SAVOIR PRENDRE EN CHARGE LA DOULEUR - Le Moniteur des Pharmacies n° 2869 du 19/02/2011 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2869 du 19/02/2011
 

Entreprise

POINT DE VENTE

Auteur(s) : Marie Luginsland

Rage de dents, mal de dos, migraines… Comment prendre en charge les différentes douleurs sans marcher sur les plates-bandes des médecins ? Si les initiatives des officinaux sont encore embryonnaires, spécialistes et formateurs pointent du doigt la nécessité de mettre en place un accueil spécifique à l’officine.

1 Inciter le client à exprimer sa douleur

Si les sources de douleur sont multiples, les demandes du client ne le sont pas moins. Elles peuvent aller du simple achat de son antalgique préféré à la présentation d’une ordonnance en passant par l’expression, sans ambiguité, de sa douleur au comptoir. Dans tous les cas, le dialogue avec le patient est nécessaire. « Pour les produits en libre accès, les équipes limitent le plus souvent l’interrogatoire à la posologie et au destinataire du produit. On omet de demander au client si le produit est adapté ou non à sa douleur. Il suffirait d’ouvrir le dialogue par une simple question : “Qu’est-ce qui vous arrive ?” », conseille Marie-Hélène Gauthey, qui inclut la prise en charge de la douleur dans ses programmes de formation chez Atoopharm.

Ce type de question ouverte incite le client à exprimer sa douleur et permet de lui proposer éventuellement un médicament plus adapté. En effet, l’expérience montre que les clients utilisent souvent la même molécule par habitude. Certes, l’attitude du pharmacien face à cette demande spontanée du client s’apparente à une technique de vente et peut le mettre mal à l’aise. Cependant, si le client peut parfois se sentir déstabilisé ou contrarié par le questionnement de son pharmacien, il lui est le plus souvent reconnaissant car il ressentira toujours le besoin de parler de son mal et d’être considéré dans cette expression. « La douleur perturbe le fonctionnement du patient et celui-ci s’exprime différemment ? », résume Philippe Villeneuve, officinal et formateur chez IFMO.

2 Personnaliser l’écoute

Idéalement, la douleur doit faire l’objet d’une prise en charge spécifique. L’équipe doit alors montrer au patient que ses symptômes sont pris en considération, y compris pendant les heures de pointe. On peut alors le rejoindre en faisant le tour du comptoir ou encore l’inviter à s’isoler pour un dialogue plus approfondi. Les comptoirs espacés sont généralement adaptés à ce face-à-face. Il est aussi possible d’aménager l’officine en réservant un comptoir à lécoute et à des prises en charge plus en profondeur, évitant ainsi aux clients de trop longues files d’attente. Si l’officine dispose d’un espace de confidentialité afin de mener des entretiens de prévention et de dépistage, il est également possible de l’utiliser pour prendre en charge la douleur de façon plus personnalisée, avec une signalétique spécifique.

3 Approfondir le questionnaire

Au-delà du simple questionnaire sur l’âge du patient et de l’information sur les effets secondaires, la délivrance d’un antalgique, prescrit ou non, peut ouvrir d’autres horizons. En adoptant une attitude proactive, le pharmacien joue pleinement son rôle de professionnel de santé et renforce le capital confiance de son client. « Dans la délivrance sur ordonnance, le pharmacien doit identifier les inconforts du patient liés à sa pathologie, conseille Marie-Hélène Gauthey. Là aussi, des questions toutes simples peuvent contribuer à rompre la glace, comme par exemple “Comment supportez-vous votre traitement ?”, il faudra alors s’assurer si cet antalgique est approprié et s’il n’y a pas d’interactions. »

Face à une nouvelle prescription, le pharmacien doit aussi rassurer le client. « Certains traitements, comme celui de l’arthrose, ne font pas effet tout de suite. Mieux vaut prévenir le patient qu’il n’en ressentira pas les bénéfices immédiats et lui proposer un antalgique pour atténuer les douleurs au quotidien », conseille une titulaire. De même, face à certaines ordonnances, le pharmacien doit avoir le réflexe d’anticiper sur la douleur. C’est le cas des anti-inflammatoires, pour lesquels les patients ne sont pas toujours prévenus des risques de maux d’estomac. « Il faut rassurer le patient et ne pas dévaloriser l’acte médical, tout en mettant en garde sur les effets secondaires », recommande Marie-Hélène Gauthey.

Enfin, se mettre à la place du patient, c’est aussi lui conseiller différents dérivatifs. « Pour déstresser face à la douleur, je conseille d’appliquer des plaques de froid, une bouillotte, des tisanes ou de l’homéopathie. Pour les douleurs chroniques, on peut suggérer le yoga et la sophrologie », suggère Philippe Villeneuve.

4 Connaître ses limites

Signe clinique d’une pathologie, la douleur peut conduire le pharmacien aux limites de ses compétences. L’intensité et la fréquence de la plainte du client doivent l’alerter. Loin de se substituer au praticien, il pourra orienter le patient vers un spécialiste ou un centre antidouleur. « Quand la douleur se fait l’écho d’une pathologie plus grave, le pharmacien passera le relais », indique Philippe Villeneuve.

Certaines pathologies, en effet, restent sous-diagnostiquées. C’est le cas de l’algie vasculaire de la face. Ce constat a incité la société Orkyn’ à lancer en avril prochain une formation des officinaux pour son dépistage. « Un questionnaire précis concernant la localisation de la douleur, les symptômes (larmoiements, sudations du front), l’anamnèse ainsi qu’un état de grande agitation permettront au pharmacien de distinguer cette pathologie d’une grosse migraine chez un patient polymédiqué et de qualifier la douleur ? », indique Laureline Pouteau, pharmacienne et chef de produit chez Orkyn’.

Une orientation immédiate vers un neurologue n’empêchera pas pour autant que, sur le moyen terme, le pharmacien continue à suivre l’efficacité du traitement et la qualité de vie de son client. Un patient dont il aura durablement gagné la confiance.

TÉMOIGNAGE

« Pas de protocole, mais une réponse au cas par cas » VIOLAINE F., TITULAIRE EN ILLE-ET-VILAINE

« La douleur est la première demande du client qui se livre au comptoir. C’est une opportunité pour offrir un conseil complémentaire à la prescription. L’écoute est alors essentielle. L’équipe s’efforce donc de faire preuve d’empathie et de chercher des solutions concrètes. Pour mieux appréhender la douleur, toute l’équipe est formée. Mais je reste persuadée que sa prise en charge ne peut pas faire l’objet d’un protocole. Ce serait la déshumaniser. Confrontée à la plainte du client, l’équipe apporte une réponse homogène mais chaque collaborateur aura une attitude différente en fonction de sa personnalité et du client qui lui fera face. »

Les formations

Si la prise en charge de la douleur au comptoir ne fait pas l’objet de formations spécifiques, elle est en revanche abordée dans des sessions de formation sur l’accueil du client, la communication appliquée au conseil officinal ou encore sur les techniques de commercialisation. Voici quatre formations (liste non exhaustive) qui abordent la douleur.

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