L’ÉPILEPSIE DE L’ADULTE - Le Moniteur des Pharmacies n° 3021 du 01/03/2014 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 3021 du 01/03/2014
 

Cahiers Formation du Moniteur

Ordonnance

ANALYSE D’ORDONNANCE

Monsieur G. passe sous bithérapie

RÉCEPTION DE L’ORDONNANCE

Pour qui ?

Monsieur G., 46 ans, pesant 95 kg.

Par quel médecin ?

Son neurologue.

L’ordonnance est-elle conforme à la législation ?

Oui.

QUEL EST LE CONdiv DE L’ORDONNANCE ?

Que savez-vous du patient ?

Monsieur G. souffre depuis l’âge de 14 ans d’épilepsie partielle se manifestant par des crises pouvant se généraliser secondairement. Sous valproate de sodium depuis une dizaine d’années, le patient a vu la fréquence de ses crises augmenter il y a un an. Son neurologue a donc décidé d’ajouter un nouveau médicament : Zebinix (eslicarbazépine). Depuis, le nombre de crises a considérablement diminué.

Quel était le motif de la consultation ?

Monsieur G. a consulté son médecin généraliste pour préparer son voyage à Madagascar.

Que lui a dit le médecin ?

Monsieur G. ayant signalé à son médecin généraliste que l’antipaludique Malarone lui avait déjà provoqué des nausées, ce dernier lui a prescrit du Lariam. Il a également prescrit un vaccin contre la fièvre typhoïde et l’hépatite A.

Vérification de l’historique patient

Dépakine (valproate de sodium) et Zebinix sont délivrés à monsieur G. chaque mois depuis un an.

LES PRESCRIPTIONS SONT-ELLES COHÉRENTES ?

Que comportent les prescriptions ?

→ Dépakine (valproate de sodium) est un antiépileptique indiqué notamment dans le traitement des épilepsies partielles avec ou sans généralisation secondaire des crises, en monothérapie ou en association à un autre traitement antiépileptique.

→ Zebinix (eslicarbazépine) est indiqué en association dans le traitement de l’épilepsie partielle avec ou sans généralisation secondaire des crises.

→ Lariam (méfloquine) est un antiparasitaire antipaludique de synthèse indiqué en prophylaxie du paludisme en zone d’incidence élevée de paludisme chimiorésistant (pays du groupe 3).

→ Tyavax est un vaccin qui permet l’immunisation active conjointe contre la fièvre typhoïde et l’infection provoquée par le virus de l’hépatite A.

Sont-elles conformes aux référentiels ?

→ Epilepsie : oui, le valproate de sodium est indiqué en première intention dans l’épilepsie partielle, bien qu’en pratique il soit assez peu utilisé dans cette indication. Une bithérapie avec l’eslicarbazépine peut être envisagée.

→ Traitement antipaludéen : depuis le passage en 2013 de Madagascar dans le groupe 3, la méfloquine est recommandée au même titre que l’association atovaquone-proguanil et la doxycycline. Par ailleurs, le ministère des Affaires étrangères recommande la mise à jour de la vaccination diphtérie-tétanos-poliomyélite ainsi que les vaccinations contre la fièvre typhoïde et les hépatites virales A et B.

Y a-t-il des médicaments à marge thérapeutique étroite ?

Oui, les anticonvulsivants.

Y a-t-il des contre-indications pour ce patient ?

Non (pas d’insuffisance rénale, pas d’hépatite aiguë ou chronique…).

Les posologies sont-elles cohérentes ?

→ Oui.

– La posologie moyenne du valproate de sodium est de 20 à 30 mg/kg/j.

– La posologie d’eslicarbazépine recommandée est de 800 mg à 1 200 mg/j en une prise.

– La posologie habituelle de la méfloquine est de un 1 comprimé par semaine, à débuter 10 à 21 jours avant le départ. Le traitement est à poursuivre jusqu’à 3 semaines à près le retour.

Y a-t-il des interactions ?

Oui ! L’association méfloquine et valproate de sodium est une contre-indication absolue en raison du risque de survenue de crises épileptiques par augmentation du métabolisme de l’acide valproïque et de l’effet proconvulsivant de la méfloquine (diminution du seuil épileptogène).

Appel au prescripteur

– Bonjour Docteur, vous avez prescrit de la méfloquine à monsieur G.

– Oui, en effet, il part à Madagascar et me dit qu’il ne supporte pas bien Malarone.

– Mais monsieur G. prend Dépakine pour son épilepsie et la méfloquine est contre-indiquée avec le valproate de sodium !

– Ah oui, je vois ! Alors tant pis, je vais vous envoyer une ordonnance de Malarone et de Vogalène en cas de nausées. Donc : Malarone 250 mg, 1 comprimé par jour, et Vogalène lyoc : 1 si besoin.

Malarone (atovaquone 250 mg associée à proguanil 100 mg) est un antipaludéen indiqué dans la prophylaxie du paludisme à Plasmodium falciparum, en particulier chez les voyageurs se rendant dans les zones d’endémie où sévissent des souches résistantes à la chloroquine.

La prescription pose-t-elle un autre problème particulier ?

Non.

QUELS CONSEILS DE PRISE DONNER ?

→ Le valproate de sodium est à prendre de préférence au cours des repas sans écraser ni croquer les comprimés. L’administration en une prise unique est possible dans le cas d’une épilepsie bien équilibrée. L’eslicarbazépine peut être prise indifféremment au cours ou en dehors des repas (réponse 1).

→ Malarone est à prendre à heure fixe avec un repas ou une boisson lactée pour favoriser l’absorption de l’atovaquone.

→ Tyavax confère au patient une protection initiale après une seule injection, mais les taux d’anticorps protecteurs ne sont obtenus que quatorze jours après l’administration du vaccin.

Pour l’hépatite A, il est recommandé d’administrer une seconde dose de vaccin dans les 6 à 12 mois, voire jusqu’à 5 ans après la première dose. La vaccination contre la fièvre typhoïde doit être renouvelée tous les 3 ans (réponse 1 et 2).

Quand commencer le traitement ?

→ Malarone est à débuter la veille ou le jour du départ en zone d’endémie.

Malarone doit être poursuivi pendant la durée du risque et 7 jours après avoir quitté la zone d’endémie (réponse 3).

Que faire en cas d’oubli ?

Dans ce cas il faut prendre le traitement (par exemple quelques heures après la prise initialement prévue), et, si l’oubli est constaté au moment de la prise suivante, il ne faut pas doubler la prise.

