LA PERSONNE ÂGÉE - Le Moniteur des Pharmacies n° 2935 du 26/05/2012 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2935 du 26/05/2012
 

Cahiers Formation du Moniteur

Iatrogénie

CAS N° 1 — EFFETS INDÉSIRABLES

M.C. est tombé en se levant

Depuis le décès de son épouse, il y a deux ans, M. C., 86 ans, vit seul à son domicile. Marielle, une aide-ménagère, lui rend visite tous les jours. Tous les deux viennent régulièrement à la pharmacie chercher les médicaments de M C. : Zanidip 10 (lercanidipine) 2/j, Zestril 20 mg (lisinopril) 1/j, Fludex LP 1,5 (indapamide) 1/j, bisoprolol 10 1/j, Kardégic 75 1/j, fluvastatine 40 1/j, Tanakan (extrait de Ginkgo biloba) 3 cp/j et Forlax 10 (macrogol) 1/j. Aujourd’hui, Marielle, vient acheter une crème pour les bleus et un antalgique pour M. C. : il vient de tomber, heureusement qu’elle était là pour l’aider à se relever !

Que penser de cette chute ?

80 % des personnes âgées de plus de 85 ans tombent au moins une fois par an et 25 % décèdent dans l’année suivant leur chute.

C’est pourquoi, une chute survenant chez une personne âgée ne doit pas être banalisée et il faut s’efforcer de rechercher une étiologie pour éviter la récidive.

ANALYSE DU CAS

• Interrogée sur les ciconstances de la chute, Marielle précise que M. C. est tombé en se levant de son fauteuil.

• La chute n’étant apparemment pas liée à un problème environnemental, il convient d’envisager une cause médicamenteuse, d’autant que M. C., âgé de plus de 85 ans et polymédicamenté, présente plusieurs critères de fragilité l’exposant au risque iatrogène.

• Cette chute survenue lors d’un lever brusque peut faire suspecter une hypotension orthostatique.

Cette cause est d’autant plus probable, qu’une personne âgée, du fait d’une altération des barorécepteurs aortiques et carotidiens, a plus de mal à rééquilibrer les variations de pression lors des changements de position, et est prédisposée à ce type de malaise.

• De nombreux médicaments sont susceptibles d’induire une hypotension orthostatique comme les antiparkinsoniens, les antidépresseurs tricycliques, les neuroleptiques, les alpha-bloquants urinaires, les dérivés nitrés, mais surtout les antihypertenseurs, qui représentent la première cause iatrogène d’hypotension orthostatique dans la population âgée.

Ainsi selon la HAS, il ne faut pas associer plus de trois antihypertenseurs chez la personne âgée.

• Or, le traitement de M. C. comporte plusieurs antihypertenseurs : un inhibiteur calcique vasodilatateur (Zanidip), un IEC (Zestril), un diurétique thiazidique (Fludex) et un bêtabloquant (bisoprolol). Du fait de son action chronotrope négative, le bisoprolol peut provoquer une hypotension chez plus de 1 patient sur 100.

ATTITUDE À ADOPTER

Le pharmacien explique à Marielle, que la chute de M. C. est peut-être dûe à ses médicaments.

Il préconise une consultation médicale pour en apprécier les conséquences (physiques et psychiques) et réévaluer le traitement antihypertenseur de M. C.

Le pharmacien se propose d’appeler lui-même le médecin pour obtenir rapidement un rendez-vous. Il délivre un gel contre les ecchymoses et du paracétamol, après s’être assuré auprès de Marielle que M. C. ne prenait pas d’autres antalgiques.

CAS N° 2 – EFFETS INDÉSIRABLES

Mme R. gère seule ses insomnies

Mme R., 82 ans, est traitée depuis 4 mois pour une maladie de Horton (artérite temporale auto-immune dont l’incidence augmente chez la femme âgée), suspectée sur fébricule, céphalées, induration temporale, douleur de la mâchoire, et élévation de la VS et de la CRP, et confirmée par une biopsie de l’artère temporale. Après un traitement d’attaque par prednisone à 1 mg/kg/j, Mme R. prend actuellement 11 mg/j de cortisone et bénéficie également d’une supplémentation calcique. À l’annonce du diagnostic, Temesta 1 mg (1/2 cp 1 à 2 fois/j) a également été prescrit temporairement à Mme R., qui s’inquiétait du risque de cécité. Aujourd’hui, Geneviève, la fille de Mme R., arrive catastrophée à la pharmacie. Elle vient acheter un nécessaire de toilette pour sa mère qui est à l’hôpital : Mme R. a fait hier une mauvaise chute dans sa chambre et s’est cassé le col du fémur. Geneviève est très inquiète.

Que s’est-il passé ?

Geneviève explique à la pharmacienne que sa mère n’en a toujours fait qu’à sa tête : d’une part, elle ne prenait pas son calcium, parce que cela la constipait, d’autre part, elle gérait seule ses insomnies en prenant de temps en temps du Temesta qui lui restait. « On voit le résultat ! » soupire Geneviève, effondrée.

ANALYSE DU CAS

• Toutes les benzodiazépines, quelles que soient leurs indications, exercent une action anxiolytique, sédative, hypnotique, myorelaxante, anticonvulsivante et amnésiante. Elles peuvent de ce fait être à l’origine de nombreux effets indésirables : aggravation de troubles mnésiques et confusion, baisse de la vigilance, sensation d’ébriété, somnolence (très fréquent chez le sujet âgé), troubles du comportement (sujet âgé particulièrement exposé) ou encore asthénie et hypotonie musculaire, de survenue fréquente, et pouvant être à l’origine de chutes. Ainsi l’emploi au long cours des benzodiazépines est déconseillé chez les personnes âgées et il faut bien respecter les indications, les posologies et les durées de traitement.

• Par ailleurs, si le traitement anti-inflammatoire stéroïdien (AIS) a pu favoriser les troubles du sommeil de Mme R. puisque les corticoïdes peuvent provoquer des effets neuropsychiques à type notamment d’excitation et d’insomie, il a aussi très certainement aggravé les conséquences de la chute. En effet, une corticothérapie administrée à des doses supérieures à 7,5 mg/j d’équivalent prednisone, pendant plus de trois mois est susceptible d’induire une ostéoporose du fait d’une hypocalcémie (dûe à une diminution de l’absorption intestinale du calcium et à une augmentation de son excrétion urinaire) et d’une déminéralisation osseuse (liée à une augmentation de l’activité des ostéoclastes). Ainsi le risque fracturaire est accru dans les six premiers mois de traitement. C’est pourquoi, à l’instauration d’un traitement AIS au long cours, une supplémentation en calcium et vitamine D est systématique.

ATTITUDE À ADOPTER

Une bonne observance des traitements aurait certainement été salutaire à Mme R. Pour l’instant, il ne sert à rien d’accabler cette dernière. En revanche, la mise en œuvre d’une bonne réeducation fonctionnelle est primordiale.

CAS N° 3 – EFFETS INDÉSIRABLES

Une ordonnance incomplète

Mme B., 74 ans, présente à Julien, étudiant en pharmacie de 3e année, une ordonnance de Voltarène LP 75 mg (1 cp 2 fois/j) et de paracétamol, qsp 7 jours. Lorsque Julien vient faire contrôler les médicaments qu’il a sortis, par le pharmacien, ce dernier semble perplexe.

Julien a-t-il fait une erreur ?

Non, en revanche, la prescription semble incomplète.

