LES ANTIDÉPRESSEURS - Le Moniteur des Pharmacies n° 2984 du 18/05/2013 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2984 du 18/05/2013
 

Cahiers Formation du Moniteur

Iatrogénie

CAS N° 1 – EFFETS INDÉSIRABLES

Arrêt brutal

Madame O., 42 ans, traitée depuis six mois par paroxétine (Déroxat 20 mg/j), demande conseil au pharmacien. Se sentant mieux, elle n’avait plus envie de prendre son médicament pendant les vacances et l’a arrêté il y a une semaine. Depuis deux jours, elle se sent fatiguée et angoissée par moment. Elle dort très mal, et « souffre à nouveau de son intestin irritable ».

L’arrêt du traitement antidépresseur peut-il expliquer ces signes ?

Oui : la suspension brutale d’un traitement antidépresseur, notamment par un IRS, peut induire des signes d’arrêt.

ANALYSE DU CAS

• Tous les IRS peuvent induire des signes d’interruption de traitement. Leur sévérité varie selon la molécule (les molécules à demi-vie courte, sans métabolites actifs, seraient plus fréquemment impliquées que les molécules à demi-vie longues), la posologie du traitement et sa durée. La paroxétine est fréquemment impliquée dans ce type de réaction car elle n’a pas de métabolite actif.

• Les signes d’interruption sont nombreux : fatigue, douleurs erratiques, syndrome pseudo-grippal, signes psychiques (irritabilité, hostilité, agitation, dysphorie, anxiété, dépression), neurologiques (céphalée, vertiges, tremblements, troubles visuels, paresthésies), signes gastro-intestinaux (nausées, vomissements, diarrhées, douleurs digestives, ballonnements) mais aussi insomnies et cauchemars. Restant souvent peu sévères, ces signes se résolvent spontanément en 2 à 8 jours.

ATTITUDE À ADOPTER

• L’interruption étant ici de courte durée, le pharmacien conseille à Madame O. de reprendre son traitement. Si elle avait été plus longue, une réintroduction à dose progressive aurait été nécessaire.

• Madame O. évoquera avec le médecin, si ce dernier le juge pertinent, un arrêt du traitement qui sera alors étalé sur plusieurs semaines.

CAS N° 2 – EFFETS INDESIRABLES

Sueur et tremblements

Pierre H., 38 ans, très déprimé depuis que sa femme a perdu leur bébé pendant l’accouchement, est traité par fluoxétine (Prozac 40 mg/j) depuis 5 jours. Depuis la veille, M. H. est pris de bouffées de chaleur, sue abondamment, et ses doigts tremblent légèrement.

Qu’en pense le pharmacien ?

Le pharmacien y voit une conséquence du traitement : ces signes évoquent un syndrome d’hypersérotoninergie.

ANALYSE DU CAS

• La fluoxétine (Prozac) est un antidépresseur inhibiteur de la recapture de la sérotonine.

• Sa posologie élevée est bien conforme à l’AMM (20-60 mg/j). Il n’y a pas eu d’instauration progressive du traitement.

• Cette prescription est compatible avec l’apparition de signes sérotoninergiques.

• Les signes cliniques d’hypersérotoninergie, observés de façon brutale ou insidieuse, survenant de façon simultanée ou séquentielle, sont de trois types : psychiques (agitation, confusion mentale, hypomanie, parfois obnubilation), moteurs (tremblements, rigidité, hyperactivité, hyperréflexie, myoclonies), végétatifs (sueurs, frissons, hyperthermie, troubles de la tension, douleurs abdominales, diarrhées).

• Le condiv est évocateur mais il est parfois difficile de distinguer un syndrome d’hypersérotoninergie d’un syndrome malin ou d’un syndrome d’arrêt de traitement par IRS.

ATTITUDE À ADOPTER

• Ce surdosage n’est pas le fait d’une interaction, mais celui d’une dose trop forte : le pharmacien conseille à M. H. de revoir son médecin. Celui-ci lui demande de suspendre le traitement deux jours puis de le reprendre à la dose de 20 mg/j. Les signes disparaissent effectivement.

CAS N° 3 – EFFETS INDESIRABLES

Un traitement délicat

MmeG., 40 ans, souffre d’une dépression avec traits névrotiques depuis dix ans. Le psychiatre a prescrit Marsilid (iproniazide, 1 cp matin et soir) à Madame G., suite à l’échec d’Anafranil, de Ludiomil et d’Effexor. Une semaine plus tard, son mari interroge le pharmacien : ce traitement explique-t-il les céphalées et vertiges dont se plaint sa femme ?

Est-il plausible que Marsilid induise les signes décrits ?

Oui. Marsilid (iproniazide) est un antidépresseur ancien. Sa prescription, devenue rare, est associée à une iatrogénie non négligeable.

ANALYSE DU CAS

• L’iproniazide est un antidépresseur inhibiteur non sélectif des mono-amine oxydases (IMAO). Ce médicament est longtemps demeuré indisponible. Son index thérapeutique est médiocre : sa prescription se justifie en seconde intention lorsqu’une composante très psychostimulante s’impose.

• Il induit des effets indésirables nombreux : hypotension, vertiges, céphalées, constipation, rétention urinaire, sécheresse buccale, excitation psychomotrice, insomnie, et hépatite cytolytique parfois fatale.

• Par ailleurs, l’iproniazide expose à un risque hypertensif par interaction avec divers médicaments (CI : bupropion, midodrine, sympathomimétiques indirects, triptans, etc.) ou avec des aliments riches en tyramine (CI : fromages fermentés, bières, viandes faisandées et foies de volailles, caféine).

• Les signes associés à une crise hypertensive doivent être connus : céphalée occipitale, raideur méningée, nausées, photophobie, mydriase, sueurs, palpitations. Ils apparaissent plusieurs heures après l’ingestion d’une substance contre-indiquée. La crise hypertensive peut induire un collapsus vasculaire ou une hémorragie cérébrale fatals.

ATTITUDE À ADOPTER

Monsieur G. a bien fait de signaler ces signes évocateurs de troubles tensionnels associés à l’usage de l’iproniazide. Sa femme doit contacter sans tarder le médecin.

CAS N° 4 – EFFETS INDESIRABLES

Un patient alarmé

Mr. Léon S., 68 ans, jusqu’alors toujours dynamique, est abattu : sa femme est décédée il y a trois mois. Le médecin lui a prescrit de la venlafaxine (Effexor LP 150 mg/j) depuis deux mois. C’est assez inquiet que M. S. entre dans la pharmacie. Il a entendu le nom de son antidépresseur à la radio : son médicament exposerait à un risque pour le cœur.

