L’OSTÉOPOROSE - Le Moniteur des Pharmacies n° 3103 du 14/11/2015 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 3103 du 14/11/2015
 

Cahiers Formation du Moniteur

ORDONNANCE

ANALYSE D’ORDONNANCE

Mme S., 67 ans, débute un traitement par Actonel

RÉCEPTION DE L’ORDONNANCE

Pour qui ?

Mme S., 67 ans.

Par quel médecin ?

Un rhumatologue.

L’ordonnance est-elle conforme à la législation ?

Oui.

QUEL EST LE CONdiv DE L’ORDONNANCE ?

Que savez-vous de la patiente ?

• Mme S. vient tous les mois chercher son traitement pour de l’arthrose au niveau des genoux. Elle prend parfois du paracétamol ou de l’ibuprofène en cas de crises douloureuses, et de temps en temps, un antiacide pour soulager un reflux gastro-œsophagien intermittent.

• Il y a 6 mois, elle est tombée en descendant du bus, alors que le véhicule était arrêté, et s’est fracturé l’humérus. Vous lui aviez délivré une attelle d’immobilisation prescrite par le médecin.

Quel était le motif de la consultation ?

Lors de son passage à l’hôpital suite à sa fracture, l’urgentiste a questionné Mme S. sur les circonstances de survenue de l’accident : la chute ne semblait pas « violente » au point d’expliquer la survenue de la fracture. L’urgentiste a donc recommandé à la patiente de faire un point auprès de son généraliste. Face au profil de la patiente (âge > 60 ans, faible indice de masse corporelle : IMC = 18,7), le médecin a soupçonné une ostéoporose. Le bilan biologique a révélé un dosage de la vitamine D à 30 ng/ml ; l’ostéodensitométrie a confirmé le diagnostic d’ostéoporose avec un T-score à - 2,6. Le médecin généraliste a orienté la patiente vers un rhumatologue.

Qu’a dit le rhumatologue ?

Le rhumatologue a expliqué qu’il était nécessaire de mettre en route un traitement afin d’éviter une nouvelle fracture. Il a expliqué qu’il s’agissait d’un traitement au long cours et a insisté sur la nécessité d’une bonne observance, indispensable à l’efficacité de l’antiostéoporotique.

Vérification de l’historique du patient

Outre les prises d’antiarthrosique et de paracétamol, l’historique indique des délivrances occasionnelles d’ibuprofène, de Gaviscon et de Xolaam.

LA PRESCRIPTION EST-ELLE COHÉRENTE ?

Que comporte la prescription ?

• Risédronate ou acide risédronique (Actonel) : antiostéoporotique de la famille des bisphosphonates qui agit en inhibant la résorption osseuse induite par les ostéoclastes.

• Colécalciférol ou vitamine D3 (Uvédose) : la vitamine D favorise la minéralisation osseuse en améliorant l’absorption du calcium au niveau de l’intestin et par action directe sur l’os.

Est-elle conforme aux référentiels ?

• Oui, après correction le cas échéant d’une carence vitaminocalcique, un bisphosphonate tel que le risédronate peut être indiqué en première intention.

• Le taux sérique de vitamine D recommandé est compris entre 30 et 70 ng/ml (75 à 175 nmol/ml). Un taux sérique trop bas favorise l’ostéoporose, or celui de madame S. est à la limite de la normale. La supplémentation prescrite a pour but de maintenir un taux sérique optimal. Cette supplémentation doit être associée à des apports calciques suffisants. Un questionnaire sur les habitudes alimentaires permet de les estimer. Mme S. n’a pas besoin a priori d’un complément médicamenteux.

Y a-t-il des médicaments à marge thérapeutique étroite ?

Non.

LES POSOLOGIES SONT-ELLES COHÉRENTES ?

• La posologie d’Actonel 35 mg n’est pas correcte (réponse 2). Le dosage à 35 mg doit être pris de façon hebdomadaire et non sur 2 jours consécutifs par mois, qui correspond au rythme d’administration d’Actonel 75 mg. La posologie d’Uvédose en « entretien » ou en traitement préventif est bien de 100 000 UI tous les 3 mois.

• Le pharmacien soupçonne une erreur d’inattention et décide d’appeler le médecin.

Y a-t-il des contre-indications ?

Non. Mme S. ne présente pas d’hypocalcémie ni d’insuffisance rénale sévère qui contre-indiqueraient le traitement par risédronate.

Y a-t-il des interactions médicamenteuses ?

Non, toutefois l’absorption des bisphosphonates peut être diminuée par l’alimentation et la prise simultanée d’autres médicaments. Mme S devra impérativement les prendre à distance du bisphosphonate.

La prescription pose-t-elle un problème particulier ?

Non, en dehors des modalités de prise particulières de l’antiostéoporotique. S’agissant d’un traitement instauré pour plusieurs années, il faudra aussi sensibiliser Mme S. à l’observance qui est capitale.

Le traitement nécessite-t-il une surveillance biologique particulière ?

Non.

QUELS CONSEILS DE PRISE DONNER ?

Modalités de prise

• Actonel 75 mg : les comprimés doivent être pris 2 jours consécutifs chaque mois, par exemple le 1er et le 2 de chaque mois. En raison du risque de diminution de son absorption, la prise du bisphosphonate doit se faire au moins 30 minutes avant le premier repas de la journée et/ou toute prise médicamenteuse. De plus, en raison d’un risque de lésions œsophagiennes, les comprimés doivent être avalés entier avec un grand verre d’eau et le patient ne doit pas s’allonger dans les 30 minutes suivant la prise.

En questionnant Mme S. sur ses habitudes concernant l’eau de boisson, celle-ci signale qu’elle ne boit que de l’eau minérale.

La prise du bisphosphonate doit se faire uniquement avec de l’eau plate peu minéralisée comme l’eau du robinet, éventuellement de l’eau de source (réponse 3). La prise de toute autre boisson (jus de fruits, café), y compris une eau minérale (riche en sels minéraux), est à proscrire car elle peut interférer sur son absorption.

• Uvédose : l’ampoule de vitamine D se prend pure ou diluée dans un peu d’eau.

Que faire en cas d’oubli ?

• Actonel 75 mg : le comprimé doit être pris le lendemain matin de la constatation de l’oubli à condition qu’il reste au moins 7 jours avant la prochaine prise mensuelle ; celle-ci doit être maintenue les jours initialement prévus. Dans le cas inverse, il ne faut pas rattraper l’oubli car il ne faut pas prendre plus de 2 comprimés dans la même semaine.

• Uvédose : la dose oubliée doit être rattrapée dès que possible.

