LA PERSONNE ÂGÉE AU COMPTOIR - Le Moniteur des Pharmacies n° 2869 du 19/02/2011 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2869 du 19/02/2011
 

Cahiers Formation du Moniteur

Conseil

LE RHUME

« Monsieur B. s’est servi tout seul ! »

Monsieur B., 72 ans, tend une ordonnance de renouvellement d’Avodart (dutastéride) et pose sur le comptoir une boîte de Rhinofébral qu’il a prise dans le rayon en libre accès.

– Je me suis enrhumé. J’ai le nez qui coule et sûrement un peu de fièvre.

– Avec votre problème de prostate, ce médicament n’est pas conseillé car il peut provoquer des difficultés urinaires. Préférez les lavages de nez.

– Rien d’autre ?

– Je peux aussi vous conseiller de l’homéopathie. Pour la fièvre, prenez du paracétamol. Si d’ici 48 heures cela ne va pas mieux, consultez votre médecin.

Nez bouché ou nez qui coule, maux de tête, fièvre sont des plaintes fréquentes au comptoir. Cependant, lorsque ces symptômes sont décrits par un patient âgé, le pharmacien doit être particulièrement vigilant dans son conseil et adapter celui-ci aux éventuelles pathologies chroniques du patient et à leurs traitements, en tenant compte des contre-indications des vasoconstricteurs et des antihistaminiques H1.

VASOCONSTRICTEURS

Les dérivés de l’éphédrine sont des sympathomimétiques, qui induisent une vasoconstriction des muqueuses rhinopharyngées, permettant de diminuer la rhinorrhée et l’obstruction nasale.

Effets indésirables

• De par leur action sympathomimétique, les dérivés de l’éphédrine peuvent induire des troubles cardiovasculaires (poussée hypertensive, palpitations), des céphalées, mais également des troubles urinaires (à type de dysuries ou de rétention urinaire par contraction du sphincter lisse) ou une crise de glaucome par fermeture de l’angle (consécutive à une mydriase). Ils peuvent aussi avoir un effet stimulant sur le système nerveux central, expliquant la possible survenue d’insomnies.

• En surdosage, ils peuvent induire un accident vasculaire cérébral (favorisé par l’élévation de la pression artérielle), de l’agitation et des hallucinations.

• Compte tenu de leurs effets vasoconstricteurs, la durée de traitement des dérivés de l’éphédrine est limitée à 5 jours. Rappelons qu’il en est de même pour les vasoconstricteurs administrés par voie nasale, en raison d’un possible passage systémique des principes actifs. En outre, la survenue de céphalées ou de palpitations doit imposer l’arrêt du traitement.

Contre-indications

• Hypertension artérielle sévère ou mal équilibrée, antécédent d’accident vasculaire cérébral, insuffisance coronarienne sévère, risque de glaucome par fermeture de l’angle, risque de rétention urinaire liée à des troubles urétroprostatiques.

• Le patient hyperthyroïdien (donc susceptible d’HTA et de tachycardie) nécessite un avis médical.

• Les vasoconstricteurs sont parfois associés à de l’ibuprofène : tenir compte des contre-indications de cet AINS (voir page 5).

Interactions

• Les dérivés de l’éphédrine sont contre-indiqués avec les autres vasoconstricteurs à visée décongestionnante (y compris ceux administrés par voie nasale), avec le méthylphénidate en raison d’un risque majoré de poussée hypertensive. L’association des vasoconstricteurs aux IMAO non sélectifs (Marsilid) est également contre-indiquée en raison d’un risque d’hypertension artérielle paroxystique mais aussi d’hyperthermie pouvant être fatale. Cette interaction est encore possible quinze jours après l’arrêt de l’IMAO, en raison de la durée d’action de celui-ci.

• Ils sont déconseillés avec les dérivés ergotés (antimigraineux mais aussi antiparkinsoniens) pour la même raison.

• L’association des dérivés de l’éphédrine est déconseillée avec le moclobémide, IMAO-A (risque de poussée hypertensive).

ANTIHISTAMINIQUES H1

Les antihistaminiques H1 ont des propriétés antiallergiques et anticholinergiques qui permettent une diminution de la rhinorrhée, des larmoiements et des éternuements en salve.

Effets indésirables

• Ils sont parfois à l’origine de troubles neurovégétatifs à type de sédation et de somnolence et aussi d’hypotension orthostatique.

• Du fait de leur composante anticholinergique, ils peuvent induire des effets atropiniques particulièrement mal tolérés chez un patient âgé :

– effets périphériques : sécheresse buccale à l’origine de dysgueusies, de mycoses ou de lésions buccales ; problèmes visuels à type de troubles de l’accommodation et de mydriase pouvant induire une crise de glaucome à angle fermé ; constipation ; rétention urinaire ;

– effets centraux : troubles mnésiques, confusions, désorientations, délires ou encore hallucinations visuelles. Les patients âgés sont particulièrement sensibles aux effets centraux des atropiniques.

Contre-indications

Glaucome par fermeture de l’angle et adénome de la prostate (dont la prévalence augmente avec l’âge).

Interactions

• Il n’y a pas d’association contre-indiquée avec les antihistaminiques.

• Leur association avec l’alcool est déconseillée pour ne pas majorer la sédation. Et leur association à d’autres sédatifs (morphine, neuroleptiques, anxiolytiques, hypnotiques) ou à d’autres anticholinergiques (urinaires par exemple) doit prendre en compte le risque d’addition d’effets indésirables de même nature.

AUTRES TRAITEMENTS

Traitement local

En cas de contre-indications à l’usage de vasoconstricteurs ou d’antihistaminiques, un traitement local antiseptique peut être proposé (lavage des fosses nasales, gouttes antiseptiques ou inhalations).

Homéopathie

Sticta pulmonaria (nez bouché), Allium cepa ou Arum triphyllum (écoulement clair), Mercurius solubilis et Kalium bichromicum (écoulement épais) peuvent être conseillés sans risque.

LA DOULEUR

« Je veux l’antalgique que j’ai vu à la télé »

Monsieur T., 75 ans, vient renouveler son traitement antihypertenseur. Il souhaite aussi un antalgique pour soulager ses douleurs d’arthrose.

