre les prochaines règles (méthode « quick start »). Dans ce cas, une utilisation conjointe du préservatif est indispensable pendant les 7 premiers jours. Dans tous les cas, le port du préservatif est recommandé pour la protection contre les infections sexuellement transmissibles.

• Les pilules progestatives exposant à des anomalies menstruelles (spotting, aménorrhée…), souvent mal supportées à l’adolescence, ne sont proposées qu’en cas de contre-indication ou d’intolérance à l’éthinylestradiol.

• En cas de mauvaise tolérance du contraceptif choisi, une autre pilule pourra être proposée : changement de génération pour les pilules estroprogestatives, passage à un progestatif seul ou recours à une autre méthode (patch, anneau, DIU…).

• Pour faciliter l’accès à la contraception des jeunes filles mineures d’au moins 15 ans, les contraceptifs remboursables par l’assurance maladie, prescrits par un médecin ou une sage-femme sont pris en charge à 100 % dans le cadre d’une procédure de dispense d’avance des frais. Le secret sur la délivrance des contraceptifs est également possible (plus d’informations sur le site de l’Assurance maladie : ameli.fr/Espace pharmaciens).

CAS  2  EFFETS INDÉSIRABLES 

JAMAIS TRANQUILLE !

Sophia, 33 ans, prenait la pilule Leeloo (éthinylestradiol et lévonorgestrel). Il y a 3 mois, son gynécologue a changé pour une pilule microprogestative, Microval, vu sa consommation de tabac et sa prise de poids importante. Alors qu’elle vient renouveler son ordonnance, Sophia se plaint de saignements fréquents en dehors des règles : « Je ne suis jamais tranquille. Il n’y a rien à faire ? ».

ANALYSE DU CAS

Microval contient uniquement du lévonorgestrel, progestatif de synthèse à faible dose (0,03 mg). Son mode d’action est essentiellement périphérique : coagulation de la glaire cervicale qui devient impropre au passage des spermatozoïdes et action anti-nidatoire sur l’endomètre.
Les perturbations du cycle menstruel (aménorrhée, irrégularités menstruelles, saignements intermenstruels, modification du flux menstruel) constituent les effets indésirables les plus fréquemment observés sous microprogestatifs.
Ces effets endométriaux dépendent du progestatif utilisé et des taux d’estrogènes endogènes persistants. Ceux-ci peuvent être très variables : de l’hypo-estrogénie associée à une oligoménorrhée, voire une aménorrhée, à une sécrétion importante d’estrogènes associée à des spottings.


ATTITUDE À ADOPTER

Le pharmacien explique à Sophia que les saignements intercurrents sous microprogestatif seul, sont fréquents. Ils diminuent généralement en fréquence avec le temps.
Le pharmacien lui conseille de respecter un horaire fixe de prise afin de limiter les variations hormonales à l’origine des saignements.
Dans le cas où les saignements ne s’amenderaient pas après quelques mois, Sophia devra reconsulter son gynécologue.
À retenir
Les contraceptifs microprogestatifs sont fréquemment à l’origine de saignements intermenstruels. La prise à heure fixe permet de diminuer la survenue de ces saignements intercurrents.

CAS  3 EFFETS INDÉSIRABLES 

LOU A UN RETARD DE RÈGLES

Il y a 20 jours, Lou, 16 ans, est venue chercher une pilule du lendemain, suite à un rapport non protégé la veille. Ce matin, elle revient à la pharmacie : « J’ai bien pris le Norlevo que vous m’avez donné. Depuis j’ai des petits saignements, mais toujours pas mes règles. J’aurais dû les avoir il y a trois jours ! J’ai fait un test de grossesse et il est négatif. Je suis perdue ! ».

ANALYSE DU CAS

Le lévonorgestrel est un agoniste des récepteurs de la progestérone. A forte dose et s'il a été administré avant l'augmentation initiale du taux d’hormone lutéinisante (LH), il exerce un rétrocontrôle négatif sur l’axe hypothalamo-hypophysaire permettant la suppression du pic de LH et donc l’inhibition du développement et de la maturation folliculaire et/ou la libération de l’ovule.
Les essais réalisés par l’OMS montrent une efficacité de presque 100 % dans les 12 heures qui suivent le rapport à risque, 95 % entre 12 et 24 h, 85 % entre 24 et 48 h et 58 % entre 48 et 72 h.
Après la prise de Norlevo, 30 % des femmes ont des saignements irréguliers qui se poursuivent parfois jusqu'aux prochaines règles. Par ailleurs, un retard de règles de 5 à 7 jours est souvent constaté.

ATTITUDE À ADOPTER

Le pharmacien rassure la jeune fille. Les tests de grossesse sont fiables et il est fréquent d’observer des perturbations du cycle suite à la prise de Norlevo.
Il lui propose de faire un 2e test de grossesse le lendemain pour confirmer le résultat négatif. En l’absence de règles, Lou devra consulter un gynécologue. Une contraception régulière pourrait aussi être évoquée.
À retenir
Des perturbations du cycle menstruel sont des effets indésirables fréquemment rencontrés après un apport massif de lévonorgestrel dans le cadre d’une contraception d’urgence.

CAS  4  EFFETS INDÉSIRABLES 

PILULE ET TACHES BRUNES

Juliette, 24 ans, vient demander conseil à la pharmacie. Suite à un voyage, la jeune femme a constaté l’apparition de taches brunes éparses sur ses joues. Juliette a lu sur Internet que cela pouvait être dû aux hormones et notamment à la pilule : « Mon médecin m’a prescrit Adepal il y a quelques mois. Avant, ça ne m’avait jamais fait ça. Qu’est-ce que je dois faire ? ».

CAS  5  MÉSUSAGE 

PASSER D’UNE PILULE À L’AUTRE

Pendant 6 mois, Garance, 19 ans, a pris Optilova (éthinylestradiol et lévonorgestrel). La jeune femme se plaignant de migraines répétées, son médecin a remplacé sa pilule par un microprogestatif seul. Garance vient avec une ordonnance d’Optimizette : « En ce moment, j’ai mes règles et dans deux jours j’aurai fini ma plaquette d’Optilova. Je commence la nouvelle pilule juste après, et je suis protégée, c’est ça ? » demande-t-elle.

