LE DIABÈTE DE TYPE 1 - Le Moniteur des Pharmacies n° 3014 du 11/01/2014 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 3014 du 11/01/2014
 

Cahiers Formation du Moniteur

ANALYSE D’ORDONNANCE

Elouan sort de l’hôpital avec une pompe à insuline

RÉCEPTION DE L’ORDONNANCE

Pour qui ?

Elouan, un garçon de 4 ans, pesant 17 kg.

Par quel médecin ?

Un pédiatre diabétologue hospitalier.

L’ordonnance est-elle conforme à la législation ?

Oui.

QUEL EST LE CONdiv DE L’ORDONNANCE ?

Que savez-vous du patient ?

Elouan est un petit garçon sans aucun condiv médical particulier.

Quel était le motif de la consultation ?

La maman d’Elouan avait consulté le pédiatre car son fils réclamait de plus en plus souvent à boire. Parallèlement, il se levait trois ou quatre fois par nuit pour aller aux toilettes, avec très souvent des énurésies nocturnes. Avec une glycémie à 2,2 g/l à jeun, Elouan a été hospitalisé pour la mise en place d’un traitement.

Que lui a dit le pédiatre diabétologue ?

Elouan souffre d’un diabète insulinodépendant qui nécessitera des injections d’insuline à vie.

Vérification de l’historique patient

Délivrance d’Orelox (cefpodoxime) pour une otite il y a un mois.

LA PRESCRIPTION EST-ELLE COHÉRENTE ?

Que comporte la prescription ?

• L’ordonnance comporte en premier lieu de l’insuline pour pompe : Novorapid est une analogue d’insuline d’action très rapide qui peut être utilisée en perfusion sous-cutanée continue d’insuline à l’aide d’une pompe.

• Le lecteur de glycémie Freestyle Optium mesure aussi bien la glycémie capillaire à l’aide des électrodes Freestyle Optium que la concentration sanguine du principal corps cétonique, le bêtahydroxybutyrate (bêta-FOHB), via les électrodes Freestyle Bêta-Cétone. La pharmacienne ne dispose pas du lecteur de glycémie que le Dr Lebel a prescrit.

La pharmacienne doit commander ce lecteur au grossiste car elle ne peut pas faire de substitution (réponse 2).

• Le kit BD Optimus Confort 0,20 mm permet le prélèvement sanguin au niveau du doigt. Il comprend un stylo autopiqueur réglable sur 6 positions associé à des lancettes Micro-Fine + 0,2 mm qui limitent la douleur. Ce kit contient également un collecteur de DASRI et deux carnets d’autosurveillance, ainsi qu’un étui de rangement.

• La prescription comporte également deux insulines en stylo.

Les stylos d’insuline ont pour objectif de remplacer la pompe à insuline en cas de panne de cette dernière (réponse 2).

Les cartouches Novorapid Penfill s’adaptent sur le stylo Novopen Echo que l’hôpital a fourni, permettant une délivrance par demi-unité.

Lantus Solostar est un stylo prérempli d’insuline d’action lente. Cette insuline est injectée à l’aide d’aiguilles 4 mm adaptées à l’usage pédiatrique.

• Biseptine (antiseptique) et compresses sont destinées au changement du cathéter et au remplissage de la pompe tous les 3 jours.

• Emlapatch, pansement adhésif cutané à base de lidocaïne et de prilocaïne, réduit la sensation douloureuse lors du changement du cathéter de la pompe.

• Enfin, le kit Glucagen permet l’injection de glucagon par l’entourage en cas d’hypoglycémie sévère avec perte de connaissance.

• Le prestataire fournit le matériel lié à la pompe et doit assurer une assistance permanente en termes d’éducation thérapeutique et de conduite à tenir, en accord avec le diabétologue.

Est-elle conforme aux référentiels ?

• Oui, l’insuline est associée à une autosurveillance glycémique et au respect de règles hygiénodiététiques.

• La prescription d’une pompe est adaptée à Elouan car il est souvent difficile d’obtenir chez un enfant de moins de 5 ans un contrôle glycémique satisfaisant avec un traitement par multi-injection : la pompe favorise une résorption plus régulière de l’insuline. Par ailleurs, l’utilisation d’une pompe améliore le quotidien des jeunes enfants en limitant le nombre d’injections sous-cutanées : le cathéter est laissé en place 2 à 3 jours. La pompe offre également une souplesse au niveau du rythme de la journée qui ne dépend plus des injections à heures fixes et facilite l’adaptation des doses d’insuline lors des maladies intercurrentes, fréquentes à cet âge.

• En revanche, Emlapatch n’est pas utilisé de manière systématique, même chez les enfants en bas âge.

Y a-t-il des médicaments à marge thérapeutique étroite ?

Oui, l’insuline. La surveillance glycémique permet de détecter tout surdosage.

Y a-t-il des contre-indications pour ce patient ?

Non.

Les posologies sont-elles cohérentes ?

• Aucune posologie n’est mentionnée. Les besoins individuels en insuline chez l’enfant se situent généralement entre 0,5 et 1,0 UI/kg/j, sauf lors de la première année au cours de laquelle ils peuvent être plus bas. Le schéma thérapeutique d’Elouan a été expliqué à sa maman lors de son séjour à l’hôpital : débit de base de 0,1 UI/h entre 0 h et 8 h et de 0,2 UI/h entre 8 h et 0 h avec en bolus 2 UI le matin, 2 UI le midi, 1 UI à 16 h, 1 UI le soir, ce qui correspond à 10 UI d’insuline par jour. Cette posologie est à adapter en fonction de l’autosurveillance glycémique.

• La posologie du glucagon est de 0,5 mg chez l’enfant de moins de 25 kg et/ou 6 ans.

• Pour le schéma de remplacement en cas de panne de la pompe à insuline, Novorapid Penfill est administré de la même façon que les bolus de la pompe. Lantus remplace l’insuline basale, soit 4 UI le soir au coucher.

• Emlapatch : appliquer le pansement au moins 1 heure avant le changement du cathéter, sur une surface cutanée propre et sèche.

Y a-t-il des interactions médicamenteuses ?

Non.

La prescription pose-t-elle un problème particulier ?

Oui, il manque l’unité d’affichage souhaitée pour le lecteur. La mère d’Elouan précise que le médecin souhaite un affichage en mg/dl.

Le traitement nécessite-t-il une surveillance particulière ?

Oui, une autosurveillance glycémique est à réaliser 5 à 8 fois par jour afin d’adapter la posologie pour obtenir un équilibre glycémique et repérer un blocage de pompe ou de cathéter (montée très rapide de la glycémie). Si la glycémie est > 2,5 g/l, une recherche de cétonémie est indispensable. Une mesure du taux d’hémoglobine glyquée (HbA1c) est également effectuée 4 fois par an afin de savoir si l’objectif glycémique est atteint.

