Le fœtus malade de la pollution

Deux médecins du CHU de Montpellier – Charles Sultan, responsable du service d’endocrinologie pédiatrique, et Nicolas Kalfa, chirurgien pédiatrique – viennent de présenter une étude qui établit un lien direct entre la pollution environnementale et l’hypospadias, malformation génitale des nouveau-nés. « Cette affection se traduit par un urètre qui ne va pas jusqu’au bout de la verge et nécessite une correction chirurgicale demandant parfois plusieurs interventions. Avec 3 cas pour 1 000 dans le monde, elle reste rare mais la progression est trop rapide pour être naturelle », observe Nicolas Kalfa.

Ces médecins ont coordonné une étude prospective, menée pendant cinq ans avec les CHU de Marseille, Nice et Bordeaux, sur trois cents cas inexpliqués d’hypospadias. Elle montre que le nombre de cas opérés en France augmente de 1 à 1,2 % par an. « Nous avons éliminé les anomalies génétiques pour ne retenir que les formes idiopathiques en travaillant sur les facteurs environnementaux », explique Charles Sultan.

Il ressort qu’une exposition fœtale significative – professionnelle ou environnementale – pendant le premier trimestre de la grossesse à des perturbateurs tels que des solvants, peintures, détergents, pesticides, cosmétiques ou produits chimiques industriels, soit 80 % des cas de l’étude, multiplie le risque d’hypospadias par trois. « Ce risque augmente en cas d’expositions multiples, dans un rayon de 3 kilomètres autour d’une décharge, d’un incinérateur ou d’une usine chimique par exemple », notent les médecins qui, forts de ces résultats, tirent la sonnette d’alarme auprès de toutes les instances.