« Nous souhaitons qu’il y ait une reconnaissance du métier de pharmacien » - Le Moniteur des Pharmacies n° 2850 du 16/10/2010 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2850 du 16/10/2010
 
INTERVIEW

Dossiers

Enquête

Auteur(s) : Claire Bouquigny

An Lê, chef de l’unité Pharmacopée, et Caroline Vilain, responsable du Formulaire national à l’Afssaps ont l’intention de soutenir les préparations. Elles attendent avec impatience les propositions des pharmaciens.

Quel est le rôle de l’Afssaps sur les préparations officinales ?

Son rôle est de standardiser la qualité des matières premières à usage pharmaceutique et d’élaborer les divs du Formulaire national. Les préparations officinales sont étudiées par le groupe de travail du Formulaire national, qui est rattaché à la commission nationale de la Pharmacopée. Les comptes rendus des séances de travail sont en libre accès sur le site Internet de l’Afssaps.

Pourquoi n’y a-t-il que deux officinaux dans le groupe de travail sur le Formulaire ?

Les nominations des membres des 17 groupes de travail rattachés à la commission nationale de la Pharmacopée se font dans le respect des règles de déontologie de l’Afssaps. L’appel à candidatures est ouvert à tous les candidats et c’est un jury extérieur qui examine les demandes. Les groupes sont renouvelés tous les trois ans. De nombreux officinaux ont posé leur candidature pour le prochain mandat. Les nominations devraient avoir lieu d’ici la fin de l’année.

Est-ce l’Afssaps qui élabore les formules du Formulaire ?

L’Afssaps élabore des formules dans le cadre des besoins des patients et en fonction des remontées d’information qui proviennent du terrain. Nous avons retiré du Formulaire des formules anciennes qui n’avaient plus de raison d’être ou qui avaient un équivalent thérapeutique sous forme de spécialité. Nous avons aussi défini des critères généraux d’élaboration de formules et des formats de formules. Notre limite aujourd’hui est que nous n’avons pas de retour des officinaux, de réseau extérieur qui nous transmette des remontées du terrain et de la pratique.

Qu’attendez-vous des officinaux ?

Nous leur demandons de fournir à l’Afssaps des formules de préparations. Elles seront étudiées par le groupe de travail et celles qui seront validées pourront être intégrées dans le Formulaire. Nous souhaitons qu’il y ait un travail commun, un partage des connaissances et qu’il y ait une reconnaissance d’un travail collectif et du métier de pharmacien.

Un pharmacien peut-il créer des formules conseil et les soumettre à l’Afssaps ?

Non, la formule conseil est hors la loi. Il doit donc utiliser les formules qui figurent au Formulaire national.

Mais il y a très peu de formules dans le Formulaire ! On est en plein paradoxe !

C’est bien pourquoi nous demandons aux pharmaciens qu’ils nous envoient leurs anciennes formules traditionnelles, qui ont été validées par l’usage, et celles qu’ils réalisent actuellement. Il faut que ce soit des formules crédibles, présentant un intérêt général et thérapeutique. En fonction de sa composition, une préparation magistrale qui répond à une demande peut également devenir une préparation officinale et être intégrée dans le Formulaire.

A quel type de patient pourra-t-on proposer ces préparations ?

[…] Elles sont adaptées aux petites pathologies et se situent dans des axes thérapeutiques définis et de préférence intégrés dans les plans de santé publique, comme c’est le cas, par exemple, des produits amaigrissants.

Comment le pharmacien peut-il différencier son offre de conseils quand 148 plantes médicinales ont été sorties du monopole pharmaceutique ?

La vente des plantes médicinales libérées n’est autorisée que dans le cadre des compléments alimentaires. Ces produits ne bénéficient pas de la garantie que confère une origine pharmaceutique et ils ne peuvent pas être assortis d’allégations santé qui n’ont pas été démontrées. La DGCCRF autorise la vente de plantes dites médicinales en dehors de l’officine, mais c’est illégal si ces plantes sont vendues comme présentant des activités thérapeutiques. Seules les plantes vendues en officine bénéficient de ce statut. Lorsque de la sauge ou de la badiane sont vendues sur un marché, elles sont vendues en tant que condiments et non comme plantes médicinales.

