L’énurésie de l’enfant - Le Moniteur des Pharmacies n° 2836 du 19/06/2010 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2836 du 19/06/2010
 

Cahiers Formation du Moniteur

Ordonnance

Une prescription à la loupe

Théo veut partir en colonie de vacances

RÉCEPTION DE L’ORDONNANCE

Pour qui ?

Théo, 8 ans. Il est accompagné de sa maman.

Par quel médecin ?

Le docteur Plongs, pédiatre de Théo.

L’ordonnance est-elle recevable ?

Oui. Il n’y a pas de médicaments à délivrance particulière.

QUEL EST LE CONdiv DE L’ORDONNANCE ?

Que savez-vous du patient ?

Théo a commencé un traitement par Minirinmelt il y a un mois. Vous connaissez ce petit garçon depuis plusieurs années et il n’a jamais eu de problèmes de santé particuliers.

Quel était le motif de la consultation ?

La maman de Théo est allée avec celui-ci consulter le pédiatre afin qu’il renouvelle le traitement instauré il y a un mois.

Que lui a dit le médecin ?

Le calendrier mictionnel que Théo remplit quotidiennement montre que la fréquence des nuits « mouillées » a diminué mais reste encore trop élevée. Le médecin a donc décidé d’augmenter la posologie de Minirinmelt de 60 µg par jour (passant ainsi de 120 à 180 µg par jour). Il a également expliqué à Théo qu’il fallait continuer à utiliser le pipi-stop s’il voulait mettre toutes les chances de son côté pour partir sereinement en colonie de vacances au mois d’août.

Vérification de l’historique patient

Minirinmelt 60 µg s’ajoute effectivement à Minirinmelt 120 µg que l’enfant prenait depuis 1 mois. Théo ne prend pas d’autres médicaments.

LA PRESCRIPTION EST-ELLE COHÉRENTE ?

Que comporte la prescription ?

L’ordonnance associe deux types de traitement indiqués dans l’énurésie.

→ Le pipi-stop est un système d’alarme sonore. Une couche de tissu contenant une sonde est reliée à l’appareil. Dès les premières gouttes d’urine émises par l’enfant, l’alarme se déclenche. L’enfant doit l’interrompre et poursuivre sa miction dans les toilettes.

→ Minirinmelt (desmopressine) est un analogue de la vasopressine (ou hormone antidiurétique). Il est utilisé pour diminuer le volume d’urine produit pendant la nuit.

Est-elle conforme aux référentiels ?

→ Oui. La prise en charge de l’énurésie doit impliquer l’enfant et commence toujours par des mesures éducatives et hygiénodiététiques avec notamment l’établissement d’un calendrier des nuits « sèches » et « mouillées » (ce qui a été fait pour Théo).

→ En cas de contrôle insuffisant par ces mesures, un traitement est mis en place en privilégiant en première intention soit un système par alarme, soit la desmopressine en fonction de la forme d’énurésie dont souffre l’enfant (voir « Thérapeutique » p. 8). Après deux mois, si l’efficacité du traitement instauré est jugée insuffisante (moins d’une nuit sèche sur deux), l’association des deux stratégies (alarme et desmopressine) est possible.

Y a-t-il des médicaments à marge thérapeutique étroite ?

Non.

Y a-t-il des contre-indications pour ce patient ?

→ Non. Théo a plus de 6 ans (il n’y a pas d’indication thérapeutique de ce traitement avant l’âge de 6 ans). Il ne souffre d’aucun trouble susceptible de contre-indiquer la prise de desmopressine : insuffisance cardiaque, insuffisance rénale modérée ou sévère…

→ Il ne souffre pas non plus de troubles cognitifs qui le rendraient incapable de respecter la restriction hydrique (impérative lors de la prise de la desmopressine).

Les posologies sont-elles cohérentes ?

→ La posologie de Minirinmelt est conforme à l’AMM. Le traitement a bien été initié à la posologie de 120 µg. L’augmentation de la posologie initiale est consécutive à la réponse clinique et se fait par palier de 60 µg.

→ Chez les enfants répondeurs, le traitement est administré sur une période de trois mois à la dose minimale efficace. Il est ensuite arrêté et l’énurésie est réévaluée Si nécessaire, un second traitement de trois mois peut être suivi en respectant un arrêt d’une semaine entre les deux traitements.

La prescription pose-t-elle un problème particulier ?

Non. A noter que la prise de la desmopressine doit toujours se faire sous le contrôle des parents.

Y a-t-il des interactions ?

Non.

Le traitement nécessite-t-il une surveillance particulière ?

→ Oui. Le traitement par Minirinmelt nécessite de surveiller certains signes qui doivent faire évoquer une intoxication par l’eau, et en particulier une prise de poids, conséquence possible d’une rétention hydrique excessive.

→ Cette surveillance est particulièrement importante lors de l’initiation du traitement ou en cas d’augmentation de posologie.

QUELS CONSEILS DE PRISE DONNER ?

Concernant Minirinmelt

Minirinmelt est un médicament que le patient connaît déjà mais la posologie est augmentée de 120 à 180 µg par jour, ce qui nécessite d’être attentif aux effets indésirables. Ces derniers doivent être rappelés à la maman de Théo.

QU’EN PENSEZ-VOUS ?

Théo devra prendre les deux comprimés de Minirinmelt :

1 dès le premier soir, au coucher

2 le lendemain matin

3 à raison de un comprimé le matin et de un comprimé le soir

Quand commencer le traitement ?

L’effet thérapeutique recherché étant une diminution du volume d’urine la nuit, la desmopressine doit impérativement être prise le soir. L’administration se fait au moment du coucher et la posologie de Minirinmelt pourra donc être augmentée le soir même (réponse 1). Il faut bien expliquer à Théo que désormais, il n’aura plus un mais deux comprimés le soir à mettre sous la langue.

Que faire en cas d’oubli ?

En cas d’oubli, il ne faut en aucun cas doubler la prise suivante.

Modalités de prise

→ Il est également important de s’assurer que Théo prend son traitement au bon moment dans la soirée : « A quelle heure prends-tu ton traitement et à quelle heure te couches-tu ? »

→ D’autre part, une restriction hydrique est nécessaire : « A partir de quelle heure fais-tu attention à ne plus boire ? »

QU’EN PENSEZ-VOUS ?

