La clause de conscience - Le Moniteur des Pharmacies n° 3127 du 07/05/2016 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 3127 du 07/05/2016
 

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DROIT d’EXPRESSION

Auteur(s) : Anne-Charlotte Navarro

Le service Moniteur Expert donne cette semaine la parole à Dan Nahum, avocat au sein du cabinet ADN, spécialiste du droit du travail appliqué à l’officine. Il revient sur la question de la clause de conscience.

Un pharmacien peut-il objecter une clause de conscience pour refuser de délivrer la pilule du lendemain à une adolescente ?

Une pharmacienne adjointe refuse à plusieurs reprises de délivrer la pilule du lendemain à une jeune fille, préférant laisser une préparatrice traiter la demande. Pour justifier son refus, elle invoque sa liberté religieuse et son engagement antiavortement.

Son titulaire a procédé au licenciement devant les plaintes des patientes (dignité, discrétion et anonymat non respectés), décision contestée par ladite adjointe devant les tribunaux.

La liberté religieuse peut-elle l’emporter sur la nécessité de protection de la santé publique ? Le conseil de prud’hommes de Paris (25 janvier 2016) ne lui a pas donné raison. Le principe est que tout praticien (médecins, sages-femmes, pharmaciens) a le devoir de délivrer les médicaments prescrits.

Il existe néanmoins des exceptions prévues pour les médecins et sages-femmes qui peuvent refuser dans certains cas encadrés. Cependant aucune exception au Serment de Galien n’est prévue pour les pharmaciens. Ces derniers jurent en effet d’« exercer leur profession dans l’intérêt de la santé publique avec conscience et respect non seulement de la législation en vigueur mais aussi des règles de l’honneur, de la probité et du désintéressement ».

En matière d’interruption de grossesse, si les médecins, sages-femmes, infirmiers ou même les auxiliaires médicaux peuvent faire valoir une clause de conscience pour refuser un produit abortif (art. L. 2212-8 du Code de la santé publique), il n’en est donc pas de même pour les pharmaciens. Les juges ont d’ailleurs déjà affirmé que les convictions religieuses d’un pharmacien ne peuvent constituer un motif légitime de refus de vente de contraceptif (Cass. Crim., 21 octobre 1998, n° 97-80981).

Selon la Cour européenne des droits de l’homme, « dès lors que la vente du produit est légale, intervient sur prescription médicale uniquement et obligatoirement dans les pharmacies, les requérants ne sauraient faire prévaloir et imposer à autrui leurs convictions religieuses pour justifier le refus de vente du produit, la manifestation desdites convictions pouvant s’exercer de multiples manières hors de la sphère professionnelle » (arrêt du 2 octobre 2001).

Les deux seules justifications admises d’un refus de vente par un pharmacien sont l’absence du produit demandé en stock (Cour de Cassation, 16 juin 1981, n° 80-93379), et « lorsque l’intérêt de la santé du patient lui paraît l’exiger » (article R. 4235-61 du Code de la santé publique).

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