Le patient pourra-t-il juger de l’efficacité du traitement ?

Pour l’épilepsie : oui, par l’absence de crises épileptiques.

Quels sont les principaux effets indésirables ?

→ Valproate de sodium : alopécie, prise de poids, thrombopénie avec allongement du temps de saignement, anomalies du bilan hépatique.

→ Eslicarbazépine : sensations vertigineuses, somnolences, nausées, vomissements, diplopie ou vision trouble, céphalées, troubles de l’équilibre.

→ Malarone : céphalées, douleurs abdominales, nausées, vomissements, diarrhées.

Quels sont ceux gérables à l’officine ?

→ Prévenir le patient que des troubles de la vision ou de l’équilibre sont possibles.

→ Insister sur l’administration le soir au coucher de Zebinix.

→ Proposer du paracétamol en cas de céphalées.

→ S’assurer que la NFS et les transaminases sont surveillées.

→ En cas de vomissements survenant dans l’heure qui suit une prise de Malarone, une nouvelle dose doit être administrée.

Quels signes nécessiteraient d’appeler le médecin ?

→ En cas de survenue, chez un épileptique connu, d’une crise identique aux crises habituelles, et si l’entourage est fiable, le recours au service d’urgences n’est pas toujours nécessaire (voir page 15).

→ Une consultation médicale s’impose en cas de crises se répétant de manière rapprochée et inhabituelle pour le patient, ou d’une crise qui se prolonge au-delà du temps habituel, ainsi que face à la survenue d’idées suicidaires.

CONSEILS COMPLÉMENTAIRES

Concernant l’épilepsie

→ Rappeler qu’un mode de vie régulier (sans surmenage, manque de sommeil, alcool) et une observance rigoureuse du traitement participent à limiter la fréquence des crises.

→ Ne jamais arrêter le traitement antiépileptique brutalement, ne pas prendre de nouveau médicament sans avis médical et signaler le traitement antiépileptique à tout nouveau professionnel de santé.

Concernant le voyage

→ Prévoir une quantité de médicaments antiépileptiques suffisante pour le séjour, plus une quantité supplémentaire en cas de perte ou de vol, placée dans un bagage différent.

→ Se munir d’une ordonnance indiquant la DCI des médicaments antiépileptiques et d’une fiche rédigée par le médecin (en français et en anglais de préférence) indiquant le nom du patient, le type d’épilepsie, les coordonnées d’une personne à prévenir en urgence, et ce qu’il convient de faire en cas de crise.

→ Boire suffisamment pour prévenir une déshydratation, susceptible de modifier la pharmacocinétique des médicaments. Préférer les eaux en bouteilles capsulées, de préférence gazeuse pour éviter le remplissage par une eau de mauvaise qualité, à défaut de l’eau filtrée, bouillie et décontaminée. Eviter eau du robinet, glaçons, jus de fruits frais, légumes crus et fruits non pelés, aliments (poisson, viande, volaille) insuffisamment cuits.

→ Déconseiller les cocktails alcoolisés.

→ Recommander au patient d’utiliser des mesures de protection contre les piqûres de moustiques : répulsifs, moustiquaire…

→ Prévoir également une trousse à pharmacie comprenant, entre autres, un produit purifiant pour l’eau, un gel hydroalcoolique, un antipyrétique, un antiémétique, un antidiarrhéique (lopéramide ou racécadotril), une protection solaire.

→ Le patient doit discuter avec son neurologue des activités sportives qu’il envisage de pratiquer.

PATHOLOGIE

L’ÉPILEPSIE DE L’ADULTE EN 6 QUESTIONS

L’épilepsie se traduit par la répétition de crises paroxystiques induites par une hyperexcitation neuronale dans le cerveau. Ses symptômes, parfois spectaculaires, parfois presque inaperçus, sont liés à la localisation de l’excitation et à l’importance de la population neuronale concernée.

1 QU’EST-CE QUE L’ÉPILEPSIE ?

→ Affection neurologique chronique, la maladie épileptique ou épilepsie (ou comitialité) se caractérise par la récurrence plus ou moins fréquente de crises épileptiques.

→ La crise épileptique témoigne cliniquement d’une hyperactivité paroxystique anormale, soudaine et transitoire, d’un groupe de neurones corticaux et de son éventuelle propagation.

→ Elle se caractérise par une modification rapide de l’état de conscience et/ou des phénomènes moteurs et/ou sensitifs, sensoriels, psychiques, végétatifs, et/ou une altération de la réponse du sujet à l’environnement.

→ Il existe deux types essentiels de crises :

– la crise partielle (ou focale), qui peut survenir en n’importe quel point du cortex, reste contenue à cette zone limitée ;

– la crise généralisée affecte l’ensemble du cortex (donc les deux hémisphères du cerveau). Elle peut être généralisée d’emblée ou se généraliser de façon secondaire, après un début localisé.

→ L’état de mal épileptique convulsif généralisé (EMECG) se définit comme une condition épileptique fixe et durable. En pratique, la durée à partir de laquelle un EMECG nécessite une prise en charge spécifique est de cinq minutes si les convulsions sont continues, ou de deux crises successives sans reprise de conscience. Constituant une urgence médicale, il peut entraîner, hors traitement, un décès ou des séquelles neurologiques.

2 COMMENT SE MANIFESTE UNE CRISE D’ÉPILEPSIE PARTIELLE ?

→ Les symptômes d’une crise partielle sont caractéristiques de la localisation corticale du foyer épileptique. A titre d’exemples :

– lobe frontal : incapacité à parler, paralysie unilatérale, automatismes moteurs et gestuels ;

– lobe temporal : nausées, hallucinations olfactives, difficultés à comprendre ;

– lobe pariétal : picotements et fourmillements, hallucinations gustatives ;

– lobe occipital : troubles visuels, vision de points lumineux.

→ Le foyer peut chevaucher plusieurs zones, d’où la conjugaison possible des signes cliniques.

→ Ces crises ont en commun leur brièveté et la stéréotypie des manifestations cliniques d’une récurrence à l’autre (c’est-à-dire que leur présentation est toujours analogue).

→ La crise simple (ou élémentaire) ne s’accompagne pas d’une altération de la conscience. Elle peut être dominée par des signes moteurs (trouble de la marche, contractions musculaires…), sensoriels (paresthésies, troubles visuels, troubles auditifs…), végétatifs (tachycardie, sueurs, etc.), ou psychiques (sentiment d’étrangeté, onirisme, etc.).

