FACTURER OU NON LES HONORAIRES - Le Moniteur des Pharmacies n° 3063 du 17/01/2015 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 3063 du 17/01/2015
 
MÉDICAMENTS SANS ORDONNANCE

L’événement

Auteur(s) : Anne-Charlotte Navarro

Faute de textes réglementaires, la facturation de la nouvelle rémunération aux patients dans le cadre des médicaments remboursables non prescrits reste floue.Y a-t-il des risques à l’appliquer?

Depuis le 1er janvier 2015, l’application de la nouvelle rémunération des pharmaciens pour les médicaments remboursables prescrits se passe sans heurts malgré quelques couacs (lire « Doliprane : pourquoi ces écarts de prix ? » p. 9). Concernant les médicaments remboursables non prescrits, les règles du jeu restent floues.

La nouvelle rémunération s’applique-t-elle aux ventes directes sans ordonnance ? Cette question n’est pas anodine. Elle a été soulevée lors du dernier comité de liaison entre l’Assurance maladie et les syndicats de pharmaciens en décembre par l’UNPF, un syndicat de pharmaciens non signataire du div conventionnel. Selon Jean-Luc Fournival, président de l’UNPF, « aucune garantie juridique n’a été obtenue quant à l’application des honoraires de dispensation pour les médicaments remboursables non prescrits ». « Nous avons demandé le report de trois mois pour permettre la publication de tous les divs. Mais notre demande n’a pas été entendue », dit-il.

La revendication de l’UNPF, rejointe par l’USPO, n’est pas sans fondement. En effet, l’avenant conventionnel signé le 21 mai entre l’Assurance maladie et la FSPF ainsi que l’arrêté d’approbation publié au Journal officiel le 2 décembre précisent bien que deux conditions sont nécessaires pour l’application des honoraires qui valorisent le travail de vérification et de conseil associé à la dispensation des pharmaciens : des « médicaments remboursables » et « l’exécution d’une prescription ». Concernant les médicaments non prescrits, le div se contente seulement d’indiquer dans le préambule que « les évolutions attendues devront également […] appliquer l’honoraire de dispensation aux médicaments remboursables de prescription médicale facultative dans les cas où ils ne font pas l’objet d’une prescription ». De quelles évolutions parle-t-on ?

Une pratique illégale en l’absence d’un div réglementaire ?

Selon Guillaume Fallourd, avocat spécialisé en droit pharmaceutique, cette « déclaration d’intention » ne permet pas aux pharmaciens d’appliquer les honoraires de dispensation pour ces médicaments en l’absence d’un div réglementaire. Contactée à multiples reprises, l’Assurance maladie se contente de renvoyer sur la base publique des médicaments. Le site indique bien que « la réforme s’applique à l’ensemble des médicaments remboursables qu’ils aient été prescrits ou non ». Interrogé sur ce vide juridique, Philippe Gaertner, président de la FSPF, se veut rassurant en considérant que l’information qui figure sur la base publique est « conforme à ce qui a été négocié avec l’Etat ». « S’il n’y avait pas ces éléments économiques d’équilibre indispensable, la FSPF n’aurait pas signé l’avenant conventionnel », ajoute-il. Le syndicaliste assure également que la base publique du médicament, qui affiche aujourd’hui un prix hors honoraires de dispensation pour chaque médicament, devra évoluer avant la fin du premier semestre pour n’afficher que les prix totaux incluant les honoraires de dispensation. Mais pour Gilles Bonnefond, président de l’USPO : « On est en train de mettre les pharmaciens en difficulté vis-à-vis des patients et on ne les protège pas des baisses de prix. »

En attendant, en pratique, rares sont les pharmaciens qui n’appliquent pas ces honoraires de dispensation, d’autant plus que les logiciels ont été paramétrés pour leur permettre de les prendre.

Denis Supplisson, directeur général de Pharmagest, éditeur de logiciels, précise au Moniteur que les pharmaciens ont la main pour ne pas les facturer. « Il leur suffit de décocher une case », explique-t-il, en reconnaissant néanmoins « qu’aucun de ses adhérents ne s’est jusqu’à présent interrogé sur cette option ». Pour Jean-Luc Fournival, les pharmaciens n’ont pas aujourd’hui le choix : « Si les pharmaciens ne les prennent pas, ils risquent de perdre de 10 000 à 12 000 euros en moyenne sur le paracétamol », dit-il en ajoutant que « pour le moment, beaucoup de confrères sont plutôt tentés de faire du discount sur ces produits pour capter le flux, mais c’est une erreur ». Face à cette facturation des honoraires lors de ventes directes, plusieurs avocats, dont Guillaume Fallourd, préviennent : « Les pharmaciens s’exposent à des recours des consommateurs et éventuellement devant l’Ordre des pharmaciens. »

Informer le consommateur avant tout paiement

Afin de limiter les litiges, il est indispensable de respecter la législation en vigueur sur l’affichage des prix des médicaments prévue par le Code de la consommation. Il est primordial d’indiquer clairement cette condition de vente à proximité des caisses, et dans le rayon ou sur la boîte de médicament. Le consommateur doit savoir, avant le paiement, le prix du produit sans les honoraires et le montant de celui-ci, en attendant la publication d’un nouveau div sur les règles d’affichage des prix. Interrogées, les associations de consommateurs déclarent rester attentives à cette évolution et laisser le temps à la mise en place des règlements.

Anne Legentil, conseillère technique de l’association Familles rurales, reconnaît néanmoins que « le consommateur s’interrogera sur la légitimité de ces honoraires et la justification de la facturation lorsqu’il constatera la différence de prix pratiqués entre deux pharmacies. Il faut que l’ensemble des parties prenantes à la réforme, le gouvernement, les syndicats, l’Assurance maladie communique sur ce changement ». « Les pharmaciens doivent être clairs et bien expliquer les raisons de l’application des honoraires. C’est la seule façon de gagner la clientèle à sa cause », conclut-elle.

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