ANALYSE DU CAS

• L’utilisation des AINS doit être très prudente chez la personne âgée, en raison d’une part, d’un risque d’interaction chez ces patients souvent polymédicamentés : interaction avec les anticoagulants et anti-agrégants plaquettaires (risque hémorragique), mais aussi avec les IEC, les ARA II et les diurétiques (survenue d’une insuffisance rénale aiguë) et d’autre part, d’un risque accru d’effets indésirables digestifs graves à type d’hémorragie ou de perforation gastro-intestinales pouvant être fatales.

• Ainsi, en dehors de certains rhumatismes inflammatoires aigus ou chroniques, le recours à un AINS chez la personne âgée, ne sera envisagé qu’après échec du paracétamol. Par ailleurs, une protection gastrique par IPP ou analogue de prostaglandines E1, est recommandée chez le patient de plus de 65 ans (Afssaps, juin 2005).

ATTITUDE À ADOPTER

Tout d’abord, le titulaire consulte le dossier pharmaceutique pour vérifier l’absence d’interactions avec le diclofénac. Compte tenu de l’âge de la patiente, le pharmacien téléphone au rhumatologue pour lui suggérer l’ajout d’un protecteur gastrique. Par ailleurs, le pharmacien insistera auprès de Mme B. sur l’importance de bien prendre Voltarène au cours du petit déjeuner et du dîner, avec un volume suffisant de boisson pour éviter l’adhésion des comprimés à la paroi œsophagienne. Tout symptôme digestif devra être signalé au médecin.

CAS N° 4 – EFFETS INDÉSIRABLES

Et le trou de la sécurité sociale ?

M. D., 73 ans, est un patient diabétique traité par Stagid (metformine) 3 cp/j. Il respecte scrupuleusement les conseils hygiéno-diététiques recommandés par son médecin, et son diabète est bien équilibré. Aujourd’hui, son médecin lui a prescrit une série d’analyses biologiques. M. D. avoue à la pharmacienne qu’il ne comprend pas pourquoi on lui fait autant d’examens, alors qu’il va très bien. « Ce n’est pas comme ça qu’on va faire des économies de santé ! » lâche-t-il exaspéré.

Pourquoi le médecin a-t-il prescrit ces analyses ?

Compte tenu de l’âge et du traitement de ce patient, une surveillance biologique rigoureuse est nécessaire.

ANALYSE DU CAS

Une accumulation de metformine dans l’organisme, peut induire une acidose lactique, qui est une complication métabolique rare, mais potentiellement létale. Elle se manifeste par des crampes, une forte asthénie, des troubles digestifs, une dyspnée et peut évoluer vers un état comateux. En France, l’incidence de l’acidose lactique sous metformine est de 1 cas/40 000 patients-années, et peut être réduite par une surveillance correcte des facteurs de risque. En effet, la metformine étant un médicament à élimination rénale majoritaire, la survenue de cette acidose est favorisée par l’insuffisance rénale. Ainsi un bilan rénal avec créatininémie doit être pratiqué avant l’instauration du traitement, puis la fonction rénale sera régulièrement évaluée pendant le traitement, a fortiori chez le sujet âgé, chez qui une altération de la fonction rénale asymptomatique est fréquente. Chez ce patient, un contrôle de la créatininémie est préconisé 2 à 4 fois/an, selon sa valeur.

ATTITUDE À ADOPTER

La pharmacienne explique à Monsieur D. pourquoi ces analyses sont justifiées.

CAS N° 5 – EFFETS INDÉSIRABLES

« Ma belle-mère perd la tête ! »

Mme H., 88 ans, est traitée par antidépresseur. Elle passe l’été chez son fils. Virginie vient prendre le renouvellement du traitement de sa belle-mère comportant Lasilix 20 mg (furosémide) 1/j, Triatec 5 mg (ramipril) 1/j et Séropram 20 mg (citalopram) 1/j. Visiblement désemparée, Virginie confie au pharmacien que Mme H. lui paraît très fatiguée et confuse depuis quelques jours : elle dit des choses incohérentes et se plaint aussi de nausées.

La confusion de Mme H. est-elle un début de maladie d’Alzheimer ?

En cette période de forte chaleur, il convient avant tout d’envisager un syndrome d’épuisement-déshydratation.

ANALYSE DU CAS

• En période de forte chaleur, les personnes âgées sont particulièrement exposées au risque de déshydratation, en raison d’une diminution de la sensation de soif, d’une perturbation des systèmes de régulation hydro-électrolytiques (par altération de la fonction rénale et par réduction des réserves hydriques corporelles liée à la diminution de la masse musculaire) et d’une atteinte des systèmes de thermorégulation. Certaines personnes âgées, souffrant d’incontinence, ont par ailleurs tendance à restreindre volontairement leurs apports hydriques. La dépendance (Alzheimer, confinement au lit) est aussi un facteur aggravant.

• Le syndrome d’épuisement-déshydratation apparaît en quelques jours et se manifeste par des céphalées, des nausées et des vomissements, des vertiges et une faiblesse musculaire. L’hyponatrémie qui accompagne la déshydratation peut se manifester par une confusion (troubles de l’attention, désorientation, troubles mnésiques, voire délires ou hallucinations).

• Certains médicaments sont susceptibles d’aggraver un tel syndrôme notamment les médicaments provoquant des pertes hydro-électrolytiques comme les diurétiques (de l’anse, en particulier), les médicaments susceptibles d’altérer la fonction rénale comme les IEC, les ARA II ou les AINS, et ceux pouvant perturber la thermorégulation comme les neuroleptiques et les médicaments agonistes sérotoninergiques (dont les IRS).

• Par ailleurs, les IRS sont susceptibles d’abaisser la natrémie et de provoquer une confusion, voire une crise convulsive, en particulier, chez la personne âgée.

De fait, Mme H., qui est également traitée par furosémide, présente un risque majoré d’hyponatrémie.

ATTITUDE À ADOPTER

• Sans avis médical préalable, il n’est pas justifié d’arrêter brutalement les traitements (risque d’aggravation des pathologies traitées, qui fragiliserait encore plus cette personne âgée, et risque de syndrôme de sevrage de l’IRS). En revanche, une évaluation clinique (surveillance de l’état d’hydratation, du poids, de la tension artérielle, et de la fréquence cardiaque) et un bilan sanguin (ionogramme et créatininémie) sont absolument nécessaires chez Mme H. avant de prendre une décision thérapeutique et d’adapter le traitement. Le pharmacien préconise impérativement une consultation médicale le jour-même.

• En outre, Mme H. doit éviter de sortir aux heures les plus chaudes, et doit boire souvent, sans attendre la sensation de soif. Les boissons alcoolisées sont bien évidemment à exclure, car elles aggravent la déshydratation.

CAS N° 6 – EFFETS INDÉSIRABLES

Un départ à la retraite mal vécu

Depuis la récente cession de son entreprise, M. V., 70 ans, a perdu l’appétit. Aujourd’hui, Céline, vient acheter un bain de bouche et une brosse à dents souple pour son père. Elle explique que depuis avant hier, il saigne en se brossant les dents. Ne connaissant pas M. V., la pharmacienne demande à Céline, si son père prend des médicaments. Cette dernière répond qu’il suit un traitement antiarythmique dont elle ne connaît pas le nom. Elle a apporté la carte vitale de son père. La consultation du DP interpelle la pharmacienne.

Qu’a découvert la pharmacienne ?

Une autre pharmacie dispense régulièrement à M V. : Cordarone (amiodarone), Préviscan (fluindione), Hémigoxine (digoxine) et Aldactazine (spironolactone + altizide). La pharmacienne se demande si les gingivorragies ne seraient pas un signe de surdosage en AVK.