– Je voudrais essayer l’antalgique que j’ai vu à la télé, celui qui cible la douleur !

– Celui à base d’ibuprofène ? Je ne vous le conseille pas car il peut interagir avec vos médicaments pour la tension. Prenez donc du paracétamol.

– Je prends déjà 2 gélules à 500 mg le soir. Cela ne me soulage pas assez !

– Essayez d’en prendre 6 par jour. Si vos douleurs ne cèdent pas, il faudra consulter votre médecin.

Non traitée, la douleur du sujet âgé (personne de plus de 75 ans ou de plus de 65 ans et polypathologique) peut avoir des conséquences délétères, comme un risque accru de chronicité, une altération de la qualité du sommeil, une diminution de l’appétit, une dégradation de l’état général, une décompensation de pathologies jusqu’alors contrôlées, un retentissement cognitif et comportemental avec repli sur soi, une perte d’autonomie, une dépression. Sa prise en charge est donc absolument nécessaire, mais elle doit être adaptée à ces patients à haut risque iatrogène et peut nécessiter une consultation médicale, d’autant que son évaluation est plus difficile chez ces patients.

FACTEURS DE RISQUE IATROGÈNE

• Age supérieur à 80 ans.

• Comorbidités, polypathologies et polymédications (la consommation moyenne de médicaments chez les personnes de plus de 85 ans est de 4,6 spécialités par jour), ce qui majore la probabilité de survenue d’effets indésirables et d’interactions médicamenteuses.

• Modifications pharmacocinétiques : altération de la barrière hématoencéphalique, favorisant la survenue d’effets indésirables centraux ; modification des volumes de distribution des médicaments, du fait d’une sarcopénie au profit d’une augmentation de la masse grasse ; diminution de l’albuminémie, ce qui a pour effet d’augmenter les fractions libres (donc actives) des médicaments à forte affinité pour les protéines plasmatiques ; altération des fonctions rénale et hépatique avec diminution des clairances ; augmentation des demi-vies des médicaments avec un risque accru d’accumulation de ces derniers et de surdosage.

ANTALGIQUES CONSEILS ET RISQUES

Paracétamol

• C’est l’antalgique de première intention. Il a, pour un grand nombre d’divs, le meilleur rapport bénéfice-risque dans la douleur d’arthrose notamment.

• Il est toutefois contre-indiqué en cas d’insuffisance hépatocellulaire.

• La dose journalière ne doit pas excéder 3 g/j en cas de poids inférieur à 50 kg, d’insuffisance hépatique légère à modérée, d’insuffisance rénale sévère, d’alcoolisme chronique, de malnutrition chronique ou de déshydratation.

• Chez un patient sous AVK, il existe un risque d’augmentation de l’effet anticoagulant par le paracétamol lorsqu’il est administré pendant plus de 4 jours aux doses maximales de 4 g/jour.

Ibuprofène et aspirine

L’ibuprofène et l’aspirine doivent être utilisés avec prudence chez le patient âgé (et sont a priori à éviter en automédication) du fait de leurs effets indésirables et de leurs nombreuses interactions.

Risques physiologiques

• L’utilisation d’AINS chez la personne âgée ne doit être envisagée qu’après échec du paracétamol (en dehors des cas de certains rhumatismes inflammatoires, sur prescription), en raison d’une mauvaise tolérance digestive avec un risque majoré de perforations et/ou d’hémorragies digestives. Chez les sujets de plus de 65 ans, une protection gastrique (IPP, misoprostol) doit être systématique.

• Les AINS peuvent également induire une insuffisance rénale aiguë fonctionnelle. En diminuant la synthèse des prostaglandines vasodilatatrices, les AINS provoquent, en effet, une vasoconstriction de l’artère rénale et diminuent la perfusion rénale, ce qui perturbe la filtration glomérulaire. Aussi sont-ils responsables d’un tiers des insuffisances rénales aiguës d’origine médicamenteuse. Cette néphrotoxicité implique chez le sujet âgé une surveillance de la fonction rénale, de l’hydratation et de la diurèse.

• En raison d’un risque de décompensation cardiaque, l’utilisation des AINS est déconseillée en cas de cardiopathie sous-jacente. Par ailleurs, les AINS sont susceptibles d’augmenter la pression artérielle (par vasoconstriction) de 3 à 6 mmHg, notamment chez les patients hypertendus.

Risque d’interactions médicamenteuses

• L’association des AINS aux IEC, ARA II, diurétiques nécessite des précautions d’emploi en raison d’un risque d’insuffisance rénale aiguë.

• Leur association avec les AVK (déconseillée pour l’ibuprofène et contre-indiquée pour l’aspirine), les héparines (association déconseillée) et les antiagrégants (association à prendre en compte) augmente le risque hémorragique.

• Il existe un risque de résistance aux antihypertenseurs : les bêtabloquants semblent être la classe thérapeutique sur laquelle l’effet antagoniste des AINS est le plus sensible (association à prendre en compte).

• L’association des AINS au lithium est déconseillée (risque d’augmenter la lithiémie).

Codéine

• Le risque de dépendance et les effets centraux des opiacés faibles (somnolence, sédation) doivent être pris en compte chez ces patients dont la barrière hématoencéphalique est altérée.

• Les effets indésirables digestifs ne doivent pas non plus être négligés. En effet, le risque de constipation est majoré chez la personne âgée et le risque de nausées et vomissements est à prendre en considération chez un patient potentiellement dénutri ou polymédiqué (les antiparkinsoniens, par exemple, sont également susceptibles d’induire des nausées et vomissements).

• Attention également au risque de rétention urinaire et aux patients souffrant d’adénome de la prostate !

• Du fait d’une possible dépression respiratoire, la codéine est contre-indiquée en conseil chez l’insuffisant respiratoire (BPCO, asthme…).

LES PATHOLOGIES DIGESTIVES

« Puis-je donner du Vogalib à mon mari ? »

Madame S. demande conseil :

– Depuis ce matin, mon mari a des nausées et vomit. Puis-je lui donner du Vogalib ?