QUELS CONSEILS D’ADMINISTRATION DONNER ?

Utilisation des médicaments

• La pompe à insuline peut se porter à la ceinture. Elle est reliée à un cathéter par l’intermédiaire d’une tubulure. La pompe est remplie tous les 2 à 3 jours, en même temps que le changement de cathéter.

• Les sites d’implantation (abdomen, cuisses, fesses, avant-bras…) doivent être variés pour limiter les lipodystrophies. Pendant les activités sportives, dont aquatiques, la pompe peut être déconnectée pendant 1 heure 30 au maximum.

• Emlapatch : après le retrait d’Emlapatch, nettoyer le site avec une compresse imbibée d’antiseptique, puis sécher avec une compresse avant de mettre en place le cathéter. Le cathéter est changé par les parents, qui ont été éduqués à l’hôpital.

Que faire en cas d’oubli de bolus ou de déconnexion involontaire ?

Vérifier la glycémie et la cétonémie si la glycémie capillaire est > 2,5 g/l (250 mg/dl). Puis suivre le protocole établi avec le diabétologue (reprendre les injections). Vérifier la tubulure lors de la reconnexion (toute bulle d’air suspend la perfusion d’insuline le temps de son évacuation).

Quand commencer le traitement ?

Le traitement a déjà été instauré lors de l’hospitalisation d’Elouan. Il doit être poursuivi selon la prescription.

L’entourage du patient pourra-t-il juger de l’efficacité du traitement ?

Oui, par les valeurs des glycémies capillaires dont les objectifs ont été définis avec le diabétologue (en général entre 70 et 160-180 mg/dl). Par ailleurs, une HbA1c inférieure à 7,5 % est souhaitable. Cette cible est moins stricte que celle imposée aux adultes (< 7 %) en raison du risque d’hypoglycémie plus important avant 5 ans.

Quels sont les principaux effets indésirables ?

• L’hypoglycémie est l’effet indésirable majeur de l’insuline. Sa prise en charge passe par l’absorption orale d’un morceau de sucre (5 g de sucre pour 20 kg chez l’enfant). En cas de perte de connaissance, une injection SC de glucagon est nécessaire. Une fois le malaise passé, prendre des sucres lents (pain ou biscuits : 15 g par 20 kg). En cas d’hypoglycémie sévère, une modification du débit de base peut être envisagée.

• En cas de lipodystrophie, ne pas insérer de cathéter pendant quelques semaines sur la zone.

• L’hyperglycémie peut survenir si la pompe est en panne ou le système d’administration bouché. Prévoir une trousse d’urgence comprenant des stylos d’insuline pour mettre en place le schéma de remplacement établi avec le diabétologue.

Quels signes nécessiteraient d’appeler le médecin ?

L’entourage d’Elouan doit contacter le diabétologue s’il a du mal à gérer seul un déséquilibre glycémique, notamment en cas de maladie intercurrente.

CONSEILS COMPLÉMENTAIRES

• Insister sur l’importance de l’autosurveillance. Vérifier qu’un carnet de suivi a été remis et proposer l’impression des courbes glycémiques.

• Encourager à ne prendre aucun médicament sans l’avis d’un professionnel de santé.

• Inciter la mère d’Elouan à se rapprocher d’une association de diabétique comme l’Aide aux jeunes diabétiques (AJD).

Intervention pharmaceutique

Trois semaines plus tard, la maman d’Elouan vous appelle dès l’ouverture de la pharmacie.

PATHOLOGIE

Le diabète de type 1 en 4 questions

Le diabète de type 1 apparaît chez des patients de plus en plus jeunes et sa fréquence augmente régulièrement. Cette affection auto-immune induit une carence en insuline liée à la destruction progressive des cellules bêta des îlots de Langerhans.

1 QUELS SONT LES SIGNES CLINIQUES ?

• Le début est habituellement brutal. Le « syndrome cardinal » associe une polyurie importante (3 à 4 l/j), une polydipsie et un amaigrissement rapide contrastant avec un appétit conservé ou une polyphagie.

• Chez le petit enfant, des prises de biberons supplémentaires, des couches très remplies ou la survenue d’une énurésie secondaire doivent attirer l’attention, de même que la présence de douleurs abdominales. Chez l’enfant, c’est parfois au stade tardif de cétoacidose que le diabète de type 1 est découvert.

• Le diabète peut aussi être découvert fortuitement par la mise en évidence d’une hyperglycémie, d’une glycosurie ou d’une cétonurie lors d’un bilan demandé pour une autre raison (grossesse, bilan familial ou évaluation du risque dans une fratrie…).

• Parmi les autres formes cliniques, on trouve le diabète de type 1 lent ou LADA (latent auto-immune diabetes in adults). Il s’agit d’une forme intermédiaire entre le diabète de type 2 et le diabète de type 1 en termes de vitesse de dégradation de l’insulinosécrétion. Par ailleurs, le diabète cétosique du sujet noir d’origine africaine subsaharienne débute par une décompensation cétosique nécessitant une insulinothérapie transitoire, et se caractérise par l’absence d’autoanticorps spécifiques.

• L’examen clinique recherche aussi les autres facteurs de risque cardiovasculaires ainsi qu’une atteinte des organes cibles : œil, rein, cœur, système vasculaire, cerveau, pieds, système nerveux périphérique.

2 QUELS SONT LES FACTEURS DE RISQUE ?

L’agression auto-immune survient sur un terrain de susceptibilité génétique à la suite de facteurs déclenchants.

• Facteurs génétiques

Un diabète de type 1 est retrouvé chez les apparentés d’un sujet atteint dans 10 % des cas, mais, dans 90 % des cas, il n’y a pas d’autre cas dans la famille. Le risque est d’environ 5 % pour les frères, les sœurs ou les enfants du cas index, et de 35 à 50 % « seulement » pour les vrais jumeaux, ce qui souligne l’importance des facteurs d’environnement. La susceptibilité génétique dans le diabète de type 1 dépend pour beaucoup (50 %) des gènes du système HLA, mais de nombreux autres gènes sont impliqués (gène de l’insuline).

• Facteurs environnementaux

Certains arguments permettent d’évoquer le rôle de l’environnement dans la survenue du diabète de type 1 : incidence croissante de la maladie non attribuable à des modifications génomiques, jumeaux non concordants pour le diabète de type 1, incidence dans les populations migrantes, incidence croissante dans les pays industrialisés.