Il est impératif de restreindre la prise de liquide :

1 au moins 2 heures avant et pendant les 4 heures suivant la prise de desmopressine

2 au moins une heure avant et pendant les 8 heures suivant la prise de desmopressine

3 pendant les 12 heures suivant la prise de desmopressine

Pour obtenir le meilleur effet thérapeutique et éviter les effets indésirables, il faut limiter les boissons une heure avant puis les 8 heures suivant la prise de Minirinmelt (réponse 2).

Efficacité du traitement

S’assurer que Théo suit scrupuleusement son traitement : « Prends-tu ton Minirinmelt tous les soirs ? », « Est-ce que tu continues à remplir ton calendrier mictionnel ? »

Le traitement sera efficace lorsque la fréquence des nuits « sèches » augmentera (plus d’une nuit « sèche » sur deux). Chez un enfant répondeur à la desmopressine, une amélioration est perçue en quelques jours.

Quels sont les principaux effets indésirables ?

Céphalées, douleurs abdominales et nausées sont fréquentes (1 à 10 %). Une intoxication par l’eau avec hyponatrémie est un effet indésirable rare mais potentiellement grave.

Quels sont ceux gérables à l’officine ?

Du paracétamol peut être délivré en première intention en cas de maux de tête.

Quand contacter le médecin ?

Si les céphalées persistent et devant tout signe pouvant évoquer une intoxication par l’eau, alerter rapidement le médecin : augmentation importante du poids sur un délai court, fatigue inhabituelle, manque d’appétit avec nausées ou vomissements, voire agitation, irritabilité, confusion mentale, somnolence, convulsions.

Concernant l’alarme

Le système est loué mais non pris en charge par la Sécurité sociale. Les bandes de tissu sont disponibles à l’achat uniquement. Lavables à l’eau savonneuse, elles se fixent dans le slip. Des bandes de rechanges peuvent être achetées si nécessaire.

Efficacité

Vérifier l’adhésion de Théo à son traitement et le bon fonctionnement de l’alarme : « Théo, utilises-tu l’alarme chaque nuit ? » (une utilisation discontinue rend le traitement inefficace), « Lorsque l’alarme sonne, arrives-tu à l’arrêter et à aller faire pipi aux toilettes ? »

Observance

Depuis que Théo sait qu’il pourra certainement partir en colonie, il fait attention à bien prendre le traitement Minirinmelt et il continue à utiliser l’alarme. Il n’y a aucun problème d’observance.

CONSEILS COMPLÉMENTAIRES

Théo a déjà bien modifié ses habitudes : réduction des apports hydriques en fin de soirée, miction avant le coucher, suppression de la couche et participation au changement des draps mouillés.

DEMANDE DE LA MAMAN

Trois jours plus tard, la maman de Théo se présente à la pharmacie. Théo souffre d’une gastroentérite : il a un peu de fièvre et des épisodes de diarrhée. Sa maman explique qu’il lui reste des gélules d’Ultra-levure. Elle demande Smecta ainsi qu’une boîte de Doliprane pour la fièvre.

QU’EN PENSEZ-VOUS ?

Le traitement par desmopressine :

1 peut être continué si Théo boit suffisamment la journée

2 peut être continué et, pour éviter tout risque de déshydratation, les boissons sont exceptionnellement autorisées la nuit

3 doit être arrêté

→ Le traitement par Minirinmelt doit impérativement être interrompu lors d’affections intercurrentes pouvant induire un déséquilibre hydrique et/ou électrolytique : épisode infectieux, fièvre, gastroentérite (réponse 3).

Smecta et Doliprane peuvent être délivrés mais il faut expliquer à la maman de Théo que Minirinmelt doit être arrêté pour l’instant. En suivant quelques conseils hygiénodiététiques, sous deux à trois jours, Théo devrait aller mieux (plus de fièvre et normalisation du transit). Il pourra alors reprendre son traitement.

Joint par téléphone, le médecin valide ces conseils et confirme que le traitement pourra être repris à la même posologie.

Répercussions sur le travail d’équipe

Suite à la question posée par cette maman, l’équipe décide d’insérer un message bien visible dans la fiche produit Minirin et Minirinmelt : « Stopper le traitement en cas de fièvre ou de syndrome infectieux ! » Ainsi, à chaque délivrance, il est rappelé aux membres de l’équipe la nécessité d’être vigilant face à ce type d’événement.

Pathologie

L’énurésie de l’enfant en 5 questions

L’énurésie nocturne correspond à l’émission involontaire d’urine durant le sommeil à un âge où l’enfant est habituellement propre. On parle d’« énurésie nocturne primaire isolée » lorsque l’enfant n’a jamais été propre et qu’il n’existe aucun autre trouble mictionnel associé.

QUELS SONT LES SIGNES CLINIQUES ?

Troubles mictionnels

L’énurésie nocturne primaire isolée (ENPI) répond à une définition bien précise.

→ L’énurésie nocturne est une incontinence intermittente pendant le sommeil chez des enfants âgés d’au moins cinq ans. C’est à la fois un symptôme et un état pathologique.

→ Elle est dite primaire lorsque l’enfant n’a jamais été propre durant le sommeil sur une période d’au moins 6 mois.

→ Elle est dite isolée ou monosymptomatique lorsqu’il n’y a aucun trouble mictionnel associé (pollakiurie, urgences mictionnelles…), notamment diurne, relevant du bas appareil urinaire.

Dans le cas contraire, il faut éliminer une cause organique sous-jacente.

→ L’énurésie nocturne primaire isolée est dite sévère si l’enfant se mouille plus de 2 nuits par semaine. Les mictions sont normales dans leur déroulement.

Troubles associés

→ On estime que 20 % des enfants souffrant d’un trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité (TDAH) ont une ENPI et que 10 % environ des enfants ayant une ENPI souffrent d’un TDAH.

→ La baisse de l’estime de soi est un symptôme fréquemment retrouvé. Il semble amélioré par la prise en charge de l’ENPI.

→ Les perturbations de la vie familiale et sociale de l’enfant énurétique sont une réalité et justifient une prise en charge médicale.

QUELLES SONT LES DIFFÉRENTES FORMES D’ENPI ?

→ On distingue deux formes principales d’ENPI, représentant 50 % d’entre elles :

– une forme polyurique pure (environ 20 % des ENPI), avec capacité fonctionnelle vésicale normale. Elle est évoquée en cas de literie ou de couches très mouillées. La polyurie ne se manifeste que la nuit ;

– une forme caractérisée par une faible capacité vésicale (environ 30 % des ENPI), qui est évoquée en cas de mictions peu abondantes mais répétées.