Ce risque est-il confirmé ?

Oui, mais ce risque reste rare.

ANALYSE DU CAS

• La venlafaxine est un antidépresseur dérivé de la phényléthylamine : sa structure diffère de celle des autres antidépresseurs, y compris des tricycliques même si, comme eux, elle inhibe la recapture des monoamines (sérotonine > noradrénaline > dopamine).

• Son administration peut être associée à des effets indésirables cardiovasculaires d’intensité légère à modérée : tachycardie, HTA, allongement du segment QT (dose > 200 mg/j). Des intoxications aiguës ont été à l’origine de décès par crises convulsives et arythmie.

• Cette action, probablement liée à un blocage des canaux sodiques voltages dépendants, explique que certains divs aient pu tenir la venlafaxine comme cardiotoxique : sa prescription fut soumise à restriction au Royaume-Uni de 2004 à 2006, à une époque où l’on a jugé son index thérapeutique défavorable.

• Des études récentes montrent cependant que le risque cardiaque associé à l’usage de la venlafaxine, à la posologie recommandée, ne diffère pas du risque lié à l’usage d’autres antidépresseurs tels les tricycliques.

ATTITUDE À ADOPTER

• Le pharmacien peut rassurer M.S. : toutefois, par précaution, il peut lui conseiller d’en parler au médecin afin de bénéficier d’une surveillance cardiovasculaire régulière.

• En fin de semaine, M. S. confirme au pharmacien que le bilan cardiaque s’est révélé normal.

CAS N° 5 – PROFILS PARTICULIERS

Une glycémie limite

Mr T., 59 ans, traite son diabète par une bithérapie (Glucovance 500/2,5 mg, 2 cp matin, midi et soir). Le médecin lui a prescrit un antidépresseur (miansérine 60 mg au coucher) il y a un mois car il vit mal son récent départ à la retraite. Il remarque depuis quelques jours, lors des contrôles de sa glycémie, diverses anomalies : il est souvent à la limite supérieure de la normale, voire en hyperglycémie. Surpris, il demande conseil au pharmacien.

La miansérine peut-elle être à l’origine de l’augmentation de la glycémie ?

Oui : la miansérine est connue pour induire des troubles de la régulation glycémique.

ANALYSE DU CAS

• Le diabète de M. T. est traité par une association fixe de deux hypoglycémiants oraux : la metformine et le glibenclamide (Glucovance 500 mg/2,5 mg).

• La miansérine (prescrit ici) et la mirtazapine, des antidépresseurs alpha-2-bloquants voisins, sont connus pour induire notamment des hyperglycémies.

• Des études observationnelles suggèrent que l’ensemble des antidépresseurs modifie plutôt l’homéostasie glucidique dans le sens d’une hyperglycémie. Toutefois, la maprotiline, la miansérine et la mirtazapine peuvent également provoquer des hypoglycémies.

ATTITUDE À ADOPTER

• Le pharmacien rappelle que les antidépresseurs peuvent altérer l’équilibre glycémique. Une surveillance plus étroite de la glycémie est recommandée chez monsieur T. Une adaptation de la posologie des hypoglycémiants oraux peut s’avérer nécessaire (et un traitement par insuline dans certains autres cas).

• Les modifications du style de vie liées à l’action antidépressive peuvent aussi expliquer des incidents glycémiques (moindre régularité des repas, désinhibition à l’égard des excès alimentaires, action orexigène, etc.).

CAS N° 6 – PROFILS PARTICULIERS

Idées noires pour Virginie

Virginie E., 16 ans, est traitée par sertraline (Zoloft 50 mg/j) car elle souffre d’une dépression sévère déclenchée par la séparation brutale d’avec son petit-ami dans un condiv d’adolescence difficile. Deux mois plus tard, sa maman se confie au pharmacien : bien qu’ayant repris le lycée, Virginie ne travaille pas, est agressive, et, surtout, lui a avoué avoir des pensées « noires » suicidaires. Doit-elle contacter le médecin ?

Le pharmacien légitime-t-il les inquiétudes de Mme E. ?

Oui. L’usage d’un antidépresseur IRS est associé, chez l’enfant et l’adolescent, à un risque de comportement hostile ou suicidaire.

ANALYSE DU CAS

• La mise en évidence d’un risque de comportement hostile et/ou suicidaire associé à l’utilisation des IRS chez l’enfant et l’adolescent a conduit l’Agence européenne du médicament (EMEA) à déconseiller en 2005 leur utilisation dans le traitement de la dépression avant 18 ans.

• Le traitement de première intention d’une dépression avant cet âge est la psychothérapie.

• Certaines situations particulières font envisager, après évaluation de la balance bénéfice/risque, le recours à un antidépresseur (qui ne se substitue pas à la psychothérapie).

• Ce traitement s’accompagne alors d’une surveillance étroite et de la recherche d’un comportement suicidaire, particulièrement à son début.

ATTITUDE À ADOPTER

• Le pharmacien souligne le risque auprès de Madame E. : il l’invite à contacter le médecin qui a instauré le traitement, déconseillé dans ce condiv.

• Il apprend quelques jours plus tard que ce dernier a orienté Virginie vers un médecin spécialiste : celui-ci a entrepris de réduire progressivement la dose d’antidépresseur et suivra Virginie dans le cadre d’une psychothérapie hebdomadaire.

CAS N° 7 – PROFILS PARTICULIERS

Sonia, enceinte de 2 mois

Abandonnée par son compagnon alors qu’elle est enceinte de deux mois, Sonia V., 23 ans, est déprimée et anxieuse. Le médecin lui a prescrit de l’escitalopram (Séroplex 10 mg/j) et de l’oxazépam (Séresta 10 mg matin, midi et soir pendant 3 semaines). Ce traitement à peine commencé, Sonia questionne le pharmacien : elle a lu sur Internet qu’un traitement antidépresseur pouvait être associé à des problèmes pour le nourrisson, notamment, dit-elle, à de la « tension ».

Ce traitement est-il compatible avec la grossesse ?

Oui. Le traitement prescrit est compatible avec la grossesse. Les effets tensionnels évoqués par Sonia restent très exceptionnels.

ANALYSE DU CAS

• L’état psychique de la jeune femme impose l’instauration d’un traitement du trouble dépressif et de la symptomatologie anxieuse qui l’accompagne.

• Le médecin a opté pour un antidépresseur inhibiteur de la recapture de la sérotonine (IRS), l’escitalopram (Séroplex), et pour une benzodiazépine, l’oxazépam (Séresta).