ANALYSE DU CAS

Lors d’un changement de pilule, les mesures à suivre, différentes d’une spécialité à l’autre, sont précisées dans les RCP. De façon générale, on préconise :
Pour le passage d'une contraception orale combinée (COC) à : –une autre COC : débuter à la fin des pilules actives ou au plus tard à la fin des 28 jours (après la pause ou les placébos) ; –une pilule microprogestative : débuter à la fin des pilules actives ; jeter les placébos si nécessaire. Dans ces cas, une contraception locale supplémentaire n’est pas nécessaire.
Pour le passage d'une pilule microprogestative à une autre pilule : débuter à n’importe quel moment de la plaquette. Une contraception locale les 7 premiers jours est recommandée.


ATTITUDE À ADOPTER

Optilova est une pilule estroprogestative continue (21 comprimés actifs et 7 placébos).
Le pharmacien explique à Garance qu’elle aurait dû débuter la nouvelle pilule à la fin de la 3e semaine d’Optilova et jeter les comprimés placébos.
Il lui conseille de ne pas prendre les derniers comprimés d’Optilova et de commencer le soir même à prendre sa nouvelle pilule, Optimizette. Elle devra protéger ses rapports pendant les 7 premiers jours.
À retenir
Lors d’un changement de contraceptif estroprogestatif pour un microprogestatif, ce dernier doit être débuté dès la fin des comprimés actifs de la pilule estroprogestative.

CAS  6 MÉSUSAGE 

TÊTE EN L’AIR

Camille, 31 ans, auto-entrepreneuse, est maman de trois jeunes enfants. Ce lundi matin elle vient demander conseil à son pharmacien : Camille s’est aperçue qu’elle avait oublié de prendre sa pilule, Adepal (éthinylestradiol et lévonorgestrel), samedi soir. Ne sachant pas quoi faire, elle a pris dimanche soir deux comprimés au lieu d’un pour rattraper l’oubli. Camille se trouve dans la 2e semaine de sa plaquette et a eu un rapport sexuel il y a 8 jours. Elle s’inquiète de la survenue d’une grossesse.

ANALYSE DU CAS

Adepal est une pilule estroprogestative qui doit être prise durant 21 jours consécutifs suivis de 7 jours d’arrêt. Pour ce type de pilule, si un oubli de prise est constaté plus de 12 heures après l’heure de prise habituelle l’effet contraceptif n’est plus assuré.
Par ailleurs, en cas de rapport sexuel dans les 5 jours précédant cet oubli, une contraception d’urgence doit être utilisée. Si le rapport sexuel date de plus de 5 jours, la prise d’un médicament de contraception d’urgence n’est pas nécessaire. Le dernier rapport de Camille datant de 6 jours avant l’oubli, il n’expose pas à un risque de grossesse.
Camille a constaté avoir oublié son contraceptif 24 heures après l’heure de prise habituelle, l’effet contraceptif n’est donc plus assuré. La prise de deux comprimés contraceptifs n’est pas suffisante pour maintenir une contraception optimale.


ATTITUDE À ADOPTER

Le pharmacien explique à Camille qu’il existe un délai de rattrapage de 12 heures avec les pilules estroprogestatives et qu’au-delà de ce délai l’effet de son contraceptif n’est plus assuré. Pour éviter la survenue d’une grossesse, il est alors impératif d’utiliser une contraception mécanique au cours des 7 jours qui suivent cet oubli.
Le pharmacien rappelle à Camille qu’elle doit poursuivre la prise de sa pilule tous les jours à l’heure habituelle.
Il la rassure sur le risque de grossesse lié à son dernier rapport sexuel, celui-ci étant éloigné de plus de 5 jours de l’oubli.
Il l’incite également à discuter avec son médecin ou gynécologue des autres moyens de contraception disponibles (anneau, DIU, implant…) qui pourraient être plus en adéquation avec son mode de vie et ses besoins, afin de limiter le risque d’oubli.
À retenir
L’oubli d’une pilule estroprogestative peut être rattrapé dans un délai de 12 heures par rapport à la prise habituelle. Au-delà, l’effet contraceptif n’est plus assuré.

CAS  7 INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES 

JULIE EST TRAITÉE PAR LAMOTRIGINE

Julie, 18 ans, est traitée par lamotrigine pour son épilepsie. Elle n’a pas de contraception régulière. Hier soir, elle a eu un rapport sexuel au cours duquel le préservatif a craqué. Ce matin, elle vient demander une pilule du lendemain. Myriam, la préparatrice, sait qu’il existe une interaction entre les contraceptifs hormonaux et certains antiépileptiques. Elle se demande s’il en est de même avec la pilule du lendemain. Elle sollicite le pharmacien.

ANALYSE DU CAS

Contrairement à certains antiépileptiques (carbamazépine, topiramate…), la lamotrigine est peu inductrice enzymatique.
Une étude a montré, d’une part, une faible augmentation de la clairance du lévonorgestrel lorsque la lamotrigine était administrée avec un contraceptif estroprogestatif, et d’autre part, des changements des taux de FSH et LH sériques. La possibilité d’une diminution de l'efficacité du contraceptif ne peut être exclue.
D'autre part, les contraceptifs estroprogestatifs diminuent significativement les taux de lamotrigine sanguins rendant nécessaire une adaptation de la posologie de l'antiépileptique.
Par prudence et en l’absence de données suffisantes, la contraception d’urgence hormonale (lévonorgestrel et ulipristal) n’est pas recommandée pour les patientes sous lamotrigine.

ATTITUDE À ADOPTER

Le pharmacien explique à Julie que la pilule du lendemain n’est peut-être pas adaptée dans son cas. Le risque d’échec des médicaments de contraception d’urgence est plus élevé.
Le pharmacien décide d’appeler le neurologue de Julie afin d’évaluer avec lui de la pertinence de la pose d’un DIU au cuivre. La prise d’un contraceptif d’urgence à double dose peut également être discutée. À retenir
Par prudence, l’utilisation de contraceptifs d’urgence hormonaux n’est pas recommandée chez les patientes sous lamotrigine.

CAS  8 INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES 

ELLAONE ET CONTRACEPTIF RÉGULIER

Suite à son accouchement, il y a 4 mois, Justine, 35 ans, utilise désogestrel en contraceptif. Ce mardi matin, la jeune maman, un peu débordée, vient demander conseil : elle a oublié de prendre son contraceptif samedi soir et ne l’a repris que le lendemain soir. Elle a eu un rapport sexuel vendredi. Elle alterne allaitement au sein et biberon, a déjà eu son retour de couche. « Dois-je prendre une pilule du lendemain, même si je prends déjà la pilule ? ».

