FIXER SA POLITIQUE DE PRIX EN ZONE CONCURRENTIELLE - Le Moniteur des Pharmacies n° 2896 du 10/09/2011 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2896 du 10/09/2011
 
POINT DE VENTE

Entreprise

Auteur(s) : François Pouzaud

Dans un environnement fortement concurrentiel, la tentation est grande de baisser ses prix. Ce qui n’est pas sans conséquence sur la rentabilité. Faut-il adopter des prix bas pour mieux séduire ? Accorder des remises ? Tour d’horizon des logiques à suivre en fonction du contexte.

Une enseigne discount vient de s’installer à quelques dizaines de mètres de votre officine ? Avant de vous lancer dans une politique de baisse des prix, mieux vaut en prévoir l’incidence sur la marge. Mais cela peut aussi permettre d’augmenter les volumes vendus, par des animations et promotions, ainsi que de capter de nouvelles ordonnances.

1 Trois stratégies de prix

Comme l’explique Philippe Lebas, le directeur de l’Agence pédagogique Cohesia, spécialiste en ressources humaines et marketing, « le pharmacien a le choix entre trois stratégies de prix pour s’adapter à son environnement concurrentiel. Chacune d’entre elles vise une cible précise de produits et met en œuvre des moyens précis ».

La pénétration

Pour quels produits ?

Ce sont des produits phares, à très forte rotation, faisant souvent l’objet de campagnes de communication dans les médias. Leurs prix sont en dessous du prix moyen du marché ou très inférieurs à ceux du concurrent de référence de la zone de chalandise. Le taux de marge doit être inférieur à 25 %, voire en dessous pour s’approcher du prix coûtant. L’objectif est d’augmenter les ventes et le nombre des ordonnances.

Quels moyens ?

Il faut mettre en place une veille concurrentielle et établir la liste des 20 à 50 produits leaders en TVA 5,5 % et 19,6 %. Le pharmacien devra alors appliquer une politique de prix dynamique avec des prix compétitifs toute l’année sur les produits quotidiens. Il faudra aussi piloter en « 4 × 4 » chaque mois : 4 produits à prix coûtant, 40 produits à prix bas, 40 produits en lots, 4 offres promotionnelles.

L’écrémage

Pour quels produits ?

Cette stratégie convient à des produits techniques, innovants, souvent associés à une démarche d’expertise et de conseil. Ils différencient l’officine et fidélisent car la concurrence est faible. Le taux de marge à appliquer doit être inférieur à 35 % sur le prix d’achat non remisé.

Quels moyens ?

L’officine doit faire le choix d’une ou plusieurs spécialisations et établir un partenariat avec les laboratoires. Après avoir formé les équipes officinales, il faudra communiquer auprès de la clientèle sur ce savoir-faire.

L’alignement

Pour quels produits ?

Ce sont des produits très connus. La technique consiste à s’aligner sur les prix pratiqués par le concurrent direct. Objectif : maintenir le flux sur l’ordonnance.

Quels moyens ?

Il faut mettre en place une veille concurrentielle active.

2 A chaque type de concurrent sa riposte

Le concurrent est une GMS

« Des enseignes comme Auchan et Carrefour imposent des lignes de conduite communes à l’ensemble de leurs hypermarchés mais ne sont pas forcément les plus agressives sur les prix », explique Joëlle Hermouet, directrice de Formaplus, spécialisé en marketing. Quelle attitude adopter ? « Communiquer sur des promotions agressives menées sur des produits sensibles et utiliser les effets de masse pour donner une image de prix dynamique », poursuit la consultante. Parallèlement, le titulaire devra donner une orientation plus médicale à sa pharmacie à travers une offre différenciante. En revanche, une enseigne d’indépendants comme Leclerc a une liberté de manœuvre plus importante et sa réactivité est beaucoup plus forte en cas de guerre ouverte sur les prix. « Dans ce cas, il faut prendre garde à ne pas déclencher les hostilités car le pharmacien s’en mordrait les doigts, continue la spécialiste en marketing officinal. Son intérêt est de maintenir une entente cordiale en s’alignant sur les prix de son concurrent, de référencer les produits leaders et de développer des gammes spécifiques pour son conseil. »

Le concurrent est une pharmacie discount

« Si la pharmacie discount est de faible surface, sans possibilité de s’agrandir ou de transférer, la stratégie sera de s’aligner sur ses prix pour les références sensibles et veiller, pour les autres produits, à ne pas pratiquer des prix supérieurs de plus de 10 % », indique Joëlle Hermouet. Il faudra aussi élargir l’offre, pondérer les marges et mettre en avant le conseil. Dans le cas où un discounter s’apprête à s’installer dans la zone de chalandise, l’officinal pourra mieux agir en anticipant car « il est plus facile de freiner le départ de la clientèle à un moment où le discounter n’a pas encore construit sa notoriété que de la recapter ».

Le concurrent est un pharmacien sous enseigne

« La politique d’enseigne impose des référencements de produits ou de gammes à ses affiliés qui ne correspondent pas forcément aux besoins de leur clientèle. La pharmacie isolée (ou seulement groupée) dispose d’une plus grande souplesse et d’une meilleure réactivité pour adapter ses offres par rapport à son environnement local », analyse la consultante. Pour contrer l’enseigne, le pharmacien devra accepter de rogner ses marges sur les produits sensibles et d’investir financièrement pour rendre sa communication plus visible. Il devra lutter avec les mêmes armes (promotions, prix, effets de masse, communication, formation et management des équipes) et, comme précédemment, se différencier de la concurrence sur des axes plus médicaux, par exemple.

Mesurez le coefficient d’effort

Il faut faire des promotions, ce qui suppose, pour préserver sa marge, de vendre plus de produits. Philippe Lebas (Cohesia) donne un exemple de l’effort à fournir.

• Vous avez vendu 100 produits avec 5 € de marge, vous avez gagné 500 €.

• Vous baissez votre prix de vente : la nouvelle marge est de 1,5 €. Si vous vendez le même volume (100 produits), vous avez gagné 150 € et perdu 350 €.

• Vous devez donc vendre beaucoup plus. Divisez l’ancienne marge par la nouvelle marge : 5/1,5 = 3,33. Vous avez trouvé le coefficient d’effort.

• Vous devez vendre 333 produits pour récupérer la même marge en valeur.

Comment une pharmacie contourne sa concurrence

A Troyes (Aube), les voisines de la Pharmacie Saint-Jean s’appellent City Pharma et Lafayette. « Il est difficile de lutter car certains produits comme Oscillococcinum sont vendus à prix coûtant », livre René Bergaentzle, son titulaire. Pourtant, ce pharmacien s’est efforcé de tirer ses prix vers le bas pour rester concurrentiel. Insuffisant. « Je me tourne vers les laboratoires ou les gammes qui ne figurent pas en produits d’appel chez Lafayette et City Pharma. » Et passe beaucoup de temps à conseiller, parler des effets secondaires, détailler le traitement. De cette manière, une majorité de sa clientèle reste fidèle, en particulier les personnes âgées. « J’ai surtout perdu une clientèle de jeunes mamans car elles trouvent le lait pour bébés et la contraception à très bas prix dans ces enseignes discount. » La pharmacie parvient néanmoins à stabiliser son activité. « Arrivant en fin de carrière, je n’ai plus de dettes. » S.B.

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