ANALYSE DU CAS

• Les anticoagulants oraux sont l’une des classes thérapeutiques les plus impliquées dans la survenue d’accidents iatrogènes. L’étude Emir de 2007, portant sur l’incidence et le risque d’effets indésirables de médicaments, montre que les AVK sont responsables à eux seuls du plus fort taux d’hospitalisation pour effets indésirables (presque 13 %). Les patients de plus de 65 ans sont majoritairement concernées par la iatrogénie liée aux anticoagulants oraux.

• En effet, chez le sujet âgé, en particulier dénutri, il existe un risque majoré de surdosage en AVK. Ces médicaments ayant la particularité cinétique d’avoir une forte affinité pour l’albumine, ils circulent davantage sous forme libre en cas d’hypoprotidémie et sont donc plus actifs.

• Ainsi, du fait de la gravité et de la fréquence accrue des accidents hémorragiques chez la personne âgée, l’utilisation des AVK chez ce patient fait l’objet de recommandations particulières de l’Afssaps : évaluation des fonctions cognitives du sujet, du condiv psychologique et social ; diminution de la posologie initiale de moitié ou d’un quart par rapport aux adultes jeunes ; réévaluation indispensable du rapport bénéfice/risque tout au long du traitement ; surveillance de l’INR au moins une fois/mois et réajustement de la dose en cas de maladie intercurrente, de modification du traitement ou de l’apport alimentaire avec une vigilance accrue en cas d’hypoprotidémie.

• 2 à 4 % des seniors de 60 à 80 ans vivant à domicile sont dénutris, en raison de modifications métaboliques et de leurs habitudes alimentaires. En parallèle l’anabolisme protéique diminue tandis que le catabolisme protéique est conservé. La dépense énergétique de la personne âgée se trouve donc augmentée. Ce phénomène est aggravé lors de stress physiques ou psychiques.

ATTITUDE À ADOPTER

Après s’être assurée auprès de Céline que M. V. n’avait pas pris d’AINS ou d’aspirine en automédication, la pharmacienne lui explique que la baisse de moral de M. V. et sa perte d’appétit ne doivent pas être banalisées car elles peuvent être liées à un surdosage en anticoagulant, à l’origine des gingivorragies. Elle préconise d’aller faire une mesure d’INR avant d’aller consulter le médecin muni du résultat, dans les plus brefs délais, pour une éventuelle adaptation posologique de Previscan, et une évaluation de l’état psychologique et nutritionnel de M. V.

PHARMACOLOGIE

IATROGÉNIE ET PATIENTS ÂGÉS

• La iatrogénie médicamenteuse survient plus fréquemment chez une personne âgée (personne de plus de 75 ans, ou de plus de 65 ans et polypathologique) que chez un sujet jeune. L’enquête nationale Emir, portant sur l’incidence et le risque d’effets indésirables des médicaments, menée au printemps 2007 par les 31 centres de pharmacovigilance, sur 2 692 patients hospitalisés en court séjour, a révélé que le taux d’hospitalisations consécutives à des accidents iatrogènes médicamenteux augmentait avec l’âge des patients.

• Le diagnostic d’accident iatrogène médicamenteux est retardé chez la personne âgée parce que les signes cliniques peuvent être atypiques d’une part, et parce que ces symptômes sont perdus dans de nombreuses autres plaintes somatiques. De plus, les effets indésirables ne sont pas toujours rapportés par le patient âgé.

• Par ailleurs, les conséquences de la iatrogénie médicamenteuse sont plus graves chez le patient âgé. En effet, selon la HAS, la iatrogénie médicamenteuse à un coût humain et économique très élevé dans cette population, puisqu’elle serait responsable de 10 % des hospitalisations chez les personnes âgées (20 % chez les octogénaires). Les chiffres extrapolés en France, de l’étude américaine Medicare publiée fin 2010, permettent de conclure que la iatrogénie serait responsable d’environ 20 000 décès annuels de personnes âgées (soit 5 fois plus que les décès par accidents de la route !).

• Selon l’enquête Eneis 2 de 2009, (dont les résultats ne sont pas améliorés par rapport à ceux de la première enquête Eneis de 2004), près de la moitié (48,1 %) des événements indésirables graves liés aux médicaments seraient évitables car prévisibles. Du fait du vieillissement de la population, leur incidence risque d’augmenter. La lutte contre la iatrogénie médicamenteuse est donc une priorité nationale de santé publique.

Facteurs de risque propres au sujet âgé

Polypathologies et comorbidités

• Les comorbidités favorisent les risques iatrogènes. En effet, la présence d’au moins 5 pathologies double le risque de survenue d’effets indésirables, non seulement parce que ces problèmes ont des répercussions sur l’action des médicaments (pathologies rénales ou hépatiques modifiant le métabolisme et l’élimination des médicaments, infection intercurrente aiguë pouvant déséquilibrer un traitement antidiabétique ou anticoagulant, anticholinergiques exposant à un risque de rétention urinaire aiguë en cas d’adénome de la prostate et aggravant une démence ou une constipation chronique, AINS susceptibles de décompenser une cardiopathie sous-jacente…), mais aussi parce que la polypathologie est à l’origine d’une polymédication.

• Les personnes âgées de plus de 65 ans consomment en effet plus de 40 % des médicaments. Et le nombre de médicaments consommés quotidiennement augmente avec l’âge, comme le montrent de nombreuses enquêtes. Selon un rapport de la Haute Autorité de santé sur la consommation médicamenteuse chez le sujet âgé (rapport du Pr Sylvie Legrain de 2005), la consommation journalière passe de 3,3 spécialités par jour chez les personnes de 65 à 74 ans à 4,6 pour les plus de 85 ans.

• Cette polymédication multiplie le risque de survenue d’effets indésirables et d’interactions médicamenteuses, surtout en cas de nomadisme médical (selon l’étude Emir, 30 % des hospitalisations liées aux médicaments sont justement consécutives à des problèmes d’interactions), mais aussi de mauvaise observance des traitements. L’observance peut effectivement passer de 75 % pour une monothérapie à seulement 40 % dans le cas où le traitement comporte plus de 4 médicaments.

Modifications pharmacocinétiques

Le vieillissement peut avoir des répercussions sur les paramètres pharmacocinétiques des médicaments.

La sarcopénie

Chez le sujet âgé, on note une fonte musculaire. Il y a une diminution de la masse maigre, au profit de la masse grasse, ce qui modifie les volumes de distribution des médicaments. En particulier, le volume de distribution des médicaments liposolubles se trouve augmenté et ces derniers présentent une activité retardée et une demi-vie plus longue.

L’hypoprotidémie

Chez la personne âgée, une diminution de la concentration d’albumine plasmatique entraîne une augmentation de la fraction libre des médicaments à forte affinité pour l’albumine (AVK, sulfamides hypoglycémiants notamment), avec un risque potentiel de surdosage, puisque la forme libre d’un principe actif est la forme active.

La réduction de la fonction rénale

Le vieillissement entraîne une diminution du nombre de néphrons fonctionnels et une diminution de la vascularisation rénale provoquant ainsi une réduction progressive de la fonction rénale, avec une augmentation des demi-vies et un risque d’accumulation des médicaments fortement hydrosolubles (metformine, HBPM, IEC, ARA II, diurétiques, lithium, AINS, morphine…) qui sont à élimination rénale prépondérante.

Fragilité de certains organes et tissus

Diminution de la vidange gastrique

La vitesse de vidange gastrique diminue avec l’âge, ce qui majore notamment le risque de toxicité digestive des AINS.

Altération du système de régulation glycémique

La régulation de la glycémie est altérée, avec notamment une diminution de secrétion de glucagon, ce qui majore les risques d’hypoglycémie sous insuline et antidiabétiques oraux insulinosecréteurs (sulfamides hypoglycémiants et repaglinide) et bêtabloquants.