→ La crise complexe s’accompagne d’une altération immédiate ou secondaire de la conscience. Pouvant faire suite à une crise simple, elle se traduit souvent par un brutal arrêt moteur d’un sujet devenu hagard, indifférent aux stimuli. Elle s’accompagne parfois aussi d’automatismes moteurs variés et stéréotypés (mâchonnement, grattage…).

3 COMMENT SE MANIFESTE UNE CRISE GÉNÉRALISÉE ?

→ Il existe divers types de crises généralisées : elles intéressent d’emblée les deux hémisphères ou se généralisent à partir du foyer d’une crise partielle via les fibres commissurales. Dans ce cas, la crise généralisée peut être précédée d’une « aura » annonciatrice qui n’est autre que la crise partielle en voie d’extension. La plupart des présentations d’épilepsies généralisées affectent les enfants et les adolescents.

→ Epilepsie avec absences (« petit mal ») : cette présentation, qui concerne avant tout l’enfant et l’adolescent, se traduit par la récurrence d’absences d’une dizaine de secondes au plus, parfois si brèves qu’elles restent quasiment imperceptibles.

→ Crise myoclonique : caractérisée par de brèves secousses musculaires intéressant généralement les bras ou/et les jambes, les épaules, parfois tout le corps. Ces contractions peuvent rester très discrètes.

→ Crise tonique. Caractérisée par une contraction musculaire intense s’étendant progressivement du cou vers l’abdomen, ou touchant les membres, avec chute. Elle peut empêcher la respiration, avec cyanose. Durant 10 à 15 secondes, elle s’accompagne de signes végétatifs.

→ Crise clonique : les secousses musculaires bilatérales régulières, rythmées, s’accompagnent d’une perte de conscience et d’un déficit moteur résolutif en quelques heures.

→ Crise tonicoclonique (« grand mal ») : dans sa présentation typique, elle voit se succéder trois phases :

– phase tonique, à début brutal, sans aucun signe annonciateur (d’où le risque d’accidents), souvent avec chute, parfois un cri, perte de connaissance, contraction tonique avec révulsion oculaire, apnée, cyanose, troubles végétatifs. La morsure du bord de la langue, de grande valeur diagnostique, reste inconstante. La tétanie se relâche en 20 secondes environ ;

– phase clonique, d’une durée de 20 à 30 secondes, avec des secousses bilatérales, synchrones, intenses, s’interrompant soudainement ;

– phase résolutive (postcritique), durant au plus quelques dizaines de minutes, caractérisée par un coma hypotonique avec relâchement musculaire complet et parfois perte urinaire et fécale. Cette phase peut s’accompagner de confusion mentale voire d’agitation.

→ Le patient ne conserve aucun souvenir de la crise. Il se plaint ensuite de courbatures, de céphalées, parfois de douleurs musculosquelettiques.

4 QUELLE EST L’ORIGINE DE L’ÉPILEPSIE ?

→ L’épilepsie idiopathique n’a pas de cause connue autre qu’une susceptibilité génétique (antécédents familiaux).

→ L’épilepsie symptomatique peut avoir de nombreuses causes, dont notamment : traumatisme crânien, lésion ou tumeur du cerveau, trouble métabolique (diabète essentiellement), maladie vasculaire intéressant le cerveau, démence type Alzheimer, infection du cerveau (méningite bactérienne, encéphalite herpétique, etc.).

→ L’épilepsie cryptogénique a une cause suspectée mais non formellement prouvée.

5 QUELS SONT LES FACTEURS DE RISQUE DE CRISE ?

La survenue d’une crise peut être favorisée chez un individu susceptible par une privation de sommeil, un stress, une activité prolongée sur un écran (cette photosensibilité concerne 5 % des patients : télévision, jeux vidéo, ordinateur), une fièvre, la prise d’alcool, un sevrage brutal d’alcool et de toxiques, mais aussi de médicaments connus pour abaisser le seuil épileptogène (antipsychotiques, antidépresseurs tricycliques, IMAO, lithium, opioïdes, anticholinestérasiques, sétrons, parfois aussi quinolones, lactamines, anesthésiques locaux, produits de contraste)

6 COMMENT DIAGNOSTIQUER UNE ÉPILEPSIE ?

→ Avant tout clinique, le diagnostic d’épilepsie est confirmé par un neurologue chez un patient ayant été victime de plusieurs crises comitiales.

→ La démarche diagnostique comprend deux temps :

– l’interrogatoire : analyse des symptômes décrits par le patient et par son entourage. Le médecin s’intéresse aux antécédents familiaux, infectieux, comitiaux, chirurgicaux, thérapeutiques…

– réalisation d’un électroencéphalogramme (EEG) et imagerie cérébrale, dont le résultat confirme ou non le diagnostic clinique. L’EEG est souvent normal en dehors des crises. Scanner et imagerie par résonance magnétique complètent l’investigation si besoin.

THÉRAPEUTIQUE

Comment traiter l’épilepsie de l’adulte ?

Le traitement anticomitial vise à contrôler les crises d’épilepsie sans dégrader la qualité de vie du patient par des effets iatrogènes mal supportés. Les effets indésirables sont réduits en veillant à adapter la prescription à toutes les situations spécifiques (conduite automobile, activité professionnelle, désir de grossesse, etc.).

STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE

Plus de quinze molécules antiépileptiques sont disponibles, sans qu’on puisse véritablement les regrouper en classes. Nombre d’entre elles sont des médicaments à marge thérapeutique étroite.

Traitement de première ligne (monothérapie)

→ Le traitement n’est pas systématiquement engagé après une crise d’épilepsie isolée. L’abstention thérapeutique est privilégiée en l’absence d’anomalie neurologique.

→ Le traitement de l’épilepsie repose sur une monothérapie accompagnée de règles d’hygiène de vie (notamment : abstinence d’alcool, durée de sommeil suffisante).

Epilepsie généralisée idiopathique

Deux antiépileptiques à spectre large, le valproate ou la lamotrigine (si risque de grossesse), constituent le traitement de référence.

Le topiramate constitue une alternative. Clobazam, phénobarbital et analogues (phénytoïne, primidone) ont une AMM mais sont rarement prescrits.

Epilepsie partielle ou secondairement généralisée.