ANALYSE DU CAS

Désogestrel est un progestatif autorisant un délai de 12 heures pour le rattrapage d’un comprimé oublié. Dans le cas présent, l’oubli étant supérieur à 12 heures et un rapport sexuel ayant eu lieu 4 jours plus tôt, l’ulipristal (Ellaone) est la seule contraception d’urgence orale indiquée.
L’ulipristal est un modulateur sélectif des récepteurs de la progestérone qui se lie aux récepteurs avec une forte affinité. Ainsi, il est susceptible de diminuer l’efficacité des contraceptifs estroprogestatifs et progestatifs par antagonisme de l’effet du progestatif pendant au moins 12 jours. Une contraception mécanique s’impose donc pendant 14 jours après une prise d'ulipristal (au lieu des 7 jours recommandés en cas d’oubli de pilule, pour retrouver l’efficacité optimale du contraceptif).

ATTITUDE À ADOPTER

Le pharmacien conseille à Justine de prendre Ellaone le plus rapidement possible. Il explique qu’elle doit continuer sa pilule habituelle et utiliser des préservatifs pendant 14 jours.
Après la prise d'Ellaone, l'allaitement ne pose a priori pas de problème (d’après le CRAT). Le RCP recommande, en l’absence de données, de suspendre l’allaitement pendant 7 jours.
À retenir
L’ulipristal est susceptible de diminuer l’efficacité des contraceptifs hormonaux habituels, imposant une contraception mécanique pendant 14 jours après la prise d’Ellaone.

CAS  9 CONTRE-INDICATIONS 

« UNE PHLÉBITE À CAUSE DE L’AVION ! »

Après son retour de San Francisco,Stéphanie, 36 ans, s’est rendue aux urgences car son mollet droit était dur, gonflé et douloureux. Le médecin a diagnostiqué une thrombose veineuse profonde, survenue à la suite de son voyage en avion. A la sortie, elle vient à la pharmacie chercher le médicament qui lui a été prescrit : poursuite d’Innohep 10 000 UI 1 fois/J. L’ordonnance précise d’arrêter Optidril (éthinylestradiol et lévonorgestrel). « Dans combien de temps pourrai-je reprendre ma pilule ? », demande Stéphanie au pharmacien.

ANALYSE DU CAS

Il est désormais établi que la contraception estroprogestative augmente le risque vasculaire, à la fois veineux (thrombose veineuse profonde des membres inférieurs, embolie pulmonaire, thrombose veineuse cérébrale) et artériel (infarctus du myocarde, accident vasculaire cérébral) d’un facteur 3 à 6 par rapport aux femmes non-utilisatrices. Ce risque thrombo-embolique est d’autant plus important la première année d’utilisation, avec les pilules de 3e génération ou à base de drospirénone et en cas de facteurs de risque associés (surpoids, tabagisme, hypertension artérielle, anomalies de l’hémostase, antécédents personnels ou familiaux de thromboses).
L’estrogène est le principal responsable du risque veineux, dose-dépendant, par le biais de modifications de l’hémostase : augmentation du fibrinogène et de certains facteurs de coagulation, diminution des facteurs anticoagulants (antithrombine et protéine S) et résistance acquise à la protéine C activée, induisant un état prothrombotique.
Le risque thrombo-embolique sous progestatif seul est beaucoup moins étudié, mais globalement, il n’existe pas de preuve épidémiologique d’une augmentation du risque lors de l’utilisation de progestatifs seuls en continu à faible dose, et il n’y a pas d’effets connus sur les différents paramètres sanguins de la coagulation.
En pratique, en cas d’antécédent thrombo-embolique, une contraception par progestatif seul, type microprogestatif, peut être envisagée, à distance de l’événement thrombo-embolique veineux profond. Les macro-progestatifs sont, quant à eux, contre-indiqués en cas d’accidents thrombo-emboliques en évolution.


ATTITUDE À ADOPTER

Le pharmacien explique à Stéphanie que la survenue d’un événement thrombo-embolique veineux contre-indique toute contraception hormonale pendant un an, et définitivement l’utilisation d’une contraception estroprogestative (pilule, patch ou anneau). Une contraception sans estrogène pourra être envisagée plus tard (pilule, implant, DIU).
Dans un premier temps, Stéphanie devra utiliser une contraception mécanique. Le pharmacien lui conseille de reprendre rendez-vous avec le gynécologue afin de rediscuter de sa contraception.
Il rappelle que pour tout voyage en avion, des précautions devront être prises : porter des chaussettes de contention, marcher, s’hydrater…

PRINCIPALES CONTRE-INDICATIONS DES ESTROPROGESTATIFS

PRINCIPALES CONTRE-INDICATIONS des ESTROPROGESTATIFS
Elles sont d’ordre cardiovasculaire, carcinologique et hépatique.

• Contre-indications absolues
- Risques vasculaires : thrombophilie, antécédents personnels d’événements thrombo-emboliques veineux, d’affections cardiovasculaires artérielles (infarctus du myocarde, accident vasculaire cérébral ischémique, artériopathie oblitérante des membres inférieurs), hypertension artérielle, migraine avec aura, tabagisme (> 15 cigarettes/j) et âge ( > 35 ans).
- Tumeurs malignes du sein ou de l’utérus.
- Troubles métaboliques : dyslipidémie. diabète mal équilibré ou compliqué.
- Pathologies hormonodépendantes systémiques : lupus, syndrome des antiphospholipides.
- Troubles hépatiques et biliaires (antécédents d’ictère cholostatique, lithiase).

• Contre-indications relatives
- Age > 35-40 ans.
- Tabagisme < 15 cigarettes/j et âge > 35 ans.
- Migraine sans aura.
- Varices importantes.
- Antécédents psychiatriques.
- Antécédents gynécologiques : fibromes, mastopathies bénignes.
- Troubles métaboliques : diabète insulino-dépendant, obésité.
À retenir
Les antécédents personnels d’accidents vasculaires sont une contre-indication absolue à l’utilisation de contraceptifs estroprogestatifs.