→ Les 50 % restantes sont des formes mixtes ou des formes pour lesquelles on ne retrouve pas de cause physiopathologique dominante.

COMMENT SE FAIT LE DIAGNOSTIC ?

Il est avant tout clinique, reposant sur l’interrogatoire et l’examen physique au cours d’une consultation initiale approfondie.

Interrogatoire

L’interrogatoire est primordial.

→ Chez un enfant de plus de 5 ans qui n’a jamais été propre, il est indispensable de recueillir les éléments suivants : existence d’une fratrie, antécédents d’énurésie dans la famille, âge d’acquisition de la propreté chez les parents et dans la fratrie, modalités d’acquisition de la propreté (trop rigides ou trop laxistes), présence d’une constipation ou d’une encoprésie (fréquemment associées), existence de comorbidités (troubles de l’attention, hyperactivité…), survenue d’événements perturbateurs (décès, naissance dans la famille…), habitudes mictionnelles en journée, évaluation des boissons consommées dans la journée, qualité du sommeil de l’enfant, nombre de nuits « mouillées » par semaine, port ou non de couches, retentissement de l’énurésie sur la vie sociale et familiale.

→ Enfin ; il est également nécessaire de s’assurer de la motivation de l’enfant, des mesures hygiénodiététiques déjà suivies, des traitements déjà entrepris et définir les causes d’échec.

Examen clinique

→ Dans le cas d’une énurésie nocturne primaire isolée, l’examen clinique est strictement normal. Il élimine une origine organique (néphrologique ou urologique).

→ Il comprend le relevé du poids, de la taille, de la courbe staturopondérale, selon le cas du stade pubertaire, la prise de la tension artérielle, la réalisation d’une bandelette urinaire.

→ Par ailleurs, un examen de la qualité du jet urinaire est réalisé : un retard à l’apparition du jet, la faiblesse du jet, la difficulté d’arrêt du jet ou un effort de poussée pour terminer la miction doivent faire évoquer une dysurie (pouvant être causée par un obstacle urétral).

Calendrier mictionnel

La tenue d’un calendrier mictionnel détaillé est le moyen recommandé pour confirmer ou corriger le diagnostic de l’une des deux formes d’énurésie.

QUELLES SONT LES ÉTIOLOGIES ?

Hérédité

Des antécédents familiaux d’énurésie existent dans 30 à 60 % des cas. Le risque pour un enfant de devenir énurétique est compris entre 65 et 70 % si les deux parents étaient eux-mêmes énurétiques, entre 25 et 45 % si un seul l’était.

Qualité du sommeil

La majorité des enfants énurétiques présente un sommeil très profond et la réaction d’éveil induite par la réplétion vésicale est perturbée.

Immaturité vésicale

Le fait que la propreté soit acquise plus tard chez les garçons que chez les filles expliquerait que les premiers soient davantage touchés par l’ENPI.

Sécrétion d’hormone antidiurétique

→ Chez certains enfants énurétiques, une anomalie du rythme de sécrétion de la vasopressine ou ADH (hormone antidiurétique) entraînerait une polyurie nocturne relative.

→ En revanche, en dehors du TDAH parfois retrouvé, les troubles psychiatriques ne sont pas plus fréquents dans l’ENPI que dans la population générale des enfants du même âge.

→ Les troubles psychologiques sont la conséquence et non pas la cause de l’énurésie.

Autre

Le syndrome d’apnées du sommeil et/ou l’encombrement sévère du carrefour ORL serait un facteur favorisant.

QUELLE EST L’ÉVOLUTION ?

→ L’énurésie s’améliore avec le temps. En l’absence de tout traitement, le taux de guérison est de 15 % par an chez les enfants âgés de 5 à 10 ans. Toutefois, une prise en charge doit être proposée pour plusieurs raisons :

– l’énurésie peut persister jusqu’à l’adolescence (1 % des cas) voire jusqu’à l’âge adulte (0,5 %) ;

– la baisse de l’estime de soi est à l’origine d’un isolement social (l’enfant évite d’aller dormir chez les amis, ne veut pas aller en colonie de vacances…) ;

– le retentissement familial est important : punition, fatigue, découragement…

Une prise en charge a un effet bénéfique sur le moral de l’enfant quel que soit le résultat du traitement sur l’énurésie.

Thérapeutique

Comment traiter l’énurésie de l’enfant ?

La prise en charge de l’énurésie passe dans un premier temps par une démarche d’information et d’éducation. Des mesures hygiénodiététiques sont ensuite proposées puis, si nécessaire, chez les enfants motivés de plus de 6 ans, la desmopressine ou un système d’alarme est proposé.

STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE

Des mesures hygiénodiététiques associées à la tenue d’un calendrier mictionnel sont mises en place dans un premier temps pour une période d’environ 3 mois.

En cas d’échec de ces mesures, un traitement spécifique peut être envisagé chez l’enfant motivé et selon le type d’énurésie.

Mesures hygiénodiététiques

→ L’établissement d’un climat de confiance est indispensable pour obtenir la coopération active de l’enfant et le motiver à suivre les mesures hygiénodiététiques :

– prendre un petit déjeuner avec des apports liquidiens suffisants (environ un tiers des besoins quotidiens) puis boire tout au long de la journée mais limiter le plus possible les apports hydriques après 18 heures ;

– privilégier tout au long de la journée des eaux peu minéralisées ;

– inciter l’enfant à aller aux toilettes régulièrement dans la journée et juste avant le coucher ;

– être aussi détendu que possible au moment des mictions et laisser couler le jet librement.

→ Par ailleurs, il est recommandé durant la nuit de supprimer les couches, de favoriser l’accès aux toilettes (veilleuse…), d’éviter les réveils nocturnes systématiques et de mettre en place un système simple pour nettoyer les draps, en favorisant la participation de l’enfant.

→ En parallèle, il est recommandé d’établir un calendrier mictionnel détaillé comportant les nuits « sèches » (dessin d’un soleil) et « mouillées » (dessin d’un nuage avec de la pluie), la quantité de boissons bue dans la journée… Ceci permet d’évaluer la situation et de suivre la progression de l’enfant.

→ Ces mesures sont poursuivies 1 à 3 mois (si elles sont bien acceptées par l’enfant). La tenue du calendrier mictionnel associée à des mesures hygiénodiététiques permet d’obtenir la guérison dans 20 à 30 % des cas.

Traitements spécifiques

Ils ne sont indiqués qu’à partir de l’âge de 6 ans, après échec des mesures hygiénodiététiques.