La patiente pourra-t-elle juger de l’efficacité du traitement ?

L’objectif du traitement est de prévenir la survenue d’une nouvelle fracture. Une fracture survenant après au moins un an de traitement bien suivi fait évoquer un échec (et implique de vérifier l’observance, l’apparition d’une pathologie pouvant accélérer la perte osseuse, etc). Une ostéodensitométrie est parfois prescrite 2 ou 3 ans après le début du traitement afin de vérifier l’évolution de la maladie, évaluer l’efficacité du traitement mais surtout rassurer le patient et le motiver à poursuivre son traitement.

Quels sont les principaux effets indésirables ?

• Sous Actonel : des troubles gastro-intestinaux (constipation, dyspepsies…) et des douleurs musculosquelettiques peuvent survenir ; des irritations œsophagiennes sont rapportées essentiellement en cas de non-respect des bonnes conditions de prise et, rarement, des ostéonécroses de la mâchoire (ONM) et des fractures atypiques du fémur au long cours (survenant même en l’absence de traumatisme).

• Sous Uvédose : hypercalcémie, hypercalciurie et risque de lithiase calcique en cas de surdosage.

Quels sont ceux gérablesà l’officine ?

• Le respect des modalités de prise du bisphosphonate limite les effets indésirables œsophagiens. Les douleurs musculosquelettiques peuvent être soulagées par la prise de paracétamol.

• Un bilan dentaire est recommandé avant la mise en route du traitement. Par la suite, une bonne hygiène dentaire et un suivi buccodentaire annuel limite le risque d’ONM.

Quels signes nécessiteraient d’appeler le médecin ?

• Des douleurs musculosquelettiques et/ou des troubles digestifs importants peuvent nécessiter de réévaluer le traitement.

• Toute douleur et/ou inflammation dentaire doit orienter vers le chirurgien-dentiste. Toute douleur, faiblesse ou gêne au niveau de la cuisse ou dans la région de l’aine doit faire suspecter une fracture et conduire à une consultation médicale.

CONSEILS COMPLÉMENTAIRES

• Mme S. présentant un faible poids (IMC < 19), il peut être intéressant de la questionner sur ses habitudes alimentaires : « Comment vous nourrissez-vous ? Suivez-vous un régime particulier ? Vous arrive-t-il de sauter des repas…. » Lui recommander de consommer suffisamment de protéines, de limiter sa consommation d’alcool, dont les effets sur l’os sont délétères, et de consommer à chaque repas des aliments riches en calcium (produits laitiers, etc.).

• Encourager une activité physique régulière, adaptée à ses capacités (footing, tennis, marche à pied…) car elle freine la fonte musculaire, la perte osseuse et entretient l’équilibre.

DEMANDE DE LA PATIENTE

Vous revoyez Mme S. trois mois plus tard. Elle est gênée par son reflux gastro-œsophagien et vous demande une boîte de Gaviscon pour la soulager.

Le risque iatrogène d’irritations ou d’ulcérations œsophagiennes est rare sous bisphosphonates mais implique de vérifier les bonnes modalités de prise du traitement (réponse 3) : avec un grand verre d’eau sans s’allonger les 30 minutes qui suivent. Mme S respecte bien ces consignes. De plus, elle n’a pas constaté d’aggravation particulière des symptômes du RGO. Il est donc possible de lui délivrer l’antiacide en lui précisant de respecter un intervalle d’au moins 2 heures avec le bisphosphonate, et même d’éviter d’en prendre les jours de prise d’Actonel.

PATHOLOGIE

L’ostéoporose en 5 questions

L’ostéoporose est caractérisée par une diminution de la masse osseuse et une altération micro-architecturale du tissu osseux qui engendrent une fragilité excessive du squelette et, par la suite, une augmentation du risque de fractures.

1 COMMENT SE MANIFESTE L’OSTÉOPOROSE ?

• L’ostéoporose se caractérise par une diminution de la résistance osseuse conduisant à une augmentation du risque de fracture. Avant la survenue d’une fracture, la maladie ne donne lieu à aucun symptôme et peut rester longtemps silencieuse. Une perte de taille est le seul signe qui peut alerter et être la conséquence de fracture vertébrale.

• Une fracture ostéoporotique, encore appelée « fracture de fragilité », survient suite à un traumatisme léger, voire spontanément, en l’absence de tout traumatisme. Tous les os peuvent être le siège d’une fracture ostéoporotique à l’exception du crâne, des os de la face, du rachis cervical, des mains et des orteils. Les fractures les plus fréquentes touchent le poignet (« fractures sentinelles »), les vertèbres et le fémur.

Certaines sont considérées comme sévères car associées à une augmentation de la mortalité : fractures de l’extrémité supérieure du fémur, de vertèbre, du bassin, du fémur distal, du tibia proximal, de l’extrémité supérieure de l’humérus ou de trois côtes simultanées.

2 QUELLES SONT LES ÉTIOLOGIES ?

Ostéoporoses primitives

• Ce sont les plus fréquentes, liées à l’âge. Les femmes sont plus touchées en raison de la ménopause qui engendre une carence en estrogènes. Le risque de survenue d’une ostéoporose est d’autant plus important qu’il est associé à d’autres facteurs de risque : antécédents personnels ou familiaux de fractures, indice de masse corporelle (IMC) inférieur à 19 kg/m2, ménopause précoce (avant 40 ans). Chez l’homme, l’ostéoporose survient à un âge plus avancé ; les fractures restent deux fois moins fréquentes que chez les femmes.

• Hormis l’âge, d’autres facteurs favorisent l’ostéoporose : tabagisme, immobilisation prolongée, alcoolisme, alimentation pauvre en calcium, carence en vitamine D par manque d’exposition solaire.

Ostéoporoses secondaires

Elles surviennent à la suite de certaines pathologies ou traitements.

•  Pathologies : affections endocriniennes (hyperthyroïdie, hyperparathyroïdie, hypogonadisme), rhumatismes inflammatoires (polyarthrite rhumatoïde, spondylarthropathies), syndromes de malabsorption (maladie cœliaque, de Crohn), hépatopathies (cirrhose biliaire, hépatites chroniques), maladies génétiques (ostéogenèse imparfaite), anorexie.

•  Traitements. La corticothérapie par voie générale est la principale cause d’ostéopathie fragilisante. Elle est à l’origine de fractures, notamment vertébrales et costales. Le risque de fracture vertébrale, dose-dépendant, est multiplié par 5,2 pour une dose d’équivalent prednisone supérieure à 7,5 mg/j prise pendant au moins 3 mois ; il diminue dès le 3e mois après l’arrêt du traitement. Autres traitements en cause : inhibiteurs de l’aromatase, agonistes de la GnRH (gonadotrophin-releasing hormone), antiandrogènes, antiépileptiques, inducteurs enzymatiques qui augmentent le métabolisme de la vitamine D. Les patients épileptiques traités ont ainsi un risque de fracture de 2 à 6 fois plus important que dans la population générale.