CAS  10 CONTRE-INDICATIONS  

MARINA A DES MIGRAINES

Marina, 22 ans, vient acheter de l’ibuprofène. Depuis qu’elle a débuté sa contraception orale, 6 mois plus tôt, elle a régulièrement des crises de migraine : « Tous les mois c’est pareil, je commence par voir trouble, la lumière me gêne, puis la migraine débute. Ça me donne envie de vomir. Avant de prendre la pilule, ça m’arrivait d’avoir des maux de tête, mais ça passait avec un Doliprane ! »

ANALYSE DU CAS

L’apparition d’une migraine sous contraceptif survient le plus souvent dès les premiers cycles, lors de la semaine d’arrêt de la pilule en raison de la chute brutale des taux plasmatiques d’estrogène.
Le risque d’apparition d’une céphalée sous contraceptif estroprogestatif serait accru en cas d’antécédents personnels et/ou familiaux de migraine et augmenterait avec l’âge.
Lors d’une migraine avec aura, des symptômes neurologiques focaux (souvent identiques chez une même personne) précèdent l’apparition d’une violente migraine généralement unilatérale avec nausées, photophobie et obligeant à s’allonger ou à s’enfermer dans le noir.
La migraine chez une femme âgée de plus de 35 ans ou qui fume, ainsi que l’existence d’aura, constituent des contre-indications absolues à la prescription d’une contraception estroprogestative du fait d’un risque accru d’accident vasculaire cérébral ischémique. Les contraceptions progestatives ou non hormonales sont autorisées dans ce condiv.


ATTITUDE À ADOPTER LE PHARMACIEN EXPLIQUE À MARINA QU’IL EXISTE UN LIEN ENTRE LA PRISE DE LA PILULE ET LA SURVENUE DE MIGRAINES. IL CONSEILLE À LA JEUNE FEMME DE CONSULTER SON MÉDECIN AFIN D’ENVISAGER UN CHANGEMENT DE CONTRACEPTIF.

À retenir
Les antécédents ou la survenue sous pilule estroprogestative de migraines avec aura contre-indiquent l’emploi de contraceptifs estoprogestatifs du fait du risque accru d’AVC.

CAS  11 PROFILS PARTICULIERS 

STOP AUX RÈGLES !

Depuis un an, Alice, 17 ans, nageuse de haut niveau, prend Ludéal. Aujourd’hui, elle demande une avance de pilule : son ordonnance n’est plus renouvelable et son rendez-vous gynécologique est dans 1 mois. Après analyse, le pharmacien ne comprend pas qu’Alice soit à cours de contraceptif. La jeune fille explique qu’elle enchaîne les plaquettes pour ne plus être embêtée avec ses règles…

ANALYSE DU CAS

L'arrêt de la pilule estroprogestatives tous les 21 jours entraîne une chute brutale du taux d’estrogènes et la desquamation de l’endomètre responsable d'une hémorragie de privation souvent confondue avec les menstruations, mimant ainsi le cycle naturel. Or, il n’y a pas d'ovulation, donc pas de règles à proprement parler.
Inversement, le maintien de la muqueuse par l’enchaînement des plaquettes ne pose pas de problème. Seuls des spottings peuvent survenir avec les pilules bi ou triphasiques du fait des variations hormonales.
Ludéal est une pilule estroprogestative monophasique.
Depuis 2015, un contraceptif estroprogestatif propose une prise continue sur 91 jours réduisant les saignements menstruels de privation à 4 épisodes par an.


ATTITUDE À ADOPTER

Le pharmacien délivre à Alice une boîte supplémentaire de Ludéal en attendant son rendez-vous médical.
Depuis 2012, les pharmaciens sont autorisés à délivrer, sur la base d'une prescription datant de moins d'un an et dont la durée de validité est expirée, des contraceptifs oraux pour une durée supplémentaire non renouvelable de six mois.
Le pharmacien incite Alice à informer son gynécologue de sa prise de pilule en continue.
À retenir
L’enchaînement de plaquettes de pilules sans interruption ne présente pas de danger. Cette prise peut être utile, sur avis médical, dans certaines conditions pour éviter les hémorragies de privation mensuelles.

CAS  12 PROFILS PARTICULIERS 

MANON VIENT D’ACCOUCHER

Manon, 28 ans, a accouché il y a 4 jours. Elle allaite son bébé. Tout juste sortie de la maternité, la jeune maman se présente à la pharmacie avec plusieurs ordonnances. Le gynécologue lui a prescrit une nouvelle contraception : Cerazette (désogestrel), à débuter dans 3 semaines. Manon ne souhaite pas que le pharmacien lui délivre la pilule dès aujourd’hui. En effet, elle explique qu’avant sa grossesse elle prenait Adepal (éthinylestradiol et lévonorgestrel). Cette pilule lui convenait très bien et elle ne souhaite pas en changer. « Est-ce que je peux demander à mon médecin traitant de me represcrire Adepal ? ».

ANALYSE DU CAS

En post-partum, la reprise de l’ovulation ne survient pas avant le 21e jour qui suit l’accouchement. Ce délai peut être allongé, notamment en cas d’allaitement maternel.
L’allaitement peut avoir un effet contraceptif jusqu’à 6 mois après l’accouchement dans certaines conditions strictes : allaitement exclusif, jour et nuit, 6 à 10 tétées/j, pas plus de 6 heures entre 2 tétées la nuit, et 4 heures le jour, aménorrhée persistante.
Trois semaines après l’accouchement, une méthode contraceptive doit donc être envisagée. Son choix dépend de plusieurs paramètres : le type d’allaitement (maternel ou artificiel), le risque thrombo-embolique veineux (majoré jusqu’à 42 jours après l’accouchement) et les éventuelles pathologies survenues pendant la grossesse (HTA gravidique, pré-éclampsie, diabète gestationnel, thrombose veineuse profonde…).
Chez la femme qui allaite, la contraception par estroprogestatifs n’est pas recommandée dans les 6 mois suivant l’accouchement. En effet, ces derniers majorent le risque de thrombose et réduiraient la production de lait.
En l’absence de contre-indications, les méthodes contraceptives recommandées chez la femme allaitante sont les progestatifs seuls à partir de 21 jours après l’accouchement et les DIU au cuivre ou au lévonorgestrel à partir de 4 semaines après l’accouchement. Les méthodes barrières (diaphragme, cape cervicale, spermicides) exposent à un risque d’échec contraceptif plus important et ne sont pas à envisager en première intention.