En première intention

→ Formes polyuriques : la desmopressine est recommandée d’emblée. Son administration à l’enfant nécessite une bonne information des modalités de prise et des règles de restriction hydrique à suivre pour éviter tout risque d’effets indésirables (en particulier hyponatrémie par dilution). La forme lyophilisat est préférée aux comprimés car elle permet à l’enfant de respecter la restriction hydrique vespérale.

→ Formes à faible capacité vésicale : les alarmes (ou thérapeutiques de conditionnement) sont recommandées en première intention si elles sont bien acceptées : elles ne doivent pas être considérées comme une punition.

→ En l’absence d’orientation clinique (formes indéterminées) : le choix d’une alarme ou de la desmopressine se fait après discussion et évaluation du soutien familial.

Evaluation de l’efficacité

→ L’efficacité de ces traitements est évaluée au bout de 2 mois environ :

– en cas de succès (amélioration d’au moins 50 %, c’est-à-dire une nuit « sèche » sur deux), le traitement par desmopressine est poursuivi pour couvrir au total une durée de 3 mois à dose minimale efficace. Il est renouvelable une fois en respectant un délai d’une semaine entre les deux traitements (pour le système d’alarme, l’arrêt s’effectue généralement après une période de 14 nuits « sèches » consécutives) ;

– en cas d’amélioration insuffisante (plus d’une nuit « mouillée » sur deux), les deux traitements sont proposés en association. Dans tous les cas, la prise en charge n’excède pas 6 mois.

→ Selon un rapport de l’Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé (aujourd’hui HAS) de mars 2003 (« Evaluation des systèmes d’alarme dans le traitement de l’énurésie nocturne primaire monosymptomatique »), il n’y a pas de différence d’efficacité entre alarme et desmopressine à l’issue des traitements. Mais cette évaluation ne tenait pas compte des différentes formes d’énurésie nocturne primaire isolée (ENPI).

→ En pratique, au long cours, l’alarme serait plus efficace que la desmopressine. En revanche, la desmopressine a un délai de réponse plus rapide (quelques jours) que les systèmes d’alarme (4 à 8 semaines).

Traitements de recours

→ Lorsque ces traitements ont échoué, l’oxybutynine peut être proposée (hors AMM), en monothérapie ou en traitement combiné, chez les enfants suspectés d’avoir une faible capacité vésicale.

→ Les antidépresseurs tricycliques ne sont recommandés qu’en dernier recours du fait de leur toxicité potentielle, en particulier dans certains cas d’énurésie réfractaire chez l’adoles-cent après évaluation des risques et information du patient et de ses parents.

Thérapies complémentaires

Une psychothérapie peut être utile pour accompagner l’enfant et les parents. Les troubles psychologiques étant la conséquence et non pas la cause de l’énurésie, elle n’est pas recommandée en première intention. Des résultats obtenus sous hypnose ou acupuncture s’avèrent intéressants mais les études sont encore peu nombreuses. Aucune autre thérapie complémentaire n’a fait la preuve de son efficacité (homéopathie, phytothérapie, ostéopathie…).

LES TRAITEMENTS

Desmopressine

La desmopressine par voie orale (Minirin, Minirinmelt) est indiquée dans le traitement de l’énurésie nocturne chez l’enfant âgé de plus de 6 ans, après avoir éliminé toute pathologie organique sous-jacente. Elle est particulièrement bénéfique chez les enfants ayant une polyurie nocturne relative avec une capacité vésicale normale. La forme spray n’a plus d’indication dans l’énurésie.

Efficacité

La desmopressine réduit le volume urinaire en augmentant la réabsorption hydrique au niveau du tube collecteur rénal. Le taux de répondeurs est compris entre 60 et 70 % à 6 mois.

Modalités de prise

La prise du médicament s’effectue le soir, sous la surveillance d’un adulte. Il est impératif de restreindre toute prise de liquides au moins 1 heure avant et pendant 8 heures suivant la prise du médicament. La dose initiale de 120 µg est augmentée progressivement si nécessaire par paliers de 60 µg espacés d’une semaine. La dose minimale efficace est recherchée. La dose maximale est de 240 µg par jour, voire exceptionnellement 360 µg par jour. En cas de bonne réponse au traitement, une interruption est faite à 3 mois pour apprécier la capacité naturelle de l’enfant à se contrôler. En cas de rechute, le traitement peut être une nouvelle fois prescrit (ou substitué par un système d’alarme), en respectant un délai d’une semaine entre les 2 traitements. Il est nécessaire de respecter à nouveau l’augmentation progressive de posologie.

La desmopressine ne doit jamais être prise de façon ponctuelle en raison du risque important d’intoxication par rétention d’eau. En cas de séjour loin du domicile, il faut débuter le traitement au moins un mois avant pour déterminer la dose optimale et s’assurer de l’efficacité du traitement.

Effets indésirables

→ Les plus fréquents sont des maux de tête, des nausées et des douleurs abdominales.

→ L’intoxication par l’eau avec hyponatrémie (très rare) est l’effet indésirable principal dont les parents et l’enfant doivent être informés. Il survient le plus souvent à l’initiation du traitement ou lors des augmentations de posologie. Sa prévention repose sur le respect de la restriction hydrique et la connaissance des signes d’alerte : augmentation du poids supérieure à 5 % sur quelques jours, fatigue inhabituelle, manque d’appétit avec nausées voire vomissements, céphalées accompagnées parfois de signes neurologiques traduisant un œdème cérébral (agitation, irritabilité, confusion mentale, somnolence, convulsions, voire coma). L’apparition de ces signes impose l’arrêt du traitement et une restriction des apports hydriquesjusqu’à normalisation de la natrémie.

Traitement comportemental

Les systèmes d’alarme sont recommandés en première intention dans l’ENPI avec capacité vésicale réduite. Mais certains pédiatres leur reprochent de culpabiliser l’enfant. Pour cette raison, les systèmes d’alarme conviennent davantage aux enfants plus âgés (8-9 ans) et motivés. Ils ne doivent pas être pris comme une punition et le principe du traitement doit être bien expliqué. Ces systèmes peuvent se louer (18 à 23 euros par mois) ou s’acheter. A l’heure actuelle, ils ne sont pas remboursés par la Sécurité sociale.