Comment aider le consommateur à faire la différence ?

Les pharmaciens doivent expliquer à leurs clients que les plantes achetées à l’extérieur de l’officine ne bénéficient d’aucune garantie de qualité et de composition, qu’elles ne sont pas contrôlées, qu’elles n’ont pas le statut de plantes médicinales et qu’elles ne sont donc pas des médicaments. Seules les plantes vendues en officine bénéficient d’une garantie de qualité. Si l’on prend, par exemple, des gélules d’Harpagophytum, celles qui sont vendues en officine avec une AMM ont une traçabilité, une qualité certifiée et un vrai statut de médicament. En revanche, celles qui sont vendues sous la forme de complément alimentaire n’ont pas été évaluées ni contrôlées selon des critères scientifiques requis pour un médicament. Le consommateur doit être informé de cette réalité et c’est le rôle des pharmaciens de défendre leurs produits et de dire ce qui relève de la pharmacie afin qu’il n’y ait pas de confusion sur les statuts.

Etes-vous pour le maintien des préparations à base de plantes ?

Bien sûr, [et ce] afin de rendre le pharmacien plus acteur de santé. Il n’y a pas de soucis avec la phytothérapie et avec l’homéopathie, qui sont bien connues. L’aromathérapie, en revanche, pose problème car des huiles essentielles sont très toxiques et ne peuvent être utilisées sans contrôle. A l’Afssaps, nous ne nous intéressons qu’à l’évaluation du rapport bénéfice/risque dès lors que les informations concernant les huiles essentielles ne sont pas validées ni mises à jour. De plus, l’aromathérapie n’est pas une spécialité actuellement reconnue par le Conseil national de l’ordre des médecins. Nous avons besoin d’avoir une lisibilité sur les « huiles essentielles médicinales » utilisées et sur leurs conditions de délivrance pour pouvoir travailler au niveau du Formulaire.

Dans ce cas, comment faire évoluer ce domaine de l’aromathérapie ?

Nous souhaitons monter un groupe de travail spécifique avec tous les professionnels concernés afin d’identifier les gens et de connaître ce qu’on enseigne, car actuellement nous n’avons pas de réseau dans ce domaine. Nous sommes demandeurs de remontées du terrain. Nous sommes là pour faciliter le travail du pharmacien, mais à l’intérieur du cadre de gestion des risques. Nous ne pouvons pas avoir deux approches : l’une avec un contrôle total pour ce qui concerne les spécialités pharmaceutiques et l’autre sans aucun contrôle pour tout le reste, et notamment l’aromathérapie.

La réalisation de préparations officinales de phytothérapie, d’homéopathie et d’aromathérapie devrait-elle être corrélée à une obligation de formation ?

Pour la phytothérapie et l’homéopathie, les officinaux sont déjà formés. En ce qui concerne l’aromathérapie, nous sommes pour la formation et sommes prêts à nous y investir et à intervenir dans des DU. Nous espérions que des universitaires spécialistes des huiles essentielles répondraient à l’appel à candidatures lancé en octobre 2009 car, actuellement, nous ne savons pas quels types de formation sont dispensés par les universités. Nous ne connaissons pas les contenus des DU d’aromathérapie, ni la nature et les allégations des huiles essentielles qui y sont étudiées. Nous avons le même problème avec les formateurs en médecine – dont on ne connaît pas le niveau de formation – et avec les fournisseurs – qui ne nous communiquent pas la liste des huiles essentielles qu’ils commercialisent. Aucun travail de recensement n’a été fait. L’Ordre des pharmaciens nous a dit que ce n’était pas de son domaine de compétence. Tout est à faire.

Pourquoi semblez-vous avoir tant de mal à travailler sur ce dossier ?

L’Afssaps ne connaît pas l’ensemble des substances utilisées en officine et, de ce fait, elle ne peut pas les définir en termes de qualité et de risques. C’est plus facile de travailler sur des spécialités pharmaceutiques qui ont des principes actifs connus et validés et des normes de qualité précises que sur les plantes et les huiles essentielles dont les principes actifs sont peu connus.

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