ATTITUDE À ADOPTER

Le pharmacien explique à Manon que la pilule Adepal n’est pas recommandée pendant l’allaitement, car elle expose à un risque plus important de thrombose et qu’elle est susceptible de diminuer sa production de lait.
Le pharmacien conseille à la jeune maman d’opter pour la nouvelle pilule qui lui a été prescrite. Si elle ne le souhaite pas, la pose d’un stérilet peut être envisagée.
À retenir
Chez la femme qui allaite, les estroprogestatifs ne sont pas recommandés dans les 6 mois qui suivent l’accouchement en raison d’une possible réduction de la production de lait.

CONTRACEPTION ORALE EN POST-PARTUM ET POST-ABORTUM

Contraception orale en post-partum et post-abortum

• En post-partum, chez la femme qui allaite
- Les progestatifs seuls peuvent être utilisés à partir de 21 jours après l’accouchement en l’absence de contre-indications (accidents veineux évolutifs, saignements génitaux inexpliqués, cancer du sein ou de l’utérus, pathologie hépatique sévère actuelle ou ancienne).
- Les estroprogestatifs ne sont pas recommandés dans les 6 mois suivant l’accouchement.

• En post-partum, chez la femme qui n’allaite pas
- Les progestatifs seuls sont utilisables à partir de 21 jours après l’accouchement en l’absence de contre-indications.
- Les estroprogestatifs peuvent être utilisés à partir de 42 jours après l’accouchement en l’absence de contre-indications (accidents veineux ou artériels, pathologie hépatique ou cancer du sein ou de l’utérus) et en prenant en compte les facteurs de risque de thrombose. Selon l’OMS, ce délai peut être raccourci à 21 jours en l’absence de facteur de risque thrombo-embolique veineux (antécédent thrombo-embolique veineux, thrombophilie, immobilisation, transfusion lors de l’accouchement, IMC > 30 kg/m2, hémorragie du post-partum, accouchement par césarienne, pré-éclampsie ou tabagisme) et d’autres contre-indications.

• Après une IVG, la reprise de la fertilité est immédiate, contrairement au post-partum. - Une contraception doit être envisagée le jour ou le lendemain de l’IVG médicamenteuse ou chirurgicale. - Le choix de la méthode doit être centré sur l’observance. Les estroprogestatifs et les progestatifs seuls peuvent être utilisés immédiatement après une IVG chez la femme ne présentant pas de contre-indications.

CAS  13 PROFILS PARTICULIERS 

LA PILULE DU SURLENDEMAIN !

Ce lundi matin, Alice, 16 ans, très gênée, explique au pharmacien qu’elle a eu un rapport sexuel non protégé jeudi soir. Elle n’a pas osé venir à la pharmacie avant. Hier, elle a lu sur Internet que la pilule du lendemain devait être prise dans les 72 heures. « Je ne sais pas ce que je dois faire et je ne veux surtout pas que mes parents soient au courant ! », explique la jeune fille.
Une brochure d’aide à la dispensation de la contraception d’urgence est disponible gratuitement sur cespham.fr

ANALYSE DU CAS

L’acétate d’ulipristal agit en se liant avec une forte affinité aux récepteurs de la progestérone humaine permettant de supprimer le pic de LH et donc d’inhiber ou retarder l'ovulation.
L’efficacité d’Ellaone est maintenue jusqu’à 5 jours (120 heures), ce qui correspond à la durée de vie maximale des spermatozoïdes dans les voies génitales féminines.
Ellaone peut être délivrée sans ordonnance. Ses modalités de dispensation anonyme et gratuite aux mineures dans le cadre d'une contraception d'urgence répondent à la même réglementation que le lévonorgestrel (Norlevo).
Dans les 5 jours suivant un rapport à risque, la pose d’un dispositif intra-utérin par un médecin est également une option possible.


ATTITUDE À ADOPTER

Le pharmacien explique à Alice qu’il existe une pilule de contraception d’urgence qui peut être utilisée jusqu’à 5 jours après le rapport non protégé.
Il lui recommande de prendre le comprimé le plus tôt possible.
Il indique qu’en cas de vomissements survenant dans les 3 heures après la prise du comprimé, il est nécessaire de prendre un comprimé de remplacement.
Il rappelle qu’aucune contraception d’urgence n’est efficace à 100 % et l’incite à surveiller l’apparition de ses règles.
Le pharmacien remet à Alice une brochure explicative sur la contraception d’urgence et lui conseille de consulter un médecin ou de se rendre au planning familial pour, si besoin, envisager une contraception régulière.
Il l’alerte sur le risque de transmission d’infections sexuellement transmissibles et lui donne les coordonnées d’un centre de dépistage.
À retenir
Ellaone peut être donnée, sans ordonnance, dans le cadre d’une contraception d’urgence jusqu’à 120 heures, soit 5 jours, après un rapport non protégé ou en cas d’échec d’une méthode contraceptive.

RÈGLES DE DISPENSATION DE LA CONTRACEPTION D’URGENCE

Règles de dispensation de la contraception d’urgence

• Les médicaments de contraception d’urgence (lévonorgestrel et acétate d’ulipristal) ne sont pas soumis à prescription médicale obligatoire.

• Ils sont remboursés à 65 % par l’Assurance maladie sur prescription (médecin ou sage-femme).

• Ils peuvent être délivrés de manière anonyme et gratuite, sans prescription médicale, aux jeunes filles mineures (la minorité est justifiée par la simple déclaration orale). Les modalités de facturation sont disponibles sur le site ameli.fr/Espace Pharmaciens.

• La dispensation à une jeune fille mineure doit être précédée d’un entretien d’information et d’accompagnement :
– s’assurer que la situation de la jeune fille correspond aux conditions d’utilisation des contraceptifs d’urgence (au plus tard 120 heures après le rapport sexuel à risque) ;
– informer sur les méthodes de contraception régulière, la contraception d’urgence étant une méthode de rattrapage qui ne vise pas à être utilisée de façon régulière notamment en raison du risque d’échec plus élevé que les contraceptions régulières. L’utilisation répétée de la contraception d’urgence au cours d’un même cycle est possible, mais n’est pas recommandée ;
– insister sur la prévention des maladies sexuellement transmissibles : recommander le port du préservatif et orienter la patiente et son partenaire vers un centre de dépistage ;
– rappeler l’intérêt d’un suivi médical ;
– remettre à la jeune fille une brochure d’information sur le sujet ;
– indiquer les coordonnées du centre de planification ou d’éducation familiale le plus proche pouvant proposer de façon anonyme et gratuite des consultations de contraception et délivrer une contraception régulière (ivg.social-sante.gouv.fr/ou-s-informer-sur-l-ivg.html).

