Antidiabétiques ciblant la voie des incrétines - Le Moniteur des Pharmacies n° 3074 du 04/04/2015 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 3074 du 04/04/2015
 
PHARMACOLOGIE

Comptoir

Auteur(s) : Denis Richard

Les gliptines et les analogues GLP-1 constituent des moyens thérapeutiques supplémentaires de prise en charge du diabète de type 2 essentiellement, en cas d’échec ou de contre-indications des thérapies « traditionnelles ».

Polypeptides issus du clivage du proglucagon et ayant une action hormonale et neurotransmettrice, les incrétines sont sécrétées par les cellules endocrines de l’intestin. On distingue :

• le GIP (glucose-dependent insulinotropic polypeptide), d’action trop peu spécifique pour être utilisé en thérapeutique ;

• le GLP-1 (glucagon-like peptide-1), à l’origine du développement d’antidiabétiques.

Les incrétines se lient à des récepteurs spécifiques (GIPR et GLP-1R) exprimés dans de nombreux tissus (pancréas, estomac, muscles, cœur, poumons, cerveau, tissu adipeux, os). Elles sont dégradées par une enzyme, la dipeptidylpeptidase4 (DPP-4), exprimée sur les membranes cellulaires ou libre dans le plasma.

Action sur le métabolisme glucidique

• Les incrétines sont libérées dans les minutes suivant l’arrivée dans la lumière intestinale d’aliments énergétiques (glucides, lipides) mais aussi de fibres et d’acides aminés. Elles gagnent la veine porte par les capillaires mésentériques, puis le pancréas.

• Leur action cible plusieurs étapes du métabolisme glucidique :

– elles stimulent la sécrétion d’insuline glucose-dépendante (de + 50 à 70 % chez un sujet sain) uniquement lorsque la glycémie est élevée, ce qui limite le risque d’hypoglycémie (« effet incrétine » ou « insulinotrope ») ;

– elles freinent la vidange gastrique et la sécrétion d’acide gastrique, ce qui réduit la sensation de faim (effet satiétogène) ;

– le GLP-1 inhibe de plus la sécrétion de glucagon hyperglycémiant.

• Le diabète de type 2 s’accompagne d’une réduction de l’« effet incrétine » : un pic insulinique insuffisant et retardé explique l’hyperglycémie postprandiale, d’où les approches thérapeutiques ciblant la voie des incrétines :

– les inhibiteurs de la DPP-4 (gliptines) qui inhibent le métabolisme des incrétines et renforcent le tonus insulinosécréteur ;

– les analogues du GLP-1 (incrétinomimétiques) qui miment l’effet de ce dernier tout en résistant mieux à la dégradation par la DPP-4.

• L’ANSM rappelle que ces médicaments constituent des moyens thérapeutiques supplémentaires de normalisation de la glycémie grâce à leur action spécifique. Des incertitudes sur certains de leurs effets indésirables (rares) expliquent qu’elles soient indiquées actuellement en cas d’échec ou de contre-indication des thérapies traditionnelles et essentiellement pour permettre de répondre à des situations spécifiques (sujet âgé par exemple).

Gliptines

• Les inhibiteurs de la DPP-4 forment la famille des gliptines : saxagliptine (Onglyza, in Komboglyze), sitagliptine (Januvia, Xelevia, in Janumet et Velmetia) et vildagliptine (Galvus, in Eucreas). Elles s’administrent en une prise quotidienne, sauf la vildagliptine (2 fois par jour).

• Les gliptines sont essentiellement indiquées en bithérapie, en association avec la metformine. Chacune est d’ailleurs commercialisée en association fixe avec la metformine (Eucreas, Janumet, Komboglyze, Velmetia). Elles ont également une AMM en association à un sulfamide hypoglycémiant ou à une insuline.

• Elles sont aussi indiquées en trithérapie (avec metformine + sulfamide hypoglycémiant).

• Sitagliptine et vildagliptine peuvent être prescrites en monothérapie si la metformine est contre-indiquée ou mal tolérée : elles ne sont alors pas remboursées.

• Pour la HAS (2013), les gliptines constituent une alternative aux sulfamides, en association à la metformine, notamment chez le sujet de plus de 75 ans, chez qui le risque d’hypoglycémie est particulièrement à craindre.