• Il a vérifié les données du CRAT et le RCP des deux spécialités :

– les observations d’exposition à l’escitalopram pendant la grossesse, quel qu’en soit le terme, sont nombreuses et rassurantes. Il n’y a pas d’augmentation du risque de malformation ;

– l’oxazépam peut être administré, à la dose efficace la plus réduite possible, quelque soit le terme de la grossesse. Aucun effet malformatif n’est associé à son usage pendant le 1er trimestre. De toute façon, ce traitement anxiolytique ne sera guère prolongé dans le cas de Mme V.

• Des observations suggèrent que la prise de certains antidépresseurs ait pu augmenter le risque d’hypertension artérielle pulmonaire persistante (HTAP) du nouveau-né, probablement par action vasoconstrictrice de la sérotonine sur les artères pulmonaires. Les IRS (citalopram, escitalopram, fluoxétine, paroxétine, sertraline) sont impliqués dans cet effet iatrogène ; les données restent encore insuffisantes mais l’escitalopram serait le mieux toléré.

• L’HTAP induite par un antidépresseur demeure exceptionnelle : le risque passe de 0,1-0,2 % en population générale à 0,3-0,5 % selon les molécules. Le traitement médicamenteux n’est pas seul à devoir être pris en compte : il faudrait y intégrer des facteurs tel que l’obésité, le tabagisme, le diabète ou la prise d’AINS au terme de la grossesse.

ATTITUDE À ADOPTER

• Le pharmacien rassure Mme V : s’agissant des informations alarmantes trouvées sur plusieurs sites Internet d’informations médicales pour grand public, il la met en garde contre ces informations dont la pertinence mérite toujours d’être vérifiée auprès des professionnels de santé.

PHARMACOLOGIE

Stratégie thérapeutique

• Le traitement d’un épisode dépressif majeur (EDM) (c’est-à-dire caractérisé) repose sur l’administration d’un médicament antidépresseur qui agit sur l’ensemble du syndrome dépressif (inhibition psychomotrice, humeur triste, éventuels troubles somatiques).

• L’amélioration thymique apparait en 2 à 4 semaines. La levée de l’inhibition psychomotrice peut faire redouter une tentative de suicide. Il importe de rester attentif à la survenue d’un virage maniaque.

• Ce traitement peut s’accompagner d’autres médicaments psychoactifs : anxiolytiques ou hypnotiques (de façon temporaire), thymorégulateurs, antipsychotiques ou d’une psychothérapie.

• Le traitement se décline en trois phases :

– traitement d’attaque visant l’obtention d’une rémission partielle puis complète de l’épisode en environ 6 à 8 semaines ;

– consolidation prévenant une rechute (4 à 6 mois) ;

– prophylaxie des récidives dépressives poursuivie sur une période prolongée (parfois jusqu’à 24 mois après la disparition des signes cliniques).

• L’arrêt du traitement est progressif (risque de récidive ou d’un syndrome d’arrêt).

• La persistance de symptômes signe une résistance (10 à 40 % des patients). Il est possible de modifier la monothérapie, de lui associer un potentialisateur (thymorégulateur, autre antidépresseur…) voire de recourir à l’électroconvulsivothérapie (ECT).

Les antidépresseurs

Inhibiteurs de la monoamine-oxydase (IMAO)

Ces antidépresseurs anciens ont un profil pharmacologique variable : inhibition non sélective et irréversible des MAO (iproniazide) ou inhibition sélective et réversible de la MAO A (moclobémide). La prescription d’iproniazide, devenue peu fréquente, est réservée, en seconde ligne, aux dépressions avec un fort ralentissement psychomoteur.

Effets indésirables principaux

• Insomnie ou agitation.

• Hypotension orthostatique, vertiges, nausées, rétention d’urine, sécheresse buccale.

• Céphalées, paresthésies, convulsions.

• Syndrome d’hypersérotoninergie (interaction ou surdosage).

• Hépatites cytolytiques (iproniazide).

Interactions contre-indiquées

• Moclobémide et iproniazide : péthidine, tramadol, dextrométhorphane, sélégiline, bupropion, certains triptans (sumatriptan, rizatriptan, almotriptan, zolmitriptan).

• Iproniazide : entacapone, antidépresseurs ISRS, antidépresseurs d’action duale, midodrine, sympathomimétiques indirects (éphédrine, méthylphénidate, phényléphrine), tétrabénazine.

Contre-indications

• Âge < 15 ans (moclobémide).

• Allaitement (iproniazide, moclobémide).

• Insuffisance hépatique, phéochromocytome (iproniazide).

• Consommation d’aliments riches en tyramine et en tryptophane (fromages fermentés, chianti ou bières, foies de volaille, extraits de levure, viandes faisandées…), de café en excès, de caféine, de cyclamates : risque de réactions hypertensives (iproniazide).

Antidépresseurs tricycliques (imipraminiques)

Antidépresseurs anciens, les tricycliques sont d’une efficacité reconnue. Ils exposent cependant à une iatrogénie importante.

Leur prescription est délicate chez le sujet âgé et/ou polymédicamenté.

Effets indésirables principaux

• Asthénie, fatigue.

• Nausées, vomissements, douleurs abdominales, prise de poids.

• Hypotension, vertiges, tremblements, myoclonies, céphalées, paresthésies.

• Insomnie, agitation, confusion.

• Tachycardie, palpitations.

• Syndrome d’hypersérotoninergie (interaction ou surdosage).

• Signes anticholinergiques (sécheresse buccale, constipation, mydriase, trouble de l’accommodation, troubles de la miction).

Interactions contre-indiquées

IMAO non sélectifs.

Contre-indications

• Risque connu de glaucome par fermeture de l’angle.

• Risque de rétention urinaire lié à des troubles urétroprostatiques.

• Infarctus du myocarde récent.

Inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS)

Ces antidépresseurs bénéficient d’une tolérance très satisfaisante. Ils ont permis de prescrire un traitement antidépresseur à une population plus large (sujets âgés).

Effets indésirables principaux

• Baisse de l’appétit (fluoxétine, fluvoxamine), augmentation de l’appétit (sertraline).

• Nausées, vomissements, troubles du transit, sécheresse buccale.

• Céphalées, migraines, insomnie.

• Palpitations, bouffées vasomotrices.

• Syndrome d’hypersérotoninergie (interaction ou surdosage).

• Hyponatrémie, hypercholestérolémie (paroxétine).

• Signes neurologiques (akathisie, dystonies, signes extra-pyramidaux) notamment chez les patients âgés ou parkinsoniens..

Interactions contre-indiquées

• IMAO non sélectif.

• IMAO-A (citalopram, escitalopram).