– Prend-il un autre traitement ?

– Oui, du Modopar.

– Alors ne lui donnez rien avant d’avoir appelé son médecin. En attendant, dites à votre mari de bien prendre son traitement antiparkinsonien au cours des repas.

NAUSÉES ET VOMISSEMENTS

Les vomissements chez une personne âgée doivent conduire à une consultation médicale pour écarter certains diagnostics sévères (occlusion intestinale, lithiase de la vésicule biliaire, infarctus du myocarde) et une cause iatrogène. Ils peuvent aussi occasionner des troubles hydroélectrolytiques. La prise d’un médicament conseil doit se faire avec précaution.

Médicaments conseil

• La métopimazine (Vogalib) s’utilise avec prudence chez la personne âgée car elle peut induire une somnolence, des troubles végétatifs de type hypotension orthostatique et un syndrome atropinique. Elle est contre-indiquée en cas d’adénome de la prostate et de risque de glaucome à angle fermé.

• Des médicaments antiémétiques, listés, figurent parfois dans les armoires à pharmacie des personnes âgées. Les antiémétiques antagonistes dopaminergiques (Primpéran, Vogalène…), « neuroleptiques cachés », peuvent induire des symptômes extrapyramidaux ou des dyskinésies tardives, en particulier chez le sujet âgé.

• Le diménhydrinate (Nausicalm), antihistaminique H1, doit aussi être utilisé avec prudence chez les personnes âgées en raison de ses possibles effets indésirables anticholinergiques. Il faut aussi tenir compte des contre-indications en cas d’adénome de la prostate et du risque de glaucome à angle fermé.

REFLUX GASTRO-ŒSOPHAGIEN

Chez le sujet âgé, les symptômes sont souvent atypiques : le RGO peut se manifester par une dysphagie, une anorexie isolée ou une anémie avec saignements digestifs. Régurgitations et pyrosis sont rares.

La diminution de la sécrétion salivaire et de la vidange gastrique, la dénutrition ainsi que certains médicaments (benzodiazépines, inhibiteurs calciques, dérivés nitrés) favorisent le reflux.

Médicaments conseil

• Chez le sujet de plus de 60 ans, la part du conseil en officine est mince. En raison de la fréquence des atypies symptomatiques et de l’absence de corrélation entre l’intensité des signes et la gravité, une consultation médicale et une fibroscopie sont nécessaires pour établir un diagnostic. Le risque de découvrir des lésions endoscopiques ou des lésions néoplasiques est en effet accru.

• Toutefois, en cas d’œsophagite diagnostiquée non sévère et de symptômes peu fréquents, l’automédication est possible et peut faire appel aux topiques digestifs, aux anti-H2 et aux IPP.

Topiques digestifs

• Les antiacides tamponnent le pH gastrique en complexant les ions H+. Les alginates jouent un rôle couvrant et protègent la muqueuse digestive.

• Les topiques doivent être pris à distance des autres médicaments pour ne pas en diminuer la biodisponibilité.

• Certains antiacides, du fait de leur teneur en Mg, sont contre-indiqués en cas d’insuffisance rénale sévère.

Anti-H2

• Les anti-H2 (cimétidine, famotidine…) bloquent les récepteurs membranaires des récepteurs H2 à l’histamine, au niveau des cellules pariétales gastriques, inhibant la sécrétion d’acide gastrique induite par l’histamine. Leur action est rapide, mais brève et d’intensité modérée.

• Les anti-H2 peuvent induire des troubles digestifs (nausées, constipation, diarrhées), des céphalées et des vertiges. Des troubles neurologiques à type de confusion, désorientation, hallucination ont été rapportés, spécialement chez les patients âgés et en cas d’insuffisance rénale sévère. Ils imposent l’arrêt du traitement.

• En termes d’interactions, la cimétidine, à forte dose, est un puissant inhibiteur enzymatique, augmentant les concentrations des médicaments associés (notamment phénytoïne, AVK, bêtabloquants). Aussi convient-il d’éduquer les patients à respecter scrupuleusement les posologies préconisées.

IPP

• Les IPP (oméprazole, pantoprazole) sont les antisécrétoires gastriques les plus efficaces. Ils inhibent de façon spécifique et irréversible la pompe H+/K+ATPase, localisée au niveau des cellules pariétales gastriques, réduisant ainsi la sécrétion acide. Leur action est durable et prolongée mais n’est pas immédiate.

• Les IPP peuvent induire fréquemment des troubles digestifs (nausées, vomissements, flatulences, troubles du transit et du goût), des céphalées et, moins fréquemment, des vertiges et des étourdissements. Par ailleurs, ils peuvent induire de rares hyponatrémies, qui peuvent se traduire par une confusion mentale.

• L’oméprazole inhibe le CYP2C19, qui transforme le clopidogrel, largement prescrit chez la personne âgée, en métabolite actif. Ainsi, dans un communiqué d’octobre 2009, l’Afssaps recommande-t-elle d’éviter la prise concomitante de clopidogrel et d’IPP pour ne pas risquer de diminuer l’efficacité de l’antiagrégant plaquettaire.

Conseils hygiénodiététiques

Chez la personne âgée, ces conseils sont préférables à un conseil médicamenteux. On peut les donner en complément d’une prescription médicale : éviter la consommation de café, thé, chocolat, menthe, boissons gazeuses, aliments acides ou épicés, alcool, tabac ; lutter contre la surcharge pondérale ; ne pas se coucher aussitôt après un repas ; surélever la tête de lit ; éviter le port de vêtements ou de ceintures trop serrés.

CONSTIPATION

• La constipation est un problème fréquent chez la personne âgée. Elle est liée à une diminution de la musculature abdominale, un régime alimentaire souvent pauvre en fibres, un apport hydrique insuffisant (diminution de la sensation de soif), une réduction de la mobilité, des causes neurologiques ou iatrogènes (antalgiques opiacés, antiparkinsoniens…).

• Son risque majeur est la formation d’un fécalome et une occlusion intestinale. Ainsi, certaines personnes âgées surveillent avec obsession leur transit et se croient constipées si elles n’ont pas une selle par jour. Or, la constipation est définie par un nombre de selles inférieur à trois par semaine (et/ou une difficulté d’exonération lors de plus de 25 % des défécations).

