LES CLÉS D’UNE DYNAMIQUE INTERGÉNÉRATIONNELLE - Le Moniteur des Pharmacies n° 3036 du 14/06/2014 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 3036 du 14/06/2014
 
MANAGEMENT

Entreprise

Auteur(s) : Chloé Devis

Faire coopérer plusieurs générations au sein de l’équipe officinale ne va pas de soi tant les attentes peuvent être divergentes. Le titulaire dispose néanmoins d’un certain nombre de leviers pour trouver des terrains d’entente et tirer le meilleur parti de la mixité des âges.

La querelle des aînés et des plus jeunes dans le monde du travail trouve toujours matière à se renouveler. « Au-delà de son histoire de vie, chaque individu subit une empreinte générationnelle liée au condiv social, économique, culturel dans lequel il a grandi et qui se traduit par des codes et normes différents dans le rapport au travail et à l’autorité », rappelle Chantal Fiévet, consultante au cabinet de ressources humaines Gereso. Ainsi, « un apprenti enverra tout naturellement des textos entre deux tâches, mais cela pourra choquer un préparateur plus âgé », relève Marie-Hélène Gauthey, dirigeante d’Atoopharm.

Manager en fonction des spécificités générationnelles

Capitaliser sur la complémentarité des expériences et des points de vue peut être bénéfique aux salariés tant en termes de bien-être que de performances. A condition de tenir compte des marqueurs générationnels dans sa manière de manager au quotidien et de gérer les carrières de chacun.

• Ainsi, les 45-60 ans sont plutôt « travailleurs, idéalistes, déférents envers l’autorité et loyaux envers l’entreprise », indique Chantal Fiévet. Parce qu’eux se sentent souvent « has been » face à leurs cadets, le manager doit leur manifester toute son attention, continuer à solliciter leurs idées et leur énergie, et faire en sorte qu’ils soient respectés.

• La génération X, celle des 35-50 ans, a dû aussi s’adapter à un certain nombre de bouleversements économiques et technologiques. « En quête d’un meilleur équilibre entre carrière et vie privée, ils sont plus individualistes que leurs aînés mais restent attachés aux relations, et ont adopté une certaine distance vis-à-vis des organisations et des chefs, sans s’y montrer déloyaux », souligne Chantal Fiévet. A travers des formations et de nouvelles responsabilités, il faut leur permettre de trouver un « second souffle » et miser sur eux pour faire le « liant » entre les générations.

• Les 20-35 ans (la génération Y) font couler beaucoup d’encre, et pas seulement parce qu’ils ont été biberonnés à Internet et aux nouvelles technologies. L’emploi à vie devenu caduc, leur rapport au travail se fonde moins sur l’idée de carrière que sur une accumulation d’expériences. Le manque d’engagement dans le travail peut se traduire par une propension à quitter l’entreprise au moindre sentiment d’insatisfaction, ou à en faire le moins possible. Mais « le fait de multiplier les petits boulots et les stages confère à la génération Y une agilité et un recul qui sont sources de créativité », pointe Franck Moringue, directeur associé du cabinet de conseil en organisation Acteüs.

Plus loyaux envers les individus que les entreprises, ils feront confiance à un manager dont ils reconnaissent les compétences et qui communique avec eux de façon transparente. « S’ils ont une idée, mettez-les au défi d’aller jusqu’au bout et tolérez leurs erreurs de débutants, tout en valoriser leurs réalisations », recommande-t-il. Mais attention : « C’est la manière dont le travail est organisé et réparti qui va faire la différence sur la santé des salariés et l’évolution des parcours et des compétences. »

Faire primer la culture d’entreprise

De nombreuses tensions peuvent être évitées à partir du moment où le manager fait respecter un socle de valeurs et d’objectifs communs clairement énoncés dès l’embauche. C’est particulièrement crucial pour les règles de savoir-être, un domaine où s’expriment particulièrement les divergences de vue générationnelles. Ainsi, « il faut avoir une politique d’entreprise au sujet des connections, par exemple imposer que le téléphone doit être éteint au comptoir, mais qu’il est possible de consulter ses mails dans la remise », suggère Franck Moringue. C’est une dimension essentielle du management intergénérationnel, à condition de définir le périmètre et les modalités de la démarche. Ainsi, « les seniors disposent de savoirs d’expérience qui ne sont pas écrits et dont ils n’ont même pas forcément conscience », relève Fabienne Caser, chargée de mission à l’ANACT. « Il revient donc au titulaire, éventuellement avec l’aide d’un tiers, de les formaliser, de définir les situations auxquelles ils peuvent être appliqués et un mode d’organisation suffisamment souple pour qu’ils puissent être concrètement partagés. » Par ailleurs, la constitution de binômes doit prendre en compte les enjeux pour les deux parties : si un aîné peut y voir l’occasion de valoriser ses acquis et de se désengager de certaines tâches, il peut éprouver a contrario la crainte d’une dépossession, alors que, pour le plus jeune, l’intérêt d’acquérir des bonnes pratiques peut être contrecarré par une attitude trop dirigiste du tuteur.

De manière générale, la transmission doit pouvoir s’opérer à double sens, par exemple en faisant appel aux compétences spécifiques des plus jeunes en manière de communication et d’usage des nouvelles technologies par exemple. « La coopération peut être envisagée avec profit sous un angle plus collectif pour favoriser un échange d’expériences pluriel et de l’entraide entre tous, mais toujours en préparant le terrain », préconise Fabienne Caser.

« J’ai repris l’officine de mon père »

Il n’est jamais facile pour un jeune pharmacien de reprendre une équipe composée majoritairement de salariés plus âgés. Pour ceux qui s’inscrivent dans une dynastie familiale, c’est encore plus délicat, comme en témoigne Mme P., entourée aujourd’hui de treize collaborateurs. « Les salariés me connaissaient pour certains depuis que j’étais enfant lorsque j’ai pris les rênes de l’officine il y a quinze ans », raconte la titulaire d’une quarantaine d’années. « Mon père était un patron à l’ancienne qui avait une relation très affective avec eux. Lorsque je suis arrivée, j’ai eu du mal à faire accepter ma gestion plus formaliste, notamment auprès d’un préparateur embauché comme apprenti par mon père avec lequel il avait un lien quasi filial. J’y suis parvenue en suivant des formations mais aussi au prix de beaucoup de patience, de larmes et de remises en question. Aujourd’hui, je rencontre une nouvelle problématique générationnelle avec mes jeunes adjoints. Je déploie beaucoup d’énergie pour leur faire comprendre que s’ils veulent s’imposer auprès des plus âgés, ils doivent apporter une plus-value dans leur travail et respecter certaines règles de savoir-vivre. Le fait d’avoir engagé une démarche de qualité m’aide en ce sens: j’apprends à mieux déléguer, mieux communiquer, je prends en compte des notions de psychologie dans la réorganisation de l’organigramme… et j’envoie mes adjoints en formation pour acquérir des bases de management. Reste que je tiens au lien affectif qui m’unit à mon équipe. S’il est une source de tensions, c’est aussi une force qui nous fait avancer ensemble. »

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