3 COMMENT EST PORTÉ LE DIAGNOSTIC ?

L’ostéoporose peut être diagnostiquée dans les suites de la survenue d’une fracture ou, en l’absence de fracture, à l’occasion de l’évaluation de la densité minérale osseuse.

•  En l’absence de fracture : l’identification des sujets à risque repose sur une évaluation associant la mesure de la densité minérale osseuse (DMO) et la recherche des facteurs de risque fracturaire (voir ci-dessous) dans le but de corriger ceux qui sont modifiables.

•  Au stade de fracture, l’ostéoporose doit être évoquée devant une fracture survenant suite à un traumatisme de faible énergie (équivalent à l’énergie d’une chute de sa hdiv). La mesure de la DMO permet de confirmer la fragilité osseuse. Les facteurs de risque fracturaire sont évalués. Les fractures vertébrales ostéoporotiques passent inaperçues dans deux tiers des cas car peu ou pas douloureuses. Elles doivent être suspectées en cas de douleurs rachidiennes ou de perte de taille (> 4 cm par rapport à sa taille à 20 ans) ou au cours de pathologies chroniques à risque d’ostéoporose. Leur diagnostic repose sur la radiographie standard, examen de référence, ou Vertebral Fracture Assessment (VFA).

Mesure de la DMO

L’ostéodensitométrie par absorptiométrie biphotonique aux rayons X (DXA) est la technique de référence pour mesurer la DMO, laquelle permet d’estimer la diminution de la résistance osseuse. Le résultat est exprimé en T-score, écart entre la densité osseuse mesurée et la densité osseuse théorique de l’adulte jeune de même sexe, au même site osseux. L’ostéoporose est définie par l’OMS par une DMO inférieure d’au moins 2,5 déviations standard à la moyenne des adultes jeunes. L’augmentation du risque de fracture est corrélée à la diminution de la DMO.

Remboursement.

– En population générale, en cas d’antécédent de fracture personnel sans traumatisme majeur (vertébrale ou périphérique, évoquant une fracture ostéoporotique), en cas de pathologie ou traitement inducteur d’ostéoporose.

– Chez la femme ménopausée, dans les situations ci-dessus et en cas d’antécédents de fracture vertébrale ou du col fémoral sans traumatisme majeur chez un parent du 1er degré, d’IMC < 19 kg/m2, de ménopause avant 40ans, d’antécédent de corticothérapie prolongée.

Evaluation globale du risque fracturaire

• En plus de la mesure de la DMO, les autres facteurs de risque de fracture ou de chute sont évalués : âge, antécédents personnels de fracture (fracture de fragilité ou fractures survenues à l’âge adulte, ménopause précoce, carence vitaminocalcique, corticothérapie prolongée, tabagisme, consommation excessive d’alcool, IMC…), antécédents familiaux ; baisse de l’acuité visuelle, de l’audition, troubles neuromusculaires ou orthopédiques favorisant les chutes.

• L’outil FRAX-tool (Fracture Risk Assessment Tool), reprenant une partie de ces facteurs de risque, permet de quantifier le risque individuel sous forme de probabilité de fracture à dix ans. Le calcul de ce score est utile chez la femme ménopausée en cas de facteurs de risque d’ostéoporose et en l’absence d’indication thérapeutique évidente. Il permet de déterminer si un traitement spécifique est indiqué.

4 QUELS SONT LES EXAMENS COMPLÉMENTAIRES ?

•  Examens biologiques. Devant une DMO basse avec ou sans fracture, un examen biologique (hémogramme, vitesse de sédimentation, bilan phosphocalcique, vitamine D, fonction rénale, hépatique, thyroïdienne…) est réalisé afin d’éliminer une ostéoporose d’origine maligne (myélome, métastases osseuses…) ou métabolique (hyperparathyroïdie, ostéomalacie…).

•  Trabecular Bone Score (TBS). La DMO évalue la masse osseuse mais ne fournit pas d’information sur la qualité osseuse. Le TBS, établi en même temps que la DMO, reflète l’état structurel de la microarchitecture osseuse et permet d’améliorer la prédiction du risque fracturaire.

5 QUELLE EST L’ÉVOLUTION ?

• Les fractures sont à l’origine de douleurs, de déformations avec un retentissement important sur la qualité de vie des patients, et souvent l’entrée en dépendance.

Les fractures vertébrales sont responsables d’une perte de taille, de douleurs chroniques, d’une déformation en cyphose.

• Les fractures de l’extrémité supérieure du fémur en particulier, sont à l’origine d’un excès de mortalité.

THÉRAPEUTIQUE

Comment traiter l’ostéoporose ?

Le traitement de l’ostéoporose a pour but de prévenir la survenue de fractures. Il est proposé après évaluation individuelle du risque fracturaire et inclut, outre le traitement médicamenteux, des règles hygiénodiététiques et la prévention des chutes.

STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE

Mesures hygiéno-diététiques

Elles constituent un prérequis indispensable à l’instauration d’un traitement antiostéoporotique pour optimiser la prise en charge, au même titre que la prévention des chutes. Le maintien d’une activité physique est bénéfique pour l’os, de même que l’ensoleillement, qui permet la synthèse endogène de la vitamine D. Le régime alimentaire doit fournir des apports protéiques et calciques suffisants. Les régimes amaigrissants trop sévères doivent être proscrits, de même que la consommation excessive d’alcool et de tabac, qui sont néfastes pour l’os.

Vitamine D

Le taux sérique recommandé doit être compris entre 30 et 70 ng/ml (75 à 175 nmol/l). Un taux sérique bas est corrigé le plus souvent par un apport de colécalciférol ou vitamine D3 : 4 prises de 100 000 UI espacées de 15 jours si taux sérique < 10 ng/ml ; 3 prises espacées de 15 jours si taux sérique entre 10 et 20 ng/ml ; 2 prises espacées de 15 jours si taux sérique entre 20 et 30 ng/ml. En prophylaxie, l’équivalent d’une ampoule de 100 000 UI de colécalciférol tous les 3 mois (ou supplémentation en vitamine D de 800 à 1 200 UI/jour).