Conseils hygiénodiététiques

Ils constituent le premier traitement à conseiller chez la personne âgée : consommation de pruneaux, d’eaux riches en magnésium (Hépar sauf en cas d’insuffisance rénale), exercice physique si possible…

Différentes classes de laxatifs et inconvénients

Les laxatifs osmotiques (hors salins)

• Ils agissent en provoquant un appel d’eau dans la lumière intestinale.

• Les laxatifs osmotiques sont très bien tolérés et doivent être utilisés en première intention chez une personne âgée. Ils peuvent toutefois occasionner des douleurs abdominales, des ballonnements et des flatulences en début de traitement.

Les laxatifs de lest

• Gonflant en présence d’eau, ils augmentent la masse et le volume des selles, ce qui provoque une distension des parois de l’intestin et stimule le péristaltisme. Ils nécessitent que le patient s’hydrate correctement.

• Ces laxatifs peuvent induire des météorismes et des flatulences, surtout en début de traitement ; aussi convient-il d’en adapter progressivement les posologies.

• Des cas d’occlusion œsophagienne ou colique ont été rapportés chez des sujets âgés dont la motricité digestive est altérée.

Les laxatifs lubrifiants

• Ils rendent les selles plus grasses, ce qui facilite leur évacuation.

• A forte dose, ils peuvent induire un suintement huileux anal et une irritation périanale.

• En usage prolongé, ils diminuent l’absorption des vitamines liposolubles.

• Ils peuvent induire des pneumopathies lipoïdes et doivent être utilisés avec prudence chez des sujets âgés alités, souffrant de troubles de déglutition ou de RGO.

Les laxatifs stimulants et osmotiques salins

• Ils modifient les échanges ioniques et stimulent la motricité colique.

• Ce sont des laxatifs d’action drastique, qui peuvent provoquer des douleurs abdominales et des diarrhées, avec un risque de déshydratation chez les personnes âgées.

• Un usage prolongé peut entraîner la « maladie des laxatifs » et une dépendance.

• Ils peuvent aussi induire une hypokaliémie et sont de ce fait impliqués dans de nombreuses interactions avec les médicaments torsadogènes et hypokaliémiants.

• Ces laxatifs ne sont donc pas à utiliser en conseil chez la personne âgée. Ils doivent être utilisés sur prescription médicale et sous surveillance biologique adéquate (ionogramme sanguin), dans le traitement de constipations sévères, comme le fécalome morphinique.

LES TROUBLES DU SOMMEIL

« Je me réveille souvent la nuit »

Monsieur P., 75 ans, se plaint de troubles du sommeil :

– Je me réveille souvent la nuit sans jamais avoir souffert d’insomnie !

– Faites-vous des siestes l’après-midi ?

– Cela m’arrive de temps à autre.

– Je peux vous proposer un produit à base de plantes, mais si vos troubles persistent, il faudra consulter un médecin.

Chez la personne âgée, il faut distinguer les fausses insomnies, liées au vieillissement, des vraies insomnies : difficultés d’endormissement, éveils nocturnes, réveils précoces… Ces dernières nécessitent une consultation médicale car elles peuvent être associées à de l’anxiété, une dépression et altérer la qualité de vie.

MODIFICATIONS PHYSIOLOGIQUES

Avec l’âge, le sommeil perd en qualité et en efficacité.

Les siestes diurnes et les éventuelles périodes de somnolence réduisent le temps de sommeil nocturne. Et les éveils nocturnes, plus fréquents et plus longs chez la personne âgée, sont plus susceptibles d’être mémorisés.

La durée du sommeil lent, ou profond, est elle aussi réduite. Caractérisé par une diminution des activités physiologiques (ralentissement du rythme cardiaque et respiratoire, baisse de la tension artérielle et de la température…), le sommeil lent est responsable de la capacité de récupération physique, par conséquent moindre chez le patient âgé.

PRISE EN CHARGE

Conseils hygiénodiététiques

• Limiter la sieste à 20 minutes.

• Eviter les repas trop lourds et les excitants (café, thé) le soir.

• Prendre les diurétiques le matin pour éviter les levers nocturnes, ainsi que les médicaments qui peuvent gêner le sommeil, par exemple les corticoïdes (effet excitant) ou les bêtabloquants liposolubles (propranolol) qui peuvent induire des cauchemars.

• Respecter un rythme éveil/sommeil régulier.

• Promouvoir l’éveil diurne (activités physiques et intellectuelles dans la journée).

• Abaisser la température de la chambre aux environs de 20 °C.

Produits conseil

Phytothérapie

Le choix des plantes est fonction des plaintes des patients :

– endormissement difficile : valériane ou Eschscholtzia,

– réveils précoces : passiflore,

– anxiété et nervosité : mélisse, houblon ou aubépine.

La ballote est à éviter : elle est suspectée d’hépatotoxicité.

Homéopathie

En dehors de spécialités (Sédatif PC, Poconeol…), des granules de Gelsemium, d’Ignatia ou de Coffea peuvent être proposées en cas de difficultés d’endormissement, Stramonium en cas de cauchemars, Arsenicum album en cas de réveils nocturnes.

Traitements médicamenteux

Les anti-H1 (doxylamine) doivent être utilisés avec prudence chez le sujet âgé en raison du risque de sédation ou de sensations vertigineuses (chutes). Il est alors recommandé d’en diminuer la posologie. Par ailleurs, du fait de leurs possibles effets indésirables anticholinergiques, ils sont contre-indiqués en cas d’adénome de la prostate et d’antécédents de glaucome à angle fermé.

LES MALAISES ET LES CHUTES

« Ma mère est encore tombée »

Jocelyn, le fils de madame D., est très inquiet :

– Je souhaiterais une crème pour les bleus. Ma mère est tombée. Heureusement j’étais là pour l’aider à se relever !

– Comment cela s’est-il passé ?

– Cela se produit à chaque fois qu’elle se lève trop vite. J’ai très peur qu’elle finisse par se casser quelque chose !