Principe

→ Une couche est placée dans le slip de l’enfant. Elle est reliée par un fil électrique au système d’alarme. Lorsque l’enfant se mouille, dès les premières gouttes d’urine un signal sonore retentit (par conduction électrique de l’urine). Il doit être interrompu par l’enfant lui-même, en général en appuyant sur un bouton durant plusieurs secondes (de manière à ce que l’enfant se réveille complètement). L’enfant doit couper le système, terminer sa miction aux toilettes si nécessaire et réinstaller le système pour le reste de la nuit. Petit à petit, l’enfant va apprendre à anticiper et à se réveiller avant la miction. L’alarme doit être utilisée chaque soir : une utilisation discontinue rend le traitement inefficace.

→ Exemples de systèmes :

– Le système pipi-stop est disponible à la location auprès de différents répartiteurs (Locapharm, Orkyn’…) : une couche de tissu (à l’achat) placée dans les sous-vêtements est reliée à un boîtier installé à côté du lit contenant l’alarme sonore.

– L’alarme Wet Stop est disponible à l’achat directement auprès du fabricant (Athena France) : le boîtier miniaturisé est fixé sur un vêtement au niveau de l’épaule. L’alarme dispose de 5 tonalités différentes et d’un vibreur.

Efficacité

Il a été démontré que le traitement par système d’alarme augmente la capacité vésicale nocturne de façon significative chez les enfants énurétiques. Ils sont à l’heure actuelle le moyen thérapeutique le plus efficace sur le long terme. Toutefois, ils n’agissent pas d’emblée : prévenir l’enfant et son entourage que le délai de réponse est de 4 à 8 semaines. Le taux de guérison est de 60 à 80 % pour une durée moyenne d’utilisation de 3 mois.

Durée du traitement

La réponse au traitement se traduit par une durée de 14 nuits « sèches » (consécutives à l’arrêt). Il est alors recommandé de poursuivre le port de l’alarme durant encore 4 semaines pour éviter une rechute, définie par la réapparition d’au moins 1 nuit « mouillée » par semaine.

En cas de rechute (15 à 30 % des cas), les enfants sont souvent répondeurs à une seconde cure.

Effets indésirables

Ces systèmes nécessitent de l’organisation. Ils ont l’inconvénient d’être peu discrets, d’où des difficultés lorsque l’enfant souhaite dormir à l’extérieur ou en colonie de vacances.

Les effets indésirables décrits sont : réveil de l’entourage avant de réveiller l’enfant lui-même avec certains systèmes d’alarmes, l’échec du réveil de l’enfant, les pannes, les fausses alarmes (par transpiration), des sensations de froid, des chutes lorsque l’enfant est réveillé par l’alarme.

Oxybutynine

L’oxybutynine (Ditropan, Driptane) est un antispasmodique anticholinergique diminuant la contractilité du détrusor, l’amplitude et la fréquence des contractions vésicales, notamment permictionnelles, ainsi que la pression intravésicale.

Indication

Dans l’ENPI, l’oxybutynine n’est indiquée que dans le cas d’une instabilité vésicale nocturne (persistance d’une vessie « automatique » avec des contractions du muscle vésical) lorsque les traitements spécifiques ont échoué. Elle est indiquée en monothérapie ou en traitement combiné (alarme ou desmopressine).

Effets indésirables

Sécheresse buccale, mydriase, constipation, troubles de l’accommodation, hallucinations, cauchemars ou encore tachycardie sont les effets indésirables les plus fréquemment rapportés. L’association à d’autres substances atropiniques majore ces troubles (anti-H1, antitussifs phénothiaziniques…). La prise prolongée d’oxybutynine peut exposer à une hypocontractilité vésicale (nécessité de réaliser des fenêtres thérapeutiques).

Antidépresseurs tricycliques

Leur prescription s’effectue en dernière intention du fait de leur marge thérapeutique étroite (toxicité notamment cardiaque). Ils sont plus particulièrement envisagés dans de rares cas d’énurésie réfractaire chez l’adolescent, notamment en cas de sommeil très profond.

Trois molécules sont utilisées : l’imipramine (Tofranil), l’amitriptyline (Laroxyl) et la clomipramine (Anafranil). Le taux d’efficacité des antidépresseurs tricycliques dans l’énurésie est compris entre 20 et 50 %. Le traitement est habituellement maintenu pendant 3 à 6 mois.

Mécanisme d’action

Le mode d’action des antidépresseurs tricycliques dans l’énurésie est imparfaitement connu : à leur action anxiolytique sur le système nerveux central s’ajoutent une action anticholinergique périphérique et une action alphamimétique qui interviendraient en diminuant les contractions du détrusor et en renforçant le tonus du sphincter lisse urétral. Les tricycliques modifieraient la profondeur du sommeil en favorisant les stades légers, au détriment des stades de sommeil profond (où survient l’énurésie).

Effets indésirables

→ Les posologies préconisées étant faibles par rapport à celles utilisées dans la dépression, les effets indésirables sont donc moins marqués :

– effets anticholinergiques (par ordre de fréquence décroissant) : sécheresse buccale et des muqueuses, constipation, troubles de l’accommodation, mydriase (très rarement glaucome), tachycardie, sueurs, troubles de la miction et parfois rétention urinaire ;

– hypotension orthostatique (effet adrénolytique), somnolence, sédation par effet antihistaminique (fréquent et plus marqué en début de traitement), insomnie, myoclonies, prise de poids, troubles du rythme.

Surveillance

Le suivi doit préférentiellement être effectué par un pédopsychiatre ayant l’habitude de prescrire ces molécules.

Dans les études cliniques conduites chez les enfants et les adolescents traités par antidépresseurs, il a été observé une augmentation du risque de comportement suicidaire et de comportement hostile. De rares cas de syndromes de sevrage (céphalées, malaises, nausées, anxiété, troubles du sommeil) ont été observés à l’arrêt du traitement. Il est donc recommandé de réduire les doses progressivement et de surveiller l’enfant tout particulièrement durant cette période.

PERSPECTIVES THÉRAPEUTIQUES

Des recommandations de la Haute Autorité de santé officielles s’appuyant sur le consensus d’experts, seraient en cours d’élaboration.

Accompagner le patient

L’ÉNURÉSIE VUE PAR LES PATIENTS

L’énurésie nocturne de l’enfant ne se limite pas à un simple problème de « pipi au lit ». Ie retentissement psychologique, familial et social peut être important.

Impact psychologique

L’énurésie peut profondément affecter l’enfant dans son développement psychologique, affectif et dans son intégration sociale. L’enfant peut se sentir incompris. En particulier s’il se fait gronder par ses parents, car l’énurésie n’est pas intentionnelle. Certains enfants sont culpabilisés par le travail supplémentaire que l’énurésie occasionne à leurs parents : changement des draps, lessives, réveils nocturnes… Le sentiment de culpabilité entraîne parfois un véritable repli sur soi.

