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TRANSACTIONS
Auteur(s) : François Pouzaud
La loi Hamon oblige depuis le 1er novembre 2014 tout dirigeant d’entreprise à informer ses salariés d’un projet de cession. Si le texte reste flou, il suscite également des interrogations. Annie Cohen-Wacrenier, avocat du cabinet ACW Conseil, analyse cette mesure. Et fait part de ses réserves.
Annie Cohen-Wacrenier : Le titulaire qui décide de vendre son fonds de commerce ou plus de 50 % des parts qu’il détient dans le capital de sa société est tenu d’en informer ses salariés, qui peuvent, individuellement ou collectivement, formuler une offre de reprise. Cette information doit intervenir au moins deux mois avant la date de réalisation de la cession. L’employeur dispose alors d’un délai de deux ans pour réaliser la cession envisagée, voire une autre cession, sans qu’il soit nécessaire d’informer à nouveau les salariés. Tout manquement à ce devoir d’information est sanctionné par la nullité de la cession. Cette possibilité n’est ouverte qu’aux salariés de l’entreprise, dans un délai de deux mois à compter de la publication de la vente au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales (BODACC).
Dans le cadre d’une cession de parts, il conviendra, postérieurement à la réalisation de la cession, de procéder à une nouvelle notification auprès des salariés, afin de faire courir le délai de recours ouvert aux salariés.
Effectivement, un salarié pourra difficilement se déclarer intéressé par une reprise d’entreprise s’il n’a pas eu connaissance auparavant des informations comptables et financières, mais seulement deux mois avant la cession. Nous pouvons craindre qu’il se développe un contentieux devant les tribunaux sur ce terrain.
Supposons que le vendeur ait déjà accepté une offre d’achat d’un acquéreur présenté par une agence de transaction et qu’un compromis ait déjà été signé. Quid de la commission pour le cas où – même improbable – le titulaire accepterait l’offre d’un salarié ? Qu’advient-il également de l’acquéreur « évincé » ? A-t-il vocation à être indemnisé ? A l’évidence, les stipulations du contrat de vente doivent envisager cette hypothèse. Les parties peuvent ainsi convenir que l’acceptation de l’offre d’un salarié libère les parties de toute obligation, sans dédit ni commission pour qui que ce soit. Mais il est peu probable que cette solution soit à la convenance d’un éventuel acquéreur. La décision du titulaire peut aussi s’analyser comme une renonciation à vendre, auquel cas il serait contraint de payer un dédit à l’acquéreur évincé (en général 10 % du prix de vente). Il est donc important de veiller à intégrer des conditions suspensives si le vendeur signe un compromis de vente avec un futur acquéreur avant d’en informer les salariés.
Si le mandat de vente est exclusif, la commission est due. Dans ce cas, il est fortement conseillé au titulaire d’informer les salariés intéressés par la reprise de l’obligation de régler la commission d’agence. S’il s’agit d’un mandat non exclusif, le titulaire, s’il conserve la possibilité de vendre « par lui-même », est toutefois engagé par la signature du compromis ou d’une offre d’achat. Dans cette hypothèse, on peut considérer que la commission d’agence est également due, mais par le titulaire, car sa renonciation à vendre s’analyserait alors comme un dédit.
Certains titulaires refusent d’informer les salariés avant la signature de l’acte de vente sous la seule condition suspensive de l’inscription du nouveau titulaire à la section A. A ce stade, ni le vendeur ni l’acquéreur ne disposent plus de la faculté de renoncer à vendre ou à acheter, s’agissant d’une vente ferme. Dès lors, quand bien même un salarié formulerait une offre de reprise, techniquement, le vendeur n’est plus en mesure de lui vendre son officine ou ses parts !
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