CAS  14 PROFILS PARTICULIERS 

KARINE EST HYPERTENDUE

Karine, 46 ans, est institutrice, mère de deux enfants. Suite au diagnostic d’une hypertension artérielle, elle est traitée depuis 2 mois par ramipril 2,5 mg. Aujourd’hui, Karine vient à la pharmacie avec une nouvelle ordonnance du gynécologue. Ce dernier a choisi de stopper la contraception par Trinordiol et a prescrit un stérilet au cuivre. Karine n’a pas osé manifester à son médecin sa contrariété. « Ça fait des années que je prends Trinordiol et cela me convient. Il paraît qu’avec l’âge, il y a plus d’effets indésirables, mais moi je me porte très bien ! Et pourquoi un stérilet alors qu’il existe de nombreuses pilules ? » se plaint-elle auprès du pharmacien.

ANALYSE DU CAS

L’hypertension artérielle (HTA) constitue une contre-indication à la prise de contraceptif estroprogestatif. Si cette contre-indication peut être relative en cas d’HTA bien contrôlée chez la femme de moins de 35 ans, sans autre facteur de risque cardiovasculaire, elle devient absolue au-delà de cet âge.
En effet, l’augmentation des risques cancéreux et cardio-vasculaires avec l’âge, ainsi que les troubles associés à la préménopause doivent amener à réévaluer l’adéquation de la méthode contraceptive utilisée à partir de l’âge de 35-40 ans.
S’il n’y a pas lieu d’interrompre avant la ménopause une contraception estroprogestative bien tolérée chez une femme n’ayant pas de facteurs de risque cardiovasculaires. Ces facteurs de risque prennent, en revanche, un poids important dans la balance bénéfice/risques après 35 ans.
Par prudence, la HAS recommande la substitution, entre 35 et 40 ans, de la méthode contraceptive estroprogestative utilisée par une contraception par DIU ou par progestatifs seuls, en cas de facteurs de risque associés : hypertension artérielle, dyslipidémies, diabète, obésité, tabac, migraines…


ATTITUDE À ADOPTER

Le pharmacien explique à Karine que la contraception estroprogestative est contre-indiquée chez les femmes hypertendues, car cela augmente significativement le risque d’accident vasculaire cérébral et d’infarctus du myocarde.
Selon les recommandations, après 45 ans, le DIU doit être proposé en première intention. En effet, si l’utilisation des progestatifs seuls est possible, même après 45 ans, les perturbations du cycle menstruel qu'ils induisent fréquemment limitent leur utilisation.
Le pharmacien propose à Karine d’exprimer ses réticences à l’utilisation du DIU. Il lui montre un DIU factice et en explique les avantages : pas d’oubli possible, grande efficacité, discret…
À retenir
Après 35-40 ans, la balance bénéfice/risque d’une contraception estroprogestative doit être réévaluée, et un relais par une contraception progestative seule doit être envisagé en cas de facteurs de risque cardiovasculaire.

CONTRACEPTION APRÈS 35-40 ANS

Contraception après 35-40 ans

• Malgré la baisse de fertilité avec l’âge, une ovulation peut se produire jusqu’à̀ la ménopause. Une contraception efficace doit donc être poursuivie jusqu’à̀ l’installation avérée de celle-ci. Cependant, l’âge modifie le rapport bénéfices/risques des méthodes contraceptives, obligeant à les réévaluer afin de conserver une contraception adaptée à l’évolution des besoins et des risques personnels. La HAS a retenu l’âge de 35 ans comme une limite pouvant être envisagée à la fois vis-à-vis des risques cancéreux et cardiovasculaires, et en tant qu’âge approximatif d’entrée des femmes dans une période de transition vers la ménopause !

• La contraception par pilule estroprogestative :
- permet de corriger les troubles liés au dysfonctionnement ovarien fréquent en période de préménopause, des symptômes d’hyperestrogénie (ménorragies, mastodynies) ou d’hypo-estrogénie (troubles vasomoteurs, densité osseuse) ;
- peut être poursuivie en l’absence de facteurs de risque vasculaire chez une femme de plus de 35 ans. Un suivi régulier est recommandé ;
- est contre-indiquée après 35 ans chez la femme fumeuse ou avec des migraines, ou tout autre facteur de risque cardiovasculaire. La substitution par une méthode progestative seule ou par un DIU est recommandée.

• La contraception par pilule microprogestative :
- peut être utilisée sans sur-risque chez les femmes après 35 ans et même au-delà de 45 ans ;
- est susceptible de majorer les troubles liés au dysfonctionnement ovarien (perturbations du cycle).

• Les macroprogestatifs discontinus (acétate de chlormadinone, nomégestrol) peuvent être prescrits chez les femmes en préménopause, car ils permettent de corriger les troubles liés au dysfonctionnement ovarien en cas de contre-indication aux estroprogestatifs et possèdent une action antigonadotrope, mais ils ne possèdent pas d’AMM pour la contraception.

PHARMACOLOGIE 

LES CONTRACEPTIFS ORAUX


LES PILULES CONTRACEPTIVES

Si les méthodes contraceptives se sont largement diversifiées ces dernières années, la pilule reste de loin la plus utilisée. En France, 74 % des femmes en âge de procréer utilisent une méthode contraceptive, et parmi elles, 46 % ont recours à une contraception orale.
La contraception orale est une méthode hormonale qui consiste en l’administration de dérivés de l’estrogène et/ou de la progestérone dans le but d’interférer avec le cycle menstruel naturel de la femme et d’empêcher la survenue d’une grossesse.
Deux types de pilule contraceptive existent : les estroprogestatifs et les progestatifs seuls.
Les contraceptifs estroprogestatifs sont les plus utilisés en première intention chez les femmes jeunes en bonne santé. Leur mode d’action est double : le progestatif inhibe l’ovulation, rend la glaire cervicale imperméable aux spermatozoïdes et l’endomètre non réceptif à la nidation ; l’estrogène se substitue à la sécrétion endogène qui est freinée, et assure la suppression du développement folliculaire.
Les contraceptifs progestatifs sont, en pratique, utilisés en 2e intention chez les femmes qui présentent certaines contre-indications (notamment cardiovasculaires). Leur action contraceptive est essentiellement périphérique : coagulation de la glaire cervicale qui devient impropre au passage des spermatozoïdes et action antinidatoire sur l’endomètre. Un léger effet antigonadotrope est également observé. Du fait de leur mode d’action, les progestatifs ont une efficacité contraceptive en théorie moindre que celle des estroprogestatifs et largement dépendante de l’observance. Cependant, la contraception progestative reste classée, de même que les estroprogestatifs, au rang des méthodes efficaces dans leur emploi courant et très efficaces en utilisation optimale (prise continue à heure fixe).