Calcium

L’efficacité du calcium seul dans la prévention du risque fracturaire n’est pas démontré. En revanche, tout déficit doit être corrigé dès lors qu’un traitement médical est envisagé. Les apports en calcium recommandés chez l’adulte sont d’environ 1 000 mg/jour et 1 200 mg/jour chez la femme ménopausée de plus de 50 ans ainsi que chez les hommes de plus de 65 ans. Il est recommandé de privilégier les apports calciques alimentaires. S’ils sont jugés insuffisants (évalués par des questionnaires), une supplémentation vitaminocalcique est prescrite.

Prévention des chutes

Elle est essentielle et passe notamment par le maintien d’un exercice physique, l’aménagement du lieu de vie, l’adaptation des traitements éventuels (hypotenseurs, hypnotiques…), la correction de troubles visuels ou orthopédiques (voir page 14).

Traitement médicamenteux

• Il a pour objectif de réduire le risque de survenue d’une fracture. Il n’est indiqué que devant un risque fracturaire élevé dont l’évaluation repose sur la mesure de la densité minérale osseuse (DMO), les antécédents de fracture sévère et la prise en compte des autres facteurs de risque de fracture, notamment par calcul du FRAX (voir page 7).

• En l’absence de fracture ostéoporotique, une DMO basse isolée n’est généralement pas suffisante pour instaurer un traitement sauf si le T-score est inférieur ou égal à - 3. Pour la HAS, un traitement n’est pas justifié en cas de T-score > - 2,5.

• Une fracture ostéoporotique sévère (fémur, humérus, bassin, vertèbres, 3 côtes simultanées, tibia proximal) nécessite dans tous les cas un traitement antiostéoporotique quel que soit le T-score.

• L’efficacité du traitement ne se manifeste qu’à long terme ; son intérêt doit être réévalué chez les patients dont l’espérance de vie est réduite. La durée du traitement dépend de l’âge, de l’évolution de l’ostéoporose, de sa tolérance, ainsi que de la rémanence d’effet après arrêt (1 à 5 ans pour les bisphosphonates ; nulle ou beaucoup moindre pour les autres traitements).

• La durée initiale recommandée pour une première séquence thérapeutique est généralement de 3 ans pour les traitements injectables (sauf le tériparatide) et de 4 à 5 ans pour les traitements oraux. L’importance d’une bonne adhésion au traitement doit être expliquée aux patients.

Ostéoporose postménopausique

•  Trois bisphosphonates (alendronate, acide zolédronique, risédronate) sont indiqués en première intention : ils ont montré un effet préventif pour réduire les fractures vertébrales et périphériques incluant celles du col du fémur. Selon la Haute Autorité de santé, le dénosumab est à utiliser en deuxième intention, en relais des bisphosphonates ou en cas d’intolérance.

•  Le raloxifène est indiqué et remboursé chez les patientes ménopausées de moins de 70 ans dans la prévention des fractures vertébrales pour lesquelles il a démontré son efficacité antifracturaire.

•  Le tériparatide est une option possible chez les femmes présentant déjà au moins deux fractures vertébrales. Le traitement est prescrit sur 18mois (voire 24 mois mais sans remboursement les 6 derniers mois), puis le relais est pris par le raloxifène ou un bisphosphonate.

•  L’estradiol est indiqué dans la prévention de la perte osseuse par carence estrogène chez les patientes ménopausées depuis peu et présentant des troubles climatériques, voire si intolérance ou échec des autres traitements.

Ostéoporose chez l’homme

L’alendronate, l’acide zolédronique et le risédronate ont une indication remboursable dans l’ostéoporose masculine. Le tériparatide peut être prescrit pendant 18 mois devant une ostéoporose sévère avec au moins 2 fractures vertébrales. Le dénosumab a une AMM chez l’homme en cas de cancer de la prostate avec castration chimique ou chirurgicale mais n’est pas remboursable dans cette indication.

Ostéoporose cortisonique

Chez les femmes ménopausées et les hommes de plus de 50 ans traités par corticoïdes pendant trois mois ou plus, une seule des conditions suivantes justifie l’introduction d’un traitement antiostéoporotique : posologie équivalente ou supérieure à 7,5 mg de prednisone, antécédent de fracture de faible traumatisme, âge supérieur ou égal à 70 ans, T-score ≤ - 2,5. L’acide zolédronique ou le risédronate et le tériparatide disposent d’une AMM dans cette indication. Chez les femmes non ménopausées et les hommes de moins de 50 ans, le traitement antiostéoporotique n’est pas systématique et son intérêt doit être évalué au cas par cas. En revanche, la prévention de l’ostéoporose cortisonique doit être systématique : recours à la plus faible posologie sur la durée la plus courte possible, préconisation d’une activité physique, sevrage du tabac et de l’alcool, apports calciques et en vitamine D suffisants…

TRAITEMENTS

Bisphosphonates

• Seuls l’alendronate, le risédronate et l’acide zolédronique ont fait la preuve de leur efficacité dans la prévention des fractures vertébrales et périphériques, dont celles du col du fémur, et sont recommandés à ce titre. L’étidronate (Didronel) et l’ibandronate (Bonviva) n’ont pas démontré leur efficacité dans la prévention des fractures non vertébrales. Les bisphosphonates ont une très forte affinité pour l’os ; environ 50 % de la dose administrée est séquestrée dans le tissu osseux pendant une longue période. Cette propriété permet leur administration à intervalles plus ou moins prolongés : quotidiens, hebdomadaires ou sur deux jours par mois. Une administration annuelle suffit pour l’acide zolédronique, ce qui simplifie le traitement mais peut compliquer la gestion des effets indésirables comme les ostéonécroses de la mâchoire (ONM).

• La prise concomitante d’aliments ou de minéraux, en particulier le calcium, réduit l’absorption des bisphosphonates par voie orale qui doivent être pris à jeun au moins 30 minutes avant un repas. Il ne faut pas s’allonger durant les 30 minutes qui suivent pour limiter le risque de lésions œsophagiennes.

Effets indésirables : principalement digestifs (diarrhée, constipation, nausées, gastralgie, etc.) et musculosquelettiques (douleurs articulaires et/ou musculaires) ; réactions cutanées possibles (prurit, urticaire voire angio-œdème) ; hypocalcémie et hypophosphatémie ; par voie orale, des dysphagies, œsophagites, érosions et sténoses peuvent être observées en cas de non-respect des modalités d’administration, et des ulcérations buccales sont décrites lorsque le comprimé séjourne longtemps dans la bouche. Avec l’acide zolédronique, des altérations parfois graves de la fonction rénale sont observées (notamment si âge avancé, prise de diurétiques, déshydratation), des cas de fibrillations auriculaires sont rapportés ; un syndrome pseudo-grippal est fréquent les 2 à 4 jours suivant la perfusion. Des cas d’ONM ont été rapportés chez des patients traités par bisphosphonates, le plus souvent en intraveineuse, et recevant par ailleurs un traitement anticancéreux. Les facteurs de risque d’ONM sont : une chimio- ou une radiothérapie, une corticothérapie, une mauvaise hygiène buccodentaire, le tabagisme. Pour limiter ce risque, il est recommandé d’effectuer un bilan buccodentaire avant traitement puis régulièrement et d’avoir une bonne hygiène buccale. Des cas de fractures atypiques du fémur sont rapportés (rares et survenant au long cours).