Divers anticomitiaux sont indiqués en première intention et en monothérapie : spectre large (ex. : lamotrigine, lévétiracétam, topiramate, zonisamide) ou spectre étroit (ex. : carbamazépine, gabapentine, oxcarbazépine).

→ Le traitement, initié à dose faible, est augmenté progressivement (paliers de 7 à 15 jours) jusqu’à la dose minimale efficace la mieux tolérée.

→ Cette instauration progressive limite l’iatrogénie : fatigue, ralentissement cognitif (antiépileptiques sédatifs et GABAergiques), prise de poids (barbituriques, valproate, gabapentine).

Traitement de deuxième ligne (monothérapie)

→ En cas d’échec ou de mauvaise tolérance de la monothérapie initiale, l’antiépileptique est remplacé par une autre monothérapie. La substitution est réalisée par un chevauchement temporaire des traitements, avec suppression progressive d’un médicament alors que l’autre est introduit progressivement.

Traitement de troisième ligne (bithérapie)

→ L’échec récurrent d’au moins deux monothérapies invite à prescrire une bithérapie qui peut inclure des anticomitiaux non indiqués en monothérapie.

Epilepsie généralisée idiopathique

L’association valproate + lamotrigine, pertinente dans l’épilepsie généralisée, exige une surveillance étroite (toxicité cutanée ; risque de nécrolyse épidermique). Lévétiracétam et topiramate sont indiqués en association dans cette forme d’épilepsie.

Epilepsie partielle ou épilepsie secondairement généralisée

Eslicarbazépine, gabapentine, lamotrigine, lévétiracétam, oxcarbazépine, phénobarbital, phénytoïne, prégabaline, primidone, tiagabine, topiramate et zonisamide peuvent être associés. Le lacosamide n’est prescrit qu’en association.

Rétigabine et vigabatrine sont réservées, en association, aux épilepsies partielles résistantes aux monothérapies antérieurement testées.

→ Rarement, les crises peuvent persister malgré une bithérapie adaptée et correctement suivie. Des combinaisons multiples peuvent être testées par le neurologue.

→ Certains patients pharmacorésistants peuvent relever d’un geste chirurgical s’ils présentent une épilepsie partielle à foyer unique.

Etat de mal épileptique

Le traitement repose sur des mesures générales (libération des voies aériennes, oxygénothérapie, contrôle de la glycémie et des paramètres biologiques, etc.) et sur l’administration d’un anticomitial par voie veineuse : clonazépam, diazépam voire phénobarbital (en seconde ligne). Valproate et phénytoïne injectables sont réservés aux hôpitaux.

Femme en âge de procréer Contraception

→ Les antiépileptiques d’ancienne génération (excepté le valproate), inducteurs enzymatiques, réduisent l’efficacité des contraceptifs oraux. Les antiépileptiques de nouvelle génération (sauf l’oxcarbazépine et l’eslicarbazépine) ne sont pas inducteurs.

→ La prise d’un antiépileptique inducteur fait recommander le recours à un contraceptif dosé à 50 µg ou plus d’estrogène, associé à une contraception non hormonale (préservatifs, crème spermicide).

→ Inversement, le contraceptif peut accélérer l’élimination de certains antiépileptiques (lamotrigine, valproate).

Grossesse

→ L’épilepsie ne constitue pas un risque fœtal significatif (sauf traumatisme par chute). Le risque peut en revanche être iatrogène : le rapport bénéfice/risque du traitement antiépileptique est discuté avant la conception.

→ Le risque tératogène est préoccupant pour le valproate, le plus tératogène des anticonvulsivants. Les anomalies de fermeture du tube neural doivent être dépistées (risque plus élevé si dose > 900 mg/j). Le valproate est aussi associé à un risque tardif de retard cognitif, de troubles du comportement et d’autisme.

→ Un risque d’anomalies de fermeture du tube neural est signalé pour la carbamazépine.

→ La lamotrigine est la molécule la moins à risque (dose ≤ 300 mg/j).

→ Les données concernant les nouvelles molécules ne permettent pas d’estimer le risque.

→ La dose efficace minimale en monothérapie est recherchée six mois au moins avant la conception puis administrée au moins pendant le premier trimestre.

→ Il est généralement recommandé de suppléer en acide folique (5 mg/j) deux mois avant la conception et pendant le premier mois de la grossesse s’il y a une prescription de valproate, carbamazépine ou lamotrigine.

→ Les crises tonicocloniques étant potentiellement délétères pour la mère comme pour le fœtus, le traitement antiépileptique est poursuivi au cours de la grossesse.

TRAITEMENTS

Les anticomitiaux appartiennent à plusieurs familles chimiques et pharmacologiques : ceci explique la variété des réactions iatrogènes. Mais tous partagent, à des degrés divers, plusieurs types d’effets indésirables :

→ Fatigue, asthénie, troubles de l’accommodation visuelle peuvent avoir une origine centrale ou périphérique.

→ Vertiges, céphalées, somnolence, troubles de la concentration sont des effets neurologiques banals en début de traitement ;

→ La prévalence des troubles psychiatriques (dépression, parfois manie) induits par les antiépileptiques concernerait jusqu’à 8 % des patients.

→ Les signes digestifs sont fréquents mais transitoires : nausées, vomissements, diarrhées, constipation, anorexie, sécheresse buccale, etc.

Anticomitiaux essentiels Carbamazépine et proches

Carbamazépine (Tégrétol), eslicarbazépine (Zebinix) et oxcarbazépine (Trileptal) sont structurellement proches. Elles se distinguent par leur profil de tolérance différent.

L’oxcarbazépine ne livre pas le métabolite toxique de la carbamazépine (10-11-époxycarbamazépine).

L’eslicarbazépine, un métabolite de l’oxcarbazépine, doit être utilisée, selon la HAS, après échec d’au moins deux monothérapies successives.

Ces médicaments inactivent les canaux sodiques voltage-dépendants et peuvent aggraver les absences dans l’épilepsie généralisée idiopathique. Les effets indésirables principaux sont :

→ Céphalées, diplopie, sédation, vertiges, faisant évoquer un surdosage, notamment en début de traitement (monitoring plasmatique et vérification de l’absence d’interaction).

→ Anomalies hématologiques (leucopénie, thrombocytopénie, hyperéosinophilie), justifiant la surveillance du traitement par carbamazépine. Ces signes sont exceptionnels avec l’oxcarbazépine et l’eslicarbazépine.

→ Risque cutané pouvant faire suspecter une nécrolyse épidermique (arrêt définitif du traitement) : en cas d’apparition de troubles cutanés, prendre contact avec un médecin.