– Cela ressemble à de l’hypotension orthostatique, qui nécessite certaines précautions. Il faudrait également en parler à son médecin, car cela peut-être dû à un médicament.

ÉPIDEMIOLOGIE DES CHUTES

Un tiers des personnes âgées de plus de 65 ans et 80 % de celles de plus de 85 ans font au moins une chute par an. Les chutes représentent la première cause de décès accidentel chez les sujets âgés. 25 % des « chuteurs » de plus de 80 ans décèdent dans l’année suivant leur chute. Ainsi, devant toute chute, il faut impérativement consulter un médecin pour vérifier l’absence de fracture et rechercher l’étiologie, éviter la récidive. Une chute récente (de moins de 6 mois) est en effet un facteur de risque majeur de rechute.

ÉTIOLOGIES

Causes environnementales

• Habitat mal adapté

Les chutes sont favorisées par un éclairage insuffisant, un mobilier inadapté ou encombrant, un mauvais revêtement de sol, un escalier non sécurisé ou encore une salle de bains mal agencée (la moitié des chutes a lieu dans cette pièce).

• Tenue vestimentaire inappropriée

Des vêtements trop longs ou trop amples, des chaussures à talons trop hauts ou trop plats (favorisant alors la rétropulsion), ou à lacets sont des causes possibles de chutes.

• Présence d’animaux

Les chiens ou les chats peuvent être responsables de chutes.

Causes liées au vieillissement

• Vieillissement de l’appareil locomoteur

L’atrophie musculaire ou l’arthrose, par exemple, favorisent les chutes.

• Vieillissement sensoriel

Altération proprioceptive du pied, atteinte de l’oreille interne, presbytie et atteintes visuelles diverses (DMLA, glaucome, cataracte, dont la prévalence augmente avec l’âge) sont des facteurs de chutes.

Causes liées à un état pathologique

Certaines chutes sont dues à des pathologies neurologiques (vertiges, maladie de Parkinson, AVC), endocriniennes (hyperthyroïdie, diabète : faiblesse musculaire) ou cardiaques (maladie coronarienne, insuffisance cardiaque : malaise).

Causes iatrogènes

Hypoglycémie

• L’hypoglycémie correspond à une glycémie inférieure à 0,6 g/l.

• L’insuline ou les antidiabétiques oraux insulinosécréteurs, comme les sulfamides hypoglycémiants ou le répaglinide, peuvent être, dans certaines circonstances (repas sauté, trop tardif ou pauvre en glucides, effort physique inhabituel, vomissements, erreur de doses d’insuline, consommation d’alcool…), responsables d’une hypoglycémie.

• Certains médicaments à forte affinité pour les protéines plasmatiques peuvent interagir avec les sulfamides par déplacement de liaison à l’albumine et potentialiser leur effet. Parmi les principaux médicaments susceptibles d’interagir avec les sulfamides figurent les AINS, dont certains peuvent faire l’objet d’une automédication (association nécessitant des précautions d’emploi).

• L’hypoglycémie s’annonce par une pâleur, une tachycardie, des sueurs et des tremblements, une sensation de fringale, des troubles visuels, une sensation de malaise et des troubles de l’humeur (nervosité, irritabilité).

Cependant, chez la personne âgée, on note une atypie des signes cliniques. L’hypoglycémie peut se manifester uniquement par une asthénie, des troubles du caractère ou une agressivité inhabituelle, d’autant plus qu’un traitement bêtabloquant (y compris par voie oculaire) peut masquer certains signes annonciateurs comme la tachycardie, les sueurs et les tremblements.

Hypotension orthostatique

• L’hypotension orthostatique est définie par une diminution de la PA systolique de plus de 20 mmHg et/ou une diminution de la PA diastolique de plus de 10 mmHg, survenant dans les 3 minutes qui suivent le passage de la position allongée à la position debout, et qui est corrigée par le retour à la position allongée.

• Le passage brutal de la position couchée à la position debout entraîne une accumulation de sang dans les membres inférieurs avec diminution du retour veineux cardiaque. La pression artérielle chute. Les barorécepteurs aortiques et carotidiens captent ces changements de pression. Il s’ensuit une stimulation sympathique qui permet de rééquilibrer les pressions, par tachycardie et vasoconstriction. Or les barorécepteurs sont altérés chez la personne âgée, qui est donc plus susceptible de faire un malaise par hypotension orthostatique.

• C’est un trouble d’autant plus fréquent chez le patient âgé que celui-ci est polymédiqué.

En effet, certains médicaments sont susceptibles d’induire une hypotension orthostatique, comme les antihypertenseurs, les dérivés nitrés, les alphabloquants utilisés dans le traitement de l’adénome de la prostate, certains neuroleptiques, les antidépresseurs tricycliques, les antiparkinsoniens.

Faiblesse musculaire

Les benzodiazépines, par leur action myorelaxante, peuvent induire une faiblesse musculaire qui peut être à l’origine de chutes, en particulier lors des levers nocturnes.

Vertiges

Certains médicaments, toxiques pour l’oreille interne, peuvent être à l’origine de vertiges (AINS, aminosides ou cisplatine).

PRÉVENTION DES (RE)CHUTES

Prévenir la dénutrition et l’ostéoporose

• Assurer un régime alimentaire équilibré et diversifié, éviter et corriger les éventuelles carences en protéines pour prévenir la fonte musculaire. Un traitement préventif ou curatif de l’ostéoporose permet de minimiser les conséquences d’une chute (fractures).

• Faire de fréquentes promenades pour renforcer les muscles, préserver la masse osseuse et assurer une exposition solaire suffisante pour synthétiser de la vitamine D.

Aménager l’habitat et parer au danger

• Assurer un éclairage suffisant du domicile, installer des barres d’appui dans les couloirs et les sanitaires, installer un rehausseur dans les toilettes, sécuriser le fond de la douche avec des pastilles antidérapantes, installer un siège de douche ou une planche de bain, faire poser des bandes antidérapantes sur les marches d’escalier, préférer un revêtement de sol type moquette ou parquet, fixer les tapis au sol.

• Préférer un lit à hdiv variable, des fauteuils à assise haute et à accoudoirs.

