« Je voudrais quelque chose pour dormir » - Le Moniteur des Pharmacies n° 3133 du 18/06/2016 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 3133 du 18/06/2016
 

Expertise

DIALOGUE

Auteur(s) : Nathalie Belin

Seuls des troubles du sommeil d’installation récente dont la cause est identifiable relèvent de l’automédication et du conseil officinal. A vous de poser les bonnes questions.

1 Pour qui est-ce ?

UN HOMME DE 35 ANS : Je voudrais une boîte d’Euphytose.

LE PHARMACIEN : C’est pour vous ?

– Non, c’est pour ma femme. Elle est enceinte et dort mal en ce moment.

Les principaux médicaments ou compléments alimentaires à base de plantes à visée anxiolytique ou sédative sont déconseillés chez la femme enceinte ou ne sont pas recommandés par manque de données. Au cours de la grossesse, les mesures d’hygiène de vie sont à privilégier. Si un médicament est nécessaire, la doxylamine fait partie des hypnotiques privilégiés sur la durée la plus courte possible.

UNE FEMME D’UNE TRENTAINE D’ANNÉES AVEC UNE POUSSETTE : Auriez-vous un sirop pour dormir s’il vous plaît ?

LE PHARMACIEN : Oui mais… pour quiest-ce ?

– C’est pour mon fils de 3 ans. Il met un temps fou à s’endormir depuis plusieurs jours !

Les troubles du sommeil sont fréquents chez l’enfant et sont souvent la conséquence d’un changement de rythme de vie : déménagement, arrivée d’un nouvel enfant, entrée à l’école… Avant de proposer un complément alimentaire, il est indispensable de rappeler quelques règles : en plus des conseils d’hygiène classiques, l’instauration d’un rituel du coucher accompagné de gestes familiers reproduits chaque soir en présence d’un adulte (peluches, histoires, chansons, câlins…) est essentielle.

2 Quel est le condiv ?

M. DUPONT, 65 ANS : Je voudrais de la mélatonine… Il paraît que c’est sans effets secondaires ?

LE PHARMACIEN : Mais il me semble que vous êtes en train de diminuer les doses de votre hypnotique…

– Oui, justement ! Depuis trois jours je ne dors plus bien… C’est pour m’aider.

Il est fréquent qu’au cours du sevrage d’un hypnotique, les patients se plaignent d’un rebond d’insomnie qui peut durer quelques jours avant de s’atténuer. Il est impératif de contacter le médecin pour une réduction plus progressive de la posologie. Parallèlement, la prise de plantes anxiolytiques ou sédatives peut aider. Il faut éviter la mélatonine en association à un hypnotique sans avis médical.

UN HOMME D’UNE QUARANTAINE D’ANNÉES : Il paraît qu’il existe quelque chose contre le décalage horaire ?

LE PHARMACIEN : De la mélatonine, oui. Où partez-vous ?

– En Chine.

La mélatonine peut être utile lors de trajet de l’ouest vers l’est pour avancer l’heure du coucher et aider à s’endormir. Il faut alors la prendre vers 19-20 h (heure locale) durant les premiers jours. En sens inverse, la prise de mélatonine est plus délicate et peut perturber les cycles veille-sommeil.

3 Prenez-vous d’autres médicaments ?

UN HOMME DE TRENTE ANS : Je ne dors plus.

LE PHARMACIEN : Que vous arrive-t-il exactement ?

– Depuis que j’ai commencé mon traitement pour ma maladie de Crohn, je suis sous Entocort et je n’arrive plus à dormir… J’ai bien envie de l’arrêter !

Certains médicaments peuvent entraîner des insomnies : corticoïdes, antiparkinsoniens, anticholinestérasiques, certains bêtabloquants… Il ne faut en aucun cas arrêter le traitement par soi-même. Un avis médical est nécessaire. Pour le cas présent : réduire la posologie, changer de médicament, voire envisager la prescription d’un hypnotique sur une courte durée.