Impact familial

Outre la tension et la fatigue, l’énurésie de l’enfant peut parfois même devenir source de différends entre les parents ou de conflits entre frères et sœurs.

Impact social

Le risque pour l’enfant est de s’isoler socialement. Il peut avoir peur que les autres enfants se moquent de lui à l’école. Pour cacher leur énurésie, ces enfants vont avoir peur d’inviter un copain à dormir chez eux ou vont refuser d’aller dormir chez lui, de partir en vacances en dehors de la famille (colonies de vacances, classe de découvertes avec leur école…).

Impact économique

Les lessives des draps et du linge mouillés, l’achat de couches ou d’alèses entraînent un surcoût pour les parents.

A DIRE AUX PATIENTS

A propos de ce symptôme

Expliquer à l’enfant qu’il ne doit pas culpabiliser : il ne fait pas exprès de faire pipi au lit, il y a des raisons physiologiques. Lorsque c’est nécessaire, lui proposer d’en parler uniquement aux personnes en qui il a confiance et s’il est d’accord (les parents d’un copain chez qui il va dormir…). Le rassurer : il n’est pas le seul enfant dans ce cas. Il doit adopter de bonnes habitudes : boire et aller aux toilettes régulièrement dans la journée, éviter de manger le soir les aliments riches en eau (soupe, yaourt liquide), très riches en sel et calcium (fromage, quiches, sauces béchamel…) et diurétiques (asperges, poireaux, aubergines, ananas, concombre, figues, melon, pêches).

Le rôle des parents est essentiel : ils doivent expliquer, dédramatiser, déculpabiliser et encourager. Si besoin, ils peuvent en parler avec l’enfant en compagnie d’un tiers (professionnel de santé), mais il faut éviter d’en parler en public devant tout le monde.

Proposer aux parents une visite sur certains sites où l’enfant trouvera des témoignages d’autres enfants (www.pipi-au-lit.net, www.enuresie-ado.forumactif.com).

Il faut enfin responsabiliser l’enfant : sa participation active est nécessaire : aide au changement des draps, tenue du calendrier mictionnel. Le féliciter quand il passe une nuit « sèche », et surtout, ne pas le punir. L’objectif n’est pas d’attendre que ça se passe mais d’accompagner activement son enfant et d’être patient.

S’informer de l’existence d’un condiv familial ou scolaire (changement d’école…) ayant pu favoriser la survenue du problème.

A propos de la prise en charge

Lors de la tenue du calendrier des nuits « sèches » et « mouillées » pour observer la progression de l’enfant : ne pas punir, ne pas récompenser (pas de cadeau) mais valoriser et encourager.

Système d’alarmes

Les systèmes d’alarme sont souvent peu connus des parents. Pourtant, selon l’ANAES (rapport de 2003), ils seraient plus efficaces à long terme que le traitement par desmopressine. Il est important de préciser que ces systèmes fonctionnent mieux chez les plus de 7 ou 8 ans car ils nécessitent une participation active de l’enfant.

Concernant le pipi-stop, des bandes de tissu de rechange peuvent être achetées auprès du répartiteur (dans le cas où l’enfant urinerait plusieurs fois la nuit). Ces bandes se lavent à l’eau savonneuse tout en maintenant le fil électrique hors de l’eau. Ne jamais tordre la bande, l’égoutter en la serrant entre deux serviettes.

Lors de la location ou de l’achat d’un appareil, bien se renseigner sur les tarifs (certains sont très onéreux !).

Traitement par desmopressine

Bien respecter la restriction hydrique 1 heure avant et 8 heures après la prise. Le médicament doit toujours être administré sous la surveillance d’un adulte. L’action est rapide mais il existe un risque de rechute.

PRÉVENTION

Il n’est pas possible de prévenir l’énurésie. C’est une affection fréquente (10 à 15 % des enfants de 5 à 6 ans) qui le plus souvent va guérir spontanément mais qui ne doit pas être négligée. L’énurésie devrait être abordée lors d’une consultation chez le médecin habituel de l’enfant, généraliste ou pédiatre, dès les premiers signes.

Délivreriez-vous ces ordonnances ?

Ordonnance 1 : NON. Le traitement par desmopressine pourrait éventuellement être repris mais son initiation doit se faire à faible posologie. Il est donc trop tard pour envisager un traitement par desmopressine à la posologie déterminée il y a 2 mois. Le fait de rassurer Jules, de mettre la maman de son ami dans la confidence (sans pour autant le dire au petit copain) peut suffire à éviter une énurésie.

Ordonnance 2 : OUI. Le Ditropan peut être délivré mais pas Primalan. En effet, Primalan (méquitazine) est un antihistaminique H1 de type phénothiazinique. Il possède donc des effets atropiniques qui vont venir s’additionner à ceux du Ditropan (bouche sèche, constipation, troubles de l’accommodation…). Conseiller au papa de Lou une consultation médicale pour instaurer un autre traitement.

Mémo-délivrance

Prise en charge

L’enfant a-t-il vraiment envie de ne plus faire pipi au lit ?

La motivation et l’implication de l’enfant (respect des règles hygiénodiététiques, tenue du calendrier mictionnel…) sont les conditions essentielles à la réussite du traitement.

Le problème peut-il s’arranger tout seul ?

Oui, le plus souvent. Mais il ne doit pas être négligé en raison des répercussions psychologiques (baisse de l’estime de soi), familiales et sociales.

Mesures hygiénodiététiques

L’intérêt du calendrier mictionnel est-il bien compris ?

Ce document permet au médecin de cibler le type d’énurésie. Et il permet à l’enfant de prendre conscience de son problème.

Les règles d’hygiène sont-elles appliquées ?

L’enfant doit bien boire dans la journée, mais réduire les boissons en soirée, aller régulièrement aux toilettes dans la journée, uriner avant le coucher. Supprimer par ailleurs les couches et tout ce qui infantilise l’enfant…

Les parents adoptent-ils un bon comportement ?

Dédramatiser la situation (il n’est pas le seul dans ce cas). Un enfant énurétique ne fait pas exprès : ne pas le gronder ni le culpabiliser, encore moins l’humilier. A l’inverse, le responsabiliser en le faisant participer au changement des draps du lit par exemple.

Que faire si l’enfant est invité à dormir en dehors de la maison ?