LES CONTRACEPTIFS D’URGENCE

La contraception d'urgence désigne les méthodes contraceptives qu'une femme peut utiliser pour prévenir la survenue d'une grossesse après un rapport non protégé ou en cas d’échec de la méthode contraceptive.
En France, deux molécules destinées à être utilisées comme contraceptifs hormonaux d’urgence sont disponibles sans ordonnance : lévonorgestrel et acétate d’ulipristal.
Le lévonorgestrel, progestatif de 2e génération, retarde l’ovulation ou la perturbe lorsqu’elle est sur le point de se produire, mais elle ne la stoppe pas lorsqu’elle est commencée, c’est-à-dire lors du pic de LH. Le lévonorgestrel aurait aussi un effet sur la mobilité des spermatozoïdes et leur pouvoir fécondant.
L’acétate d’ulipristal est un stéroïde modulateur sélectif des récepteurs de la progestérone. En contraception d’urgence, Ellaone à pour but d’inhiber ou de retarder l’ovulation. Des données pharmacodynamiques montrent que, même s'il est pris immédiatement avant la date d'ovulation prévue (quand la LH a déjà commencé à augmenter), l'acétate d’ulipristal est capable de retarder la rupture folliculaire pendant au moins 5 jours dans 78,6 % des cas.

INDICE DE PEARL

Indice de Pearl

• L’efficacité d’une méthode contraceptive est mesurée par l’indice de Pearl.

• L’Indice de Pearl (IP) est le rapport du nombre de grossesses non planifiées chez des femmes utilisant une méthode contraceptive sur le nombre de mois (cycles) exposés. Il est exprimé en % années-femmes, soit le pourcentage de grossesses survenues pour 100 femmes suivies pendant 12 mois. Ainsi un indice de Pearl à 0,1 % indique la survenue d’une grossesse parmi 1 000 femmes pendant un an.

• Plus l’IP est proche de 0, plus la méthode contraceptive est efficace.

LES TRAITEMENTS

LES TRAITEMENTS

PILULES ESTROPROGESTATIVES

On distingue plusieurs types de pilules estroprogestatives qui se différencient par :
Le type et la dose d’estrogène : les pilules estroprogestatives contenant une dose unitaire de 15 à 40 µg d’éthinylestradiol sont dites minidosées. Dernièrement, deux pilules contenant de l’estradiol, estrogène naturel, ont été mises sur le marché.
Le type de progestatif : la noréthistérone est un progestatif de 1re génération. Le lévonorgestrel et le norgestrel sont des progestatifs de 2e génération. Le désogestrel, le gestodène et le norgestimate sont des progestatifs de 3e génération. D’autres progestatifs dits de 4e génération, tels que la drospirénone, l’acétate de chlormadinone, le diénogest peuvent également être utilisés.
Le type d’associations :
Monophasique : estrogène et progestatif sont administrés à dose fixe pendant toute la durée du traitement.
Biphasique : il y a deux paliers pour la dose d’estrogène et de progestatif, soit deux types de comprimé.
Triphasique : il y a trois paliers pour la dose d’estrogène et de progestatif, donc trois types de comprimé.
Multiphasique : il y a plus de trois paliers pour la dose d’estrogène et de progestatif.


EFFICACITÉ INDICE DE PEARL : 0 À 0,07   %.



PRINCIPAUX EFFETS INDÉSIRABLES

Nausées, tensions mammaires, céphalées, migraines, prise de poids, acné, baisse de libido.
Risque d’accidents thrombo-emboliques veineux (phlébite, embolie pulmonaire) et artériels (AVC, infarctus du myocarde) rares mais graves. Le risque thrombo-embolique est une conséquence de l’effet des estrogènes. L’association de l’estrogène à un progestatif réduit l’effet prothrombotique de l’estrogène. Or, les progestatifs de 3e et 4e générations atténueraient moins cet effet prothrombotique que les progestatifs de 1re et 2e générations, d’où une majoration du risque de complications veineuses.

PRINCIPALES CONTRE-INDICATIONS

Risques vasculaires : thrombophilie biologique, antécédents personnels ou familiaux d’événements thrombo-emboliques veineux, d’affections cardiovasculaires artérielles (infarctus du myocarde, accident vasculaire cérébral ischémique, artériopathie oblitérante des membres inférieurs), hypertension artérielle, migraine avec aura, tabagisme important.
Tumeurs malignes du sein ou de l’utérus.
Troubles métaboliques : dyslipidémie, diabète mal équilibré ou compliqué.
Pathologies hormonodépendantes systémiques : lupus, syndrome des antiphospholipides.
Troubles hépatiques et biliaires (antécédents d’ictère cholostatique, lithiase).
Prise concomitante de millepertuis.


PILULES PROGESTATIVES

Les progestatifs oraux sont composés de doses faibles de progestatif de 2e génération (lévonorgestrel) ou de 3e génération (désogestrel). On parle alors de microprogestatifs ou de progestatifs microdosés.

EFFICACITÉ INDICE DE PEARL : 0,5 À 2   %.


PRINCIPAUX EFFETS INDÉSIRABLES

Métrorragies, spotting, aménorrhée.
Dystrophie ovarienne.

PRINCIPALES CONTRE-INDICATIONS

Accidents thrombo-emboliques veineux évolutifs.
Présence ou antécédent d'affection hépatique sévère, tant que les paramètres de la fonction hépatique ne sont pas normalisés.
Tumeurs malignes du sein ou de l’utérus.
Hémorragies génitales inexpliquées.
Prise concomitante de millepertuis.


CONTRACEPTIFS D’URGENCE


LÉVONORGESTREL


PRINCIPAUX EFFETS INDÉSIRABLES NAUSÉES, VOMISSEMENTS, PERTURBATIONS DU CYCLE, MASTODYNIES.


