Une REVALORISATION à négocier - Le Moniteur des Pharmacies n° 2946 du 01/09/2012 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2946 du 01/09/2012
 

Dossiers

Enquête

Matérialisé par des honoraires, l’acte pharmaceutique garantit une relative constance du revenu mais sa revalorisation reste toujours une question de négociation.

Boîte ou encore ligne de prescription comme en Suisse représentent paradoxalement l’unité de valeur pour rétribuer une prestation dite « intellectuelle ». Les honoraires perçus sur la boîte – ou la ligne – constituent la majeure partie des revenus de ces pharmaciens (70 % du bénéfice en Belgique, entre un tiers et un quart du revenu brut de distribution en Suisse). En Allemagne, la rémunération en honoraires, qui ne dit pas son nom, consiste en un forfait à la boîte (8,35 euros dont 2, 05 euros de rabais rétrocédés aux caisses) bien supérieur aux 3 % de marge sur le prix du médicament, considéré par ailleurs comme « cash flow » par les titulaires.

Il semblerait que la part prépondérante des honoraires dans le revenu du pharmacien contribue à une stabilité de ses revenus, comme le relève une étude de PharmaSuisse. Selon les projections de la société faîtière de pharmacies suisse, la marge de distribution moyenne des officines des principaux pays européens passerait de 29,4 % à 37,1 % si l’on y intégrait une rémunération basée sur les prestations, soit environ le niveau des pays ayant la marge de distribution la plus élevée : l’Autriche, pays dominé par la marge sur le prix du médicament et les Pays-Bas, pays dominé par la rémunération en honoraires.

« Nous sommes actuellement en présence de deux types de rétribution du pharmacien en Europe. Il est encore difficile d’en tirer aujourd’hui des conclusions. Mais c’est une évidence que les pressions sur les prix du médicament en Europe incitent les pays à trouver un mode de rétribution différent », constate Sabine Vogler, directrice du WHO, centre des politiques de remboursement et de fixation des prix pharmaceutiques auprès du GÖG, l’Institut fédéral de santé publique. Elle ne manque toutefois pas de relever : « Mais devant ces nouvelles formes de rémunération, se posent désormais les questions suivantes : quelles sont réellement les tâches du pharmacien ? Quelles tâches peuvent être ajoutées (pharmaceutical-care par exemple) et comment les rémunérer ? »

Bras de fer entre les pharmaciens et les caisses

Les honoraires comme système émergent de rémunération du pharmacien n’en comportent pas moins nombre d’inconnues et restent soumis à diverses pressions. Car le plus souvent, une fois le système mis en place, les Etats renvoient dos à dos les partenaires, caisses et pharmaciens. Et s’engage dans ces pays dérégulés un bras de fer qui oppose les pharmaciens aux caisses pour la revalorisation de leur rémunération. Les pharmaciens néerlandais en font les frais depuis le 1er janvier dernier. « Depuis le début de cette année, date à laquelle le prix du médicament a été libéré, le gouvernement ne détermine plus les honoraires. Le montant résulte désormais de négociations entre les assureurs santé et les pharmaciens. C’est au pharmacien de fixer lui-même le taux qu’il veut appliquer pour le médicament et ses frais en personnel. Il demandera au patient le montant qu’il a conclu avec la caisse de ce dernier. Si le titulaire n’a pas d’agrément avec cette caisse, le patient devra payer lui-même une partie des frais, le remboursement maximal sera celui en vigueur habituellement aux Pays-bas, soit le taux du marché », décrit Judith Bijloos, en charge des affaires publiques à la KNMP (Koninklijke Nederlandse Maatschappij ter bevordering der Pharmacie), l’organisation néerlandaise des pharmaciens.

Une situation devenue difficilement supportable pour les pharmaciens indépendants. « Nous nous retrouvons dans un rapport de force avec les assurances qui est inégal. En tant que pharmacien indépendant, je ne peux pas négocier avec chaque caisse comme le font les chaînes », regrette Gerald Monterie, pharmacien des environs d’Amsterdam dont 65 % des patients sont affiliés à la caisse régionale.

« Dépêchez-vous avant qu’il ne soit trop tard ! »

Même problématique de rapports de force en Belgique. Exclus des négociations du budget avec l’Etat, les pharmaciens ont éteint leur enseigne le 26 avril dernier, en signe de protestation. En Suisse, les pharmaciens souffrent eux aussi de voir leur point tarifaire stagner à 0,89 euro (TVA comprise). « Une indexation n’est pas prévue par l’office fédéral de la Santé et c’est aux assureurs et aux pharmaciens de négocier entre eux. Aujourd’hui pour toute la Suisse, mais demain peut-être canton par canton ? En tout cas, il nous est déjà arrivé d’appeler l’Etat comme arbitre ! », indique Marcel Mesnil, secrétaire général de PharmaSuisse.

Cependant, tout autant que l’indexation de leurs honoraires, ces titulaires défendent les honoraires eux-mêmes comme mode de rétribution. Un retour en arrière semble de fait plus qu’improbable dans ces pays tant le dispositif a fait ses preuves.

« Notre nouveau système de rémunération a eu un effet protecteur contre les baisses de prix successives des médicaments et a permis aux revenus du pharmacien de suivre plus l’évolution du coût de la vie. Le maintien de l’ancien système aurait été désastreux ! », relève Kristien De Bruyn, responsable du service statistiques auprès de l’APB (Association des pharmaciens belges). Anne Lecroart, titulaire à Bruxelles, qui a participé à la mise en place du système, se souvient s’être « lancée dans l’aventure à un moment difficile, mais avec le recul le geste a été salutaire pour bon nombre d’officines belges face à la crise de la dette publique des états européens ».

« Dépêchez-vous avant qu’il ne soit trop tard ! », exhorte de son côté Marcel Mesnil à l’adresse de ses confrères européens. Selon le secrétaire général de PharmaSuisse, mieux vaut négocier ce tournant tant que les marges sont encore bonnes. Il en veut pour exemple les pharmaciens canadiens pionniers dans le domaine, qui ont introduit la rétribution par honoraires alors que leurs marges étaient au plus bas. Les Suisses en ont tiré la leçon et ont enclenché le processus de la RBP (rémunération basée sur les prestations) alors que le prix du médicament augmentait de 8 à 10 % par an !

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