• Eventuellement recourir aux différentes aides techniques à la marche (cannes, déambulateurs).

• Eviter les vêtements trop longs et les chaussures à lacets, préférer les modèles à scratchs, avec une semelle antidérapante et avec un talon de 2 cm.

Prévention des accidents iatrogènes

Prévention de l’hypoglycémie

• Les sulfamides hypoglycémiants sont contre-indiqués si la clairance de la créatinine est inférieure à 30 ml/min, et ceux à longue durée d’action comme le glipizide sous forme LP sont contre-indiqués chez les patients de plus de 65 ans, en raison de leur risque important d’hypoglycémie. Les glinides doivent être utilisés avec prudence chez les sujets âgés ou insuffisants rénaux.

• Les objectifs glycémiques doivent être adaptés à l’âge, à l’ancienneté du diabète, à ses complications, à l’espérance de vie et doivent tenir compte du risque d’hypoglycémie. Ainsi, chez le patient âgé de plus de 75 ans « ayant bien vieilli », sans pathologie sévère associée, les objectifs seront semblables à ceux de l’adulte jeune. En revanche, chez le patient âgé polypathologique, à risque iatrogène élevé, l’objectif sera revu à la hausse (Hb A1c < 8 %).

• Pour prévenir les malaises hypoglycémiques, il faut éduquer les patients sous insuline ou sous antidiabétiques oraux insulinosécréteurs à ne pas sauter de repas, à avoir toujours du sucre sur eux pour pouvoir se resucrer oralement à temps, à savoir reconnaître une hypoglycémie, à augmenter la fréquence des contrôles glycémiques capillaires en cas de traitement bêtabloquant.

• Enfin, tout malaise survenant chez une personne âgée diabétique doit être considéré comme une potentielle hypoglycémie et doit amener à consulter sans délai.

Prévention de l’hypotension orthostatique

• Entre 60 et 80 ans, la prise en charge de l’hypertension ne diffère pas de celle de l’adulte jeune (PAS < 140 mm de Hg et PAD < 90 mm de Hg). Mais les posologies seront adaptées progressivement avec une surveillance étroite de la pression artérielle en position allongée et debout, pour rechercher une hypotension orthostatique.

• Chez le sujet de plus de 80 ans, les objectifs tensionnels sont moins sévères que chez l’adulte jeune. En effet, l’objectif est d’atteindre une pression artérielle systolique inférieure à 150 mmHg, en l’absence d’hypotension orthostatique. Par ailleurs, à cet âge, seulement trois médicaments antihypertenseurs peuvent être prescrits au maximum. Les classes thérapeutiques recommandées en première intention par la Haute Autorité de santé chez le patient âgé sont les diurétiques thiazidiques et les inhibiteurs calciques de type dihydropyridine.

• Rappeler au patient insuffisant coronarien qu’il doit être systématiquement en position assise ou semi-allongée lorsqu’il s’administre de la trinitrine par voie sublinguale.

• Pour prévenir l’hypotension orthostatique, il faut également conseiller aux patients sous médicaments responsables d’hypotension orthostatique de se lever prudemment, en deux temps (c’est-à-dire passer de la position allongée à assise, puis de la position assise à debout).

• Le port de bas de compression veineuse peut être utile pour prévenir l’hypotension orthostatique car ils contribuent au retour veineux. Il est alors conseillé de garder les bas près du lit et de les enfiler avant de se lever, c’est-à-dire pendant la position assise du lever qui se fera donc en deux temps.

L’INTERVIEW Dr Hervé Seignard MÉDECIN GÉNÉRALISTE CERTIFIÉ EN GÉRONTOLOGIE CLINIQUE

« L’automédication mésestime la dangérosité des médicaments »

« Le Moniteur » : A quel moment doit-on inciter une personne âgée à consulter un gériatre ?

Dr Seignard : L’avis d’un gériatre, qui est avant tout un généraliste, est surtout bienvenu lorsque des signes spécifiques peuvent s’apparenter à une affection particulièrement fréquente chez le sujet âgé, mais il n’y a pas d’âge idéal pour une première consultation. Un moment permettant un bilan gériatrique peut être celui d’une entrée en institution. Le gériatre a une vision globale du patient et élabore un projet personnalisé de soins, en prenant en compte le plus de risques possibles et toutes les pathologies concomitantes.

Le fait de noter la clairance sur les ordonnances permettrait-il, selon vous, un meilleur suivi du sujet âgé ?

Les laboratoires ont déjà une obligation de calculer la clairance selon la formule de Cockcroft dès lors qu’un dosage de créatinine leur est demandé. Si cette notion est retranscrite sur l’ordonnance de médicaments, elle peut participer à un rappel pour tous les acteurs, prescripteur en tête. Mais comme toutes les bonnes idées, elle se heurte certainement à une réalité comportementale : les médecins ont horreur des papiers. Evidemment, un dossier unique, informatisé ou non, semble la réponse logique à cette problématique, tous les professionnels disposant de ce fait des notions essentielles au suivi du patient et à l’évaluation du rapport bénéfice/risque.

Trouvez-vous que les cas d’iatrogénie soient particulièrement fréquents chez les personnes âgées ?

Globalement, il est admis qu’en ambulatoire, un effet secondaire survient chez 4 % des patients prenant 5 médicaments par jour et chez un tiers des patients prenant entre 11 et 15 médicaments par jour. Or les personnes âgées sont souvent polymédiquées. Aux urgences, 4 à 6 % des admissions seraient liées à un accident médicamenteux. Parmi les multiples facteurs de risque figure bien sûr l’automédication. Je dois dire que la campagne de promotion de l’automédication me choque car elle mésestime le fait qu’un médicament, pour être actif, est nécessairement dangereux.

Bibliographie complète des Cahiers Formation sur WK-Pharma.fr/onglet Formation

L’essentiel à retenir

Malaises et chutes

Limiter les risques de chutes

• Habitat : adapter l’éclairage, coller les tapis, aménager la salle de bains, installer un rehausseur de toilettes, proposer canne ou déambulateur.