Mettre dans la confidence une personne (la maman du copain, le directeur de colonie…) pour que certaines mesures puissent être prises (alèses, proximité des toilettes…) et que l’enfant soit en confiance

Sous desmopressine

Les modalités de prise sont-elles connues ?

Administration le soir au coucher sous le contrôle des parents. Respecter la restriction hydrique : éviter toute prise de liquide au moins 1 heure avant et 8 heures après la prise du médicament. Le traitement est toujours initié à dose faible (120 µg), progressivement augmentée si nécessaire. Les comprimés de Minirinmelt se placent sous la langue.

Et les signes d’alerte ?

Augmentation du poids supérieure à 5 % sur un délai court, fatigue inhabituelle, céphalées, nausées voire vomissements, confusion… : ces signes peuvent indiquer une intoxication par l’eau avec hyponatrémie. Contacter le médecin.

Sous alarme

Le principe est-il compris et accepté ?

L’enfant (et/ou parfois les parents) est réveillé dès les premières gouttes d’urine et doit finir la miction aux toilettes. Petit à petit, il apprend à anticiper et à se réveiller avant la miction.

L’alarme est-elle bien branchée chaque soir ?

Une utilisation discontinue rend le dispositif inefficace.

Le cas

Théo, 8 ans, souffre d’énurésie nocturne. Depuis 3 mois, il utilise un système d’alarme, le pipi-stop, et bénéficie d’une prise en charge psychologique. Le système d’alarme utilisé seul n’ayant pas permis d’obtenir un résultat satisfaisant, le médecin a prescrit à Théo Minirinmelt qu’il prend depuis 1 mois à la posologie de 120 µg par jour.

Plan de prise conseillé

→ Minirinmelt : 1 lyoc à 60 µg et 1 à 120 µg sous la langue au moment du coucher. Stopper les boissons une heure avant la prise de Minirinmelt.

→ Pipi-stop : installer l’alarme tous les soirs au moment du coucher. Si l’enfant se mouille durant la nuit, changer la couche de tissu.

LES CHIFFRES

→ L’ENPI concerne 10 à 15 % des enfants de 5-6 ans (environ 2 à 3 enfants dans une classe de cours préparatoire).

→ Les garçons sont plus fréquemment concernés que les filles (environ 70 % des cas).

→ Les formes très sévères (plus de 3 nuits « mouillés » par semaine) représentent 30 % des cas.

→ Disparition spontanée du trouble à raison de 15 % par an.

Persistance chez environ 1 % des adolescents et 0,5 % des adultes.

ENCOPRÉSIE

Perte de perception de la réplétion de l’ampoule rectale, et donc du besoin d’aller à la selle, d’où des fuites de selles involontaires.

Physiopathologie

→ La forme polyurique serait associée à une inversion du cycle nycthéméral de la sécrétion de la vasopressine (ou ADH, hormone antidiurétique). Il existe en effet un pic physiologique nocturne d’ADH à l’origine de la baisse de la production des urines la nuit. Chez certains enfants énurétiques, la sécrétion nocturne d’ADH est insuffisante. La diurèse nocturne peut être évaluée en déterminant le poids de la couche mouillée et en ajoutant le volume mictionnel au réveil. Normalement, la diurèse nocturne est inférieure à la diurèse diurne.

→ La forme à faible capacité vésicale est évoquée en cas de mictions peu abondantes répétées. Ce type d’énurésie est généralement réfractaire à la desmopressine et s’accompagne dans 30 % des cas d’une hyperactivité nocturne du détrusor.

Autres troubles urinaires

→ Enurésie nocturne secondaire : l’enfant présente des mictions nocturnes involontaires à la suite d’une période de propreté d’au moins 6 mois. Un facteur déclenchant est souvent retrouvé (séparation des parents, naissance, changement d’école, d’instituteurs…).

→ Incontinence urinaire : les pertes d’urine sont involontaires, diurnes ou nocturnes et indépendantes du besoin d’uriner. Les mictions peuvent être anormales (rétention urinaire, mictions par regorgement). Elles peuvent être déclenchées par un effort, la toux, le port d’une charge…

→ Polyurie : elle est souvent le symptôme d’un diabète (de type 1 ou insipide) associé à une soif excessive. Elle correspond à l’augmentation de la diurèse quotidienne (en volume, pas en nombre de mictions).

→ Immaturité vésicale ou instabilité vésicale : il s’agit du trouble mictionnel fonctionnel le plus fréquent, surtout entre 5 et 8 ans. Il correspond à la persistance d’une vessie automatique infantile. Les contractions du détrusor persistent plus longtemps et surviennent pendant la phase de remplissage vésical, entraînant impériosités mictionnelles, fuites d’urine diurnes, pollakiurie et attitude en squatting. L’immaturité vésicale et la retenue forcée des urines qui en découle a pour conséquence une dyssynergie vésicosphinctérienne : l’enfant qui a appris à renforcer la contraction de son sphincter strié ne le relâche plus correctement pendant la miction, au risque d’une vidange incomplète. Les mictions, au début trop fréquentes, deviennent trop espacées : l’enfant adopte un comportement « rétentionniste ». Les risques sont alors l’infection urinaire et le reflux vésico-urétéral.

→ Les malformations urologiques : l’abouchement ectopique de l’uretère, les valves de l’urètre postérieur, les sténoses du méat urétral entraînent des troubles mictionnels divers.

→ La vessie neurologique : elle est secondaire à une affection congénitale (spina bifida) ou acquise (traumatisme ou tumeur).

DÉTRUSOR

Muscle lisse de la vessie sous la dépendance du système neurovégétatif.

POLLAKIURIE

Augmentation de la fréquence des mictions sans augmentation du volume des urines.

SQUATTING

L’enfant se dandine, se trémousse sur son siège, croise les jambes, comprime son périnée. Il cherche coûte que coûte à contrôler ses mictions.

Ce qui a changé

→ Apparu

Depuis 2006, la desmopressine sous forme de lyophilisat oral (Minirinmelt), d’efficacité équivalente à la forme comprimé et permettant une prise sans eau du comprimé pour respecter la restriction hydrique.

Depuis 2009, un consensus d’experts précise la stratégie thérapeutique à adopter en fonction des 2 types principaux d’ENPI. Cette nouvelle stratégie thérapeutique devrait tendre à harmoniser la prise en charge de l’ENPI. Jusqu’à présent, bien souvent le traitement était choisi à l’issue d’une discussion avec l’enfant et les parents tenant compte de l’âge de l’enfant, du problème du coût et du maniement de l’alarme, de l’a priori sur la prise des médicaments.