Fragilité de la barrière hémato-encéphalique

L’augmentation de la perméabilité hémato-encéphalique chez le sujet âgé, rend ce dernier plus sensible aux médicaments agissant sur le SNC, qui peuvent plus fréquemment induire des perturbations de la vigilance ou des troubles cognitifs.

Altération des barorécepteurs

L’efficacité des systèmes de régulation tensionnelle est moindre chez la personne âgée, ce qui la prédispose au risque d’hypotension (en particulier orthostatique) avec les médicaments antihypertenseurs ou les dérivés nitrés, mais aussi avec les antiparkinsoniens, et les médicaments adrénolytiques (neuroleptiques, antidépresseurs tricycliques, certains anti-H1…).

Prévention de l’hypotension orthostatique : afin de prévenir une chute, il est important de conseiller à tout patient (a fortiori âgé) traité par antihypertenseur(s) de se lever prudemment. Le port de bas de compression veineuse peut également être utile dans cette indication.

Diminution des capacités de thermo-régulation

L’altération des systèmes de régulation de l’homéostasie et de la température corporelle majore le risque d’hyperthermie sous neuroleptiques et rend le sujet âgé plus vunérable au syndrome d’épuisement-déshydratation, en particulier s’il est traité par diurétiques, IEC, ARA II ou AINS.

Fragilité osseuse

L’incidence d’ostéoporose et de fragilité osseuse augmente avec l’âge et aggrave les conséquences d’une chute liée aux médicaments (chute par hypotension orthostatique ou par faiblesse musculaire sous benzodiazépines, ou consécutive à une hypoglycémie).

Facteurs sociaux

Certains facteurs peuvent influencer l’observance et la surveillance des traitements, comme l’isolement social, la précarité, la dépendance, la perturbation des habitudes de vie (deuil, veuvage, déménagement…).

Les principales classes thérapeutiques à risque

Selon la HAS dans son rapport sur la consommation médicamenteuse chez le sujet âgé de 2005, les médicaments les plus impliqués dans la survenue d’accidents iatrogènes sont ceux du système cardiovasculaire et les psychotropes.

Ces éléments sont en partie confirmés par l’étude Emir de 2007 qui indiquait que les médicaments les plus fréquemment responsables d’événements indésirables étaient ceux du système nerveux central, suivis des médicaments cardiovasculaires et par l’étude Evisa (étude régionale sur les événements indésirables liés aux soins ambulatoires, réalisée en Aquitaine en 2008 et dont les résultats ont été publiés fin 2010), puisque les AVK, les neuroleptiques et les diurétiques seraient les principaux médicaments responsables d’effets indésirables à l’origine d’une hospitalisation.

CAS N° 7 – INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES

Une mauvaise idée !

Kelly, 22 ans, vient chercher le renouvellement de Laroxyl de sa grand-mère, Mme J. Quand la pharmacienne prend de ses nouvelles, Kelly répond qu’en ce moment, elle n’est pas très en forme : elle s’est enrhumé. À ce moment, la pharmacienne s’aperçoit que Kelly a déposé sur le comptoir des boules Quies, ainsi qu’une boîte de Fervex, prise dans le rayon libre accès. Elle s’interroge.

Qu’est-ce qui préoccupe la pharmacienne ?

La pharmacienne se demande à qui est destiné Fervex.

ANALYSE DU CAS

Le maléate de phéniramine (Fervex) est un anti-H1 qui présente des propriétés anticholinergiques. Son utilisation est à éviter chez Mme J. en première intention (risque de troubles neurovégétatifs à type de vertiges, troubles de l’équilibre et somnolence chez la personne âgée), d’autant que cette dernière est par ailleurs traitée pour des douleurs neuropathiques par Laroxyl (amitryptiline).

Or, l’association de deux médicaments anticholinergiques doit prendre en compte le risque d’addition d’effets indésirables de même nature et de survenue de syndrome atropinique, particulièrement mal toléré par un patient âgé. En effet, il associe des effets périphériques (sécheresse buccale à l’origine de dysgueusies ou de lésions chez les porteurs de prothèses dentaires ; troubles visuels et augmentation de la pression intra-oculaire ; constipation, et difficultés mictionnelles), mais aussi centraux (troubles mnésiques et comportementaux). Ces effets centraux sont plus fréquents chez la personne âgée, du fait d’une altération de la barrière hémato-encéphalique.

ATTITUDE À ADOPTER

Interrogée, Kelly confirme que Fervex est destiné à sa grand-mère. La pharmacienne le lui déconseille et préconise un lavage des fosses nasales, ainsi que du paracétamol en cas de fièvre. Si l’état de Mme J. ne s’améliorait pas rapidement, il faudrait consulter un médecin.

CAS N° 8 – INTERACTIONS MEDICAMENTEUSES

« Donnez-moil’antalgique de la télévision »

M. F., 72 ans, est un sénior dynamique. Aujourd’hui, il vient chercher son renouvellement d’antihypertenseurs : Exforge 5/80 (amlodipine et valsartan) 1/j et Esidrex (hydrochlorothiazide) 1/j. Se plaignant de douleurs aux genoux, M. F. demande aussi « l’antalgique qu’on voit à la télévision, Nurofen ».

Est-il opportun de délivrer de l’ibuprofène ?

Non, l’ibuprofène n’est pas l’antalgique le mieux adapté.

ANALYSE DU CAS

L’ibuprofène doit être utilisé avec prudence chez la personne âgée pour laquelle il doit être évité en automédication du fait de ses effets indésirables et de ses interactions. En effet, outre des effets indésirables digestifs potentiellement graves chez la personne âgée, les AINS peuvent induire une insuffisance rénale fonctionnelle en inhibant l’action vasodilatatrice des prostaglandines rénales, ce qui diminue la filtration glomérulaire.

Ils sont responsables d’un tiers des insuffisances rénales aiguës d’origine médicamenteuses. Leur utilisation chez le sujet âgé nécessite de surveiller la fonction rénale, l’hydratation et la diurèse. Par ailleurs, il faut faire particulièrement attention aux patients âgés traités par IEC, ARA II et diurétiques, en raison d’un risque majoré d’insuffisance rénale aiguë et de réduction de l’effet antihypertenseur. Enfin, les AINS peuvent décompenser une cardiopathie sous-jacente du fait d’une rétention hydrosodée et d’une élévation de la pression artérielle.

ATTITUDE À ADOPTER

La pharmacienne explique à M. F. que l’ibuprofène ne lui est pas recommandé, compte tenu de son traitement anti-hypertenseur. Elle lui propose du paracétamol non effervescent. En cas d’inefficacité, une consultation médicale s’imposerait.

CAS N° 9 – INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES

Glaucome et diabète

M. T., 69 ans, est un patient diabétique de type 2 dont le diabète peine à être équilibré. Il est actuellement traité par Lantus (insuline glargine) 1 inj SC de 4 unités le soir, Glucophage 1000 (metformine), Diamicron 80 (gliclazide). Aujourd’hui, sortant d’une consultation ophtalmique, il présente à la pharmacienne une ordonnance de Timoptol LP 0,25 % (timolol). L’ophtalmologiste a diagnostiqué un glaucome à angle fermé.

Peut-on délivrer le traitement antiglaucomateux ?

Il y a une interaction entre le collyre et le traitement antidiabétique. La dispensation est néanmoins possible, mais le patient doit être mis en garde des risques d’hypoglycémie.

ANALYSE DU CAS

• Tous les bêtabloquants (y compris ceux administrés sous forme de collyre, en raison d’un possible passage systémique) peuvent masquer certains symptômes annonciateurs d’hypoglycémie (palpitation, tachycardie, sueurs et tremblements), et retarder son diagnostic. Par ailleurs, ils aggravent une hypoglycémie car ils s’opposent à la libération de catécholamines endogènes, permettant d’assurer la sauvegarde du débit glucosé cérébral.