• Pimozide (paroxétine, sertraline).

Contre-indications

Allongement acquis ou congénital du segment QT (citalopram, escitalopram).

Antidépresseurs d’action duale

Ces antidépresseurs bénéficient d’une bonne tolérance et d’une efficacité importante.

Effets indésirables principaux

• Fatigue, céphalées.

• Baisse de l’appétit, nausées, sécheresse buccale.

• Diarrhée, constipation, douleurs abdominales.

• Vertiges, tremblements, bâillements.

• Insomnie.

• Troubles de la vision (duloxétine, venlafaxine).

• Dysurie (duloxétine, milnacipran, venlafaxine).

• Syndrome d’hypersérotoninergie (interaction ou surdosage).

Interactions contre-indiquées

• IMAO non sélectifs, irréversibles (duloxétine, milnacipran, venlafaxine).

• Fluvoxamine, ciprofloxacine, énoxacine : inhibiteurs puissants du CYP1A2 (duloxétine).

• Digitaliques (milnacipran).

• Triptans (milnacipran).

Contre-indications

• Maladie hépatique entraînant une insuffisance hépatique (duloxétine).

• Insuffisance rénale sévère (clairance de la créatinine < 30 ml/min) (duloxétine).

• HTA non équilibrée (duloxétine).

Autres antidépresseurs

De profil pharmacologique hétérogène, ces antidépresseurs ont en commun leur bonne tolérance. La tianeptine est le seul antidépresseur susceptible d’exposer à un pharmacodépendance : sa prescription est soumise à des dispositions réglementaires spécifiques depuis 2012.

Agomélatine (Valdoxan)

Effets indésirables principaux

• Fatigue, céphalées, vertiges, insomnie.

• Nausées, diarrhée, constipation, douleurs abdominales

• Augmentation des ALAT et/ou des ASAT (surveillance répétée des transaminases).

Interactions contre-indiquées

Inhibiteurs puissants du CYP1A2 (ex : fluvoxamine, ciprofloxacine).

Contre-indications

Insuffisance hépatique (cirrhose ou maladie hépatique évolutive).

Miansérine

Effets indésirables principaux

• Somnolence.

• Sécheresse buccale, troubles de l’accomodation, constipation (action anticholinergique).

Pas d’interactions contre-indiquées

Pas de contre-indications

Mirtazapine (Norset)

Effets indésirables principaux

• Augmentation de l’appétit avec prise de poids, nausées, sécheresse buccale.

• Hypotension.

Interactions contre-indiquées

IMAO non sélectifs, irréversibles.

Pas de contre-indications

Tianeptine (Stablon)

Effets indésirables principaux

• Anorexie.

• Gastralgies, douleurs abdominales.

• Risque d’abus et de dépendance (prescription sur ordonnance sécurisée limitée à 28 jours).

Interactions contre-indiquées

Association aux IMAO non sélectifs.

Contre-indications

Âge < 15 ans

Millepertuis

La phytothérapie antidépressive bénéficie d’une image « naturelle » expliquant son succès et une fréquente automédication (achat sur internet). Elle expose cependant à de nombreuses interactions.

Effets indésirables principaux

• Troubles digestifs bénins.

• Photosensibilisation.

• Syndrome sérotoninergique.

Interactions contre-indiquées

Anticoagulants oraux, anticonvulsivants (éthosuximide, lamotrigine, phénobarbital, phénytoïne, primidone, tiagabine, topiramate, acide valproïque, valpromide) (simplement déconseillée avec : carbamazépine), contraceptifs oraux, digoxine, inhibiteurs des protéases du VIH, inhibiteurs des tyrosine-kinases, théophylline

Pas de contre-indications.

CAS N° 8 – INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES

Médecine au naturel

Solange V., 38 ans, est traité pour une infection par le VIH. Ce jour là, elle explique à son pharmacien qu’elle prend aussi des plantes contre la déprime : des gélules de millepertuis commandées en Allemagne. C’est « sûrement bien meilleur que les médicaments qui me sont prescrits par ailleurs » !

Le pharmacien partage-t-il l’enthousiasme de sa cliente ?

Non : le traitement de sa cliente comprend notamment Kivexa (abacavir 600 mg + lamivudine 300 mg, 1x/j), et Kalétra (lopinavir 200 mg, ritonavir 50 mg, 2x/j) un médicament dont le métabolisme peut être perturbé par l’usage de millepertuis.

ANALYSE DU CAS

• Kalétra a pour principe actif le lopinavir, un inhibiteur de la protéase (IP) du VIH, qui est ici boosté par l’association au ritonavir.

• Les inhibiteurs de la protéase sont métabolisés par le CYP 3A4 du cytochrome P450 : ils entrent donc en compétition avec les autres médicaments suivant la même voie métabolique.

• Ils sont associés au ritonavir, un puissant inhibiteur enzymatique du CYP 3A4, qui augmente leur biodisponibilité et donc leur efficacité.

• Le millepertuis est un puissant inducteur enzymatique : il peut à ce titre diminuer l’exposition aux antiprotéases du VIH et en réduire l’efficacité, voire en annuler l’effet.

ATTITUDE À ADOPTER

• Le pharmacien informe Mme V. que l’usage des spécialités ou des compléments alimentaires à base de millepertuis est contre-indiqué avec celui des inhibiteurs de la protéase.

• En cas d’association fortuite (ce qui est le cas ici), il ne faut pas interrompre brutalement le traitement par millepertuis car il y a un risque de surdosage en antiprotéase.

• La patiente doit consulter rapidement un médecin afin qu’il détermine le risque et comment arrêter le traitement par millepertuis.

CAS N° 9 – INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES

La télévision est floue

Madame F., 78 ans, était simplement traitée pour une HTA jusqu’à son entrée en maison de retraite (Nisisco 80/12,5 mg, hydrochlorothiazide et valsartan, 1 cp/j). Déprimée depuis ce placement, elle a d’abord été traitée par tianeptine (Stablon 2 cp/j). Ce traitement s’étant révélé peu efficace, le médecin lui prescrit depuis 3 mois de la clomipramine (Anafranil 75 mg/j). Présentant depuis 2 semaines une incontinence urinaire, elle est traitée par de l’oxybutynine (Ditropan, dose progressive, désormais à 5 mg matin et soir). Son fils l’a trouvée abattue, la télévision est floue, elle a des nausées et devient confuse dans ses propos. Il en parle au pharmacien.

Ces signes sont-ils liés à l’âge ?

Non, ils caractérisent une interaction entre médicaments antidépresseur et antispasmodiques.