→ Disparu

Depuis avril 2006, la desmopressine sous forme nasale ne dispose plus de l’indication « énurésie nocturne isolée ». Bien que rares, dans 96 % des cas les effets secondaires notifiés (céphalées, vomissements, convulsions) concernaient la forme nasale, probablement en raison d’un maniement difficile exposant à un risque de surdosage. La forme nasale ne doit donc jamais être délivrée dans l’indication ENPI.

POTOMANIE

Trouble du comportement alimentaire qui se caractérise par un besoin permanent de boire.

Vigilance !

Certaines contre-indications et précautions d’emploi sont à connaître.

Desmopressine : enfants de moins de 6 ans, insuffisance rénale modérée ou sévère, hyponatrémie, polydipsie ou potomanie, patients incapables de respecter la restriction hydrique, état pathologique nécessitant un traitement par diurétique. Par ailleurs, la desmopressine ne doit pas être administrée en cas de fièvre, de diarrhée ou de vomissements, d’épisode infectieux (risque de désordres électrolytiques).

Antidépresseurs tricycliques et oxybutynine : enfants à risque de rétention urinaire, d’occlusion intestinale. Les autres contre-indications ne concernent a priori pas les enfants (risque de glaucome par fermeture de l’angle, infarctus du myocarde récent…). Par ailleurs, l’oxybutynine n’est pas recommandée avant l’âge de 5 ans et les tricycliques sont contre-indiqués avant 6 ans.

Point de vue

« Une consultation médicale est essentielle avec un système alarme »

Peut-on accéder à la demande de parents souhaitant un système d’alarme sans avoir de prescription ?

Non. La consultation médicale (médecin généraliste, pédiatre) est essentielle pour cibler le type d’énurésie et éliminer une pathologie plus sérieuse sous-jacente. Ensuite, elle permet de déterminer le degré de motivation des parents et de l’enfant, qui conditionne en grande partie la réussite du traitement. Pour ce faire, le calendrier mictionnel est très révélateur. Un enfant qui revient avec un calendrier mal tenu ou mal rempli indique qu’il n’est probablement pas prêt à suivre un traitement par alarme ou médicament. Enfin, le système par alarme nécessite tout un accompagnement pour éviter les déceptions. Il faut informer l’enfant et les parents sur le principe (les premières nuits, l’enfant se réveille difficilement et il aura besoin d’aide) et le délai nécessaire à l’obtention des premiers résultats (au minimum deux semaines).

En plus de la restriction hydrique, d’autres conseils sont-ils préconisés sous desmopressine ?

Oui. En fin de journée, il est conseillé de limiter toutes les substances hyperosmolaires favorisant une polyurie : laitages (sels de calcium), boissons gazeuses ou sucrées ou encore aliments très salés. Concernant la restriction hydrique, il s’agit de répartir différemment les apports : augmenter franchement les apports le matin et en début de journée et réduire en fin de journée, alors que la majorité des enfants fait l’inverse.

Pr DIDIER AUBERT, service de chirurgie et urologie pédiatrique, hôpital Saint-Jacques de Besançon

Témoignage

CAMILLE, 9 ANS, EN CM1, GUÉRIE D’UNE ÉNURÉSIE

« Ce qui m’énervait le plus c’était de me lever plus tôt, d’avoir à prendre ma douche le matin, de changer mes draps. Ma maman se fâchait tout le temps, me disait que c’était les bébés qui faisaient pipi au lit. En plus, ma petite sœur ne faisait plus pipi au lit la nuit. Quand j’allais dormir chez mes copines, j’attendais que tout le monde soit couché et je mettais ma couche en cachette. Je n’aimais pas qu’on en parle. J’en avais parlé à ma meilleure copine mais quand on se disputait elle me traitait de bébé. J’ai essayé le médicament à sucer. C’était dégoûtant mais ça a marché très vite, en trois jours, mais quand j’ai dû arrêter j’ai recommencé à faire pipi au lit. Quand on m’a proposé la machine, j’ai dit à maman que j’étais prête à tout essayer pourvu que ça marche. La première nuit je n’ai rien entendu, c’est ma maman qui m’a réveillée. La deuxième nuit je me suis réveillée quand ça sonnait. Ça faisait tellement de bruit, ça me faisait tellement mal aux oreilles, j’avais tellement peur de déranger les autres que les nuits suivantes je me suis réveillée avant que l’alarme ne sonne. Depuis, je ne fais plus pipi au lit. Je me sens plus grande maintenant, je ne suis plus un bébé et surtout j’ai plus de temps pour dormir le matin. Aux autres enfants qui ont ce problème j’aimerais dire que c’est possible d’arrêter de faire pipi au lit. »

Question de parents « Mon médecin m’a parlé des systèmes d’alarme. Je ne suis pas convaincu et cela m’a l’air barbare ! »

Non, ces systèmes ne sont ni barbares ni traumatisants, à condition que le principe de fonctionnement soit bien expliqué à l’enfant (et aux parents) et que l’enfant soit motivé. Ils constituent le moyen pour lui d’apprendre à se réveiller et à devenir indépendant.

Question de parents « Kelvin a bientôt 5 ans et il fait toujours pipi au lit ! On m’a dit qu’il était possible de louer des systèmes d’alarme. Je pourrais peut-être essayer ? »

Pour l’instant, Kelvin est trop jeune. Une prise en charge ne s’envisage qu’à partir de l’âge de 6 ans, même pour les systèmes d’alarme. En attendant, il ne faut surtout pas le punir mais au contraire lui expliquer que ce n’est pas de sa faute. Il a sans doute un sommeil profond. Vous devriez en parler à la pédiatre ou au médecin qui suit Kelvin. Il va lui donner (et vous donner) des conseils. Le problème peut encore s’arranger tout seul.

En savoir plus

Association

Association d’aide aux personnes incontinentes, www.aapi.asso.fr

L’association vise à informer toutes les personnes incontinentes (adultes, enfants). Sur le site, des brochures sont à télécharger (réservées aux adhérents). En accès libre, l’onglet « Conseil pratique » met en avant des astuces en cas de séjour loin de la maison.

Livre

« Des nuits sèches pour Victor – Victor fait pipi au lit », Dr Henri Lottmann, Dr Nadia Lahlou, éditions Medi-text, 2003

Au fil des 12 pages et sur un ton simple, l’énurésie nocturne primaire isolée et ses solutions sont expliquées à l’enfant.

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