• Des infections virales (Coxsackies) sont associées à la survenue de la maladie, et il existe un pic hivernal de diagnostic dans les pays d’Europe.

• Selon l’hypothèse hygiéniste, au contraire, la diminution de l’exposition des enfants à de nombreux agents infectieux altère la maturation du système immunitaire et favorise l’émergence des maladies auto-immunes, dont le diabète.

• Le rôle des protéines du lait de vache a été suggéré. La supplémentation en vitamine D au cours de la petite enfance aurait au contraire un rôle protecteur. La surcharge alimentaire et la prise de poids excessive augmenteraient l’incidence de la maladie.

3 QUELS SONT LES EXAMENS COMPLEMENTAIRES ?

• Pour confirmer le diabète : glycémie à jeun (plus de 8 h de jeûne) ≥ à 1,26 g/l sur deux prélèvements successifs, ou glycémie 2 heures après charge de 75 g de glucose ≥ à 2 g/l, ou présence de signes cliniques d’hyperglycémie associés à une glycémie ≥ à 2 g/l à n’importe quel moment de la journée. Au moment du diagnostic de diabète de type 1, la glycémie est souvent franchement élevée, avec une glycosurie massive et une cétonémie/cétonurie. Un dosage de l’hémoglobine glyquée A1c est également pratiqué.

• La réaction auto-immune survient plusieurs années avant l’apparition du diabète : anticorps anti-GAD (acide glutamate-décarboxylase), anticorps anti-IA2 (islet antigen 2), anticorps anti-insuline, anticorps anti-îlots. Exceptionnellement, le typage HLA est demandé.

• Pour rechercher d’autres maladies auto-immunes associées : dosage de la TSH et recherche d’anticorps antithyroïdiens (thyroïdite), éventuellement anticorps antigliadine (maladie cœliaque).

• Pour évaluer la présence de complications chroniques, généralement absentes lors de la découverte du diabète de type 1 : fonction rénale, recherche d’une microalbuminurie, électrocardiogramme, rétinographie ou consultation ophtalmologique. Un bilan lipidique peut être pratiqué, mais habituellement il s’agit de patients jeunes ayant un risque cardiovasculaire faible.

4 QUELLE EST L’ÉVOLUTION ?

L’insulinothérapie précoce et intensive induit parfois une rémission partielle ou totale de la maladie au cours de laquelle le traitement par insuline peut être allégé, voire stoppé (reprise d’une sécrétion insulinique). Mais la rechute survient toujours en quelques semaines ou mois.

• Les complications métaboliques aiguës

– La cétoacidose inaugure parfois la maladie chez l’enfant. Elle peut aussi survenir chez l’adolescent qui arrête ses injections, ou bien à l’occasion d’une infection ou d’une pathologie intercurrente. Elle provient de l’accumulation de corps cétoniques, induite par la carence en insuline.

La cétoacidose associe une hyperglycémie majeure, une glycosurie massive, une cétonurie ou une cétonémie positive, un pH artériel < 7,2 et des bicarbonates < 15 mmol/l. Il existe une déshydratation importante. Le risque est l’évolution vers des troubles de la conscience pouvant aller jusqu’au coma voire vers le décès (4 à 5 % de mortalité). La prévention est essentielle : recherche d’acétone à la bandelette urinaire ou sur sang capillaire si glycémie > 2,5 g/l, supplémentation en insuline rapide en cas de cétose, maintien de l’insulinothérapie même en cas d’intolérance alimentaire ou digestive. En cas de persistance de la cétose, une hospitalisation en urgence peut s’avérer nécessaire.

– Les hypoglycémies résultent de l’inéquation entre la dose d’insuline (erreur de maniement, lipodystrophies) et les apports alimentaires et/ou la pratique d’une activité physique. Elles sont parfois asymptomatiques. Les prodromes sont de type bêta-adrénergique : tremblements, palpitations, sueurs, pâleur surviennent pour des baisses modérées (0,50 à 0,80 g/l). Puis viennent les symptômes glucopéniques (glycémie < 0,5 g/l) : malaise, trouble du comportement, paresthésies, diplopie, crise d’épilepsie, voire coma hypoglycémique.

• Les complications dégénératives

Le diabète de type 1 expose aux mêmes complications que celui de type 2, favorisées par l’importance et l’ancienneté de l’hyperglycémie.

• Les complications microvasculaires sont de 3 trois ordres :

– la rétinopathie diabétique est à dépister tous les ans, trois ans après le diagnostic de la maladie ;

– la néphropathie diabétique débute par le stade de microalbuminurie puis évolue vers le stade de protéinurie avérée et d’insuffisance rénale. Elle doit être dépistée annuellement par la recherche de microalbuminurie et l’estimation de la fonction rénale. L’insuffisance rénale est la principale cause de mortalité chez le diabétique de type 1 ;

– la neuropathie la plus fréquente est la polynévrite sensitivomotrice symétrique des membres inférieurs. Elle expose au risque d’apparition de troubles trophiques et d’ulcération cutanée (mal perforant plantaire). Elle doit être dépistée une fois par an (monofilament). Par ailleurs, l’atteinte du système nerveux autonome peut se manifester au niveau de différents organes : estomac (gastroparésie), système cardiovasculaire (hypotension orthostatique, tachycardie), organes génitaux, système sudoral.

• Les complications macrovasculaires sont les coronaropathies, les accidents vasculaires cérébraux, l’insuffisance cardiaque, l’artériopathie des membres inférieurs.

THÉRAPEUTIQUE

Comment traiter le diabète de type 1 ?

La prise en charge du diabète de type 1 associe une insulinothérapie permettant de stabiliser la glycémie, une alimentation équilibrée, un exercice physique régulier et la correction éventuelle de facteurs de risque cardiovasculaire. Objectifs généraux

STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE

Objectifs généraux

• L’objectif à court terme de l’insulinothérapie est de compenser le déficit en insuline pour obtenir une glycémie adéquate (0,70 à 1,20 g/l avant les repas) tout en prévenant les hypoglycémies et la cétoacidose. A plus long terme, l’insuline vise à stabiliser le diabète pour éviter ou réduire les complications liées à l’hyperglycémie chronique.

• Suite à la découverte d’un diabète de type 1, une hospitalisation est indispensable pour la mise en route de l’insulinothérapie. Celle-ci s’accompagne d’une éducation thérapeutique du patient : apprentissage des injections d’insuline, schéma thérapeutique, adaptation des doses, autosurveillance glycémique (ASG), prévention et correction des hypoglycémies ou de la cétoacidose, mesures hygiénodiététiques, aide psychologique. L‘hospitalisation est urgente en cas de cétoacidose et de déshydratation.