→ Anomalies hépatiques (justifiant un contrôle régulier avec la carbamazépine).

→ Prise de poids.

→ Hyponatrémie avec confusion mentale, observée surtout chez le sujet âgé, en cas de déshydratation ou d’insuffisance rénale (carbamazépine, oxcarbazépine). Elle impose un contrôle de la natrémie à 2 semaines, puis tous les mois pendant le premier trimestre du traitement ou selon les besoins.

Gabapentine

Proche du GABA, la gabapentine (Neurontin) a un mode d’action complexe et mal connu. Elle bénéficie d’une bonne tolérance mais d’une puissance relativement modeste. Son administration peut aggraver les absences dans l’épilepsie généralisée idiopathique.

Ses effets indésirables principaux sont :

→ Effets neuropsychiques usuels dont, une dépression.

→ Troubles oculaires (amblyopie, diplopie), ventilatoires (dyspnée) ou gingivite ne sont pas exceptionnels.

Lamotrigine

Initialement développée comme antifolique, la lamotrigine (Lamictal) est aussi efficace que la carbamazépine, avec un index thérapeutique très favorable (pas de risque tératogène, bonne tolérance au plan cognitif).

Elle peut aggraver les absences dans l’épilepsie généralisée idiopathique. La survenue de réactions cutanées graves (dont syndrome de Stevens-Johnson ou de Lyell) invite à augmenter progressivement la dose quotidienne (paliers de 8 à 12 semaines) ; le risque est potentialisé par l’association au valproate ou au valpromide (mise en garde de l’Afssaps de 2010). La lamotrigine peut provoquer une diplopie.

Lévétiracétam

Bénéficiant d’une bonne tolérance, le lévétiracétam (Keppra) peut être administré d’emblée à la dose efficace. Il n’expose pas à des interactions médicamenteuses.

Les troubles neuropsychiatriques, dont des troubles du comportement avec labilité émotionnelle, agressivité ou confusion mentale, atteignent 10 % des patients. Des troubles oculaires (amblyopie, diplopie) ne sont pas exceptionnels mais transitoires. Il existe un risque d’éruptions cutanées, de rhinopharyngite et de toux.

Topiramate

Le topiramate (Epitomax) est un dérivé du fructose anticomitial de spectre large indiqué également comme antimigraineux.

Il provoque des troubles cognitifs et comportementaux chez 25 % des patients.

Autres effets indésirables : troubles oculaires (diplopie, glaucome à angle fermé, nystagmus), rhinopharyngite, lithiase rénale.

Valproate de sodium

Le valproate de sodium (Dépakine, Micropakine), de spectre large, bénéficie d’un excellent index thérapeutique (sauf grossesse). Il n’est pas à l’origine d’interactions par induction enzymatique et se prête à un suivi plasmatique aisé. Le valproate peut provoquer une hépatite cytolytique rare mais justifiant une surveillance (transaminases, taux de prothrombine) avant instauration du traitement, puis pendant les 6 premiers mois, puis si signes d’appel (asthénie, anorexie, somnolence, vomissements répétés, rechutes comitiales). Il peut provoquer une thrombopénie dose-dépendante justifiant un bilan de la coagulation avant traitement et avant intervention chirurgicale.

Les autres effets indésirables sont :

→ tremblement fin d’attitude,

→ pancréatite,

→ augmentation de la toxicité cutanée en cas d’association à la lamotrigine ou au phénobarbital,

→ risque tératogène.

Anticomitiaux moins fréquemment prescrits en officine Lacosamide (Vimpat)

Le lacosamide (Vimpat) est un acide aminé de synthèse exerçant une action anticomitiale et antalgique (douleurs neuropathiques). Il peut être responsable d’asthénie, fatigue, céphalées et vertiges, troubles digestifs.

Phénobarbital et proches

Phénobarbital (Gardénal), phénytoïne (Di-Hydan) et primidone (Mysoline) ont des points communs. La primidone est partiellement métabolisée en phénobarbital. Ils sont mal tolérés (sédation) et peuvent être à l’origine de nombreuses interactions.

Les principaux effets indésirables sont :

→ Somnolence diurne parfois handicapante, troubles de la coordination et de l’équilibre (syndrome cérébellovestibulaire).

→ Anomalies hématologiques (anémie mégaloblastique) rares mais parfois fatales.

→ Risque d’ostéomalacie.

→ Phénytoïne et phénobarbital peuvent induire des éruptions cutanées (parfois épidermolyse).

→ Phénytoïne : pigmentation brune du visage et du cou ; hypertrophie gingivale caractéristique.

Prégabaline

Proche du GABA, la prégabaline (Lyrica) n’en a pas l’action pharmacologique et tend à réduire l’excitabilité neuronale.

Effets indésirables principaux

→ Troubles neuropsychiatriques (vertiges, somnolence, irritabilité, troubles de la libido et dysérection, confusion mentale).

→ Troubles oculaires (diplopie).

→ Troubles gastro-intestinaux.

Rétigabine

La rétigabine (Trobalt) constitue, en association, un traitement des épilepsies partielles après échec d’au moins deux monothérapies.

Effets indésirables principaux :

→ Rétention urinaire avec lithiase.

→ Allongement dose-dépendant de l’intervalle QT.

→ Troubles psychiques (hallucinations, réactions d’allure psychotique).

→ Troubles oculaires (diplopie, vision trouble).

La rétigabine peut entraîner des modifications pigmentaires (rétine, tissus oculaires, ongles, lèvres, peau) et coloration brunâtre de l’urine.

Tiagabine

La tiagabine (Gabitril) inhibe la recapture du GABA. Elle peut entre autres occasionner des troubles de la coagulation (ecchymoses).

Vigabatrine

La vigabatrine (Sabril) est un inhibiteur de la GABA-transaminase qui constitue, en association, un traitement des épilepsies partielles résistantes. L’iatrogénie ophtalmologique réduit considérablement son usage actuel : possible rétrécissement irréversible du champ visuel survenant plus ou moins rapidement chez 30 % à 50 % des patients. Rares cas de psychoses.

Zonisamide

Le zonisamide (Zonégran) est un agoniste GABAergique.

Son iatrogénie est dominée par les troubles visuels (diplopie) et le risque d’éruptions cutanées.