• De ce fait, les bêtabloquants interagissent avec les médicaments pourvoyeurs d’hypoglycémie. L’association des bêtabloquants à l’insuline ou aux sulfamides hypoglycémiants est en effet classée en association nécessitant des précautions d’emploi : le patient doit être prévenu du risque d’hypoglycémie, qui pourrait se manifester de façon atypique (asthénie, nausées, troubles du caractère, dégradation psychomotrice, voire confusion). En début du traitement bêtabloquant, il est important de renforcer l’autosurveillance glycémique, pour apprendre à déceler une hypoglycémie.

• Les personnes âgées, dont le système de régulation glycémique est altéré, sont particulièrement sensibles aux épisodes d’hypoglycémie. C’est pourquoi, l’ANSM (ex-Afssaps) attire l’attention sur les conséquences de l’association de médicaments hypoglycémiants et de bêtabloquants, même en collyre, chez le sujet âgé.

ATTITUDE À ADOPTER

La pharmacienne délivre Timoptol en prenant bien soin d’expliquer à M. T. que ce collyre peut masquer et aggraver une hypoglycémie. Elle lui apprend à reconnaître une hypoglycémie atypique : nausées, troubles de l’humeur et du comportement, dégradation psychomotrice, voire confusion. Pour prévenir ce risque, et éviter le passage systémique de bêtabloquants, la pharmacienne conseille enfin à M. T. de comprimer l’angle interne de l’œil avec l’index, pendant quelques secondes après l’administration de Timoptol.

CAS N° 10 – INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES

Aricept et Ditropan

Mme O., 73 ans, atteinte de maladie d’Alzheimer, vit chez sa fille Aude. Elle est suivie par un neurologue et traitée par Aricept 10 mg. Ces derniers temps, sa maladie s’est aggravée et une incontinence urinaire est apparue. Aude présente à la préparatrice, une ordonnance de Ditropan, prescrit par un généraliste. Lors de l’enregistrement de la dispensation, le logiciel détecte une interaction.

La préparatrice peut-elle délivrer Ditropan ?

Il y a effectivement une interaction entre le traitement habituellement prescrit par le neurologue et celui prescrit par le médecin généraliste.

ANALYSE DU CAS

• Aricept (donépezil) est un anticholinesterasique, qui augmente les transmissions cholinergiques par action parasympathomimétique indirecte.

• Ditropan (oxybutinine) est un anticholinergique urinaire, antagoniste du système nerveux parasympathique, et susceptible d’exercer aussi des effets anticholinergiques (c’est à dire atropiniques).

• Ces deux médicaments ayant des actions pharmacologiques opposées, leur association est illogique : il s’agit d’une interaction à prendre en compte par antagonisme. Elle expose le patient au risque de voir diminuer l’efficacité de son anticholinestérasique.

Par ailleurs, lors de la prochaine consultation, le traitement par Aricept pourrait être réévalué par le médecin. En effet, depuis mars 2012, le taux de remboursement d’Aricept est passé de 65 % à 15 %. Cette modification fait suite à la réévaluation par la HAS du service médical rendu (SMR). L’ASMR est mineure (IV) depuis 2007.

ATTITUDE À ADOPTER

La pharmacienne téléphone au généraliste pour discuter avec lui des risques liés à cette interaction, et lui suggère de remplacer sa prescription par Urispas. Le flavoxate est en effet un spasmolytique urinaire, indiqué dans le traitement de l’incontinence, sans interaction avec les anticholinesterastiques.

CAS N° 11 – CONTRE-INDICATIONS

Pas de confiture rose pour Mme L. !

Mme L., 90 ans, passe le plus clair de son temps au lit ou au fauteuil en position allongée ou semi-allongée. Evoquant les problèmes de constipation de sa mère, Anne-Marie vient chercher un « pot de confiture rose pour aller aux toilettes ».

Lansoÿl est-il adapté ?

Les laxatifs lubrifiants peuvent être responsables d’effets indésirables graves chez le patient âgé, notamment alité.

ANALYSE DU CAS

• La constipation concerne 30 à 50 % des plus de 65 ans (diminution de la musculature abdominale, de la consommation de fibres et de boissons, réduction de l’activité physique voire alitement, causes neurologiques ou iatrogènes…).

• Les laxatifs stimulants peuvent provoquer des diarrhées avec un risque de déshydratation important chez la personne âgée, et un risque d’hypokaliémie non négligeable chez un patient souvent polymédicamenté.

• Les laxatifs lubrifiants, à base d’huile de paraffine, doivent être utilisés avec la plus grande prudence chez les sujets âgés alités, ou souffrant de troubles de déglutition, en raison d’un risque de pneumopathie lipoïde d’inhalation en cas de fausses-routes.

• Les laxatifs de lest peuvent provoquer des occlusions œsophagiennes ou coliques chez les sujets âgés dont la motricité digestive est altérée.

• Les laxatifs à utiliser en première intention chez une personne âgée, sont les laxatifs osmotiques (lactulose, macrogol).

ATTITUDE À ADOPTER

La pharmacienne déconseille l’achat de Lansoÿl pour Mme L. Elle insiste sur l’importance d’une alimentation riche en fibres et d’une hydratation suffisante et conseille un laxatif à base de lactulose. Si ces mesures s’avéraient inefficaces, il faudrait signaler la constipation au médecin.

CAS N° 12 – CONTRE-INDICATIONS

Mon mari a mal au cœur

M. S., 71 ans, est parkinsonien. La semaine dernière, le neurologue a ajouté à son traitement habituel par Requip 5 mg (ropinirole), Modopar 62,5 (lévodopa + bensérazide). Aujourd’hui, Mme S. voudrait savoir si son mari peut prendre Primpéran (métoclopramide) qu’ils ont dans leur armoire à pharmacie. Il est pris de nausées depuis quelques jours.

Est-ce une bonne idée ?

Non ! Le métoclopramide est formellement contre-indiqué.

ANALYSE DU CAS

• Les antiémétiques antagonistes dopaminergiques (métoclopramide, métopimazine) sont des neuroleptiques cachés, qui peuvent induire des symptômes extrapyramidaux ou des dyskinésies tardives, en particulier chez le sujet âgé. Leur utilisation chez le patient parkinsonien est à proscrire du fait d’un risque d’antagonisme avec les agonistes dopaminergiques et la dopathérapie.

• Par ailleurs, la métopimazine et le dimenhydrinate (Nausicalm) possédant des propriétés anti-H1 et anticholinergiques, peuvent induire une somnolence, des troubles végétatifs et des effets atropiniques. Ils doivent être utilisés avec prudence chez la personne âgée, et sont contre-indiqués en cas de risque de glaucome à angle fermé et d’adénome de la prostate.

• Bien qu’étant un antagoniste dopaminergique, l’antiémétique le mieux toléré par une personne âgée, reste la dompéridone, car ne passant pas la barrière hématoencéphalique, ses effets extrapyramidaux sont exceptionnels. Mais sa prescription doit prendre en compte le risque d’allongement de l’espace QT à l’ECG et d’arythmie ventriculaire.

ATTITUDE À ADOPTER

Le pharmacien déconseille Primpéran et suspecte une cause iatrogène. Il préconise une administration de Modopar au cours des repas. Une consultation médicale s’avère indispensable pour apprécier la gravité des troubles hydroélectrolytiques et pour une éventuelle prescription de dompéridone.

CAS N° 13 – CONTRE-INDICATIONS

Je me réveille souvent la nuit !