Mesures hygiénodiététiques

• Les patients diabétiques de type 1 doivent avoir une alimentation équilibrée, comme tout autre patient. En règle générale, les apports conseillés comportent 40 % de glucides (de préférence complexes et riches en fibres), 20 % de protéines et 40 % de lipides. Ces recommandations doivent permettre au patient de retrouver un poids satisfaisant, tout en évitant une prise de poids excessive (indice de masse corporelle < 25).

• La pratique régulière d’une activité physique est fortement recommandée : 30 à 60 minutes deux ou trois fois par semaine, adaptée aux capacités physiques du patient. Elle améliore la sensibilité à l’insuline exogène et de ce fait permet une réduction des doses d’insuline avec un meilleur équilibre métabolique. En cas d’exercice physique intense imprévu, une collation durant ou après l’effort permet d’éviter une hypoglycémie.

• Un sevrage tabagique s’avère nécessaire pour limiter le risque cardiovasculaire.

Insulinothérapie

• L’objectif de l’insulinothérapie est de mimer la sécrétion d’insuline physiologique.

Les besoins en insuline dépendent du patient, des circonstances et des événements dans la journée : alimentation, exercice physique. L’effet de l’insuline dépend de l’insulinémie mais aussi de l’insulinorésistance du patient, qui peut également varier selon les circonstances. En général, les besoins quotidiens en insuline sont compris entre 0,5 et 1 UI/kg/jour chez un sujet de poids normal.

• Dans les premières semaines de l’insulinothérapie, les doses d’insuline nécessaires peuvent diminuer rapidement : cette période de « lune de miel » justifie une autosurveillance glycémique accrue. Les besoins en insuline augmentent ensuite de façon variable dans le temps selon les patients.

Différents schémas d’insulinothérapie

• Schéma basal-bolus à 4 ou 5 injections/jour : insuline rapide (ou analogue rapide) avant chaque repas et 1 ou 2 injections par jour d’insuline de durée intermédiaire ou 1 injection le soir d’analogue lente au coucher.

• Schéma basal-bolus à l’aide d’une pompe : la pompe à insuline permet de délivrer un débit de base fixe ou variable selon les horaires (jour, nuit), complété par un bolus avant les prises alimentaires. Avec ce système, l’insuline est diffusée en continu par l’intermédiaire d’un petit cathéter en Téflon placé sous la peau à l’aide d’une aiguille. Le cathéter se change habituellement tous les 3 jours, en même temps que le réservoir d’insuline (1,8 à 3 ml d’insuline selon les modèles, soit 180 à 300 unités).

La pompe ainsi que les consommables (cathéter, réservoir, pile…) sont fournis par un prestataire de service qui assure la formation du patient et la maintenance du matériel. Ce schéma permet une insulinothérapie fonctionnelle. C’est une technique éducative d’adaptation optimisée des doses basales et prandiales d’insuline chez un patient sous schéma basal-bolus ou sous pompe à insuline. Elle améliore l’équilibre glycémique et la qualité de vie des patients. Avec la réalisation d’une épreuve de jeûne et de repas test, le patient détermine ses besoins respectifs en insuline basale et en insuline prandiale. Il apprend à quantifier la quantité de glucides à chaque repas, pour un choix optimal de ses différentes doses d’insuline. Des stages pratiques d’insulinothérapie fonctionnelle sont organisés par la plupart des équipes de diabétologie.

• Plus rarement, schéma à 3 injections : mélange d’insuline rapide (ou analogue rapide) et intermédiaire le matin et le soir, insuline rapide avant le repas de midi.

• Schéma à 2 injections : mélange d’insuline rapide (ou analogue rapide) et intermédiaire le matin et le soir éventuellement.

Choix du schéma

Le schéma adopté est un compromis pour chaque diabétique en fonction de sa tolérance, de son profil (âge, poids, horaires, ancienneté et stabilité du diabète) et de la qualité du contrôle glycémique. Une HbA1c élevée de façon répétée malgré les multi-injections, des hypoglycémies répétées et une variabilité glycémique importante orientent le choix vers une pompe à insuline chez l’enfant et la femme enceinte par exemple.

Modalités d’injection

• Le passage de l’insuline dans le sang et donc son action dépendent de la nature de l’insuline mais aussi de la technique d’injection. L’insuline doit être placée dans le tissu sous-cutané profond, juste au-dessus du muscle, avec une injection à 90° (ou à 45°), avec ou sans pli de peau. La rapidité de diffusion de l’insuline dépend de la profondeur et de la zone de l’injection : partie basse et externe de l’abdomen, parties supérieure et externe des bras, partie antérieure et externe des cuisses et partie haute des fesses. En pratique, les injections d’insuline rapide sont pratiquées dans des zones « rapides » (abdomen et bras) alors que les insulines d’action longue le sont dans des zones « lentes » (cuisses et fesses), avec une rotation dans la même zone (distance de 3 cm entre 2 injections consécutives) pour éviter des lipodystrophies. Après injection, il est recommandé d’attendre 5 à 10 secondes avant de retirer l’aiguille pour que l’insuline ne ressorte pas. La technique d’injection peut être différente selon la région du corps. Les aiguilles courtes (jusqu’à 6 mm) sont actuellement préférées pour éviter le risque d’injection dans le muscle. La tolérance des injections semble meilleure.

• Avec une pompe à insuline, le cathéter est implanté dans l’abdomen et changé tous les deux à trois jours, en même temps que le remplissage de la pompe.

Autosurveillance glycémique

Une autosurveillance glycémique pluriquotidienne (4 à 6 fois par jour voire plus) est essentielle pour contrôler les réponses glycémiques aux injections d’insuline et adapter les doses à injecter. Le patient prélève une goutte de sang à l’aide d’un autopiqueur (le plus souvent sur la face externe d’un doigt). Puis il mesure la glycémie capillaire à l’aide d’un lecteur de glycémie au minimum avant chaque injection et avant le coucher.

Le patient adapte son traitement à son mode de vie (alimentation, activité physique), et non l’inverse.

Nombre de circonstances nécessitent une augmentation de la fréquence de l’autosurveillance glycémique : changement d’insuline, introduction d’autres traitements médicamenteux, apparition de fièvre, infection… L’autosurveillance glycémique doit être rigoureuse en cas de traitement par pompe car le corps n’a aucune réserve d’insuline. Le moindre problème de pompe ou de cathéter engendre une montée très rapide de la glycémie. Les pompes sont cependant équipées d’une alarme en cas d’éventuelle anomalie ou de dysfonctionnement.

Adaptation des doses

Une autosurveillance glycémique (ASG) pluriquotidienne est nécessaire pour surveiller les réponses glycémiques aux injections d’insuline et adapter les doses à injecter.