Perspectives

La commercialisation du perampanel (Fycompa) est annoncée pour cette année. Indiqué en association (après échec d’au moins deux monothérapies) dans certaines épilepsies, il inaugurera la classe des antagonistes sélectifs non compétitifs des récepteurs ionotropiques au glutamate de type AMPA postsynaptiques.xx

ACCOMPAGNER LE PATIENT

L’ÉPILEPSIE VUE PAR LES PATIENTS

Les conséquences de l’épilepsie sur la vie des patients dépendent de la sévérité des crises, de leur résistance aux traitements ainsi que de l’âge auquel a débuté la maladie. Elles diffèrent également selon les personnes et leur capacité à rebondir face aux difficultés qu’engendre l’épilepsie.

Impact sur la vie quotidienne

L’épilepsie impose certaines restrictions ou adaptations : interdiction de la pratique de certains loisirs et sports (plongée sous-marine…) ou nécessité d’un encadrement particulier (piscine, gymnastique…), accès au permis de conduire en cas d’épilepsie stabilisée pour les véhicules légers, sous réserve d’une autorisation d’aptitude, généralement temporaire, délivrée par la commission médicale départementale…

Les personnes, notamment celles dont l’épilepsie n’est pas stabilisée, doivent adapter leur vie en fonction du type d’épilepsie dont elles souffrent, ainsi que du handicap qui peut être associé à cette pathologie (retard du développement mental par exemple, conduisant à une dépendance).

Impact sur le plan professionnel

Il n’existe pas d’obligation légale à parler de sa maladie à l’employeur. Bien que le travail ait une action bénéfique pour les patients, les conséquences de l’épilepsie sur celui-ci varient selon le type d’emploi, la nature des manifestations épileptiques et l’attitude de l’employeur. Un simple aménagement du poste de travail peut suffire dans certains cas : 70 % des personnes épileptiques arrivent à s’insérer dans le monde du travail. Pour d’autres, l’épilepsie peut conduire à un licenciement ou à une incapacité de travail.

Dans tous les cas, les métiers susceptibles de perturber le sommeil, qui requièrent une attention continue ou qui présentent des dangers en cas de crise pour le malade lui-même ou pour les autres personnes sont déconseillés (travail à la chaîne, en hdiv, sur machines dangereuses) et parfois interdits par la loi (transports en commun, transport ferroviaire, aviation civile, plongeurs professionnels et travaux en caisson, police nationale…).

Impact psychologique

Les personnes épileptiques souffrent avant tout d’une image négative de l’épilepsie. Le regard des autres conduit très souvent à un handicap social. Les patients vivent sous la menace de crises qui, d’une part, peuvent mettre en danger le patient et son entourage, et, d’autre part, génèrent de la peur chez les autres. Les enfants épileptiques se sentent souvent coupables ou honteux de ne pas pourvoir contrôler les crises, d’autant que, pour les absences, le diagnostic peut tarder.

L’anxiété anticipatoire, le sentiment d’insécurité, la mauvaise image de soi dépendent toutefois de la sensibilité de la personne, de son style de vie, de son entourage et du type de crises qu’il subit.

À DIRE AUX PATIENTS

A propos de la pathologie

→ Les crises d’épilepsie peuvent être comparées à des courts-circuits dans les réseaux électriques du cerveau. Elles surviennent le plus souvent de façon imprévisible.

→ Certaines épilepsies de l’enfance guérissent spontanément. D’autres formes d’épilepsie peuvent être opérées et donc définitivement guéries ; mais elles représentent encore peu de cas. La majorité des épilepsies peut être contrôlée par un traitement adapté.

→ Plusieurs situations peuvent abaisser le seuil épileptogène et favoriser la survenue d’une crise convulsive : surmenage, stress et anxiété, manque de sommeil, fièvre et, pour certaines épilepsies, stimulation lumineuse (lumière alternée de certaines boîtes de nuit, écran de jeu…).

→ Chez un épileptique connu, en cas de survenue d’une crise identique aux crises habituelles, le recours au service d’urgences n’est pas nécessaire.

A propos du traitement

→ L’objectif du traitement est de faire disparaître les crises ou au moins de les diminuer en fréquence, en durée et/ou en intensité afin d’améliorer la qualité de vie, et ce, tout en limitant les effets indésirables du traitement. Une monothérapie est donc privilégiée en fonction du type de crise, du profil du patient (enfant, femme, personne âgée, maladie associée…) et des effets secondaires prévisibles des différentes molécules.

→ Une observance rigoureuse du traitement est nécessaire : sa prise irrégulière favorise l’apparition ou l’augmentation de la fréquence des crises. Il ne faut jamais arrêter un traitement antiépileptique brutalement.

→ De nombreux médicaments peuvent provoquer des interactions avec d’autres traitements (contraception orale, antibiotiques…) ou déséquilibrer le traitement antiépileptique : ne pas prendre de nouveau médicament sans avis médical.

Signaler le traitement antiépileptique à tout nouveau professionnel de santé.

→ En cas de troubles associés à l’épilepsie, une prise en charge rééducative (ergothérapie, orthophonie…), psychologique ou psychiatrique (troubles du comportement, anxiété, dépression…) peut être nécessaire.

Les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) peuvent apporter par ailleurs des solutions pour améliorer la vie quotidienne.

PRÉVENTION

→ Pour diminuer le nombre de crises, une adaptation du mode de vie est nécessaire. Elle passe par la connaissance de sa maladie (rôle de l’éducation thérapeutique du patient), par le suivi d’un mode de vie régulier et du traitement prescrit. Toute situation entraînant un risque de surmenage ou un manque de sommeil doit être évitée. La consommation d’alcool est également à limiter.

→ Lors d’une crise, conseiller aux proches d’allonger la personne, d’écarter ou protéger tout objet contre lequel il pourrait se blesser, de la placer dès que possible en position latérale de sécurité et ne pas la laisser seule dans les minutes qui suivent la crise. Ne pas tenter de bloquer ses mouvements ou de mettre un objet dans sa bouche. Noter l’heure de début et de fin de crise. En cas de signes prédictifs, s’asseoir voire s’allonger.

→ Pratiquer une activité sportive régulière est la plupart du temps possible, voire recommandée.

Délivreriez-vous ces ordonnances ?

ORDONNANCE 1 : OUI. mais il existe un risque de diminution des concentrations et de l’efficacité de la lamotrigine par augmentation de son métabolisme hépatique. Une surveillance clinique avec une éventuelle adaptation de la posologie de la lamotrigine est nécessaire lors de la mise en route d’une contraception orale et après son arrêt.