Devant une aggravation de ses troubles mictionnels liés à un adénome de la prostate, le médecin de M. P., 75 ans, a rajouté à son traitement habituel par tamsulosine, Avodart (dutastéride). M. P. demande aussi Donormyl : il explique qu’il se réveille souvent la nuit.

Est-ce un bon conseil ?

Non, la doxylamine n’est pas adaptée à ce patient. En outre, il convient de s’interroger sur les troubles du sommeil de M. P.

ANALYSE DU CAS

• La doxylamine est un anti-H1 qui doit être utilisé avec prudence chez le sujet âgé (risque de somnolence diurne ou de sensations vertigineuses). De plus, ce médicament, du fait de ses possibles effets anticholinergiques peut, chez ce patient prostatique, aggraver les troubles urinaires liés à l’adénome, et provoquer une rétention urinaire aiguë.

• D’autre part, avant tout conseil médicamenteux, il convient de savoir si M. P. souffre réellement d’insomnie. Ses fréquents réveils nocturnes peuvent être liés à l’aggravation de ses troubles prostatiques (la vidange diurne incomplète de la vessie étant à l’origine d’une nycturie). Par ailleurs, chez une personne âgée, il faut distinguer les vraies insomnies des modifications physiologiques du sommeil liées au vieillissement (réduction du temps de sommeil nocturne du fait des siestes, sommeil plus léger et plus fragmenté).

ATTITUDE À ADOPTER

Le pharmacien déconseille formellement l’achat de Donormyl et donne des conseils hygiéno-diététiques : limiter la sieste à 20 mn, promouvoir l’éveil diurne, éviter la consommation de thé ou de café le soir, pas de boissons avant de se coucher, retarder l’horaire du coucher. En seconde intention, des gélules de valériane pourront être conseillées. Si les troubles persistent, il faudra les signaler au médecin.

CAS N° 14 – PROBLÈMES D’OBSERVANCE

Marie a du mal à avaler ses gélules

M. G. présente une ordonnance de Clamoxyl 1 g (3/j) et de paracétamol 500 mg en sachets pour son épouse, Huguette, qui a une pneumopathie. Il en profite pour prendre le renouvellement du traitement habituel de sa femme comportant Modopar 125 gélules et Timoptol 0,50 (1 goutte 2 fois/j). Quand la pharmacienne revient avec les médicaments, M. G. s’enquiert immédiatement de la taille des comprimés de Clamoxyl.

Que faut-il en penser ?

Les inquiétudes de M. G. quant à la taille des comprimés nouvellement prescrits, doivent faire réagir la pharmacienne et l’amener à se poser la question de savoir si Huguette est dans la capacité d’observer correctement son traitement habituel.

ANALYSE DU CAS

• Les personnes âgées (a fortiori atteintes de maladie de Parkinson ou d’Alzheimer) souffrent de troubles de déglutition, qui peuvent constituer un obstacle à la bonne observance de leur traitement.

• En effet, hormis les déficits cognitifs (incompréhension de la nécessité du traitement et des objectifs thérapeutiques, mauvaise compréhension des posologies et/ou des modes d’administration, troubles mnésiques…), les barrières les plus fréquentes à l’adhésion thérapeutique chez la personne âgée sont les difficultés que cette dernière peut rencontrer pour prendre son traitement. Ces entraves peuvent être liées aux médicaments (formes galéniques inadaptées, comprimés trop gros, difficiles à avaler, et dont l’éventuel mauvais goût reste plus longtemps en bouche dans ce cas…), mais elles peuvent être liées au patient lui-même, c’est à dire à ses déficits fonctionnels (troubles de la déglutition, perte de la dextérité manuelle, problèmes de vue…).

• Interrogé par la pharmacienne, M. G. explique qu’effectivement Marie a des difficultés de déglutition et « qu’elle a d’ailleurs bien du mal à avaler ses gélules de Modopar ».

• La pharmacienne s’assure que Mme G. parvient à mettre ses gouttes de Timoptol. Il faut en effet non seulement tenir compte, chez le sujet âgé, de la réduction de la mobilité scapulaire, rendant plus difficile l’élévation du bras et l’auto-administration de collyre, mais aussi, dans le cas présent, des troubles moteurs inhérents à la maladie de Parkinson. M. G. avoue que sa femme n’arrive pas à mettre toute seule ses gouttes dans les yeux et que lui non plus, n’est « pas très doué pour cela ». Marie attend donc le soir, la visite de leur fille, qui passe tous les jours les voir en rentrant du travail, pour mettre son collyre. Du coup, le plus souvent, Marie n’a qu’une seule goutte quotidienne au lieu de deux.

ATTITUDE À ADOPTER

La pharmacienne propose à M G. de contacter leur médecin pour lui faire part des difficultés rencontrées par son épouse. Elle suggère au médecin de remplacer Timoptol 0,50 par sa forme LP ne nécessitant qu’une seule goutte par jour et Modopar 125 par sa forme dispersible, plus facile à avaler (les gélules de Modopar 125 ne devant pas être ouvertes). D’autre part, la pharmacienne rassure M. G. : les comprimés de Clamoxyl 1 g peuvent être dispersés dans de l’eau.

Prévenir l’iatrogénie

Démarche à suivre lors d’une dispensation pour une personne âgée

• Consulter attentivement l’historique médicamenteux ou le dossier pharmaceutique du patient

– Tenir compte des situations cliniques qui peuvent être aggravées par des médicaments (adénome de la prostate et anticholinergiques, HTA et AINS …).

– Y a-t-il des interactions ? antiparkinsoniens et antiémétiques neuroleptiques, anticholinestérasiques et anticholinergiques, diurétiques, IEC ou ARA II et AINS, association d’anticholinergiques, bêtabloquants – y compris en collyre – et médicaments insulino-secréteurs ou insuline…).

• Connaître les objectifs thérapeutiques propres au sujet âgé (moins sévères que chez l’adulte jeune, pour éviter les malaises)

– Tension artérielle : Pas inférieure à 150 mm Hg chez les personnes de plus de 80 ans.

– Diabète : Hba1c < 8 % chez le sujet âgé fragile polypathologique.

• La forme galénique est-elle adaptée au patient ? Tenir compte des difficultés visuelles, des problèmes rhumatologiques, des troubles de déglutition et de coordination motrice…

• Éviter de changer de marque de générique lors des renouvellements (risque d’erreurs et de confusions).

• Faciliter et vérifier l’observance du traitement etablir des plans de prise cohérents, écrire lisiblement les posologies sur les conditionnements, conseiller l’achat de pilulier, s’enquérir de savoir si un tiers peut aider à l’administration.

• Avoir « le réflexe iatrogénique »

– Une cause médicamenteuse doit être systématiquement envisagée devant toute altération de l’état de santé d’une personne âgée sans explication évidente.

– Toujours se poser la question : y a-t-il un événement intercurrent qui peut déséquilibrer un traitement ou favoriser la survenue d’un accident iatrogène ? (forte chaleur, épisode aigu avec fièvre, deuil, déménagement, dénutrition…).

• Être très prudent face à l’achat de médicaments en libre accès ou lors de toute demande de médicaments ne nécessitant pas d’ordonnance. vigilance particulière vis à vis de l’ibuprofène, de médicaments ayant des propriétés anticholinergiques (contenus dans de nombreuses spécialités antirhume, antiémétique ou somnifères), des laxatifs stimulants ou huileux !

• Déconseiller l’automédication.

HYPOTENSION ORTHOSTATIQUE

Les anti-hypertenseurs représentent la première cause iatrogène d’hypotension orthostatique chez la personne âgée.

