PROTECTION RAPPROCHÉE - Le Moniteur des Pharmacies n° 2880 du 30/04/2011 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2880 du 30/04/2011
 

Actualité

Auteur(s) : Matthieu Vandendriessche

Les ministres de la Santé, de l’Intérieur et de la Justice ont annoncé, le 20 avril, des mesures pour renforcer la sécurité des médecins et pharmaciens. Ce protocole élaboré avec les ordres professionnels, mais qu’ils n’ont pas encore signé, prévoit notamment de désigner un interlocuteur « santé » au sein des commissariats.

Dans un an, jour pour jour, nous serons entre les deux tours de l’élection présidentielle. On devine que la campagne ne fera pas l’impasse sur la question de l’insécurité. Lors de l’émission « Paroles de Français » sur TF1 en février, c’est une pharmacienne qui avait interpellé Nicolas Sarkozy sur les agressions récurrentes dont elle était victime. Ce soir-là, elle était la porte-parole des professionnels de santé en proie à une insécurité permanente. Le gouvernement a présenté le 20 avril dernier un plan d’action spécifique au monde de la santé. « Pour bien soigner, il faut soigner en sécurité », a affirmé le ministre de la Santé, Xavier Bertrand, intervenant aux côtés de ses collègues de l’Intérieur et de la Justice, Claude Guéant et Michel Mercier. Le protocole d’accord, élaboré en lien avec sept ordres professionnels, n’a pourtant pas obtenu leur signature. Le motif ? l’intégration des syndicats, peu avant cette présentation. « La volonté du ministère était d’intégrer tout le monde. Ce plan nous a été présenté, nous y souscrivons pleinement », justifie Philippe Gaertner, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF). Selon lui, cela ne change rien sur le fond. Tout de même un peu vexés, les ordres demandent un temps de concertation et devraient se réunir aux alentours du 10 mai. Car ce plan est leur « bébé ». « Il était d’abord spécifique aux médecins, puis il a été étendu aux autres professions de santé », se félicite André Deseur, membre de l’Ordre des médecins. « Il constitue une révolution culturelle », ose même Alain Marcillac, responsable de la sécurité à l’Ordre des pharmaciens. Interlocuteur et numéro de téléphone spécifiques aux professionnels de santé dans les commissariats, guide pratique, diagnostic de prévention figurent ainsi dans le protocole (voir ci-contre).

Intervention rapide de la police

Sur le terrain, certaines mesures sont déjà en place. C’est le cas à Stains et Pierrefitte-sur-Seine, en Seine-Saint-Denis. Médecins et pharmaciens, mais aussi kinés et infirmières, ont constitué un collectif associatif, voilà une dizaine d’années. Récemment, une gynécologue et une dermatologue ont été violemment agressées dans leur cabinet. Elles sont parties exercer ailleurs. Tout à côté, une pharmacienne braquée l’an dernier ne travaille plus qu’en actionnant à distance l’ouverture de sa porte d’entrée. Elle subit encore des menaces récurrentes. « La réalité des dépôts de plainte fait que le nombre d’agressions est sous-estimé, mais que leur progression, elle, est surévaluée », précise Jocelyne Rousseau, généraliste et présidente du collectif. Elle se félicite de l’ouverture d’une ligne téléphonique spécifique, il y a trois ans. « Les inspecteurs de la brigade anti-criminalité sont sur place en quelques minutes. Mais le numéro à dix chiffres doit être simplifié pour être vraiment mémorisable », estime la généraliste. Le dépôt de plainte sur rendez-vous est déjà effectif. « Cela évite des heures d’attente », constate t-elle. La possibilité de déclarer l’agression sur place est promise par la préfecture. D’autres mesures ne remportent pas forcément l’adhésion. Notamment le diagnostic de sécurité proposé par les autorités. « Nous ne voulons pas travailler dans un blockhaus, en n’ouvrant la porte qu’aux personnes connues. Ce n’est pas éthique. Cela peut être une mesure intermédiaire, mais pas définitive », pointe le Dr Rousseau.

Sur le plan national, ni budget, ni calendrier n’ont été précisés pour l’instant. Du côté des policiers, l’opposition est nette. « Nous n’avons été ni concertés, ni associés à ce protocole », assure Denis Jacob, responsable d’Alliance, second syndicat de police. Ce plan mériterait bien sûr d’être mis en œuvre. Mais il est irréalisable de l’étendre sur tout le territoire. Et si on le fait pour les professions de santé, pourquoi pas pour d’autres ? » L’Ordre des pharmaciens table cependant sur une mise en œuvre dans les prochaines semaines.

L’ESSENTIEL

• Le gouvernement a présenté le 20 avril un protocole d’accord visant à sécuriser l’exercice des professionnels de santé.

• Suite à des modifications de dernière minute, les ordres professionnels ont reporté la signature de ce div.

• Les différentes mesures, dont certaines sont déjà appliquées en Seine-Saint-Denis, devraient être appliquées dans les prochaines semaines.

L’insécurité en pharmacie encore taboue en 2010

L’an dernier, l’Ordre des pharmaciens a reçu 112 déclarations d’agressions, contre 102 en 2009, 229 en 2006 et même 742 en 2002. Ce recul est progressif depuis près de 10 ans, du fait d’un équipement croissant en matériel de protection. Mais tous les pharmaciens agressés ne se manifestent pas et l’Ordre proposera, début 2012, d’effectuer la démarche sur la page d’accueil de son site Internet. Cependant, selon les statistiques ordinales, les deux tiers des officinaux indiquent qu’ils portent plainte. Pour la moitié d’entre eux, c’était la première agression. Elle survient le plus souvent hors des gardes et lorsque l’officine est ouverte (dans 59 % des cas). L’épisode reste délicat à évoquer pour un confrère sur deux. Les autres estiment qu’il n’a pas laissé de traces (43 % des cas). Pourtant, la seule agression verbale ne concerne que 36 % des cas déclarés à l’Ordre. Avec 46 % des motifs de violence, c’est le contenu de la caisse qui attire le plus de convoitises, contre 22 % pour les stupéfiants. Le phénomène touche davantage les petites villes (de 5 000 à 30 000 habitants), dans les quartiers centraux, plus souvent en Ile-de-France et en Lorraine.

DES MESURES EN RAFALE

En prévention

• Des interlocuteurs policiers et gendarmes dédiés ;

• un diagnostic de la sécurisation des locaux ;

• la sensibilisation à la préservation des indices et à l’établissement d’un signalement ;

• un guide pratique pour prévenir les actes de malveillance.

Après l’agression

• Une ligne téléphonique « police-secours » pour les professionnels de santé ;

• un recueil de la plainte sur place ou sur rendez-vous ;

• la possibilité pour le plaignant de se domicilier à son adresse professionnelle ;

• la possibilité pour l’Ordre de se porter partie civile ;

• l’information par le procureur des suites données à l’affaire ;

• un suivi annuel, au plan national et local, en présence du préfet et des autorités judiciaires.

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