ORDONNANCE 2 : OUI ET NON. L’association tramadolcarbamazépine est déconseillée car il existe un risque de diminution des concentrations plasmatiques du tramadol. Le traitement antalgique ne soulagera pas le patient. De plus, le tramadol est proconvulsivant. Il vaudrait mieux appeler le médecin et lui proposer de prescrire du paracétamol codéiné.

MÉMO-DÉLIVRANCE

S’IL S’AGIT D’UNE INITIATION DE TRAITEMENT

Le traitement est-il bien initié à dose progressive ?

Cette instauration progressive a pour but de limiter l’iatrogénie. Les paliers doivent être de 7 à 15 jours jusqu’à la dose minimale efficace la mieux tolérée.

Si le traitement comporte de la lamotrigine, le patient est-il sensibilisé au risque cutané ?

La lamotrigine peut entraîner des réactions cutanées graves (syndrome de Lyell). Le risque est potentialisé en cas d’association au valproate ou au valpromide. La posologie doit être augmentée très progressivement (paliers de 8 à 12 semaines) et les réactions cutanées immédiatement signalées au médecin.

Le patient et son entourage savent-ils comment réagir en cas de crise d’épilepsie ?

Conseiller aux proches d’allonger le patient, d’écarter ou de protéger tout objet contre lequel il pourrait se blesser, de la placer en position latérale de sécurité, de ne pas tenter de bloquer ses mouvements ou de mettre un objet dans sa bouche.

GESTION DES EFFETS INDÉSIRABLES

Le patient connaît-il les effets indésirables possibles et sait-il comment les gérer ?

→ Les antiépileptiques ont des effets indésirables communs : fatigue, somnolence, vertiges, céphalées, qui peuvent diminuer l’observance. La prise irrégulière du traitement favorise la survenue de crises.

→ Des troubles de l’accommodation visuelle sont possibles. Ils nécessitent une adaptation du traitement.

→ Des troubles psychiatriques (dépression, manie) concernent près de 10 % des patients et sont à surveiller de près par le patient lui-même ou son entourage. Le millepertuis est contre-indiqué avec la plupart des antiépileptiques. w Les troubles digestifs sont transitoires.

ANTIÉPILEPTIQUES, CONTRACEPTION ET GROSSESSE

Si la patiente est une femme, sait-elle qu’un traitement contraceptif est indispensable ?

De nombreux antiépileptiques sont inducteurs enzymatiques et réduisent l’efficacité des contraceptifs oraux. Une pilule estroprogestative dosée à 50 µg d’œstrogène est recommandée, associée à des préservatifs.

Si la patiente a un projet de grossesse, sait-elle que le traitement doit être adapté avant la conception ?

→ Le traitement épileptique doit être évalué avant la grossesse.

→ Le risque tératogène est en particulier préoccupant pour le valproate et à moindre degré pour la carbamazépine (anomalies du tube neural). La lamotrigine est la molécule privilégiée.

→ Une supplémentation en acide folique (5 mg/j) deux mois avant la conception et pendant le premier mois de grossesse est habituellement recommandée.

LE CAS : Monsieur G. souffre depuis plusieurs dizaines d’années d’épilepsie partielle avec des crises se généralisant secondairement. Il y a un an, suite à une augmentation de la fréquence des crises, son neurologue a décidé d’ajouter de l’eslicarbazépine (Zebinix). Monsieur G. présente une ordonnance de son médecin généraliste qu’il a consulté avant un voyage prévu à Madagascar dans deux mois. Il en profite pour renouveler son ordonnance d’antiépileptiques.

Qu’en pensez-vous

Le valproate de sodium à libération prolongée peut-il être administré en une seule prise journalière ?

1) Oui, dans le cas d’épilepsie bien équilibrée.

2) Non, deux prises quotidiennes sont nécessaires.

Qu’en pensez-vous

Un rappel vaccinal doit-il être envisagé ?

1) Oui, pour l’hépatite A.

2) Oui, pour la fièvre typhoïde.

3) Non, une seule administration immunise à vie.

Qu’en pensez-vous

Combien de temps doit être poursuivi Malarone après le retour ?

1) 4 semaines.

2) 3 semaines.

3) 7 jours.

EN CHIFFRES

• L’épilepsie est la plus banale des maladies neurologiques chroniques.

• Prévalence moyenne : 8,2/1 000 sur la planète et 7/1 000 en France.

• Incidence annuelle : 50/100 000 dans les pays développés et 100/100 000 (infections cérébrales, paludisme, malnutrition) dans les pays en voie de développement.

• La mortalité de l’adulte épileptique est deux à trois fois plus élevée que celle de la population générale : morbidité associée, accidents liés aux crises, arrêt cardiaque ou respiratoire, suicide.

FIBRES COMMISSURALES

Structures reliant les deux hémisphères du cerveau et coordonnant leur action. Le faisceau commissural le plus important forme le corps calleux, dont les ramifications se prolongent jusqu’au cortex.

ABSENCE

Brève altération de la conscience se traduisant par une rupture du contact avec l’entourage et parfois une perte du tonus postural : le patient s’immobilise, le regard vide et ne conserve pas de souvenir de l’épisode.

EXCITABLE

Neurone générant des décharges électriques répétées en réponse à une stimulation ne provoquant qu’un seul potentiel d’action.

PÉRIODE INTERCRITIQUE

Période d’activité électrique normale entre les crises d’épilepsie.

NEURONE HYPER-EXCITABLE

Neurone générant des décharges électriques répétées en réponse à une stimulation ne provoquant qu’un seul potentiel d’action.

Physiopathologie

→ Survenant dans une population de neurones hyperexcitables (constituant le « foyer épileptique »), la crise d’épilepsie résulte d’une dépolarisation paroxystique créant des bouffées de potentiels d’action qui s’étendent ou non dans le cortex.

→ La dépolarisation résulte d’une anomalie des canaux ioniques (canalopathie) perturbant l’équilibre ionique et donc électrique des neurones (hypothèse dite neuronale), ou de la mise en jeu de potentiels postsynaptiques exacerbés par les neuromédiateurs excitateurs (adrénaline, acétylcholine, acide glutamique) : c’est l’hypothèse dite synaptique.

→ Ces anomalies peuvent être observées en dehors des crises (en période intercritique), mais elles ne donnent lieu à des signes cliniques que lorsque les mécanismes de compensation physiologiques sont dépassés. Le phénomène se synchronise alors à un grand nombre de neurones (phénomène de recrutement ou d’« embrasement »).