Prise en charge de l’HTA

• Entre 60 et 80 ans, la prise en charge de l’hypertension ne diffère pas de celle de l’adulte jeune (objectif : PAS < 140 mm de Hg et PAD < 90 mm de Hg). Chez le patient âgé de plus de 80 ans, une intervention thérapeutique est justifiée en raison d’un bénéfice sur la prévention des AVC ; mais les objectifs tensionnels sont moins sévères que chez l’adulte jeune : PAS < 150 mm de Hg, en l’absence d’hypotension orthostatique.

• Chez le patient âgé, les doses initiales d’antihypertenseur seront plus faibles et la titration plus lente que chez l’adulte jeune, avec notamment une surveillance étoite de la pression artérielle en position allongée et debout (risque d’hypotension orthostatique).

• Les classes thérapeutiques d’antihypertenseurs recommandées en première intention chez le patient âgé sont les diurétiques thiazidiques et les inhibiteurs calciques de type dihydropyridine. La prescription de diurétiques, d’IEC ou d’ARA II impose une surveillance régulière de la fonction rénale.

• Au-delà de 80 ans, maximum 3 médicaments antihypertenseurs peuvent être prescrits. Pas de restriction sodée.

BENZODIAZÉPINES

Les benzodiazépines doivent être utilisées avec prudence chez la personne âgée, quelle que soit leur indication, en raison d’un risque de sédation et de faiblesse musculaire, qui peut favoriser les chutes, aux conséquences graves dans cette population.

Du bon usage des benzodiazépines

• Chez la personne âgée, du fait des modifications pharmacocinétiques qui lui sont propres, il faut tenir compte d’un risque d’accumulation des benzodiazépines ou apparentés dans l’organisme. A titre d’exemple, la demi-vie de la zopiclone passe de 5 heures chez l’adulte jeune à 8 h chez la personne âgée. Celle du flunitrazépam est de 85 heures chez le sujet âgé contre 16 à 35 heures chez le jeune.

• Ainsi la posologie initiale doit être diminuée de moitié chez la personne âgée et la durée de traitement doit être la plus courte possible.

• L’utilisation de molécules à demi-vie courte (zolpidem et zopiclone) et/ou sans métabolites actifs (témazépam, loprazolam, lormetazépam) doit être privilégiée.

• Il convient d’éviter d’associer une benzodiazépine à d’autres psychotropes, du fait du cumul du risque de chutes et de troubles de la vigilance et mnésiques.

• Un traitement par benzodiazépine (ou apparenté) doit être arrêté progressivement, pour éviter un syndrôme de sevrage.

AINS

L’utilisation d’un AINS doit être très prudente chez la personne âgée. En raison d’une mauvaise tolérance digestive, une protection gastrique par IPP ou misoprostol est recommandée chez le patient de plus de 65 ans.

METFORMINE

Le risque de survenue d’une acidose lactique sous metformine peut être diminué chez la personne âgée par une surveillance rigoureuse de sa fonction rénale.

HYPONATRÉMIE

Les diurétiques et les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine peuvent provoquer une hyponatrémie, à l’origine d’une confusion mentale, en particulier, chez la personne âgée. Le risque confusiogène est majoré par une déshydratation, notamment en période de fortes chaleurs.

Hyponatrémies iatrogènes

• Définie par une concentration plasmatique des ions sodium inférieure à 135 mmol/l, l’hyponatrémie peut être asymptomatique ou entraîner une hypotension artérielle, des céphalées, des nausées, vomissements, une somnolence et une faiblesse, ou encore une confusion, voire des convulsions ou un coma, lorsqu’elle est sévère.

• Une hyponatrémie peut résulter d’une perte sodique rénale (insuffisance surrénalienne) ou digestive (diarrhées, vomissements répétés), ou d’une déshydratation, mais aussi d’une hémodilution consécutive à un défaut d’élimination de l’eau (augmentation de secrétion d’aldostérone lors d’une insuffisance cardiaque).

• Certains médicaments sont hyponatrémiants : tous les diurétiques, les IEC et les ARA II, les IRS, les antidépresseurs d’action duale, et certains anti-épileptiques (carbamazépine, oxcarbazépine). Ces médicaments sont d’autant plus susceptibles d’entraîner une hyponatrémie qu’il existe d’autres facteurs de risque. C’est particulièrement le cas, chez les personnes âgées, dont la fonction rénale est souvent altérée, qui souffrent de comorbidités et qui sont plus vulnérables en période de fortes chaleurs.

AVK

Les AVK ont un fort potentiel iatrogène, en particulier chez les patients de plus de 65 ans. La surveillance des traitements doit être renforcée chez ces derniers, du fait d’un risque accru de surdosage, notamment en cas de modifications majeurs de l’apport alimentaire.

Limites à l’utilisation du carnet AVK chez le patient âgé

• Selon une étude publiée en septembre 2011 dans la Presse Médicale, il s’avérerait que les personnes âgées rencontrent des difficultés à lire et donc à utiliser correctement le carnet d’information et de suivi des AVK. Ce carnet élaboré notamment par l’Afssaps et le Cespharm, vise à optimiser le suivi et l’éducation des patients sous AVK. Il rappelle les règles d’usage de ces médicaments, donne des conseils pratiques et alimentaires, et permet de relever les posologies, les dates et valeurs d’INR.

• Or, la typographie du carnet serait mal adaptée à la lisibilité par les personnes de plus de 75 ans (police trop fine, contraste insuffisant des caractères blancs sur fond violet). Ainsi à peine 70 % des 47 patients testés (patients hospitalisés, âgés d’au moins 75 ans, ne présentant pas de troubles cognitifs) ont réussi à lire correctement huit extraits du carnet à voix haute.

• Compte tenu des limites que connaissent les personnes âgées à utiliser correctement ce carnet, il est certain que le pharmacien à un rôle d’accompagnement d’autant plus vigilant à jouer auprès des seniors sous AVK, pour prévenir la iatrogénie liée à ces médicaments.

Optimiser la médication des patients âgés

• Selon la HAS, trois anomalies de médication ont été décrites chez le patient âgé. En s’inspirant du modèle anglo-saxon, on parle d’ « overuse » pour l’excès de traitement, de « misuse » pour une prescription inappropriée, et d’« underuse » pour une insuffisance de traitement.

L’excès de traitement

Il s’agit de l’utilisation de médicaments prescrits en l’absence d’indication (prescription excessive de benzodiazépines, sans tenir compte des modifications physiologiques du sommeil avec l’âge, par exemple), ou dont le SMR (service médical rendu) est insuffisant, c’est à dire n’ayant pas prouvé leur efficacité (comme les vasodilatateurs cérébraux). Ainsi, il est nécessaire, selon la HAS, de revoir régulièrement les indications et les traitements, au moins sur une base annuelle. Il est également indispensable que les prescripteurs réfléchissent à une stratégie d’arrêt des traitements inutiles.

La prescription inappropriée

C’est l’utilisation de médicaments dont les risques chez la personne âgée dépassent les bénéfices attendus. Le premier à avoir réfléchi à ce concept est Beers dans les années 1990 aux Etats-Unis. Depuis, une liste* française de médicaments potentiellement inappropriés en gériatrie a été établie par le centre régional de pharmacovigilance de Limoges en 2007. Elle s’applique aux patients d’au moins 75 ans et regroupe une trentaine de médicaments ou classes médicamenteuses, dont les médicaments ayant des propriétés anticholinergiques, les benzodiazépines à demi-vie supérieure ou égale à 20 h, les antihypertenseurs d’action centrale, les laxatifs stimulants, les sulfamides hypoglycémiants à longue durée d’action, la digoxine à des doses > 0,125 mg/j…

L’insuffisance de traitement

C’est l’absence d’instauration d’un traitement efficace. Certaines pathologies, comme l’hypertension artérielle, la fibrillation auriculaire, la dépression, l’ostéoporose, sont parfois sous-traitées chez le patient âgé. Une réduction à l’aveugle de la polymédication chez la personne âgée n’est pourtant pas souhaitable, selon la HAS.