Interactions : par prudence, décaler les prises de 2 heures avec des médicaments contenant des ions polyvalents (magnésium, calcium, fer, aluminium, zinc, cuivre).

Dénosumab

• Le dénosumab (Prolia) est remboursé dans le traitement de l’ostéoporose postménopausique. Il est recommandé en seconde intention, en relais des bisphosphonates. Sa demi-vie longue permet une injection sous-cutanée tous les six mois.

• Le dénosumab est susceptible d’entraîner des hypocalcémies sévères, principalement au cours des premières semaines du traitement. La correction préalable d’une hypocalcémie préexistante est impérative et tout signe d’hypocalcémie (spasmes ou crampes musculaires, engourdissement ou picotements dans les doigts, les orteils ou autour de la bouche, convulsions, confusions, perte de conscience) impose un avis médical.

Effets indésirables : outre l’hypocalcémie, les plus fréquents sont les douleurs dorsales et musculosquelettiques. Des réactions d’hypersensibilité sont rapportées. Le risque infectieux pourrait être augmenté (urinaire, respiratoire, cutané, dont des cas de cellulite). Des ostéonécroses des mâchoires et des fractures atypiques du fémur (très rares) sont rapportées.

Raloxifène

Le raloxifène (Evista, Optruma) réduit l’incidence des fractures vertébrales, mais pas celle des fractures périphériques. Il a une AMM chez la femme ménopausée mais n’est remboursable que chez les patientes de moins de 70 ans ayant une ostéoporose rachidienne à faible risque de fracture du col du fémur, et sans facteurs de risque thromboembolique veineux.

Effets indésirables: Principalement troubles digestifs, bouffées de chaleur, crampes, œdèmes périphériques, surtout les premiers mois de traitement. Le raloxifène induit fréquemment une augmentation de la pression artérielle ; il augmente le risque de thromboses veineuses, principalement au cours des 4 premiers mois de traitement. Il doit être utilisé avec précaution en cas d’antécédent d’AVC ou de facteurs de risque d’AVC.

Interactions : avec la colestyramine qui réduit significativement son absorption.

Tériparatide

Le tériparatide (Forsteo) possède une indication remboursable dans le traitement de l’ostéoporose postménopausique et masculine, chez les patients ayant déjà eu au moins deux fractures vertébrales. Il s’administre en injection sous-cutanée quotidienne.

Législation : prescription par tout médecin sur une ordonnance de médicament d’exception.

Effets indésirables : troubles digestifs, céphalées, sensations vertigineuses, hypotension orthostatique (surtout en début de traitement), hypercholestérolémie, dépression. Des hypercalcémies, hyperuricémies et lithiases rénales sont également rapportées. Une méthode de contraception efficace est recommandée durant le traitement.

Traitement hormonal

Les œstrogènes entraînent une augmentation de la densité osseuse de 2 à 4 % au cours des 12-24 premiers mois qui se maintient ensuite en plateau. A l’arrêt du traitement, la densité diminue à nouveau. En l’absence d’hystérectomie, ils doivent être associés à un progestatif pour prévenir l’hyperplasie endométriale. Les associations œstroprogestatives se prennent par voie orale ; les estrogènes seuls peuvent également être administrés par voie percutanée (gel, patch).

Effets indésirables : céphalées, nausées, irritabilité, tension mammaire, augmentation du risque thromboembolique. Le rapport bénéfice/risque du traitement doit être réévalué régulièrement en tenant compte des risques de cancer du sein et de l’endomètre.

Autres traitements

Le ranélate de strontium (Protelos), du fait de manifestations d’hypersensibilité graves (syndrome de DRESS), d’événements thromboemboliques veineux et d’infarctus du myocarde, n’est plus remboursé dans le traitement de l’ostéoporose.

Perspectives thérapeutiques

•  L’abaloparatide, un nouvel analogue de la séquence active de la parathormone, comme Forsteo, a montré au cours d’un essai de phase III une action préventive sur les fractures vertébrales similaire à celle du tériparatide et une meilleure efficacité a priori sur les fractures périphériques (notamment celles du poignet).

•  Les anticorps antisclérotine : la sclérotine, synthétisée par les ostéocytes, inhibe l’activité des ostéoblastes.

Le romosozumab est un anticorps monoclonal qui bloque les effets de la sclérotine et augmente la formation osseuse. Des essais de phase III sont en cours.

•  L’odanacatib, un inhibiteur de cathepsine K, enzyme produite par les ostéoclastes, impliquée dans la résorption osseuse, est en cours d’étude avec la démonstration d’une efficacité antifracturaire (vertèbres, périphériques et col fémoral) au cours d’études de phase III.

ACCOMPAGNER LE PATIENT

Elisabeth, 63 ans

Je me suis fracturée le poignet gauche en chutant sur un sol glissant il y a 2 mois. Je savais que j’avais de l’ostéoporose mais je n’ai jamais pris le traitement qu’on m’avait prescrit. Je le trouvais trop contraignant. A la place, je me suis dit qu’il suffisait de beaucoup marcher, de faire attention à mon alimentation, mais cela n’a pas suffi. Après la fracture, je ne voulais pas de traitement mais la rhumatologue m’a expliqué que c’était nécessaire et qu’il existait des formes mensuelles. Et, finalement, c’est moins contraignant que ce que je pensais : il faut seulement ne rien avaler ni se recoucher les 30 minutes suivant la prise. Dommage qu’on me l’ait pas si bien expliqué la première fois ! »

L’OSTÉOPOROSE VUE PAR LES PATIENTS

Impact psychologique

L’ostéoporose étant une maladie silencieuse, beaucoup de patients n’ont pas conscience du risque fracturaire associé. En revanche, ceux qui ont déjà vécu une fracture appréhendent souvent une récidive. Cette peur peut conduire à un isolement, à un délaissement de certaines activités voire à un repli sur soi.

Impact physique

Les fractures qui compliquent la maladie sont parfois sévères et, pour certaines, associées à une surmortalité. Elles peuvent fortement altérer la vie quotidienne en étant responsables de déformations (dos voûté…), de handicaps et d’une perte d’autonomie.