→ La décharge électrique cesse notamment sous l’influence de la production de neuromédiateurs inhibiteurs (sérotonine, glycine, acide gamma-aminobutyrique).

ANTIÉPILEPTIQUE DE SPECTRE LARGE

Antiépileptique actif sur les crises généralisées idiopathiques et sur les crises partielles ou secondairement généralisées.

CE QUI A CHANGÉ

Août 2011 : l’Afssaps lance une mise en garde contre l’utilisation détournée en dehors de toute AMM du topiramate à des fins amaigrissantes.

Depuis septembre 2011 : les formes orales de clonazépam (Rivotril) doivent être prescrites en toutes lettres sur une ordonnance sécurisée. Prescription initiale annuelle réservée aux neurologues et pédiatres.

Avril 2012 : sortie de l’eslicarbazépine (Zebinix), indiquée en association chez le patient de plus de 18 ans souffrant d’épilepsie partielle avec ou sans généralisation secondaire.

Octobre 2013 : le zonisamide (Zonégran) peut être utilisé pour le traitement adjuvant des crises partielles d’épilepsie avec ou sans généralisation secondaire.

Novembre 2013 : sortie de Lyrica en solution buvable dosée à 20 mg de prégabaline par ml, indiqué chez l’adulte.

ANTI-ÉPILEPTIQUE DE SPECTRE ÉTROIT

Antiépileptique actif sur les crises partielles ou secondairement généralisées.

VIGILANCE !!!

Certaines contre-indications doivent être connues du pharmacien :

Carbamazépine

→ Bloc auriculoventriculaire (carbamazépine, eslicarbazépine).

→ Antécédents de porphyrie (carbamazépine).

→ Antécédents d’hypoplasie médullaire (carbamazépine).

Valproate

→ Toute forme d’hépatite ou antécédents d’hépatite.

→ Porphyrie hépatique.

Lacosamide

Bloc auriculoventriculaire.

Phénobarbital, primidone

→ Porphyries.

→ Insuffisance respiratoire sévère.

Tiagabine

Insuffisance hépatique sévère.

DIPLOPIE

Vision double souvent liée à des problèmes de motricité oculaire.

AMBLYOPIE

Baisse de l’acuité visuelle.

ÉPIDERMOLYSE

Affection dermatologique aiguë très sévère caractérisée par la destruction de l’épiderme et des muqueuses.

Elle résulte généralement d’une réaction allergique iatrogène.

NYSTAGMUS

Oscillations involontaires et saccadées des globes oculaires liées à un défaut de coordination musculaire.

OSTÉOMALACIE

Décalcification osseuse.

POINT DE VUE Dr Laurent Vercueil, neurologue, praticien hospitalier au CHU de Grenoble, interrogé par Sylviane Le Craz, pharmacienne

« Le vieillissement diminue la tolérance aux médicaments »

Des problèmes particuliers apparaissent-ils quand le patient épileptique vieillit ?

Avec l’âge, la tolérance aux médicaments devient plus difficile suite à la diminution des fonctions hépatique et rénale qui implique une adaptation des doses. Les officinaux doivent être vigilants quant à l’apparition d’effets indésirables. Penser également à interroger l’entourage, souvent plus à même de détecter des changements d’humeur. Le vieillissement amplifie également l’effet sédatif de certains médicaments comme le lévétiracétam, habituellement mieux supportés chez les patients jeunes. Par ailleurs, les pathologies neurologiques telle la maladie d’Alzheimer compliquent l’utilisation des antiépileptiques avec, ici, un risque accru de sédation ou de perte de mémoire. Un autre risque lié au vieillissement apparaît avec les inducteurs enzymatiques : l’ostéoporose. Ceci en raison d’un métabolisme de la vitamine D plus important chez des patients par ailleurs enclins, du fait du risque de crises, à rester davantage chez eux et donc réduisant à la fois leur exposition au soleil et leur activité physique.

Pensez-vous qu’il ne faut pas donner de génériques dans l’épilepsie ?

Oui. Contrairement à d’autres traitements préventifs d’un risque, comme celui de l’hypertension ou de l’hypercholestérolémie, pour lesquels nous disposons de marqueurs, cliniques (prise de tension artérielle) ou biologiques (dosage du cholestérol) qui permettent de vérifier l’efficacité de la mesure préventive, dans l’épilepsie, aucun marqueur ne permet d’anticiper le niveau du risque de survenue d’une crise d’épilepsie. C’est la loi du tout ou rien : la sanction d’un traitement qui est modifié est la survenue d’une crise, dont les conséquences peuvent être graves : accidents de la route, mort subite du patient…

Laëtitia, 34 ans, secrétaire à temps partiel :

« Je suis sous traitement préventif depuis l’âge de 11 mois. Mon épilepsie, frontotemporale gauche, est qualifiée de pharmacorésistante car après avoir testé sept médicaments selon différentes combinaisons et posologies, je subis encore deux à trois crises généralisées par an et des crises partielles tous les mois, ainsi que des crises nocturnes. La somnolence et la fatigue font partie de mon quotidien et affectent mon moral, ce qui perturbe mon sommeil : c’est un cercle vicieux. Mes difficultés de compréhension qui en découlent m’ont ralenti dans mes études. Quant à mon entourage, il est difficile de se faire des amis face à la peur qu’engendre cette maladie et aux préjugés qui nous font culpabiliser. Honte et reproches sont fréquents, notamment en cas de perte d’urine. Sans compter la mise en danger perpétuelle sans rien pouvoir contrôler. Mon espoir : une possible opération. »

Questions de patients « Puis-je avoir un enfant si je suis épileptique ? »

« Oui, une grossesse est envisageable mais nécessite certaines précautions afin de diminuer les conséquences des crises sur le développement du fœtus ainsi que celles du traitement médicamenteux, qu’il faut parfois par exemple modifier pour limiter les risques de malformation. Tout désir d’enfant doit être anticipé avec le médecin. »

Questions de patients « La présence répétée ou prolongée devant un écran est-elle contre-indiquée ? »

« Non, le risque de déclenchement de crises par des stimulations lumineuses ne concerne qu’un petit nombre de personnes dites photosensibles. »

INTERNET

Ligue française contre l’épilepsie (www.lfce.fr) : association de professionnels de santé.

Epilspsie-France (www.epilepsie-france.fr) : association de patients.

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