ANALYSE DU CAS

• La clomipramine, un antidépresseur tricyclique, exerce une action anticholinergique, indépendante de son activité thérapeutique.

• L’oxybutynine exerce une activité antagoniste sur les récepteurs à l’acétylcholine comme la majorité des autres médicaments antispasmodiques anticholinergiques (tiémonium, ipratropium, trospium, etc.)

• Elle potentialise les effets des médicaments anticholinergiques, dont, notamment, les antidépresseurs tricycliques, mais aussi les neuroleptiques anciens, les antiparkinsoniens, les phénothiazines antihistaminiques.

• La somme de tous les effets anticholinergiques médicamenteux est ici élevée car chacun des médicaments administrés a un fort pouvoir anticholinergique.

• Cette interaction est à l’origine de signes caractérisant une intoxication atropinique (anticholinergique) : signes périphériques (mydriase, troubles de l’accommodation visuelle avec vision trouble, sécheresse buccale, oculaire et cutanée, nausées, constipation, bradycardie, etc.), signes centraux (confusion mentale, désorientation, irritabilité avec possible agitation, parfois hallucinations visuelles, délire). La confusion mentale et les troubles visuels augmentent le risque de chute.

• L’âge rend plus sensible aux effets iatrogènes anticholinergiques.

ATTITUDE À ADOPTER

• Le pharmacien explique que les signes présentés par Mme F. sont caractéristiques d’une intoxication anticholinergique.

• Il faut opter pour un antidépresseur plus maniable chez le sujet âgé (IRS par exemple) ou privilégier l’usage de protections urinaires en s’abstenant de traiter, au moins temporairement, les fuites urinaires.

CAS N° 10 – INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES

Perte de chance pour Madame P. ?

Mme P., 48 ans, bénéficie depuis un an d’un traitement adjuvant par tamoxifène (20 mg/j) pour un cancer du sein. Son médecin de famille, en reconduisant ce traitement, lui a prescrit une association psychoactive car, entre maladie et perte d’emploi, cette femme, jusqu’alors dynamique, est devenue très dépressive : paroxétine (Déroxat 1 cp le soir) et bromazépam (Lexomil 1/4, 1/4, 1/2 cp). Au vu de l’ordonnance, le pharmacien hésite cependant à dispenser le traitement antidépresseur.

Qu’est-ce qui engendre l’hésitation du pharmacien ?

L’association entre tamoxifène et paroxétine est déconseillée.

ANALYSE DU CAS

• Le tamoxifène, un anti-estrogène indiqué dans le traitement du cancer du sein hormono-dépendant, est un pro-médicament : son efficacité est liée à la production d’un métabolite actif (endoxifène) par le CYP 2D6 du cytochrome P450. Ce métabolite bloque de façon compétitive les récepteurs sensibles aux estrogènes.

• La paroxétine (Déroxat) (et la fluoxétine (Prozac)) inhibent fortement le CYP 2D6 du cytochrome : elles limitent la formation d’endoxifène.

• L’inhibition de la formation de l’endoxifène est associée à une réduction de l’efficacité du tamoxifène. Une étude rétrospective a notamment montré qu’il existe une relation entre la durée de l’association tamoxifène-paroxétine et la survie des patientes. Diverses autres études vont dans le même sens, certaines évoquant une véritable « perte de chance » pour la patiente victime de cette interaction.

• L’ANSM déconseille donc depuis 2008 l’association de tamoxifène avec la paroxétine ou la fluoxétine (cf. Thésaurus des interactions ; lettre d’information de juin 2010). Pour les mêmes raisons, l’association avec la terbinafine (Lamisil), le bupropion (Zyban) ou la duloxétine (Cymbalta) est également déconseillée.

ATTITUDE À ADOPTER

• Le pharmacien explique les raisons de son hésitation. Il invite Mme P. à revoir le médecin auquel il téléphone pour lui expliquer le problème.

• Le médecin ne connaissait pas cette interaction. Ayant revu la patiente, il lui a finalement prescrit un traitement antidépresseur pharmacologiquement proche du précédent mais n’exposant pas au même risque iatrogène métabolique : l’escitalopram (Séroplex 10 mg/j).

CAS N° 11 – INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES

Histoire de foie

Jérôme B., 58 ans, déprimé, est traité par agomélatine (Valdoxan, 1 cp/j). La prescription du psychiatre remonte à un mois environ. Aujourd’hui, souffrant d’une prostatite aiguë, il présente une ordonnance de son généraliste comportant un antibiotique : la ciprofloxacine (Ciflox 500 mg 2x/j qsp 2 semaines).

Le pharmacien dispense-t-il le traitement antibiotique ?

Non : l’association agomélatine/ciprofloxacine fait l’objet d’une contre-indication formelle.

ANALYSE DU CAS

• L’agomélatine est métabolisée par le CYP1A2 du cytochrome ? P450 hépatique.

• La ciprofloxacine est, comme d’autres fluoroquinolones (énoxacine, norfloxacine, ofloxacine, péfloxacine) mais aussi comme de nombreux médicaments (cimétidine, macrolides, fluvoxamine, etc.), un inhibiteur de ce système enzymatique.

• Son association à l’agomélatine expose donc à une accumulation de cet antidépresseur, compatible avec une toxicité dose-dépendante (forte augmentation des enzymes de cytolyse hépatique voire à une hépatite médicamenteuse).

ATTITUDE À ADOPTER

Le pharmacien contacte le médecin par téléphone pour faire part du problème.

Celui-ci modifie l’ordonnance et opte pour une association antibiotique, le cotrimoxazole (Bactrim Forte, un comprimé matin et soir), à laquelle le germe est également sensible.

CAS N° 12 – INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES

INR revu à la hausse

M. F., 51 ans, est traité pour une dépression par mirtazapine depuis 3 mois (Norset 15 mg/j pendant 3 semaines, 30 mg/j pendant 6 semaines puis 45 mg/j). Ce patient, victime d’une récidive de TVP il y a 1 an, est également traité par warfarine (Coumadine 5 mg un comprimé par jour). L’INR de M. F., généralement stable, est passé à 3,2 , pour une cible entre 2 et 3. Sortant du laboratoire, M. F. sollicite l’avis du pharmacien.

Cette variation de l’INR étonne-t-elle le pharmacien ?

Non. L’administration de mirtazapine peut induire une légère augmentation de l’INR.

ANALYSE DU CAS

• La mirtazapine est un antidépresseur antagoniste alpha-2, proche de la miansérine.

• L’administration de 30 mg de mirtazapine suffit à induire une augmentation faible mais significative de l’INR (International Normalized Ratio). La mirtazapine inhibe en effet légèrement le métabolisme de la warfarine.