• Tenue vestimentaire : éviter les vêtements trop longs et amples, les chaussures à lacets…

• Accidents iatrogènes : éduquer les patients pour limiter au maximum les risques d’hypoglycémie et d’hypotension orthostatique.

En cas de chute

• Consultation médicale : pour vérifier l’absence de fracture et chercher l’étiologie.

• Technique pour se relever : apprendre au patient à se relever seul (voir page 13).

Douleurs

Paracétamol

– Antalgique de première intention.

– Risque d’augmentation de l’effet anticoagulant chez un patient sous AVK si le paracétamol est pris pendant plus de 4 jours à la dose de 4 g/jour.

AINS

– Risque majoré de perforations et/ou hémorragies digestives chez la personne âgée.

– Néphrotoxicité.

– Attention aux interactions : IEC, ARA II, AVK, lithium ?!

Codéine

– Risque de dépendance, constipation, nausées/vomissements, rétention urinaire.

– Contre-indiqué chez l’insuffisant respiratoire.

Rhume

Vasoconstricteurs

– Risque de troubles cardiovasculaires, céphalée, troubles urinaires, insomnie.

– CI : HTA sévère ou mal équilibrée, antécédent d’AVC, insuffisance coronarienne sévère, glaucome par fermeture de l’angle et adénome de la prostate.

– Interactions : autres vasoconstricteurs, dérivés ergotés, IMAO.

Antihistaminiques H1

– Sédation, somnolence et hypotension orthostatique.

– Sécheresse buccale, troubles visuels, constipation, rétention urinaire, troubles confusionnels.

– CI : glaucome par fermeture de l’angle et adénome de la prostate.

Les questions à poser

Pour un conseil adéquat, un questionnement judicieux du patient, une consultation de son DP ou de son historique médicamenteux sont impératifs pour lever certaines interrogations :

• Le patient a-t-il une pathologie qui contre-indiquerait un traitement décongestionnant ? Recherche d’HTA, d’antécédent d’AVC, d’adénome de la prostate.

• A-t-il un antécédent de crise de glaucome à angle fermé ? A ne pas confondre avec le glaucome à angle ouvert.

• Quels sont ses traitements ? Ecarter les nombreuses interactions, en particulier avec les vasoconstricteurs et les IMAO et les redondances entre AINS et ibuprofène.

• Prend-il déjà un médicament pour le rhume ? Eviter les conseils redondants : risque de surdosage en antipyrétique, risque d’associer un vasoconstricteur per os à un traitement nasal déjà en cours.

INFOS CLÉS

• Attention aux traitements du rhume chez la personne âgée ! Ils ont de nombreuses contre-indications qui figurent parmi les pathologies fréquentes des personnes âgées.

• Attention également en cas de traitement antiparkinsonien et de traitement sédatif.

QU’AURIEZ-VOUS RÉPONDU ?

Madame G., 78 ans, est très enrhumée.

– Je voulais prendre de l’Actifed qui me restait chez moi, mais j’ai lu dans la notice que c’était contre-indiqué en cas de glaucome. Or j’ai un glaucome et je mets des gouttes de Xalacom.

– Effectivement, Actifed est contre-indiqué. Je vais vous conseiller de l’homéopathie.

La pharmacienne a-t-elle bien répondu ?

Non. Xalacom est utilisé dans le traitement du glaucome à angle ouvert, dû à une accumulation de l’humeur aqueuse dans la chambre antérieure. Or, ce type de glaucome ne contre-indique aucun traitement vasoconstricteur ou anti-H1, contrairement au glaucome à angle fermé, dont le risque dépend de l’âge, des antécédents familiaux et personnels de glaucome aigu et de critères évalués chez l’ophtalmologiste. Toutefois chez les personnes âgées, le traitement du rhume reste avant tout local.

La formule de Cockcroft et Gault

• La clairance de la créatinine peut être évaluée simplement grâce à la formule de Cockcroft et Gault :

– Chez l’homme : clairance (en ml/min) = (140 – âge en années) × poids (en kg)/0,814 × créatininémie (µmol/l)

– Chez la femme : × 0,85

• Appréciation de la fonction rénale en fonction de la clairance :

– supérieur à 90 ml/min : fonction rénale normale

– 60-89 ml/min : insuffisance rénale débutante

– 30-59 ml/min : insuffisance rénale modérée

– 15-29 ml/min : insuffisance rénale sévère

– inférieur à 15 ml/min : insuffisance rénale terminale

INFOS CLÉS

• Paracétamol en première intention, chez le patient âgé.

• Prudence avec les AINS (risque digestif, rénal et nombreuses interactions).

• Attention aux effets centraux et digestifs de la codéine !

• La formule de Cockcroft permet d’apprécier, de façon simple, la fonction rénale.

• Attention, l’artérite de Horton constitue une urgence médicale !

QU’AURIEZ-VOUS RÉPONDU ?

A l’heure de pointe, la pharmacie reçoit un appel de madame R, 83 ans :

– Allô, bonsoir, c’est Madame R.

– Bonsoir Madame R., comment allez-vous ?

– Justement, pas très bien : j’ai un peu de fièvre et très mal à la tête, surtout au front et aux tempes. J’ai tellement mal que j’ai l’impression que ça descend jusqu’à la mâchoire ! Pensez-vous que je puisse prendre du Doliprane ?

– Oui, c’est une bonne idée, cela fera baisser la fièvre et soulagera la douleur. Si cela ne va pas mieux demain, il faudra consulter.

Le pharmacien a-t-il bien répondu ?

Non ! Les signes cliniques décrits par la patiente sont évocateurs d’une maladie de Horton. Il s’agit d’une artérite temporale auto-immune dont l’incidence augmente avec l’âge et dont la prévalence est plus élevée chez la femme. Elle se manifeste par des céphalées d’apparition brutale, un léger fébricule, une altération de l’état général, une induration des artères temporales et éventuellement une claudication de la mâchoire. C’est une situation d’urgence qui nécessite une consultation médicale impérative et un traitement corticoïde. Un conseil antalgique ne doit pas retarder sa mise en route en raison d’un risque de cécité qui augmente avec le délai de prise en charge.