Adaptation prévisionnelle : elle est indispensable, basée sur l’effet qu’ont eu les doses d’insuline injectées à la même heure les jours précédents. Les doses à venir seront modifiées si les glycémies de fin de dose sont différentes, sans cause identifiable.

Adaptation anticipatrice : elle tient compte des événements à venir au cours des heures suivantes. Exemples : augmentation d’une dose d’insuline avant un repas riche en glucides ou diminution d’une dose avant un exercice physique.

Adaptation correctrice : les modifications de dosage sont utilisées pour corriger une glycémie trop élevée ou trop basse. L’adaptation des doses d’insuline prend en compte ces 3 aspects. Les modifications de doses se font par paliers de 1 à 2 unités en fonction des résultats de l’ASG.

En cas d’hypo- ou d’hyperglycémie justifiée par une cause facilement identifiable, aucune modification des doses d’insuline n’est recommandée. En revanche, en cas d’hypoglycémie inexpliquée, il est nécessaire de diminuer la dose d’insuline couvrant la période du malaise hypoglycémique. Lors d’une hyperglycémie non expliquée, une augmentation des doses d’insuline sera recommandée après la confirmation des mesures sur plusieurs jours successifs.

TRAITEMENTS

L’insuline représente le seul traitement pharmacologique du diabète de type 1. Cette hormone hypoglycémiante et anabolisante favorise la pénétration intracellulaire du glucose et du potassium, ainsi que son stockage sous forme de glycogène.

Différentes insulines

Les insulines sont produites par la technique de l’ADN recombinant sur Saccharomyces cerevisiæ. Les insulines rapides et d’action intermédiaire sont des insulines humaines alors que les analogues rapides ou lents d’insuline comportent quelques modifications.

Les insulines sont dosées à 100 UI/ml et se présentent sous forme de flacons, cartouches ou stylos préremplis jetables (voir tableau page 11). Elles diffèrent par leurs caractéristiques pharmacocinétiques.

• Les insulines rapides ont un début d’action entre 30 à 60 minutes, un pic entre 2 et 4 heures et une durée d’action de 4 à 6 heures. Ces solutions doivent être injectées par voie sous-cutanée 20 à 30 minutes avant un repas ; elles peuvent être utilisées également par voie IV ou IM.

Les analogues rapides de l’insuline (ou insulines ultrarapides) comportent des changements minimes d’acides aminés sur la chaîne peptidique de l’insuline qui modifient les paramètres pharmacocinétiques : début d’action entre 15 et 35 minutes, pic entre 1 et 3 heures avec une durée d’action de 3 à 5 heures. Ces solutions doivent être injectées par voie SC juste avant le début du repas. L’addition de protamine à ces analogues allonge la durée d’action mais cette préparation ne s’utilise que dans des insulines prémélangées.

• Les insulines d’action intermédiaire (insulines isophanes ou NPH : neutral protamine Hagedorn) ont un début d’action entre 2 à 4 heures, avec une durée d’action de l’ordre de 12 heures. Elles sont destinées à couvrir les besoins basaux d’insuline et non pas les besoins prandiaux. Ces suspensions doivent être homogénéisées par retournement avant injection.

• Les insulines prémélangées sont de 2 types : mélanges d’insuline et d’insuline NPH en proportions fixes (Mixtard et Umuline), ou mélanges d’insuline ultrarapide avec le même analogue protaminé, en proportions fixes et variées (Humalog Mix, Novomix). La dénomination de ces spécialités reprend le pourcentage d’insuline rapide ou ultrarapide dans le mélange. Le début d’action de la spécialité dépend bien sûr du type d’insuline (rapide ou ultrarapide) dans la préparation. Ces suspensions peuvent être utilisées quand le rapport insuline rapide/insuline d’action intermédiaire est stable mais ne permettent pas une adaptation fine des doses d’insuline rapide.

• Les analogues lents d’insuline sont destinés également à couvrir les besoins de base et doivent être complétés par des insulines d’action rapide injectées avant les repas. L’insuline glargine, obtenue par des modifications d’acides aminés sur la chaîne peptidique, a un début d’action entre 2 et 4 heures et une durée d’action d’environ 24 heures. L’insuline détémir, liée à l’albumine plasmatique, a une durée d’action qui couvre entre 12 et 24 heures ; elle est injectée, selon les patients, une ou deux fois par jour.

Conservation

Les insulines se conservent dans le bas du réfrigérateur entre + 2 et + 8 °C, sauf pour les insulines en cours d’utilisation qui peuvent rester 30 jours à température ambiante. En cas de mauvaise conservation (congélation ou stockage à une chaleur excessive), l’insuline perd son activité biologique.

Principaux effets indésirables

L’insuline entraîne peu d’effets indésirables. Les effets les plus gênants résultent des difficultés d’adaptation de doses :

– prise de poids en cas de surdosage chronique, conséquence de l’action anabolisante de l’insuline ;

– lipodystrophies, avec amas graisseux généralement dus à des injections répétées dans un même site, altérant les propriétés pharmacodynamiques de l’insuline. Pour les éviter, il est utile de faire varier le lieu à chaque injection de 3 cm dans une même zone (ceinture abdominale, cuisse…) ;

– hypoglycémies : elles peuvent résulter d’une prise alimentaire insuffisante, d’un exercice physique inopiné, d’une mauvaise adaptation ou d’une erreur de dose ;

– hyperglycémies : elles peuvent également résulter d’une modification de prise alimentaire, d’oubli ou de non-adaptation de doses d’insuline, mais aussi d’un événement intercurrent (fièvre, infection) modifiant l’insulinorésistance.

Prise en charge d’une hypoglycémie

Les signes adrénergiques (sueurs, tremblements, palpitations) et neuroglucopéniques (troubles de la vue, de l’équilibre, de la vigilance) sont variables selon les individus et les circonstances. Une glycémie capillaire permet un diagnostic rapide et une prise en charge adéquate. En dessous de 4 mmol/l, un patient conscient nécessite un resucrage rapide par voie orale, avec 15 g de glucose (3 morceaux de sucre ou 2 cuillères à café de confiture), puis un nouveau contrôle de glycémie 15 minutes plus tard.

En cas d’hypoglycémie sévère chez un patient non conscient, une injection intramusculaire de 1 mg de glucagon sera nécessaire (0,5 mg chez l’enfant de poids < 25 kg). L’action hyperglycémiante se manifeste en 10 à 15 minutes et un resucrage peut être proposé par voie orale dès la reprise de conscience. En cas d’inefficacité du glucagon, une seconde injection est inutile (mais non dangereuse) et une perfusion de sérum glucosé s’avère nécessaire.

