Les titulaires des petites officines sont les grands perdants - Le Moniteur des Pharmacies n° 3106 du 05/12/2015 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 3106 du 05/12/2015
 

Économie

Revenus

Auteur(s) : François Pouzaud

L’enquête économique de la FSPF montre une forte dégradation des revenus des titulaires d’officines réalisant un chiffre d’affaires inférieur à 1,2 M€. Mais, au-delà de ce seuil critique, le résultat courant avant impôt se maintient. Il augmente même légèrement pour les officines de plus de 2 M€.

Yves Marmont, président de la Fédération des centres de gestion agréés (FCGA), aime à le rappeler : la pharmacie reste l’activité qui a la meilleure rentabilité de tous les commerces et services étudiés par sa fédération. Et, dans le classement des TPE établi par la FCGA, les pharmaciens figurent toujours dans le haut du panier en termes de revenus.

La réalité des chiffres 2014 lui donne-t-il toujours raison ? Dans l’enquête économique de la FSPF, il n’y a en effet pas eu de grands remous au niveau de l’excédent brut d’exploitation (EBE), l’indicateur financier qui permet de mesurer la rentabilité.

Comme en 2013, cet EBE baisse cependant de 3 k€, pour s’établir à 155 k€ en moyenne. Un travail d’équilibriste d’autant plus méritant que les pharmaciens ont dû réaliser cette prouesse sans effets « amortisseur » de la convention. Corrélativement, le résultat courant avant impôt (RCAI), calculé uniquement à partir des bilans des entreprises à l’IR (impôt sur le revenu), baisse aussi de 3 k€ à 125 k€, soit un recul en moyenne de 2,26 %.

Exprimé par pharmacien, ce résultat accuse également en 2014 un recul de 2,26 % pour s’établir autour de 92 k€ dans un condiv de baisse modérée du CA (0,4 % en moyenne). Et c’est là toute la différence avec 2013 où, malgré une baisse du CA de 2,2 %, le résultat par pharmacien avait, au contraire, progressé de 0,2 % à 94,2 k€.

Au final, ce n’est pas tant la baisse moyenne du RCAI ou du résultat par pharmacien qui interpelle mais les disparités importantes entre officines qui se cachent derrière ces moyennes. Ainsi, 36,2 % d’entre elles enregistrent une baisse de plus de 10 % de leur RCAI.

La situation est dramatique pour les officines dont le CA est inférieur à 1,2 M€ (baisse du revenu de 7 %) pour ne pas dire catastrophique pour celles dont le CA est en dessous de 800 k€ et pour lesquelles la perte de revenus s’élève à 20 %. « Ces deux catégories représentent un tiers des pharmacies, soit près de 7000 officines qui connaissent une baisse significative de leurs ressources, très souvent des officines rurales, souligne Philippe Besset, vice-président de la FSPF. Leurs titulaires n’ayant plus la possibilité de réaliser des gains de productivité ont assumé sur leurs propres résultats les effets désastreux des baisses de prix. »

Un système de vases communicants

Depuis des années, la marge de dispensation sur le médicament remboursable ne fait plus le bonheur des pharmaciens. Ils misent davantage sur les prestations de services et remises octroyées sur les génériques. Dans les statistiques de Fiducial, la marge de dispensation décroît en moyenne de 429 137 € en 2013 à 425 749 € en 2014.

Cette perte de 0,8 % (– 3 388 €) est cependant compensée par la montée en puissance des prestations de services qui s’élèvent en moyenne à 51 854 € (+10 %, soit un gain de 4 752 € par pharmacie).

Une fois encore, les titulaires sont parvenus à préserver la marge, la rentabilité de leur officine, le résultat et leur rémunération grâce aux génériques, à une gestion défensive (diminution des investissements, maîtrise des charges externes et des frais de personnel) et au coup de pouce du CICE.

Et, pour 2015, même topo : la nouvelle rémunération du pharmacien est composée de multiples ingrédients avec une recette qui va évoluer dans le temps : une marge de dispensation sur le médicament remboursable dont le poids en valeur tend régulièrement à baisser, des rémunérations complémentaires dont la part au contraire tend à augmenter. La transition engagée déplace les repères, ce qui perturbe la lecture des comptes et donne des inquiétudes.

L’essentiel dans ce mouvement de vases communicants est qu’au final le pharmacien s’y retrouve et ne soit pas lésé financièrement. Suite au prochain épisode.

IL A CONTRIBUÉ À CE NUMÉRO

Olivier Delétoille, expert-comptable du cabinet AdequA

Olivier Delétoille Expert-comptable du cabinet AdequA

Mes quatre constats

2015 est une année charnière, et quatre constats peuvent être dressés :

Le premier : la rentabilité moyenne des officines est mise à mal avec la baisse des prix. Cette évolution est hétérogène, tant les exercices à l’intérieur du métier sont nombreux.

Le deuxième : sur le plan stratégique, deux modèles se dessinent, la pharmacie orientée sur les services et le soin aux patients, et celle sur la distribution aux consommateurs. Les implications de ces deux évolutions auront nécessairement des répercussions profondes sur l’avenir de la profession.

Le troisième : la profession n’est pas en crise, elle est en mutation, avec un avenir devant elle. De nombreux pharmaciens, acteurs de santé, l’ont compris et déploient des stratégies novatrices pour innover (regroupements, travail en réseaux, gestion optimisée, investissement dans les ressources humaines, élargissement de l’offre produits/services/conseil/relation…).

Le quatrième : les jeunes sont plus aguerris et optimistes, ne regrettent pas le modèle passé et sont tournés vers l’avenir. Ils accordent une importance beaucoup moins grande que leurs aînés à la capitalisation dans l’outil de travail. Ils ont compris depuis longtemps que la valeur de l’officine n’est plus un capital garanti attaché à des éléments protectionnistes (numerus clausus, monopole, propriété du capital), mais à d’autres actifs immatériels (emplacement, notoriété, typologie de la clientèle, compétence des équipes, organisation, marques, savoir-faire, spécialités…). Ils ont intégré que leurs revenus ne seront pas davantage valorisés, alors même qu’ils apporteront plus de valeur ajoutée au marché. Mais, dans ce nouveau condiv, l’intérêt, l’attractivité et les perspectives du métier seront nettement meilleurs.

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