ACCORD ET DÉSACCORDS - Le Moniteur des Pharmacies n° 3112 du 23/01/2016 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 3112 du 23/01/2016
 
RÉGULATION DES PRIXDES MÉDICAMENTS

L’événement

Auteur(s) : François Pouzaud

Les industriels du médicament présentent la nouvelle convention signée avec le Comité économique des produits de santé (CEPS) comme « équilibrée ». Mais pour qui ? Les pharmaciens, eux, devront se montrer vigilants quant aux dispositions prévues sur la régulation des prix. Décryptage.

Ce qui est bon pour l’industrie pharmaceutique peut être, par effet ricochet, bon pour l’officine. » Philippe Gaertner, président de la FSPF, accueille avec prudence et une satisfaction mesurée l’accord-cadre conclu le 11 janvier entre Les Entreprise du médicament (Leem) et le CEPS. Plusieurs avancées figurent, en effet, dans ce div qui permet, moyennant des engagements réciproques, une stabilité des prix favorable à la fois aux industriels et aux officinaux.

Sans entrer dans le détail technique, Eric Baseilhac, directeur des affaires économiques et internationales du Leem, cite quelques exemples : le maintien de la garantie de prix européens pour les produits innovants (ayant obtenu une ASMR 1, 2, ou 3) pour une durée maximale de 5 ans, en contrepartie d’un engagement des industriels à fournir une étude d’impact budgétaire pour les nouveaux produits dont le chiffre d’affaires prévisionnel pourrait excéder 50 millions d’euros ou la création d’un « contrat de performance », qui lie la stabilité d’un prix négocié au départ aux « performances du médicament dans la vie réelle ».

Autre point souligné par Claude Le Pen, économiste de la santé : la notion de remises effectuées par les industriels au profit de l’Assurance maladie est établie, permettant de maintenir des prix nominaux élevés dont profitent à la fois les officinaux et les activités à l’exportation des industriels. Par ailleurs, l’accord prévoit une transformation des remises en baisses de prix des produits innovants à l’issue de la garantie de prix de 5 ans ou, à défaut, à l’issue d’une période de 3 ans suivant l’inscription d’un médicament au remboursement.

Fin des décisions arbitraires pour les génériques ?

Concernant les génériques, Eric Baseilhac signale que, « pour la première fois, des règles conventionnelles inscrites dans l’accord-cadre prévalent à la régulation de leurs prix. Auparavant, en comité de suivi des génériques, le CEPS pouvait édicter de nouvelles règles et les faire appliquer immédiatement. Dans le nouvel accord-cadre, ce comité est chargé d’organiser et de mettre en application les règles de l’accord conventionnel ».

Sinon, les missions du comité de suivi des génériques restent inchangées. Il peut notamment analyser et suivre le montant des remises accordées aux pharmaciens et en tirer des recommandations sur la modulation du plafond des remises. Pour Gilles Bonnefond, président de l’USPO, « cette dernière mission qui paraît ambiguë ne constitue pas une menace de remise en cause du plafond à 40 % ».

Gare à la nouvelle gouvernance !

Prévue dans l’accord, la création d’un organe de gouvernance, baptisé « comité de pilotage de la politique conventionnelle » (CPPC), est loin de rassurer les syndicats de pharmaciens. Cette instance permettrait aux industriels de prendre la main sur la politique de régulation des prix. Les pharmaciens n’étant pas présents au CPPC, Philippe Gaertner appelle à la plus grande vigilance, « d’autant que la lettre de mission adressée par les différents ministères au président du CEPS n’est pas encore connue ». Le président de la FSPF craint aussi que les discussions sur des contreparties ne relèvent pas forcément des mêmes approches entre l’industrie et l’officine : « Si l’on réduit ou limite la baisse des prix sur les princeps, le risque est d’aller chercher ailleurs l’économie, en particulier là où la contribution de l’officine est plus élevée. »

Eric Baseilhac tient à rassurer les officinaux : « Il ne devrait pas y avoir de mesures économiques concernant le médicament qui ne soient pas présentées au préalable au comité de suivi » – où sont présents les officinaux.

De son côté, Gilles Bonnefond juge « scandaleux » que la profession n’ait pas été associée à cette convention, alors que l’USPO avait demandé à être partie prenante dans les discussions portant sur des mesures ayant un impact direct sur l’économie de l’officine. « Après avoir été absente de la loi de santé, la pharmacie est absente de la politique globale de régulation des prix,du pilotage des génériques, des biosimilaires et du suivi de l’évaluation en vie réelle des médicaments », fustige Gilles Bonnefond.

Comprenant la crainte des syndicats, Claude Le Pen relativise la portée de cet accord-cadre et ses conséquences pour l’économie de l’officine. « Il n’est pas destiné à définir la politique du médicament mais à la mettre en œuvre, le comité de pilotage de la politique conventionnelle n’est pas une instance décisionnaire et, sur le fond, la politique des prix décidée par les pouvoirs publics continuera à s’appliquer. » maintient-il.

Si c’est un économiste de la santé qui le dit…

Le Gemme salue l’accord

Déléguée générale du Gemme, Catherine Bourrienne-Bautista note des points positifs : un div en phase avec le plan d’action de promotion des génériques signé par le CEPS, la création d’un groupe de pilotage des médicaments biosimilaires et l’accélération de leur inscription au remboursement… « Jusqu’ici, le générique servait essentiellement de variable d’ajustement et les laboratoires avaient assez peu de visibilité », souligne-t-elle. Autres avancées pour le Gemme : la prise en compte dans la politique de fixation des prix des investissements en développement ou production réalisés au sein de l’Union européenne, ou encore l’adoption de règles de tarification pour des spécialités dont les conditions en vigueur conduiraient à une impossibilité de développement de l’offre. « L’article 19 permet de développer une offre en produits compliqués à fabriquer ou en produits de niche, moyennant une décote moindre sur le prix industriel du générique », ajoute Catherine Bourrienne-Bautista, attendant néanmoins « la mise en œuvre du div ».

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