Prise en charge d’une hyperglycémie

En cas de glycémie > 2,5 g/l, il est impératif de vérifier la présence de corps cétoniques. En effet, la carence en insuline peut entraîner :

– l’élévation de la glycémie par déficit d’utilisation du glucose, avec glycosurie quand la glycémie dépasse 1,80 g/l. Ceci entraîne une élévation du volume urinaire pouvant conduire à une déshydratation ;

– l’augmentation du métabolisme des acides gras avec production de corps cétoniques. La cétoacidose s’installe rapidement et une glycémie > 2,5 g/l doit obligatoirement amener à rechercher des corps cétoniques dans le sang (bandelettes Bêta-Cétone sur lecteur Optium Xceed) ou les urines (Keto-Diabur, Keto-Diastix). En cas de cétonurie à 1 ou 2 croix, le patient suivra un protocole de correction de la cétose avec des rajouts itératifs d’insuline. Une cétonurie à 3 croix ou plus doit conduire à une hospitalisation rapide du fait du risque de coma diabétique. Dans tous les cas, une surveillance médicale est nécessaire pour étudier les causes de survenue de la cétose.

Interactions déconseillées

Seul le danazol est déconseillé du fait de son effet diabétogène. Pour les autres médicaments pouvant modifier la glycémie (IEC, bêta-2-mimétiques…) ou masquer les signes d’hypoglycémies (bêtabloquants), l’autosurveillance glycémique sera renforcée.

Surveillance des traitements

Pour éviter l’apparition des nombreuses complications artérielles et neuropathiques dégénératives, une surveillance biologique de l’efficacité du traitement et une surveillance clinique de dépistage et de suivi des complications sont obligatoires.

Surveillance biologique

• Hémoglobine glyquée HbA1c tous les 3 mois : donne le reflet des glycémies sur une période de 2 mois et assure la surveillance de l’efficacité du traitement. Un objectif < 7,5 %, à moduler par le spécialiste selon les patients, est généralement requis, sachant qu’une diminution de 1 % de l’HbA1c diminue de 20 % la fréquence des complications du diabète.

• Bilan biologique annuel avec exploration lipidique, bilan rénal : protéinurie (bandelette), microalbuminurie et créatininémie (recherche néphropathie diabétique).

Surveillance clinique

Dans les 6 mois qui suivent le diagnostic, des contacts médicaux (consultations, appels) fréquents sont nécessaires pour compléter l’éducation du patient, assurer un soutien psychologique et évaluer la survenue d’hypoglycémie et la qualité de vie. Par la suite, une consultation médicale est recommandée tous les 3 mois pour vérifier la maîtrise du diabète, dépister et suivre les complications :

– examen ophtalmologique annuel avec examen du fond d’œil (recherche de rétinopathie),

– examen des pieds : inspection à chaque consultation et test au monofilament annuel (recherche d’une neuropathie diabétique),

– examen cardiovasculaire avec ECG annuel,

– Bilan dentaire annuel.

POINT DE VUE

Alfred Penfornis, chef du service d’endocrinologie, métabolisme et diabétologie-nutrition, hôpital Jean-Minjoz, CHU de Besançon, et professeur à l’université de Franche-Comté, interrogé par Carole Fusi

« Le diabète s’adapte désormais à la vie des patients et non l’inverse »

La pompe à insuline est-elle destinée à certains patients en particulier ?

Non, elle peut convenir à tous les patients diabétiques de type 1. Cependant, bien que facilitant l’équilibre glycémique, le traitement par pompe est plus onéreux qu’un traitement par multi-injection d’insuline. Il est donc souvent réservé aux patients en situation particulière, par exemple les adultes qui ont du mal à équilibrer leur diabète ou qui font beaucoup d’hypoglycémies. Chez les jeunes enfants en âge préscolaire, la pompe à insuline est proposée en première intention. Elle est également souvent proposée chez la femme enceinte ou désirant l’être à court terme.

Le patient diabétique de type 1 doit-il suivre un régime alimentaire particulier ?

Non, le diabète de type 1 n’est pas lié à l’alimentation. Le patient peut donc s’alimenter comme la population générale. L’insuline doit cependant être adaptée à l’alimentation, c’est ce qu’on appelle l’insulinothérapie fonctionnelle. Le diabète de type 1 s’adapte désormais à la vie du patient, et non l’inverse. C’est un changement considérable dans la vie de celui-ci.

Y a-t-il des nouveautés dans le diabète de type 1 ?

Oui, la mesure en continu du glucose [MCG] est désormais possible grâce à des électrodes insérées en sous-cutané (Enlite, Dexcom, Freestyle Navigator II…). Le suivi de la « glycémie » (plus exactement de la concentration de glucose sous-cutané) est donc permanent. L’infusion d’insuline par la pompe n’est cependant pas encore asservie à cette MCG et c’est toujours le patient qui décide de la dose d’insuline à s’administrer. Une exception est la fonction « hypo-stop » qui interrompt automatiquement l’infusion d’insuline pendant 2 heures en cas d’hypoglycémie et d’absence d’intervention du patient. Cette fonction peut être très utile chez les patients souffrant d’hypoglycémie nocturne. Ce système de MCG peut être couplé à différentes autres alarmes.

ACCOMPAGNER LE PATIENT

Alice, 34 ans, professeur de biologie en lycée

« Quand mon diabète a été découvert, j’avais 13 ans. Soif intense, fatigue, mictions 3 à 4 fois par nuit, mycose sur la langue avaient d’abord été mises sur le compte de la chaleur de l’été et sur la prise récente d’antibiotique, jusqu’à ce qu’un pharmacien incite mes parents à effectuer une bandelette urinaire. Ce test, positif, a été confirmé chez le médecin par une glycémie capillaire. Des bribes de mots finissant par « -émie » entre mes parents et le médecin m’ont fait croire que je souffrais d’une leucémie. Quand celui-ci m’a tout expliqué, j’ai été rassurée. Mais les débuts du traitement n’ont pas été faciles : les seringues me faisaient peur et les manipulations des flacons étaient complexes. Aujourd’hui, les stylos préremplis ont simplifié le traitement et l’insulinothérapie fonctionnelle a fait disparaître les interdits alimentaires. Reste encore mes difficultés à gérer mes hypoglycémies au travail. J’ai donc tendance à maintenir une légère hyperglycémie artificielle. »

LE DIABÈTE DE TYPE 1 VU PAR LES PATIENTS

Impact psychologique

• Après le choc de l’annonce du diagnostic, les diabétiques sont souvent anéantis, voire dans la négation. S’ensuit généralement un sentiment de révolte puis une phase temporaire de dépression qui aboutit à la résignation. Toutefois, certains patients conservent de la rancœur, se sentant dévalorisés, et diminués physiquement. D’autres nient leur maladie, les amenant à une prise en charge partielle de leur diabète.

