Tout le monde en réclame - Le Moniteur des Pharmacies n° 2865 du 22/01/2011 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2865 du 22/01/2011
 

Portfolio

Auteur(s) : ISABELLE LATOUR

Souvent conçues par des affichistes ou illustrateurs célèbres, portées par des slogans qui ont marqué les esprits, les publicités des produits pharmaceutiques ont contribué à l’extraordinaire longévité de nombre d’entre eux. En voici une petite sélection accompagnée de l’histoire du produit et de son inventeur.

1909

Thermogène par Cappiello

Charles Vandenbroeck, un pharmacien belge, commence à fabriquer de la ouate thermogène en 1889 à Forest, près de Bruxelles. La ouate est immergée dans une solution contenant du capsicum, un petit piment. Appliquée localement, elle a un pouvoir apaisant sur les rhumatismes et la toux. Economique, elle peut être utilisée – et réutilisée – par toute la famille. En 1909, l’affiche créée par Leonetto Cappiello*, représentant un Pierrot crachant le feu, synthétise le message du produit avec une rigueur expressive. Devant le succès du Thermogène, Vandenbroeck fait construire une nouvelle usine. Dans les années 50, une voiture Thermogène intègre la caravane publicitaire du Tour de France. A l’intérieur, un personnage articulé distribue la fameuse ouate.

1936

Quand Valda crachait sa pub

Henri-Edmond Canonne, pharmacien parisien, a l’idée un jour de créer un nouveau médicament pour soulager les infections respiratoires à partir d’une association de cinq antiseptiques issus de plantes mélangées à de la gomme arabique. Ainsi naquirent, le 26 septembre 1900, les pastilles Valda. Installé dans une immense pharmacie située près de la gare de l’Est, Henri-Edmond Canonne n’hésite pas à aller lui-même vendre son produit sur les quais de gare. En 1908, il passe les frontières et exporte Valda dans plus d’une trentaine de pays. Douze ans plus tard, il ouvre une grande usine de fabrication dans le quartier de la Bastille. Pour prôner les bienfaits de la pastille verte et la faire connaître au plus grand nombre, Canonne utilise tous les supports de communication et de publicité de l’époque en y associant les plus grands artistes : boîtes d’allumettes illustrées de dessins de Dubout ou de René Caille, plaques émaillées, affiches signées Georges Grellet, Raymond Savignac ou Robert Falcucci*, tôles peintes animées représentant les célèbres voitures, bateaux, chameaux ou avions qui témoignent de l’expansion de Valda à travers le monde.

Pavis allait au Charbon

Médecin militaire, Camille Belloc, né en 1807 à Agen, contracta de graves troubles gastriques lors d’une campagne en Algérie. S’étant soigné par lui-même avec du charbon de bois de peuplier vert, il décide en 1848 de commercialiser cet ingrédient pour soigner « les maladies de l’estomac, des intestins, en cas de gaz ou de liquides irritants ». Ce sera le début de la notoriété du Charbon de Belloc, dont le caricaturiste Georges Pavis* vantera les bienfaits avec humour dans les journaux.

1920

Sacrée Crème Nacrée

En 1920, François Debat, dermatologue et pharmacien mais aussi grand amateur d’art, fonde le laboratoire Innoxa. Le Lait Innoxa, un démaquillant d’une parfaite tolérance, remporte un succès immédiat. A partir de 1937, d’autres produits de soin verront le jour (Crème Nacrée, Crème Organique…). Le maquillage fait son apparition à la même époque avec une poudre de riz réputée pour sa finesse.

1929

Lactéol par Tamara de Lempicka*

En 1907, Pierre Boucard, médecin et spécialiste en bactériologie, isole des selles d’un enfant malade une bactérie de la flore saprophyte : la souche Lactéol (Lactobacillus acidophilus). En l’étudiant, il met en évidence une activité bénéfique au niveau intestinal qui se révèle stable à la chaleur. Il décide donc de tuer les ferments lactiques au cours du procédé de fabrication afin d’obtenir une bonne stabilité et une grande sécurité d’emploi. Il fonde alors le Laboratoire du Lactéol et commercialise la spécialité antidiarrhéique Lactéol, sous forme de comprimés. Le premier antidiarrhéique d’origine microbienne disponible dans les officines françaises est né. A la fin des années 1920, Pierre Boucard met en place le premier marketing direct avec l’envoi postal à tous les médecins de France d’un agenda par an, « l’agenda Lactéol », devenu célèbre et recherché des collectionneurs. Pierre Boucard décède en 1967 à l’âge de 91 ans… en ayant pris du Lactéol toute sa vie.

La Jouvence sourit toujours

Au milieu du XVIIIe siècle, l’abbé Delarue s’est forgé la réputation d’avoir le don de soigner par les plantes. Gilbert Soury, grand admirateur de l’abbé, lequel lui a transmis son savoir botanique, médical mais aussi religieux, devient prêtre et, très vite, travaille à la formulation d’une solution pour soulager les « douleurs des jambes dues à une mauvaise circulation du sang ». C’est ainsi que la Tisane des deux Abbés, composée de onze plantes, voit le jour en 1745. Après la disparition de l’abbé Soury, le secret du remède se transmet de génération en génération jusqu’à son arrière-petit-neveu, Magloire Dumontier. Nous sommes au XIXe siècle et Magloire, pharmacien à Rouen, décide d’industrialiser le remède. C’est à cette époque que le mot « Jouvence » prend place sur les flacons. L’héritage de la célèbre formule est transmis par la suite au fils de Magloire, René Dumontier. Entre les deux guerres, une trentaine d’affiches publicitaires sont conçues pour promouvoir la Jouvence de l’abbé Soury, axées essentiellement sur les femmes, la nature, les saisons.