UN HOMME DE 60 ANS : Je n’arrive plus à dormir depuis quelques jours. Le décès d’un ami m’a complètement retourné ! Ma fille me conseille de prendre de la doxylamine. Vous connaissez ?

LE PHARMACIEN : Oui. Prenez-vous des médicaments par ailleurs ?

– Non… enfin juste pour ma prostate.

La doxylamine, comme tous les anti-H1, est contre-indiquée chez les patients souffrant d’un adénome de la prostate (risque de rétention urinaire). Des plantes à visée sédative, sous forme de gélule, sont à conseiller (éviter les tisanes afin de limiter les mictions nocturnes).

L’ESSENTIEL

L’insomnie est caractérisée par une série de symptômes parfois subjectifs comme les difficultés d’endormissement, les réveils nocturnes répétés, les réveils matinaux précoces. Les répercussions en journée sont fréquentes avec des somnolences, de la fatigue, des difficultés de concentration… L’étiologie est multiple : contrariétés, stress, irritabilité à l’environnement, arythmie veille-sommeil (décalage horaire, travail posté comme les trois « 8 »…).

Les traitements

ANTI-HISTAMINIQUES H1

Non phénothiazinique : doxylamine ; Phénothiaziniques : alimémazine et prométhazine.

• Pour qui ? L’adulte dans les troubles du sommeil, 5 jours maximum.

• Des effets indésirables ?

Somnolence diurne possible (réduire la posologie) ; effets anticholinergiques (constipation, sécheresse buccale, troubles de l’accommodation, palpitations cardiaques).

Pour les phénothiaziniques : effets extra-pyramidaux (agitation, troubles de la mémoire, confusion, vertiges, tremblements), hypotension orthostatique, troubles hématologiques.

• Quand les éviter ? Contre-indiqués en cas de troubles urétroprostatiques et de risque de glaucome aigu par fermeture de l’angle.

A éviter chez les personnes âgées (risque de chutes et effets atropiniques). Phénothiaziniques: antécédents d’agranulocytose.

• Des interactions ? Alcool et dépresseurs du SNC (majoration de la sédation) ; anticholinergiques (antidépresseurs imipraminiques, antiparkinsoniens…).

MÉLATONINE

La concentration maximale autorisée dans les compléments alimentaires est de 1 mg par prise. Son indication est limitée aux effets du décalage horaire (voyage vers l’est) et à l’amélioration de l’endormissement.

• Pour qui ? L’adulte. Utilisation ponctuelle ou sur une courte durée (15 jours à un mois).

• Des effets indésirables ? Si prise au mauvais moment ou pour une mauvaise indication, perturbation des rythmes biologiques.

• Quand l’éviter ? Au cours de la grossesse ou de l’allaitement. En l’absence d’efficacité après 3 jours, inutile de poursuivre les prises. Inefficace si les troubles du sommeil sont dus à l’anxiété, au stress.

• Des interactions ? Avec la fluvoxamine (augmentation des concentrations en mélatonine).

PLANTES

Sédatives et/ou anxiolytiques : valériane (efficacité proche d’un hypnotique faible), passiflore, houblon, mélisse, Escholtzia (ou pavot de Californie), ballote, aubépine…

• Pour qui ? Chez l’adulte et l’adolescent à partir de 12 ans et dès 1an pour certaines spécialités. Mélisse, verveine odorante, oranger, tilleul ont une efficacité bien établie et sont utilisables chez le jeune enfant. Utilisation sur quelques semaines maximum. Action progressive.

• Des effets indésirables ? Somnolence possible. La ballote pourrait être toxique pour le foie.

• Quand les éviter ? Au cours de la grossesse et de l’allaitement.

MESURES HYGIÉNODIÉTÉTIQUES

Ne pas prendre de stimulants (café, thé ou boissons à la caféine) les 4 ou 6 heures précédant le coucher, pratiquer une activité physique en journée, éviter les écrans avant de s’endormir, adopter des heures de coucher et de lever réguliers.

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