• La linagliptine (Trajenta) a bénéficié d’un avis favorable de la Commission de la transparence en 2012 ; l’alogliptine (Vipidia, in Vipdomet) est également en attente de commercialisation.

Analogues du GLP-1

• Les analogues du GLP-1 sont des agonistes du récepteur GLP-1 : ces incrétinomimétiques accroissent notamment l’insulinosécrétion et inhibent la sécrétion de glucagon. Leur utilisation n’est pas recommandée chez le sujet âgé du fait d’une expérience clinique limitée.

• Exénatide (Byetta) ou liraglutide (Victoza) s’administrent par voie sous-cutanée (stylos injecteurs) en association à la metformine et/ou à un sulfamide hypoglycémiant lorsque ces traitements ne permettent pas d’obtenir un contrôle glycémique adéquat aux doses maximales tolérées. Ils ont notamment un intérêt lorsque le contrôle du poids est une priorité : IMC ≥ 30 ou en alternative à l’insuline (qui a tendance à favoriser la prise de poids). L’association à un sulfamide implique généralement une réduction de posologie de ce dernier pour éviter tout risque d’hypoglycémie.

• Une présentation LP d’exénatide (Byduréon) est en attente de commercialisation : elle limite les injections sous-cutanées à une seule par semaine (contre 2 par jour Byetta). Le dulaglutide (Trulicity), bénéficiant d’une AMM européenne, devrait être disponible à terme en France.

• Elargissant le champ de l’action incrétinomimétique, Saxenda (liraglutide) bénéficie d’un avis favorable européen (janvier 2015) dans le contrôle du poids chez l’adulte obèse ou en surpoids (avec alors au moins une complication). Xultophy, association fixe de liraglutide et d’insuline dégludec, bénéficie d’une AMM européenne.

Sources : « Stratégie médicamenteuse du contrôle glycémique du diabète de type 2 », HAS et ANSM (2013) ; « Point d’information sur le risque pancréatique chez les patients diabétiques traités par les incrétinomimétiques », ANSM (2013).

QUELLE IATROGÉNIE POUR LES INCRÉTINES ?

• Gliptines. La iatrogénie est dominée par des signes digestifs transitoires (nausées, douleurs coliques, diarrhées), des étourdissements, des signes cutanés, infectieux (rhinopharyngite voire infections urinaires) et des signes rhumatologiques (arthrites). Une insuffisance hépatique contre-indique la vildagliptine. L’administration de saxagliptine ou de sitagliptine n’est pas recommandée en cas d’insuffisance hépatique sévère.

Les gliptines peuvent être administrées en cas d’insuffisance rénale mais la posologie doit être réduite de moitié si la clairance à la créatinine est inférieure à 50 ml/min.

Le plan de gestion des risques des gliptines intègre notamment le suivi des troubles gastro-intestinaux, infectieux, neurologiques, psychiatriques, rhumatologiques et cutanés. Une surveillance renforcée porte sur le risque potentiel de pancréatite, voire de cancer du pancréas.

• Agonistes GLP-1. Les effets indésirables majoritaires sont dominés par les signes digestifs (nausées, vomissements, diarrhées). Les hypoglycémies ne s’observent pas lors de l’association à la metformine mais uniquement en cas d’association aux sulfamides ou aux glinides (ou à l’insuline).

L’exénatide (Byetta) est contre-indiqué en cas d’insuffisance rénale sévère et son usage doit être prudent en cas d’insuffisance rénale modérée. Le liraglutide (Victoza) n’est pas recommandé chez le patient présentant une insuffisance rénale modérée ou sévère.

Le plan de gestion des risques des agonistes GLP-1 comprend des études observationnelles visant notamment à apprécier le risque de pancréatite, de cancer pancréatique et de cancer thyroïdien. Dans l’attente de preuves épidémiologiques robustes, il faut noter que le diabète est en lui-même une maladie à surrisque de cancer pancréatique, et que les nouveaux antidiabétiques restent des moyens thérapeutiques supplémentaires, proposés en seconde ligne, notamment en cas d’échec ou de contre-indication aux traitements conventionnels.

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