Normogastryl, le grand voyageur

C’est avec la création de l’Union de pharmacologie scientifique appliquée par un médecin radiologue, Camille Bru, en 1935 à Agen, que débute la production du Normogastryl. Présenté sous forme de comprimé effervescent permettant de réaliser une solution alcaline bromurée citratée, le médicament est indiqué pour traiter douleurs, brûlures et aigreurs d’estomac. Pour conditionner sa première spécialité pharmaceutique, Camille Bru a l’idée d’ajouter au conditionnement normal une petite boîte en forme de trèfle à trois feuilles qui permet de porter sur soi la dose quotidienne du médicament et donc de faciliter l’observance. Cette boîte évoluera vers un modèle de trèfle à quatre feuilles : les trois comprimés journaliers, plus un autre pour un ami ! Les slogans publicitaires se succéderont pour vanter les bénéfices du comprimé auprès du « neuro-dyspeptique », « quand il souffre ».

1982

Synthol, où le slogan qui fait mal !

Fruit des cogitations de M. Roger, pharmacien orléanais, Synthol fait sa première apparition en pharmacie en 1925. Sa première idée était de créer une potion agissant localement pour atténuer la douleur et désinfecter. Les premiers résultats sont prometteurs mais M. Roger améliore encore son invention. D’abord en utilisant du jaune de quinoléine pour lui donner une couleur ambrée et la rendre moins photosensible. Puis en la stockant dans un flacon de verre teinté, emballé dans une boîte de couleur noire. Initialement préconisé pour soigner les maux de bouche, Synthol est utilisé plus largement par les Français afin de soulager petits maux du quotidien, bosses, bleus, piqûres d’insectes, etc. Le succès est immense. En 1932, Bruno Varilla, propriétaire du journal Panorama médical, achète Synthol et en fait une large promotion. Déremboursé en 1981, le produit est dès lors autorisé à la publicité. En 1982, une stratégie de relance basée sur l’humour et le principe d’un antihéros est adoptée, faisant intervenir l’agence DDB et un illustrateur américain, Jack Davis. C’est l’heure de la première campagne de communication avec la signature « Ça fait du bien là où ça fait mal ».

1913

Peu importe le flacon pourvu qu’on ait l’Eau précieuse !

En 1890, Charles Dépensier, un pharmacien, élabore l’Eau précieuse qui portera son nom. Indiquée pour les maladies de peau et les maux de jambes, elle contient des acides salicylique et borique qui aident à lutter contre l’excès de sébum et éliminer points noirs et impuretés. Les premières publicités apparaissent dès le début du XXe siècle, dans la presse notamment. Utilisée par les jeunes femmes, la lotion est alors vendue par correspondance dans des petites fioles de verre. En 1927, la marque est rachetée par le laboratoire Charles Roux et l’Eau précieuse vient garnir les présentoirs des pharmacies. L’obtention du statut de médicament en 1942 achève de la populariser. En 1950 apparaîtront les premières « réclames » à la radio, sur RTL.

Vicks, le baume contre le « rub »

En 1905, aux Etats-Unis, Lunsford Richardson fonde la Vick Family Remedies Company pour commercialiser les 21 remèdes Vick de santé familiale qu’il a lui-même conçus. En 1907, le fils aîné de Lunsford, H. Smith Richardson, devient directeur des ventes dans l’entreprise familiale. Pour accroître les possibilités d’expansion, il recommande à son père d’abandonner la vente de tous les produits, sauf celle du baume Vicks VapoRub – qui se vend très bien –, et de changer le nom de la firme en Vick Chemical Company. En 1910, les ventes s’envolent. Dans le même temps, un nouveau plan de « pull » marketing est adopté. La stratégie consiste à communiquer directement auprès du consommateur final et non du pharmacien, et ce en utilisant la publicité (dans la presse locale). En 1918, la grippe espagnole fait littéralement exploser les chiffres de vente de Vicks VapoRub, dont la promotion s’accompagne de conseils médicaux. Dans les années 20, l’entreprise se développe en Angleterre et au Mexique. Rapidement, le produit acquiert une renommée internationale. Il est bientôt utilisé dans plus de soixante pays, recherché des consommateurs pour son effet de soulagement immédiat. Il faut attendre le début des années 50 pour que Vicks VapoRub apparaisse en France.

* Né en 1875 à Livourne (Italie), mort en 1942, sa carrière fut essentiellement française. Il fut le premier artiste à aborder franchement l’affiche par son côté utilitaire.

* Peintre, illustrateur, affichiste, décorateur (1900-1989).

* div de dessins satiriques, de dessins de presse et de caricatures (1886-1977).

* Peintre polonaise (1898-1980) la plus célèbre de la période Arts-Déco. Pierre Boucard était un collectionneur fervent de ses œuvres.

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