Personnes âgées et diarrhées

• Une diarrhée doit motiver une consultation médicale pour éviter tout risque de déshydratation et de troubles électrolytiques. Il faut également exclure une colite à Clostridium difficile, due à une antibiothérapie, une fausse diarrhée, qui relève d’un traitement laxatif, ou une cause iatrogène (laxatifs stimulants, IPP…).

• L’utilisation du lopéramide (en libre accès) doit être prudente : c’est un dérivé opiacé dont les effets centraux (asthénie, somnolence, vertiges) peuvent être accentués chez le sujet âgé, et qui peut également entraîner de rares cas de rétention urinaire.

• Les conseils hygiénodiététiques doivent être prodigués avec un soin tout particulier chez ces patients, en insistant sur l’importance de la réhydratation (Adiaril, GES 45). En cas de troubles de la déglutition, les liquides peuvent être épaissis (Magic Mix).

INFOS CLÉS

• Le traitement des nausées et vomissements ne relève pas du conseil en officine chez la personne âgée.

• Laxatif de premier choix chez la personne âgée : osmotique.

• Chez le sujet âgé, un RGO ou une diarrhée doivent motiver une consultation.

QU’AURIEZ-VOUS RÉPONDU ?

Sylvie vient chercher un renouvellement de Lasilix 40, Cordarone et Sinemet LP 100 pour sa mère, madame J., 77 ans, parkinsonienne depuis dix ans.

– Je voudrais aussi du Dulcolax, ma mère n’a pas été à la selle depuis 3 jours. J’en ai déjà pris et je me souviens que c’est très efficace.

– C’est un laxatif qui agit rapidement, mais compte tenu de son traitement pour le cœur, il ne convient pas à votre mère. Je vous conseille plutôt un laxatif plus doux comme du Lansoÿl.

Le pharmacien a-t-il bien réagi ?

Oui et non. Il a bien fait de déconseiller un laxatif stimulant, susceptible d’induire une hypokaliémie chez cette patiente qui est à la fois sous diurétique hypokaliémiant et sous amiodarone (donc souffrant de troubles du rythme cardiaque). En revanche, il n’a pas tenu compte de la maladie de Parkinson de madame J., qui l’expose à des risques de troubles de déglutition. Or, en cas de fausses routes, les laxatifs lubrifiants peuvent induire des pneumopathies lipoïdes. Il aurait donc été très nettement préférable de conseiller à cette patiente un laxatif osmotique.

Les benzodiazépines

De nombreuses personnes âgées prennent des somnifères (benzodiazépines et apparentés). Ils doivent être utilisés avec prudence chez ces patients du fait de leurs effets indésirables (sédation, effet myorelaxant et aggravation de troubles mnésiques) et du risque d’accumulation du médicament en cas de prises répétées. Il convient donc

• de vérifier la présence de molécules à demi-vie courte (zolpidem, zopiclone) ou intermédiaire et sans métabolite actif (témazépam, loprazolam, lormétazépam) ;

• d’utiliser la dose minimale efficace (posologie initiale diminuée de moitié) sur la durée la plus courte possible ;

• d’arrêter progressivement pour éviter un syndrome de sevrage.

Testez-vous

Chez la personne âgée :

a) La doxylamine peut être utilisée sans risque.

b) Le sommeil profond dure moins longtemps.

c) La ballote est le traitement de première intention.

Réponse vraie : b.

Test « Timed up and go » ou TUG

• Appelé également « test de la chaise chronométré », ce test simple permet d’identifier les personnes à risque de chute.

• Muni d’un chronomètre, on demande à la personne testée de se lever d’une chaise, de parcourir 3 mètres, de se retourner et de revenir s’asseoir sur la chaise. Les personnes ne souffrant pas de troubles de l’équilibre ou de la marche doivent pouvoir réaliser cet exercice en moins de 14 secondes.

• Interprétation des résultats : évaluation du risque de chute

– chute antérieure et TUG > 14 secondes = risque élevé ;

– chute antérieure ou TUG > 14 secondes = risque modéré ;

– pas de chute antérieure et TUG < 14 secondes = risque faible.

INFOS CLÉS

• Le test TUG permet d’identifier les personnes à risque de chute.

• Les chutes ont des conséquences physiques, psychiques et engagent le pronostic vital.

• Attention aux chutes iatrogènes !

En savoir plus

Fiches de l’INPES

Les fascicules de l’INPES apportent des solutions concrètes pour faciliter la vie de la personne âgée et de son entourage. Des brochures pratiques sur l’aménagement de l’habitat pour éviter les chutes, la maladie d’Alzheimer ou les risques liés à la chaleur sont proposées gratuitement sur commande. www.inpes.sante.fr.

Complications d’une chute

• Conséquences physiques

– Les chutes entraînent des fractures dans 5 à 10 % des cas. Favorisées par l’ostéoporose, les plus fréquentes sont celles du col du fémur (30 % des cas), à l’origine de complications (phlébites, embolies pulmonaires, escarres), et celles du poignet et de l’humérus à l’origine d’une gêne fonctionnelle pour se nourrir et de troubles d’équilibre à la marche par entrave du ballant du bras.

– Les chutes peuvent également être à l’origine de traumatismes crâniens et d’hématomes intracrâniens.

– Une chute peut être mortelle quand la personne est restée longtemps à terre : risque de rhabdomyolyse et d’insuffisance rénale aiguë.

• Conséquences psychiques

La chute peut induire un sentiment de dévalorisation et d’insécurité, à l’origine d’un repli sur soi et d’une restriction des activités. Une perte d’autonomie voire une dépendance peuvent alors s’installer, parfois corrélées à un syndrome dépressif. Le risque de phobie de la marche est d’autant plus important que la personne est restée longtemps à terre.

Testez-vous

1. Les chutes chez les personnes âgées entraînent une fracture dans :

a) 1 % des cas

b) 3 % des cas

c) 5 à 10 % des cas

2. Chez le sujet âgé fragile, les objectifs tensionnels et glycémiques sont :

a) moins sévères que chez l’adulte jeune

b) plus sévères que chez l’adulte jeune

Réponses : 1 – c ; 2 – a.

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