PRINCIPALES CONTRE-INDICATIONS HYPERSENSIBILITÉ AU LÉVONORGESTREL.


ULIPRISTAL ACÉTATE


PRINCIPAUX EFFETS INDÉSIRABLES TROUBLES DIGESTIFS, CÉPHALÉES, TENSIONS MAMMAIRES, VERTIGES, ASTHÉNIE.


PRINCIPALES CONTRE-INDICATIONS HYPERSENSIBILITÉ À LA SUBSTANCE ACTIVE OU À L'UN DES EXCIPIENTS.



PRINCIPALES INTERACTIONS AVEC LES CONTRACEPTIFS ORAUX

Principales interactions avec les contraceptifs oraux
En raison d’une diminution de l’efficacité contraceptive, l’association d’une contraception hormonale avec les traitements suivants est déconseillée :
- Les inducteurs enzymatiques (augmentation du métabolisme hépatique) : certains anticonvulsivants (phénobarbital, phénytoïne, phospho-phénytoïne, primidone, carbamazépine, topiramate) ; rifabutine ; rifampicine ; griséofulvine ; millepertuis (contre-indication).
- Certains inhibiteurs de protéases du VIH (par ex. ritonavir, nelfinavir, lopinavir, efavirenz et névirapine) : risque de diminution de l’efficacité́ contraceptive due à une diminution du taux d’estrogènes. Une contraception non hormonale devra être utilisée.
- Le modafinil : risque de diminution de l’efficacité contraceptive pendant le traitement et un cycle après l’arrêt du traitement par le modafinil.

• D’autres médicaments nécessitent des précautions d’emploi lorsqu’ils sont utilisés de façon concomitante avec les contraceptifs oraux :
- L’ulipristal : risque de diminuer l’efficacité contraceptive des contraceptifs hormonaux contenant un progestatif en se liant aux récepteurs de la progestérone avec une forte affinité.
- Les antiacides, les inhibiteurs de la pompe à protons, les antagonistes du récepteur H2 diminuent la concentration maximale de l’ulipristal (sans conséquences cliniques connues).
- Les topiques gastro-intestinaux et absorbants (charbon activé, charbon végétal, diosmectite, gel d’hydroxyde d’aluminium et de carbonate de magnésium, hydroxyde de magnésium, kaolin lourd, monmectite…) risquent de diminuer la résorption digestive. Espacer la prise de 2 heures.

PRÉVENIR L’IATROGÉNIE


LES QUESTIONS À SE POSER LORS DE LA DISPENSATION

Les questions à se poser lors de la dispensation


DANS QUEL CONdiv DE PRISE SE TROUVE LA PATIENTE ?

Dans quel condiv de prise se trouve la patiente ?
Première délivrance du contraceptif prescrit
– S’assurer de la bonne compréhension des modalités d’instauration de la contraception (prise le 1er jour des règles, avec la méthode « quick start » ou en enchaînement des plaquettes de contraceptifs différents), des modalités de prise (heure fixe, jours d’arrêt) et de la conduite à tenir en cas d’oubli (délai de rattrapage).
– Montrer la plaquette et visualiser les comprimés (actifs et inactifs).
– Informer sur les signes cliniques qui doivent alerter sur les effets indésirables graves (fiche ANSM-HAS « Vous et vos contraceptifs estroprogestatifs »).
– Informer de la possibilité d’utiliser une contraception d’urgence en cas d’oubli de pilule et de rapport sexuel non protégé.
Renouvellement
– Vérifier que l’utilisatrice connaît les dates de début et d’arrêt de son contraceptif.
– Faire un rappel des modalités de prise et de la conduite à tenir en cas d’oubli.
– Si le type de contraception ne semble plus adapté au mode de vie de la femme, ou si les oublis sont trop fréquents, l’informer de l’existence d’autres méthodes contraceptives et l’orienter vers une consultation.
Délivrance d’une contraception d’urgence
– Le rapport sexuel à risque a eu lieu il y a moins de 72 heures sous Norlevo ou moins de 120 heures sous Ellaone : 1 comprimé doit être pris le plus tôt possible.
– Surveiller l’arrivée des prochaines règles. En cas de retard de plus de 7 jours, réaliser un test de grossesse.
- L’utilisation répétée de la contraception d’urgence au cours d’un même cycle est possible, mais n’est pas recommandée.


QUEL ÂGE A LA PATIENTE ?

Quel âge a la patiente ?
– Les jeunes filles mineures âgées d’au moins 15 ans peuvent bénéficier de la délivrance des contraceptifs remboursables sans avance de frais et de manière confidentielle, sur présentation d’une prescription médicale.
– Les médicaments de contraception d’urgence peuvent être délivrés de manière anonyme, gratuite et sans prescription médicale aux jeunes filles mineures.


Y A-T-IL DES INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES ?

Y a-t-il des interactions médicamenteuses ?
– Certains médicaments interagissent en diminuant l’efficacité contraceptive : anticonvulsivants inducteurs enzymatiques (phénobarbital, phénytoïne, carbamazépine, topiramate), antibiotiques inducteurs enzymatiques, antirétroviraux inhibiteurs des protéases (ritonavir, nelfinavir, lopinavir, efavirenz, névirapine). La prise de millepertuis, inducteur enzymatique puissant, est contre-indiquée.
– Acétate d’ulipristal : diminution de l’efficacité des contraceptifs hormonaux habituels imposant une contraception mécanique pendant au minimum 14 jours après une prise d'ulipristal.


A DIRE AUX PATIENTES

A dire aux patientes
– Seul le préservatif est efficace pour se protéger des infections sexuellement transmissibles.
– A partir de 35 ans, la consommation de tabac est fortement déconseillée avec la prise d’un contraceptif hormonal.
– Consulter en urgence en cas de signes évocateurs de complications thrombo-emboliques (douleur et induration du mollet, dyspnée, douleur thoracique, troubles visuels et de la parole).

Les 3 niveaux d’action des contraceptifs hormonaux : - Axe hypothalamo-hypophysaire : l’abaissement des concentrations plasmatiques des gonadotrophines et la suppression du pic d’estrogène et du pic de LH aboutissent à une inhibition de l’ovulation. C’est l’effet antigonadotrope. - Endomètre : atrophie de la muqueuse endométriale qui devient impropre à la nidation. - Glaire cervicale : épaississement de la glaire cervicale qui devient imperméable à la migration des spermatozoïdes.

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