• Pour accepter le diabète, les patients doivent effectuer le deuil de leur ancienne façon de vivre et intégrer les changements que cette pathologie chronique implique : vie suspendue à un traitement qui soigne mais qui ne guérit pas, remise en cause des projets personnels et professionnels, regard des autres qui les réduit à leur affection. Les diabétiques sont deux fois plus susceptibles de développer une dépression.

• Ce bouleversement est d’autant plus difficile chez les adolescents, que leurs parents ont tendance à les surprotéger en raison d’un sentiment de culpabilité. Cette sensation d’étouffement peut s’ajouter à un sentiment de honte, de punition…

Impact sur la vie quotidienne

• L’impact du diabète de type 1 est avant tout lié aux contraintes thérapeutiques : plusieurs injections et mesures glycémiques par jour dans un lieu adéquat, régime alimentaire contrôlé, hypoglycémies pouvant survenir dans des situations gênantes et limitation des activités sportives et de loisir.

• Les conséquences des complications liées aux diabètes sont également à prendre en compte : baisse de l’acuité visuelle, risque d’amputation…

• Cette maladie chronique complique la souscription aux assurances, l’obtention d’emprunts bancaires, du permis de conduire…

Impact professionnel

• Selon l’enquête « Diabète et travail » réalisée par l’AFD du 8 au 22 avril 2013, un quart des répondants estime avoir été victime d’une discrimination liée au diabète au cours de leur carrière et un tiers a décidé de cacher sa maladie.

• Tous les métiers ne sont pas envisageables en cas de diabète de type 1 : postes de sécurité, transport de personnes, travail en hdiv, métiers nécessitant une bonne acuité visuelle…

• Par ailleurs, le diabète de type 1 augmente le risque de passage en invalidité ou en retraite anticipée avant 60 ans.

Impact sur la vie sexuelle

• La dysfonction érectile est 3 fois plus fréquente chez les hommes diabétiques. Les troubles de la sexualité féminine sont plus difficiles à mettre en évidence mais semblent eux aussi plus fréquents en cas de diabète.

• Chez les patients sous pompe à insuline, celle-ci peut être déconnectée pendant les rapports sexuels pendant une heure au maximum.

À DIRE AUX PATIENTS

A propos de la pathologie

• En l’absence de traitement, l’augmentation de la glycémie consécutive au déficit en insuline aboutit très rapidement à un coma acidocétosique potentiellement mortel. Si les doses d’insuline sont sous-estimées, l’hyperglycémie, modérée mais chronique, endommage les vaisseaux sanguins et les nerfs, à l’origine de complications à long terme : cécité, insuffisance rénale et cardiaque, atteinte des pieds avec risque d’amputation…

• Vérifier que le suivi des complications du diabète soit effectué.

• Inciter le patient à examiner régulièrement l’aspect cutané de ses pieds, à surveiller des déformations éventuelles et à porter des chaussures adaptées.

• Les infections ne doivent pas être négligées. Le vaccin contre la grippe est à renouveler chaque année.

• En raison des conséquences néfastes d’une hyperglycémie sur le fœtus, toute grossesse doit être anticipée.

A propos du traitement

• Les doses d’insuline varient d’un patient à l’autre selon plusieurs facteurs : âge, poids, stade pubertaire, ancienneté du diabète, apports nutritionnels, activité physique… Ces doses doivent être réévaluées régulièrement par mesure glycémique capillaire : environ 4 fois par jour. Une autosurveillance doit être également pratiquée avant de conduire, avant et après des efforts physiques intenses, dans des circonstances de repas ou d’activités inhabituelles, et renforcée si un nouveau traitement est mis en place, par corticoïdes notamment, ou en cas d’infections intercurrentes.

• Tremblements, pâleur, sueurs, fatigue, troubles de la parole, de l’équilibre, de l’humeur impliquent la mesure de la glycémie et éventuellement un resucrage (l’équivalent de 15 g de sucre : morceaux, jus de fruits). Attention, le chocolat et les fruits ont un effet hyperglycémiant trop lent ! Le patient doit être également en possession d’un kit de glucagon et d’une « carte de diabétique ». La recherche étiologique est indispensable.

• L’évaluation de l’efficacité du traitement repose sur la mesure de l’hémoglobine glyquée (HbA1c), la survenue d’hypoglycémies, la prise en compte de la croissance (enfant) et de la qualité de vie.

A propos de l’hygiène de vie

• Manger équilibré et varié, selon ses besoins et à heures régulières, sans sauter de repas. Eviter l’alcool qui inhibe les réactions de compensation pouvant faciliter la survenue de coma hypoglycémique.

• Pratiquer une activité physique régulière : sportive (natation, footing, vélo…) ou de loisirs (jardinage, bricolage, jeux…). Cela contribue à diminuer les doses quotidiennes d’insuline et à favoriser un meilleur équilibre métabolique. Attention, certains sports sont déconseillés : boxe, plongé sous-marine…. Dans tous les cas, ne pas commencer d’activité sportive si la glycémie est supérieure à 2,5 g/l et prévenir son entourage en cas de pratique sportive solitaire.

• Les autres facteurs de risque cardiovasculaire doivent être corrigés si nécessaire : poids, HTA, tabagisme… Une hygiène dentaire rigoureuse est également nécessaire.

Délivreriez-vous ces ordonnances ?

ORDONNANCE 1 : OUI. Mais l’IEC améliore la tolérance au glucose qui aurait pour conséquence une réduction des besoins en insuline, surtout au début du traitement. La survenue de malaises hypoglycémiques semble toutefois exceptionnelle. Prévenir le patient de renforcer son autosurveillance glycémique.

ORDONNANCE 1 : OUI. Mais le bêtabloquant est susceptible lors d’une hypoglycémie de masquer les symptômes liés à la décharge d’adrénaline : palpitations et tachycardie. Prévenir le patient de renforcer l’autosurveillance glycémique, surtout en début de traitement. Par ailleurs, le propranolol s’oppose à la réponse des catécholamines endogènes permettant de corriger une hypoglycémie : un malaise hypoglycémique peut donc être prolongé.

MÉMO-DÉLIVRANCE

LA PRESCRIPTION EST-ELLE COHÉRENTE ?

En cas de schéma multi-injection

• Insulines : l’ordonnance doit comporter une insuline intermédiaire ou lente (injectée le soir, ou matin et soir) et une insuline rapide (injectée avant chaque repas). A conserver entre + 2 et + 8 °C, sauf pour le flacon en cours (30 jours à température ambiante).