Par ailleurs, une modification de l’INR est possible avec d’autres antidépresseurs, notamment avec les ISRS.

• Face aux symptômes dépressifs sévères de M. F., le psychiatre a souhaité augmenter la posologie de l’antidépresseur : la posologie est passée ainsi à 45 mg/j en à peine plus de 2 mois.

Cette dose élevée explique la modification de l’INR.

• Un contrôle de l’INR aurait du être réalisé après initiation du traitement antidépresseur et après chaque changement de posologie afin de modifier la posologie de l’AVK si nécessaire.

ATTITUDE À ADOPTER

• Le pharmacien rassure M. F. : il lui explique l’origine probable de cette élévation de l’INR.

• Il l’invite à contacter son médecin. Ce dernier prescrit un nouveau contrôle de l’INR afin d’éventuellement réduire la posologie du traitement anticoagulant.

CAS N° 13 – INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES

Monsieur A. saigne du nez

Alors qu’il vient chercher un tube d’Arnicagel, M. A. interroge le pharmacien : exposé aux traumatismes dans son travail (il est manutentionnaire), il a remarqué que les moindres coups occasionnent désormais des « bleus ». Ses gencives saignent aussi lorsqu’il se brosse les dents. Il rappelle au pharmacien qu’il prend 2 ou 3 cp/j d’ibuprofène 400 selon la prescription de son médecin. Le pharmacien s’interroge : il lui a dispensé du citalopram (Séropram 20 mg/j) dix jours auparavant.

Le pharmacien peut-il imputer cet incident à l’antidépresseur ?

Oui, les antidépresseurs inhibiteurs de la recapture de la sérotonine majorent le risque hémorragique.

ANALYSE DU CAS

• M. A. est traité par citalopram (Séropram 20 mg/j) pour une dépression réactionnelle suivant un accident du travail.

• Des saignements cutanés anormaux (ecchymoses, purpura) et d’autres événements hémorragiques (digestifs ou gynécologiques) sont rapportés avec les IRS, qui diminuent les taux en sérotonine des plaquettes et donc leur agrégabilité.

• Les ecchymoses et les saignements gingivaux de M. A. peuvent être une conséquence du traitement antidépresseur.

• La prudence est de mise chez tout patient traité par IRS, notamment en cas d’usage concomitant de médicaments affectant la fonction plaquettaire comme les AINS.

ATTITUDE À ADOPTER

M. A. possède une prescription d’ibuprofène pour traiter des douleurs musculo-tendineuses liées à son travail. Le pharmacien lui recommande de limiter cet usage pendant la durée du traitement antidépresseur et de privilégier le recours au paracétamol (max 3 g/j). Le risque hémorragique disparaît quasi immédiatement à l’arrêt du traitement antidépresseur.

CAS N° 14 – INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES

Un pharmacien « récalcitrant »

Jocelyne C., 35 ans, présente une ordonnance pour un complément de traitement par Zomigoro, avec lequel elle traite ses crises de migraine. L’examen de son dossier pharmaceutique montre que Mme C., victime d’un licenciement, est traitée depuis 3 semaines par milnacipran (Ixel 50 mgx2/j). Le pharmacien refuse la dispensation. M. C. ne comprend pas la position drastique du pharmacien et le juge « récalcitrant ».

Le pharmacien peut-t-il satisfaire M. C ?

Non, cette association zolmitriptan et milnacipran est contre-indiquée.

ANALYSE DU CAS

• Le milnacipran est un antidépresseur d’action duale, induisant notamment une inhibition de la recapture de la sérotonine.

• Le zolmitriptan (Zomig, Zomigoro), indiqué dans le traitement de la phase céphalalgique de la crise migraineuse, est un agoniste sérotoninergique, ciblant spécifiquement les récepteurs 5-HT1D.

• L’association inhibiteur de la recapture de la sérotonine / agoniste sérotoninergique est contre-indiquée. Elle expose à un risque d’hypertension artérielle et de vasoconstriction coronaire par addition des effets sérotoninergiques.

ATTITUDE À ADOPTER

• Le pharmacien maintient son refus.? Il précise qu’un délai d’une semaine devra être respecté entre l’arrêt du traitement par milnacipran et la reprise d’une éventuelle administration de Zomigoro.

• Dans l’attente, le pharmacien propose deux attitudes : si les crises migraineuses sont fréquentes, envisager avec le médecin un traitement préventif (ex : bêta-bloquant), sinon, opter pour un autre type de traitement curatif type AINS (ibuprofène ou kétoprofène).

Prévenir l’iatrogénie

Les questions à se poser lors de la délivrance d’un antidépresseur

Profil physiopathologique du patient

Est-ce un enfant ou un adolescent ?

Le risque de comportement suicidaire ou hostile sous antidépresseur n’est pas négligeable. Les antidépresseurs (sauf fluoxétine) sont indiqués à partir de 18 ans.

Est-ce une femme enceinte ?

La plupart des antidépresseurs sont théoriquement utilisables pendant la grossesse (CRAT).

Est-ce une personne âgée ?

Privilégier les ISRS. Le traitement est introduit progressivement. Les tricycliques sont prescrits en seconde intention et à posologie généralement réduite de moitié.

Médicaments associés

Y-a-t-il une association contre-indiquée ?

• Association IMAO et tricycliques ou ISRS.

• Association du milnacipran aux digitaliques ou aux triptans.

• Inhibiteurs enzymatiques (CYP 1A2) (fluvoxamine, ciprofloxacine, enoxacine) en association avec la duloxétine dont ils élèvent les taux sériques.

• Millepertuis associé aux AVK, anticomitiaux, contraceptifs oraux…

Surveillance du traitement

Si le patient est sous IMAO, évoque-t-il des signes d’hypertension ?

L’hypertension iatrogène se traduit par des céphalées récurrentes et très douloureuses. Observée lors d’une interaction médicamenteuse ou alimentaire, elle impose un avis médical urgent.

Si le patient est sous tricycliques, évoque-t-il des signes d’hypotension ?

Banale en début de traitement, l’hypotension orthostatique expose à un risque de vertiges avec chute. Elle suggère une réduction posologique ou une prise en charge symptomatique (hydratation, bas de contention, médicaments correcteurs type heptaminol, etc.)

Le patient évoque-t-il des signes d’hyponatrémie ?