À DIRE AUX PATIENTS

A propos de la pathologie

• L’ostéoporose est une maladie indolore mais qui expose à un risque de fractures graves, survenant même en l’absence de tout traumatisme. Néanmoins, il ne s’agit pas d’une fatalité : une prise en charge adaptée réduit le risque fracturaire ; les mesures d’hygiène de vie y tiennent une place essentielle.

•  Alimentation : elle doit être équilibrée, suffisamment énergétique pour lutter contre l’amaigrissement et riche en protéines et calcium : il faut se rapprocher d’un apport de 1 200 mg par jour en calcium. Les apports alimentaires, mieux tolérés, doivent être privilégiés : les produits laitiers en sont une bonne source ; ils apportent en outre des protéines, bénéfiques pour l’os et limitant la fonte musculaire. Les apports calciques alimentaires doivent être estimés avant toute prescription d’une supplémentation. Le plus souvent, il n’existe pas de carence d’apport calcique ou celle-ci peut facilement être corrigée. Une supplémentation en vitamine D peut en revanche être nécessaire, surtout chez les personnes âgées, par exemple lorsque l’exposition quotidienne à la lumière n’est pas suffisante (15 min par jour sur le visage et les avant-bras).

• Un sevrage tabagique et une consommation d’alcool maîtrisée (maxi 2 verres de vin par jour) sont recommandés car le tabac et l’alcoolisme sont corrélés à une diminution de la densité minérale osseuse.

• Activité physique : elle freine la perte osseuse, renforce les muscles et l’équilibre. Elle doit être régulière et adaptée. Des séances de kinésithérapie peuvent être utiles.

•  Prévention des chutes. Elle repose sur le maintien d’une activité physique, l’aménagement du domicile (suppression des tapis, amélioration de l’éclairage, pose de barres d’appui dans les toilettes et la salle de bains…), la réévaluation des traitements altérant la vigilance (hypnotiques, anxiolytiques, antidépresseurs…), la correction de l’acuité visuelle, la prise en charge des troubles neuromusculaires ou orthopédiques (chaussage adéquat…). Les protecteurs de hanche (coques garnies de mousse et généralement placées dans les poches de sous-vêtements adaptés), très peu pratiques, sont rarement utilisés.

•  Suivi médical : il est essentiel (tous les 6 à 12 mois) avec notamment la mesure de la taille.

A propos du traitement

Observance : évoquer les moyens pour se rappeler les jours de prise (calendrier, alarme sonore sur tablette/téléphone…). Vérifier régulièrement l’adhésion au traitement car il existe un risque de lassitude, d’autant plus que le patient ne peut pas réellement se rendre compte de l’efficacité. Inciter à parler des difficultés rencontrées car des alternatives thérapeutiques peuvent exister (injection tous les 6 mois…). Bisphosphonates. Administration : prise à jeun le matin avec un grand verre d’eau du robinet (ou eau de source), au moins 30 minutes avant toute prise alimentaire ou médicamenteuse. Précautions : ne pas s’allonger durant les 30 minutes qui suivent. Effectuer un contrôle dentaire si possible avant la mise en route du traitement puis une fois par an et maintenir une bonne hygiène buccodentaire (risque d’ONM, rare). Consulter rapidement un dentiste en cas de douleur, inflammation et/ou mobilité dentaire. Signaler toute douleur nouvelle ou inhabituelle au niveau de la cuisse, de la hanche ou de l’aine (suspicion de fractures atypiques). Interactions : sels de calcium, fer, aluminium, magnésium sont à prendre à au moins 2 heures de distance, ou, mieux, à éviter le jour de prise du bisphosphonate.

Raloxifène : toute douleur, lourdeur, gonflement de la jambe au repos doit faire suspecter une thrombose veineuse profonde. Arrêt du traitement en cas d’immobilisation prolongée.

Dénosumab : risque d’ostéonécrose de la mâchoire et de fractures atypiques du fémur (même précautions que bisphosphonate). Des symptômes évoquant une hypocalcémie doivent être rapidement signalés au médecin (raideur musculaire, paresthésies, spasmes, crampes).

Supplémentation calcique : troubles digestifs fréquents. Les prises fractionnées sont préférables car elles seraient mieux absorbées. Espacer les prises de 2 heures avec les fluoroquinolones ou les cyclines (risque de diminution de leur efficacité).

SUIVI ET PRÉVENTION

• Les patients à risque (ménopause avant 40 ans, faible poids, antécédent de fracture de la hanche chez le père ou la mère, corticothérapie au long cours, polyarthrite rhumatoïde…) doivent avoir un suivi médical régulier. Une perte de taille rapide ou importante (par exemple 4 cm ou plus par rapport à sa taille à 20 ans) fait suspecter une fracture vertébrale, parfois indolore.

• Dans tous les cas, les mesures d’hygiène de vie sont à encourager (voir page 14).

Délivreriez-vous ces ordonnances ?

ORDONNANCE 1 : OUI, mais Mme H doit absolument voir un dentiste avant l’injection de Prolia. Le dénosumab (Prolia) est un anticorps monoclonal inhibant comme les bisphosphonates la résorption osseuse et exposant tout comme eux à un risque d’ostéonécrose de la mâchoire. Tout symptôme buccal (mobilité dentaire, douleur, gonflement) doit amener le patient à consulter rapidement un dentiste. Si besoin, l’injection de Prolia sera différée.

ORDONNANCE 2 : OUI, sous certaines conditions. Le raloxifène est fréquemment responsable de crampes les premiers mois suivant l’instauration du traitement, mais il est également associé à un risque accru d’accident thromboembolique veineux. Pour cette raison, il est d’ailleurs nécessaire de stopper le traitement en cas d’immobilisation prolongée. Dans le cas présent, par prudence, mieux vaut orienter la patiente vers son médecin.

MÉMO-DÉLIVRANCE

SUPPLÉMENTATION VITAMINOCALCIQUE

Prérequis indispensable à l’efficacité d’un traitement antiostéoporotique, toute carence éventuelle en calcium et vitamine D doit être corrigée avant son instauration.

• Calcium : apports recommandés de 1 200 mg/jour après la ménopause et après 60 ans chez l’homme. Apports alimentaires (mieux tolérés) à privilégier (notamment produits laitiers, eau minérale riche en calcium) ; si jugés insuffisants (via des questionnaires), supplémentation calcique en prise fractionnée de préférence.

• Vitamine D : carence relativement fréquente par manque d’exposition solaire. Taux sérique recommandé : entre 30 et 70 ng/ml.