• Matériel d’injection : aiguilles, stylos, seringues à insuline de dépannage.

• Matériel de surveillance glycémique (surveillance 4 à 6 fois par jour) :

– stylo autopiqueur, lancettes,

– lecteur de glycémie, bandelettes,

– boîte pour les DASRI.

• Matériel de surveillance des corps cétoniques (en cas d’hyperglycémie) : bandelettes urinaires ou bandelettes sur sang capillaire.

• Glucagon : en cas de malaise hypoglycémique. Vérifier périodiquement la date de validité. Peut se conserver à température ambiante chez le patient, maximum 18 mois.

En cas de pompe à insuline

• Insulines : insuline ultrarapide pour le remplissage de la pompe tous les deux à trois jours. Prévoir les insulines pour le schéma multi-injection en cas de défaillance de la pompe.

• Matériel d’injection : fourni par le prestataire pour la pompe. Aiguilles, stylos, seringues à insuline de dépannage.

• Matériel de surveillance glycémique et glucagon : cf. supra.

LE PATIENT CONNAÎT-IL LES CONDUITES À TENIR EN CAS D’HYPO- OU D’HYPERGLYCÉMIE ?

Sait-il que faire en cas de signes d’hypoglycémie ?

Le patient doit s’assurer que son entourage sait que faire en cas de malaise sévère : injection intramusculaire de 1 mg de glucagon, resucrage oral dès la reprise de conscience. S’il est conscient, le patient doit absorber du sucre par voie orale (3 morceaux de sucre).

Et en cas de signes d’hyperglycémie ?

• L’hyperglycémie peut être due à un événement intercurrent : fièvre, infection.

• Le patient doit connaître la conduite à adopter : si la glycémie est supérieure à 2,5 g, il doit contrôler les corps cétoniques dans le sang ou les urines. Une cétonurie élevée doit entraîner une hospitalisation pour éviter un coma acidocétosique.

LE PATIENT FAIT-IL FAIRE LES EXAMENS NÉCESSAIRES ?

• Tous les trois mois : hémoglobine glyquée (objectif < 7,5 %). Surveillance clinique. Examen des pieds à chaque consultation.

• Bilan annuel : lipidique, rénal, ophtalmologique, EEG, bilan dentaire.

LE CAS :

Un diabète de type 1 a été diagnostiqué chez Elouan, 4 ans, il y a deux semaines. Sa mère avait rapporté au pédiatre la soif permanente de son fils ainsi que sesnombreux « pipis » nocturnes. Hospitalisé pour l’initiation du traitement et l’apprentissage de la gestion de la maladie, le petit garçon est ressorti avec une pompe à insuline. Sa mère, un peu perdue, présente l’ordonnance de sortie.

Qu’en pensez-vous ?

Peut-on remplacer Freestyle Optium par Glucofix Premium ?

1) Oui.

2) Non.

Qu’en pensez-vous ?

Des injections d’insuline sont nécessaires en parallèle de la pompe pendant les premiers jours du traitement.

1) La pompe délivre une quantité continue d’insuline ne couvrant pas les repas. Des injections préprandiales sont nécessaires.

2) Le patient doit disposer d’un autre système d’administration d’insuline qu’il utilisera en cas de panne de la pompe.

– Elouan a vomi plusieurs fois au cours de la nuit. Il n’a plus de fièvre et semble aller mieux ce matin. Pensez-vous que ce soit nécessaire d’appeler le médecin ?

– Oui, il faut contacter le diabétologue et, en attendant son avis, multiplier les mesures de glycémie et de cétonémie de contrôle, mais aussi proposer à boire en petites quantités régulièrement.

EN CHIFFRES

• Prévalence en France en 2009 : 160 000 sujets environ, soit 5,6 % des diabètes traités au plan pharmacologique.

• La fréquence du diabète de type 1 augmente de 3-4 % par an.

• Avant 45 ans, 54 % des sujets diabétiques ont un diabète de type 1 (étude Entred 2007-2010) ; après cet âge, c’est le diabète de type 2 qui domine.

• L’âge au diagnostic se décale vers des âges de plus en plus jeunes et la fréquence de la maladie avant l’âge de 5 ans a doublé en 15 ans.

• Chez l’enfant et l’adolescent, la cétoacidose révèle la maladie dans la moitié des cas.

Physiopathologie

• Le diabète de type 1 est un diabète auto-immun. L’agression auto-immune survient sur un terrain de susceptibilité génétique. Les cellules insulinosécrétrices (cellules bêta) des îlots de Langerhans au sein du pancréas sont progressivement infiltrées par des lymphocytes T CD8+ cytotoxiques, puis détruites. On observe également une production par les lymphocytes B d’autoanticorps dirigés contre certains antigènes pancréatiques. La destruction des cellules bêta s’étend sur plusieurs années. Au début, ce phénomène reste asymptomatique et la glycémie à jeun est normale (prédiabète), mais l’on peut détecter la réaction auto-immune par la positivité des tests immunologiques et la diminution de la sécrétion d’insuline.

• Quand environ 80 à 90 % des cellules insulinosécrétrices sont détruites, la maladie se manifeste sur le plan clinique. L’hyperglycémie aggrave à son tour la destruction des cellules (glucotoxicité), engendrant un cercle vicieux.

• Plus rarement il s’agit d’une forme à anticorps négatifs, dite « diabète de type 1 idiopathique non auto-immun ».

TEST AUMONOFILAMENT

Examen utilisant un monofilament pour détecter les troubles de la sensibilité au niveau du pied.

GASTROPARÉSIE

Diminution d’amplitude et ralentissement des mouvements de l’estomac.

CE QUI A CHANGÉ

Janvier 2013 : retrait du marché des insulines intermédiaire et prémélangées Insuman et Insuman Comb.

QUESTIONS DE PATIENTS « Pourquoi dois-je continuer les injections alors que ma glycémie va mieux ? »

Après la découverte d’un diabète, les doses d’insuline peuvent baisser très rapidement les premières semaines (c’est la « lune de miel ») et justifient une autosurveillance glycémique accrue. L’insulinothérapie est allégée mais pas supprimée, pour en faciliter l’acceptation. Par la suite, les besoins en insuline augmentent sur une période très variable d’un individu à l’autre.

EN SAVOIR PLUS

Association française des diabétiques (www.afd.asso.fr)

Ce site permet de répondre aux questions des diabétiques sur leur pathologie et ses éventuelles complications, leur prise en charge médicamenteuse et hygiénodiététique.

Pourrez-vous respecter la minute de silence en mémoire de votre consœur de Guyane le samedi 20 avril ?


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