L’hyponatrémie (surtout ISRS, antidépresseurs d’action duale, miansérine, mirtazapine) se traduit par des céphalées, des nausées. Elle peut être inaugurée par un épisode de confusion mentale. Vérifier l’absence d’interactions (médicaments néphrotoxiques : diurétiques thiazidiques, sulfamides hypoglycémiants, carbamazépine et apparentés, lamotrigine, inhibiteurs de la pompe à protons, IEC, AINS, etc.), et orienter le patient vers son médecin.

Le patient évoque-t-il des signes anticholinergiques ?

Sécheresse buccale et oculaire, troubles de la vision, constipation évoquent un syndrome hypercholinergique iatrogène (posologie trop forte ou interaction). S’il est impossible de modifier le traitement, des mesures correctives sont proposées : substitut salivaire ou lacrymal, exercice physique, traitement de la constipation, etc.

Le patient évoque-t-il des signes d’hypersérotoninergie ?

L’hypersérotoninergie (ISRS, tricycliques, IMAO, miansérine, mirtazapine, millepertuis) se traduit par des signes psychiques (agitation, confusion mentale…), moteurs (tremblement, rigidité…) et végétatifs (frissons, sueurs, troubles de la tension artérielle, tachycardie…). Elle invite à rechercher une interaction entre médicaments pro-sérotoninergiques (antidépresseurs entre eux, association antidépresseur-triptan).

Le patient a-t-il arrêté son traitement brutalement ?

Les signes d’interruption se résument souvent à un malaise général avec anxiété, vertiges, oppression thoracique, douleurs abdominales. Ces signes invitent à lui rappeler la nécessité d’une observance prolongée au-delà de la simple amélioration des signes dépressifs.

À RETENIR

L’arrêt brutal d’un traitement antidépresseur est souvent à l’origine d’une réaction iatrogène pouvant induire des signes cliniques très variés.

À RETENIR

Un antidépresseur pro-sérotoninergique (IRS, mais aussi ISRNA, tricyclique ou IMAO) administré à une posologie trop forte peut induire un syndrome d’hyper-sérotoninergie.

À RETENIR

L’iproniazide (Marsilid) expose à un risque d’hypertension par interaction (médicaments, aliments).

À RETENIR

L’administration de venlafaxine peut induire des effets indésirables cardiovasculaires : hypertension, tachycardie, arythmie, allongement de l’intervalle QT.

À RETENIR

L’usage d’un antidépresseur, notamment celui de la miansérine ou de la mirtazapine, doit inviter le patient diabétique à surveiller avec plus de fréquence et de rigueur sa glycémie.

À RETENIR

Un traitement par IRS peut être à l’origine de comportements d’hostilité et/ou suicidaire chez l’enfant et l’adolescent. Il est déconseillé avant 18 ans.

ATTENTION

L’administration d’un antidépresseur tel que l’escitalopram, est compatible avec une grossesse, quel qu’en soit le terme.

Maternité et antidépresseurs

Grossesse

• Tricycliques. Sont privilégiées l’amitryptiline (Laroxyl), la clomipramine (Anafranil) ou l’imipramine (Tofranil) (Centre de référence sur les agents tératogènes : CRAT).

• IMAO. L’usage d’iproniazide est déconseillé pendant la grossesse (RCP). Il est préférable d’éviter celui du moclobémide (RCP).

• Inhibiteurs de la recapture de la sérotonine (IRS). Citalopram, escitalopram, fluoxétine et sertraline peuvent être administrées à la future maman, quelque soit le terme de la grossesse (CRAT). La paroxétine sera utilisée si elle est strictement nécessaire (RCP) ; elle pourra être plutôt réservée aux deux derniers trimestres en raison de la controverse quant à l’existence d’un très faible risque de survenue de légères malformations cardiaques (CRAT). L’usage de la fluvoxamine chez la femme enceinte est moins documenté mais elle peut être utilisée quel que soit le terme de la grossesse (CRAT).

• Antidépresseurs d’action duale et antagonistes alpha-adrénergiques. La venlafaxine pourra être administrée quelque soit le terme de la grossesse (CRAT). Milnacipran et mirtazapine peuvent éventuellement être utilisés quelque soit le terme de la grossesse (CRAT). En revanche, une exposition à la duloxétine (Cymbalta) pendant la grossesse invite à contacter le CRAT afin que cet organisme dispose peu à peu de données sur ce point. La miansérine peut être utilisée si besoin quelque soit le terme de la grossesse (CRAT).

• Tianeptine (Stablon). La tianeptine peut être utilisée quelque soit le terme de la grossesse (CRAT).

Prévision de grossesse. Un traitement antidépresseur instauré chez une femme envisageant une grossesse privilégie les molécules susceptibles d’être administrées pendant la grossesse.

Coordonnées du Centre de référence sur les agents tératogènes (CRAT)

Téléphone-fax : 01 43 41 26 22, du lundi au vendredi ou www.lecrat.org

Comment agissent les principaux antidépresseurs ?

• Les antidépresseurs facilitent la neurotransmission au niveau central par une action plus ou moins sélective sur divers types de neurones.

• La plupart d’entre eux inhibent la recapture d’une ou de plusieurs monoamine(s) (noradrénaline, sérotonine ou dopamine) : c’est le cas des tricycliques, des IRS et des antidépresseurs dits d’action « duale ». Leur action post-synaptique intrinsèque, notamment de type anticholinergique ou histaminergique, explique leurs effets indésirables centraux comme périphériques : elle est particulièrement importante pour les tricycliques.

• D’autres antidépresseurs agissent par des mécanismes complexes et incomplètement élucidés : action sur les synapses excitatrices glutamatergiques pour la tianeptine, action agoniste mélatoninergique pour l’agomélatine, etc.

• Le millepertuis contient de nombreux composés agissant sur divers types de synapses : il a notamment une faible action inhibitrice de la recapture des monoamines.

Millepertuis : naturel mais pas anodin

• Le millepertuis (Hypericum perforatum) est une plante médicinale disponible en officine (Euphypertuis, Mildac, Procalmil, Prosoft), mais aussi, illégalement, sur certains sites Internet de vente en ligne.

• Il est souvent commercialisé sans AMM et son activité thérapeutique n’a jamais été démontrée : il n’en est pas moins présenté comme actif dans les troubles de l’humeur ou les troubles anxieux. Son emploi ne peut être envisagé que pour les dépressions légères et transitoires : il ne constitue pas un traitement acceptable pour une dépression sévère. Dans son son dossier de 2006 « Bon usage des médicaments antidépresseurs dans le traitement des troubles dépressifs et des troubles anxieux de l’adulte », l’Afssaps écrit que le millepertuis n’est pas un antidépresseur selon elle car son indication est : « Traditionnellement utilisé dans les manifestations dépressives légères et transitoires ».