TRAITEMENT

Y a-t-il des médicaments à délivrance particulière ?

Tériparatide (Forsteo) : prescription par tout médecin sur une ordonnance de médicament d’exception. A noter : fournir des aiguilles type aiguilles pour stylo à insuline pour l’injection sous-cutanée.

Certains se conservent-ils au réfrigérateur ?

• Tériparatide, dénosumab (Prolia) : entre + 2 et + 8 °C.

• Dénosumab : conservation possible 30 jours à T < 25 °C.

Le patient connaît-il les modalités de prise des bisphosphonates par voie orale ?

• A jeun au lever, 30 minutes avant toute prise alimentaire ou médicamenteuse avec un grand verre d’eau plate peu minéralisée (pas d’eau minérale), sans se recoucher les 30 minutes suivantes. Selon les dosages, prise quotidienne, hebdomadaire ou sur 2 jours par mois.

• Ils sont à prendre à au moins 2 heures de distance des sels de fer, calcium, magnésium (ou sauter la prise de ces derniers).

Est-il sensibilisé aux effets indésirables ?

• Sous bisphosphonates et dénosumab : bilan dentaire préalable si possible, puis suivi dentaire 1 fois par an en insistant sur une bonne hygiène buccodentaire. Consultation devant toute douleur inhabituelle de la hanche ou de l’aine (fractures atypiques fémorales, rares). Paracétamol voire ibuprofène pour limiter le syndrome pseudo-grippal après perfusion d’Aclasta.

• Sous dénosumab : raideur musculaire, paresthésies, crampes (suspicion d’hypocalcémie) imposent une consultation médicale.

• Sous raloxifène : arrêt du traitement en cas d’immobilisation prolongée. Douleur, lourdeur, gonflement de la jambe au repos doit faire suspecter une thrombose veineuse profonde.

AUTRES MESURES

• Prévention des chutes : activité physique régulière, aménagement du domicile ; correction de l’acuité visuelle, des troubles neuromusculaires, orthopédiques.

• Conseils hygiénodiététiques : lutter contre l’amaigrissement ; encourager le sevrage tabagique, consommation modérée d’alcool (maxi 2 verres par jour).

LE CAS :

Mme S, 67 ans, est une cliente habituelle. Elle est sous Chondrosulf depuis un an pour de l’arthrose au niveau des genoux. Suite à une fracture de l’humérus il y a 6 mois, son médecin l’a orientée vers un rhumatologue pour passer une ostéodensitométrie. Mme S. se présente aujourd’hui à la pharmacie avec une ordonnance de ce dernier comportant notamment Actonel.

IMC (INDICE DE MASSE CORPORELLE)

Rapport poids (en kg)/taille (en m). Un adulte de poids corporel normal a un IMC compris entre 18,5 et 24,9. Un IMC <  9 est considéré comme un facteur de risque de fracture.

T-SCORE

Rapport entre la densité osseuse d’un patient mesurée par ostéo-densitométrie et la densité osseuse théorique d’un adulte jeune de même sexe, au même site osseux.L’ostéoporose est définie par un T-score ≤ - 2,5.

– Bonjour Dr R., je suis le pharmacien de Mme S. que vous avez vue pour la prise en charge de son ostéoporose. Vous avez indiqué sur l’ordonnance Actonel 35 mg, 2 comprimés par mois. Vouliez-vous lui prescrire Actonel 75 mg ?

– Ah oui, excusez-moi. Mon ordinateur était en panne hier après-midi et on a discuté des 2 possibilités avec Mme S., qui a finalement choisi une prise mensuelle, donc Actonel 75 mg. Pouvez-vous corriger l’ordonnance ?

– Bien entendu. Merci docteur. Bonne journée.

Qu’en pensez-vous ?

L’ordonnance présente-elle un problème de posologie ?

1) Non.

2) Oui, concernant Actonel.

3) Oui, la posologie de la vitamine D n’est pas adaptée.

Qu’en pensez-vous ?

La prise du bisphosphonate peut se faire :

1) Avec n’importe quel type d’eau.

2) Avec de l’eau ou un jus de fruits.

3) Avec de l’eau du robinet.

Qu’en pensez-vous ?

La prise de Gaviscon :

1) Est déconseillée chez cette patiente.

2) Ne pose pas de problème.

3) Est possible sous réserve de poserquelques questions à Mme S.

OSTÉONÉCROSE DE LA MÂCHOIRE (ONM)

Mise à nu osseuse de l’os de la mâchoire qui ne cicatrise pas dans un délai de 3 à 6 semaines chez un patient traité par bisphosphonates.

EN CHIFFRES

• Incidence en constante augmentation en raison du vieillissement de la population.

• En France, on estime que l’ostéoporose concerne environ 3 millions de femmes ménopausées.

• Environ 165 000 hospitalisations/an.

• Les fractures se répartissent essentiellement sur 3 sites osseux : vertèbres (65 000 nouveaux cas par an) ; extrémité supérieure du fémur (50 000 nouveaux cas par an) ; extrémité distale du radius (35 000 nouveaux cas par an).

• 15 % des hommes de plus de 50 ans sont concernés par l’ostéoporose.

OSTÉOGENÈSE IMPARFAITE

Affection génétique appelée aussi « maladie des os de verre ».

OSTÉOPATHIE FRAGILISANTE

Maladie caractérisée par une augmentation de la fragilité osseuse, avec ou sans déminéralisation.

Ex. : ostéoporose, ostéopathie maligne, ostéopathies métaboliques (ostéomalacie, hyperparathyroïdie).

Physiopathologie de l’ostéoporose

• L’os est un tissu vivant en perpétuel renouvellement. Le remodelage osseux est assuré par deux types de cellules : les ostéoclastes qui détruisent l’os ancien et les ostéoblastes qui assurent la formation du tissu ostéoïde. Il existe un équilibre strict entre ces activités de résorption et de formation sous l’influence de nombreux facteurs (vitamine D, hormones sexuelles, hormones thyroïdiennes…).

• Le squelette évolue avec l’âge. La masse osseuse augmente rapidement durant l’enfance et l’adolescence jusqu’à atteindre un pic, en partie déterminé par la génétique mais aussi influencé par la nutrition et l’activité physique. Ensuite, la perte osseuse physiologique débute dans les 2 sexes vers 40 ans. Chez la femme, elle s’accélère de façon importante lorsque débute la carence estrogène de la ménopause. En effet, les estrogènes contrôlent le remodelage osseux en diminuant la résorption osseuse et en augmentant l’ostéoformation. Après 8 à 10 ans, la perte osseuse ralentit et devient comparable à celle de l’homme (0,5 à 1 % par an). Dans les 2 sexes, on observe ensuite un excès de perte osseuse après 70 ans. Chez certaines personnes, cette perte est sans conséquence. Chez d’autres, elle peut être à l’origine d’une ostéoporose.

