PAS DE DÉTENTE POUR LE MÉDICAMENT - Le Moniteur des Pharmacies n° 3089 du 11/07/2015 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 3089 du 11/07/2015
 
ÉCONOMIE OFFICINALE

L’événement

Auteur(s) : Loan Tranthimy*, François Pouzaud**

Cet été, les pharmaciens devront rester attentifs aux décisions gouvernementales car elles pourraient les fragiliser. A commencer par les mesures d’économies de l’Assurance maladie puis les baisses de prix envisagées par le Comité économique des produits de santé.

Adopté début juillet par le conseil de la CNAMTS, le rapport annuel « Charges et produits » de l’organisme liste des propositions d’économies qui permettront au gouvernement d’élaborer le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2016. Afin de respecter la progression de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM) fixée à 1,75 % et d’engranger 715 millions d’euros d’économies dès l’année prochaine, (soit près de 3 Md € sur trois ans), la CNAMTS appelle notamment à poursuivre les efforts en matière de prescription des médicaments et de développement des génériques. Elle rappelle que si les dépenses de médicaments en ville continuent à baisser (- 1,2 %), la prise en compte de la rétrocession hospitalière (prescrits à l’hôpital et délivrés en ville) fait grimper les dépenses de 5,5 %.

Pour les médicaments en ville hors rétrocession, elle note une décroissance de ceux à forts volumes (antihypertenseurs, antidépresseurs, IPP, hypolipémiants), sous l’effet conjugué de plusieurs phénomènes (chute du brevet, baisses de prix, développement des génériques…) et une importante progression des traitements dits de spécialités (cancer, VIH, DMLA…). « Ces médicaments sont le plus souvent prescrits, si ce n’est initié, par des médecins hospitaliers », note le rapport, qui signale aussi des prescriptions variables de médicaments dans le Répertoire et le non-respect des indications de l’AMM. Sans renoncer à toute action de contrôle sur les libéraux, l’Assurance maladie a particulièrement dans son viseur les prescripteurs hospitaliers. Prenant l’exemple des médicaments oraux contre le diabète de type 2, elle estime que leur dépense a bondi de 65,5 % à 631,5 M€ sur 2008-2013. Or le respect des recommandations de l’AMM lui permettrait de réaliser 82,1 M€ d’économies en un an, et à terme, 336 M€ en trois ans.

Le CEPS en embuscade après le 14 juillet

Si le rapport de la CNAMTS ne mentionne pas de baisse de prix contrairement à l’an passé, les mesures sur les prescriptions médicales risquent de peser sur l’économie officinale en 2016 si elles sont reprises par le ministère de la Santé à la rentrée. La maîtrise médicalisée et le contrôle renforcé des prescripteurs aboutissent souvent à la réduction du nombre de boîtes de médicaments vendues et du nombre de lignes sur les ordonnances. Or ces deux critères sont pris en compte pour les honoraires de dispensation des pharmaciens. « Notre nouvelle rémunération n’est pas du tout adaptée à cette évolution voulue par l’Assurance maladie. Elle dépend du volume et du nombre de lignes sur les ordonnances. Cela va nous pénaliser », déplore Gilles Bonnefond, président de l’USPO, qui réclame un accord tripartite sur les médicaments avec l’Etat et les médecins et de renégocier au plus vite la rémunération. De son côté, Philippe Gaertner, président de la FSPF, estime que « tout ce qui entraîne aujourd’hui une baisse de l’activité officinale est inacceptable. L’impact des mesures d’économies serait plus important si on était resté dans l’ancien mode de rémunération ».

Ce qui inquiète le plus la FSPF, ce sont les mesures de baisses de prix des génériques que devra annoncer le Comité économique des produits de santé (CEPS) vers la mi-juillet, applicables au 1er octobre. Coût pour l’officine, quelque 65 M€ rien qu’avec les nouveaux TFR (clopidogrel, buprénorphine…) et les mesures de convergence de prix entre princeps et génériques pour une même classe thérapeutique, sans compter les baisses de prix. Prenant l’exemple du clopidogrel menacé de TFR, Philippe Besset, vice-président de la FSPF, a calculé que la rémunération du pharmacien tomberait de 8,60 € à 3,56 € et qu’il faudrait une remise de plus de 40 % pour compenser cette perte.

Reçue le 1er juillet dernier à Matignon par Cécile Tagliana, conseillère santé du Premier ministre, la FSPF a fait savoir qu’elle s’opposerait à toute décision de baisse massive de tarifs non compensée. Le syndicat dénonce aussi le non-respect du principe d’égalité des marges (en valeur) entre princeps et générique, conclu au démarrage de la substitution. « Le deal de départ était de ne pas perdre de la rémunération sur la dispensation des génériques. Par conséquent nous demandons aujourd’hui à ce qu’elle devienne des honoraires conventionnels fixés au niveau du tarif initial en vigueur à la date de la générication du médicament », annonce Philippe Besset. Philippe Gaertner ajoute : « Le générique est un élément essentiel de notre économie. On ne pourra pas continuer à traiter la rémunération sans se préoccuper des mesures du CEPS. »

Ne rien perdre sur la ROSP des génériques

En attendant les arbitrages ministériels, les syndicats de pharmaciens sont déterminés à ne pas lâcher sur la négociation de la rémunération sur objectifs de santé publique des génériques (ROSP) 2016. « Il est hors de question de perdre le moindre centime sur son montant », martèle Gilles Bonnefond. Les bases de la négociation de septembre ont été posées: la ROSP pourrait être revalorisée en échange d’un taux national de substitution de 90 % l’an prochain et du codage des numéros RPPS des médecins hospitaliers. Les trois syndicats ont accepté de faire de nouveaux efforts sur le générique. « Si le CEPS ne fait pas n’importe quoi… », précise Philippe Besset. « Il faut relancer les volumes pour éviter les risques de TFR », complète Gilles Bonnefond.

Quant à l’UNPF, ce n’est pas tant l’objectif de substitution qui pose problème que la façon dont il est analysé. « Il faut être cohérent, si l’on sortait du calcul les taux de « non substituable » et de rupture, les substitutions chez les patients compliqués (traitements de substitution aux opiacés…), les chiffres de substitution seraient meilleurs de 8 à 15 points selon les régions », indique Eric Myon, vice-président de l’UNPF.

Trois mesures attendues pour l’officine

• Un nouvel avenant « asthme », à paraître en septembre, devrait relancer les entretiens pharmaceutiques, après un départ manqué en raison de conditions d’éligibilité des patients trop restrictives. Celles-ci vont être étendues à tous les patients chroniques (un patient est qualifié de « chronique » quand il a consommé au moins 3 boîtes de corticoïde inhalé dans l’année), soit un potentiel de 2,3 millions de patients contre 300 000 auparavant.

• Les anticoagulants oraux directs (AOD) intégrés aux entretiens pharmaceutiques, ce sera également chose faite à la rentrée, si tout se passe bien du côté de la Haute Autorité de santé (HAS) qui a deux mois pour statuer.

• L’avenant sur la dématérialisation de la gestion et du paiement des gardes et astreintes est, lui, attendu en août. F.P.

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