• Ce traitement faiblement psychoactif expose à de possibles signes d’hypersérotoninergie et à un risque de photosensibilisation.

• Certaines composants de la plante ont une action inductrice sur les enzymes du cytochrome P450 : ils accélèrent le métabolisme de nombreux médicaments et exposent à un risque important d’interactions.

• Les médicaments susceptibles de voir leur efficacité réduite par le millepertuis sont notamment : les immunosuppresseurs (CI : risque de rejet de greffe), les contraceptifs hormonaux (CI : risque de grossesse), les antivitamine K (CI : risque de thrombose), les inhibiteurs de la protéase du VIH (CI) et le télaprévir (CI), les inhibiteurs des tyrosine-kinases (CI), la digoxine (CI), le vérapamil (CI), les antiépileptiques (CI ou déconseillés), la théophylline (CI), la cyprotérone (déconseillée), les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine (précaution d’emploi : risque d’hypersérotoninergie), les inhibiteurs de la pompe à protons (à prendre en compte).

• En cas d’association fortuite entre le millepertuis et un AVK, la digoxine, un inhibiteur de la protéase virale boosté par le ritonavir ou la théophylline, il ne faut pas interrompre brutalement la prise de millepertuis, mais contrôler l’INR ou les taux plasmatiques du médicament associé avant puis après l’arrêt progressif du millepertuis.

ATTENTION

L’association d’un antidépresseur tricyclique avec un médicament anticholinergique peut, notamment chez un patient âgé, induire des signes anti-cholinergiques.

Antidépresseurs : quelle solution chez un sujet âgé ?

• La physiologie du sujet âgé doit être prise en compte : perte de poids, ralentissement du métabolisme et des capacités d’élimination. Il est usuel d’instaurer le traitement antidépresseur à demi-dose entre 60 et 70 ans, et à 1/3 de dose après 70 ans, pour arriver à une posologie à l’équilibre identique ou réduite de moitié par rapport à celle d’un sujet plus jeune. Déshydratation et/ou dénutrition perturbent la cinétique.

• Les pathologies associées peuvent se conjuguer avec certains effets iatrogènes (ex : démence et effets anticholinergiques).

• Les interactions peuvent être à l’origine d’effets indésirables parfois sévères : syndrome d’hypersérotoninergie, hyponatrémie, effet anticholinergique cumulatif élevé, etc. Elles sont plus nombreuses car la polymédicamentation est fréquente.

• Un suivi initial hebdomadaire permet d’identifier de façon précoce les intolérances débutantes.

• Si tous les antidépresseurs peuvent être prescrits chez le sujet âgé, mais avec une hiérarchie faisant privilégiée :

– En priorité, un traitement par un inhibiteur de la recapture de la sérotonine (IRS) ou un antidépresseur d’action duale, malgré le risque d’hyponatrémie.

– En deuxième intention, un tricyclique à faible dose (effets anticholinergiques, préjudiciables notamment chez le sujet dément ; toxicité cardiaque).

– Par ailleurs, les antagonistes alpha-2 adrénergiques (miansérine, mirtazapine) ont une composante sédative puissante qui peut constituer un atout (administration vespérale). La tianeptine bénéficie d’une bonne tolérance cognitive, et expose peu à l’iatrogénie. L’usage des IMAO est limité aux dépressions accompagnées d’un fort ralentissement psychomoteur. Si le recul manque pour l’agomélatine, l’index thérapeutique semble satisfaisant chez le sujet âgé. L’usage du millepertuis expose à un risque d’interactions.

• Le risque suicidaire en début de traitement (levée de l’inhibition psychomotrice) est d’autant plus important que le passage à l’acte est plus fréquent chez le sujet âgé.

ATTENTION

L’association de paroxétine ou de fluoxétine au tamoxifène peut avoir des conséquences graves pour la patiente, en rendant le traitement anticancéreux moins efficace.

Traitement antidépresseur : gérer la iatrogénie en pratique

• Constipation (surtout tricycliques) : mesures hygiénodiététiques (boissons abondantes, activité physique), prescription de laxatifs doux (lactulose)

• Troubles de l’accommodation (surtout tricycliques) : cèdent souvent à la poursuite du traitement ou à une adaptation posologique ; il faut prévenir le patient de cette évolution afin qu’il ne réclame pas des verres correcteurs

• Sécheresse buccale (tricycliques essentiellement, mais aussi ISRS et action duale) : doit être traitée pour éviter ses complications (candidose, carie dentaire, glossite, stomatite) : une prise unique vespérale, lorsqu’elle est possible, en limite l’incidence ainsi que la prise de boissons non sucrées associées ou non à des pastilles ou à du chewing-gum sans sucre. Les traitements stimulant la salivation (Sulfarlem) et les substituts salivaires ont une efficacité souvent relative.

• Sédation : parfois recherchée par le médecin (antidépresseurs sédatifs : miansérine, mirtazapine, paroxétine), elle cède à la poursuite du traitement. Dans ce cas, et si la somnolence diurne ne résulte pas d’une récupération insuffisante du sommeil nocturne, privilégier la prescription d’une molécule psychostimulante (fluoxétine, venlafaxine).

• Hypotension orthostatique (surtout avec les tricycliques) : explique une fatigue intense et des vertiges fréquents, avec possibilité de complications graves (chutes chez la personne âgée notamment) ; prévenue par une hydratation abondante, l’ingestion d’eaux fortement minéralisées, le port de bas de contention, une grande prudence en cas de changements brutaux de posture (lever) et le recours à des traitements correcteurs (dihydroergotamine, heptaminol, midodrine).

• Prise de poids : donner les conseils hygiéno-diététiques usuels, renoncer au grignotage, manger équilibré, pratiquer une activité physique régulière… Ces mesures sont parfois difficiles à appliquer par le patient déprimé.

À RETENIR

L’association de l’agomélatine (Valdoxan) à un inhibiteur du CYP 1A2 tel la ciprofloxacine est contre-indiquée : elle augmente l’exposition à l’antidépresseur avec risque toxique.

À RETENIR

Il est recommandé de surveiller l’INR en cas d’association entre un AVK et la mirtazapine (risque hémorragique).

À RETENIR

Les antidépresseurs IRS exposent à un risque hémorragique en diminuant la concentration plaquettaire en sérotonine. Cet effet est potentialisé par les AINS.

ATTENTION

L’association d’un triptan et d’un antidépresseur proséroto-ninergique est contre-indiquée : respecter un délai d’une semaine entre l’arrêt du traitement antidépresseur et l’éventuelle prise d’un triptan.

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