VERTEBRAL FRACTURE ASSESSMENT (VFA)

Evaluation morphologique du rachis effectuée par les appareils d’ostéo-densitométrie.

OSTÉO-DENSITOMÉTRIE

Habituellement réalisée en deux sites différents : rachis et col du fémur.

FRAX-TOOL

Questionnaire développé par l’OMS, mis à disposition des médecins sur Internet (par exemple sur grio.org).

TRABECULAR BONE SCORE (TBS)

Indice obtenu par réanalyse des niveaux de gris des images d’ostéo-densitométrie du rachis lombaire.

CE QUI A CHANGÉ

APPARU

Dénosumab (Prolia) : en 2012, anticorps monoclonal indiqué dans le traitement de l’ostéoporose chez les femmes ménopausées et les hommes à risque élevé de fractures.

DÉREMBOURSEMENT

Ranélate de strontium (Protelos) : déremboursement en juillet 2014 en raison d’un intérêt clinique insuffisant et d’effets indésirables graves (voir page 12).

VIGILANCE !!!

Les principales contre-indications des antiostéoporotiques sont : Bisphosphonates : insuffisance rénale sévère, hypocalcémie, grossesse, allaitement, maladie de l’œsophage, impossibilité de se tenir assis ou en position verticale pendant 30 minutes.

Dénosumab : hypocalcémie.

Raloxifène : femmes non ménopausées, antécédents thromboemboliques veineux, insuffisance rénale sévère, cancer de l’endomètre.

Tériparatide : insuffisance rénale sévère, hypercalcémie, grossesse, allaitement, métastases osseuses, antécédent de radiothérapie du squelette, maladie de Paget.

Traitement hormonal : antécédent de cancer du sein ou de tumeur œstrogénodépendante, affection hépatique, antécédent d’accident thromboembolique veineux ou artériel.

CELLULITE

Inflammation diffuse du tissu sous-cutané causée par une infection bactérienne.

FRACTURES ATYPIQUES DU FÉMUR

Fractures transverses ou obliques, souvent bilatérales, qui diffèrent des fractures du fémur classiques.

POINT DE VUE Dr Karine Briot, rhumatologue, hôpital Cochin, Paris, secrétaire du GRIO (Groupe de recherche et d’information sur les ostéoporoses)

« La tolérance générale aux traitements est très bonne »

Comment améliorer la prise en charge ?

Le pharmacien peut déjà avoir un rôle d’alerte et de repérage important. Je pense en particulier aux patients de plus de 50 ans qui ont eu récemment une fracture. On estime en effet que moins de 20 % des patients qui ont une fracture ostéoporotique sont dépistés et traités. Cela concerne le plus souvent les fractures peu sévères, comme celles du poignet ou de l’humérus. Une fois la fracture rétablie, les patients n’y pensent plus, voire ne la signale même pas à leur médecin. Or, cette fracture est l’occasion de faire un bilan pour dépister une éventuelle ostéoporose. On dispose et on connaît désormais des moyens efficaces, médicamenteux ou non, pour prévenir les fractures ostéoporotiques : il faut vraiment l’expliquer aux patients et les encourager à faire un point.

Et concernant l’observance ?

Les études montrent que 50 % des patients qui débutent un traitement par bisphosphonate l’arrête dans l’année qui suit. Les causes sont nombreuses : galénique mal adaptée, patient qui ne croit pas à l’effet du traitement, crainte des effets indésirables… En pratique, la tolérance générale des traitements est très bonne. Il faut signaler les troubles digestifs et les douleurs musculaires en début de traitement des bisphosphonates, le syndrome pseudo-grippal pour l’acide zolédronique, mais, pour le reste, il faut rassurer : les effets indésirables graves sont très rares. Il est important de régulièrement rassurer et convaincre le patient. Si un traitement lui a été prescrit, c’est qu’il est réellement utile.

Qu’en est-il des apports calciques ?

Il faut privilégier les apports alimentaires riches en calcium, également source de protéines essentielles au métabolisme osseux. Des études récentes suggèrent en effet une possible toxicité cardiovasculaire d’une supplémentation calcique médicamenteuse. Toute carence d’apport en calcium et de vitamine D doit dans tous les cas être corrigée avant l’instauration du traitement antiostéoporotique. C’est essentiel pour qu’il soit efficace.

SYNDROME DE DRESS

Réaction d’hypersensibilité médicamenteuse, d’évolution parfois fatale, se manifestant par une éruption cutanée généralisée, une fièvre élevée, des troubles hématologiques, une atteinte viscérale (hépatite, néphropathie interstitielle, pneumopathie).

PRODUITS LAITIERS

A titre d’exemple, un bol de lait, 30 g de gruyère ou 2 yaourts apportent chacun 300 mg de calcium. 4 portions par jour permettent d’atteindre les 1 200 mg recommandés.

ONM

Ostéonécrose de la mâchoire.

QUESTION DE PATIENTS Je n’aime pas le lait ni le fromage. Dois-je être supplémenté en calcium ?

Pas forcément. Certaines eaux minérales sont riches en calcium (Hépar, Contrex…) et on en trouve aussi en bonne quantité dans certains aliments : légumes verts (persil, cresson, épinard, fenouil, brocoli, chou…), légumes secs et fruits secs. Des questionnaires permettent d’évaluer vos apports et savoir si une supplémentation est nécessaire. Ils sont réalisés même lorsque la calcémie est normale car celle-ci ne reflète pas les apports calciques alimentaires, directement assimilables par l’os.

QUESTION DE PATIENTSY a-t-il des sports contre-indiqués et d’autres recommandés ?

Les activités pratiquées " en charge ", c’est-à-dire où tout le poids du corps est porté par les jambes (marche nordique, aérobic, step…), ainsi que celles faisant travailler l’équilibre (taï-chi, pilate, danse...), sont les plus adaptées. Aucun sport n’est réellement contre-indiqué, mais il faut éviter de débuter une nouvelle activité physique présentant des risques de chutes (ski, vélo…).

INTERNET

grio.fr

Groupe de recherche et d’information sur les ostéoporoses

Les recommandations, les questionnaires permettant d’évaluer les apports calciques journaliers, des conseils et fiches pratiques pour le grand public.

aflar.org

Association française de lutte antirhumatismale

Nombreuses informations et numéro d’écoute (0 810 43 03 43).

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