* La liste complète des médicaments potentiellement inappropriés en gériatrie est disponible sur www.amc69.fr/pdf/liste-medicaments-inappropries.pdf

Entrave au bon usage des médicaments

• Troubles cognitifs

Les éventuels troubles mnésiques de la personne âgée sont responsables d’erreurs d’observance des traitements et peuvent être à l’origine de sous-dosage (par défaut de prise médicamenteuse) ou au contraire de surdosage (lié à une surconsommation médicamenteuse pour rattraper un « faux » oubli).

• Diminution de l’acuité visuelle

L’existence d’un trouble visuel dont l’incidence augmente avec l’âge, comme un problème de glaucome, de cataracte, de DMLA, peut expliquer des confusions entre les boîtes de médicaments, ou des erreurs sur le nombre de gouttes, par exemple.

• Tremblements, déformations digitales (en cas d’arthrose, ou de polyarthrite rhumatoïde) et troubles de coordination motrice

Ces différents troubles constituent une entrave à l’ouverture de blister ou de flacon, à l’utilisation des compte-gouttes, à la manipulation et à la préhension de comprimés sécables ou à l’utilisation de dispositifs d’inhalation. De même, la réduction de mobilité des épaules peut rendre difficile l’instillation de collyres.

• Troubles de la déglutition

Les éventuels troubles de déglutition rendent plus difficile l’administration orale de certains médicaments et peuvent constituer une entrave à la bonne observance des traitements. Par ailleurs, les patients parkinsoniens ou Alzheimer, ou encore les personnes âgées alitées sont susceptibles de faire des « fausse-routes », qui peuvent être à l’origine d’accidents iatrogènes, notamment de pneumopathies lipoïdes en cas d’inhalation de laxatifs lubrifiants.

ANTICHOLI-NERGIQUES

Les personnes âgées sont particulièrement sensibles aux effets indésirables atropiniques (notamment centraux). L’association de médicaments anti-cholinergiques est donc dangereuse chez ces patients, en raison de l’additivité de ces effets.

AINS ET INSUFFISANCE RÉNALE

La prise d’AINS est à éviter en automédication chez un patient âgé en raison d’un risque d’insuffisance rénale aiguë fonctionnelle, en particulier si le patient est traité par diurétiques, ARA II ou IEC.

BÊTABLOQUANT

Les collyres bêtabloquants exposent au même type d’effets indésirables que les bêtabloquants administrés par voie générale, et peuvent masquer certains signes cliniques annonciateurs d’hypoglycémie, ce qui aggrave ses conséquences en particulier chez le sujet âgé, dont les systèmes de régulation glycémiques sont altérés.

Prise en charge du diabéte de type 2

Objectifs thérapeutiques

• Les objectifs glycémiques doivent être adaptés à l’âge, à l’ancienneté du diabète, à ses complications, à l’espérance de vie et doit tenir compte du risque d’hypoglycémie.

• Ainsi chez le patient âgé de plus de 75 ans, sans pathologie sévère associée, les objectifs seront semblables à ceux de l’adulte jeune.

• En revanche, chez le patient âgé polypathologique, (éventuellement dénutri, peu ou pas autonome) à risque iatrogène élevé, l’objectif sera revu à la hausse (HbA1c > 8 % contre 7 % chez le sujet jeune). On choisira souvent de s’abstenir de tout traitement antidiabétique oral et en cas de nécessité, l’insulinothérapie sera préférée.

Recommandations de prescription

• Il est recommandé d’utiliser avec prudence la metformine chez le sujet âgé du fait du risque d’acidose lactique en cas d’altération de la fonction rénale. Cette dernière doit être contrôlée avant mise sous traitement, puis 2 à 4 fois/an.

• Les sulfamides hypoglycémiants sont contre-indiqués si la clairance de la créatinine est inférieure à 30 ml/mn, et ceux à longue durée d’action comme le glipizide sous forme LP (Ozidia), sont contre-indiqués chez les personnes de plus de 65 ans, en raison de leur risque important d’hypoglycémie.

• Les glinides (Novonorm) ne sont actuellement pas recommandés après 75 ans, en raison de l’absence d’études spécifiques.

• Les inhibiteurs d’alpha-glucosidase sont contre-indiqués en cas d’occlusion intestinale et en cas d’insuffisance rénale sévère.

• Les glitazones sont contre-indiquées en cas d’insuffisance cardiaque.

Prévention de l’hypoglycémie

• Enfin, tout malaise survenant chez une personne âgée diabétique doit être considérée comme une potentielle hypoglycémie et mener à une consultation dans les plus brefs délais.

ANTICHOLI-NERGIQUE

L’association d’anticholinergiques aux anticholinestérasiques est illogique car antagoniste. Le traitement de l’incontinence urinaire des patients atteints de la maladie d’Alzheimer doit privilégier les antispasmodiques urinaires.

PARAFFINE

L’utilisation de paraffine liquide chez des personnes alitées ou ayant des difficultés de déglutition expose à un risque de pneumopathie lipoïde.

DOMPÉRIDONE

L’anti-émétique de premier choix à utiliser chez une personne âgée (a fortiori parkinsonienne) est la dompéridone.

SOMMEIL

La prise en charge de l’insomnie du patient âgée doit être raisonnée, tenir compte des modifications physiologiques du sommeil et des contre-indications liées aux comorbidités.

FORMES GALÉNIQUES

Face à une prescription destinée à un patient âgé, se demander systématiquement si les formes galéniques prescrites sont adaptées. Les formes orodispersibles, transdermiques ou à libération prolongée et les sachets peuvent permettre d’optimiser l’observance.

Médicaments à ne pas écraser

• Le broyage des comprimés n’est pas toujours la bonne solution pour faciliter l’administration des médicaments en gériatrie car il peut exposer aux risques :

– d’erreurs de dose (plus particulièrement de sous-dosage par perte de produit lors de la manipulation, ou si la personne âgée ne mange pas toute la portion alimentaire dans laquelle est mélangé le médicament écrasé) ;

– de toxicité pour le patient avec irritation ou ulcération des muqueuses buccales ou digestives ou pour l’aidant ;

– de modification des propriétés pharmacocinétiques ou physico-chimiques du médicament, pouvant altérer son efficacité.

• Ainsi, il ne faut pas couper, écraser ou ouvrir :

– les formes galéniques contenant des médicaments à marge thérapeutique étroite ;

– les formes enrobées, pelliculées ou dragéifiées, lesquelles visent à masquer une saveur désagréable, à protéger des principes actifs vis à vis de l’air ou de la lumière ou encore à protéger une tierce personne amenée à manipuler le médicament de ses effets indésirables en cas de passage transcutané (à l’instar des inhibiteurs de la 5-á réductase) ;

– les formes gastro-résistantes (à l’exception des gélules contenant des granules gastro-résistants, pouvant être ouvertes comme Mopral) ;

– les formes à libération prolongée ;

– les formes contenant des substances irritantes (fer, alendronate, anticancéreux…).

Vous sentez-vous régulièrement en insécurité dans vos officines ?


Décryptage

NOS FORMATIONS

1Healthformation propose un catalogue de formations en e-learning sur une quinzaine de thématiques liées à la pratique officinale. Certains modules permettent de valider l'obligation de DPC.

Les médicaments à délivrance particulière

Pour délivrer en toute sécurité

Le Pack

Moniteur Expert

Vous avez des questions ?
Des experts vous répondent !