L’adénome de la prostate - Le Moniteur des Pharmacies n° 2830 du 08/05/2010 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2830 du 08/05/2010
 

Cahiers Formation du Moniteur

Ordonnance

Une prescription à la loupe

Des troubles urinaires de plus en plus gênants

RECEPTION DE L’ORDONNANCE

Pour qui ?

Monsieur Pierre P,. 67 ans, 80 kg.

Par quel médecin ?

Son médecin généraliste.

L’ordonnance est-elle recevable ?

Oui.

QUEL EST LE CONdiv DE L’ORDONNANCE ?

Que savez-vous du patient ?

M. P. est un patient retraité qui fréquente depuis plusieurs années l’officine. Il est suivi régulièrement par son ophtalmologiste pour son glaucome à angle ouvert et par son généraliste pour son hypertension artérielle et, plus récemment, pour une hypertrophie bénigne de la prostate.

Quel était le motif de consultation ?

Le patient a pris rendez-vous avec son médecin généraliste pour le renouvellement de son traitement antihypertenseur. Il profite de cette consultation pour évoquer ses troubles mictionnels qui le gênent de plus en plus dans sa vie quotidienne.

Ce que le médecin a dit au patient

Le médecin a tout d’abord demandé à monsieur P. s’il prenait bien son traitement pour ses troubles prostatiques. Après confirmation par le patient, le médecin a prescrit, en complément d’Avodart, un autre médicament (Josir) dont le mécanisme d’action est différent.

Vérification de l’historique du patient

En consultant le dossier patient de M. P., le pharmacien constate que ce dernier est bien observant vis-à-vis de ses traitements.

Le patient est également traité par Cosopt pour son glaucome à angle ouvert. Ce collyre est une association de dorzolamide (inhibiteur de l’anhydrase carbonique) et d’un bêtabloquant (timolol).

LA PRESCRIPTION EST-ELLE COHÉRENTE ?

Que comporte la prescription ?

La prescription comporte Amlor (amlodipine), antihypertenseur de la classe des inhibiteurs calciques, et deux médicaments pour l’hypertrophie bénigne de la prostate : Avodart (dutastéride), un inhibiteur de la 5-alpharéductase, et Josir (tamsulosine), un alpha-1-bloquant.

Est-elle conforme aux référentiels ?

QU’EN PENSEZ-VOUS

L’association Avodart-Josir

1 est illogique et n’a pas lieu d’être prescrite

2 est possible

Les références médicales opposables de 1998 (JO du 14.11.1998) indiquaient qu’il n’y a pas lieu d’utiliser l’association de deux médicaments ou plus pour traiter les troubles mictionnels de l’hypertrophie prostatique bénigne.

En 2003, une étude a démontré que l’association finastéride-alphabloquant est supérieure à l’utilisation d’un alphabloquant seul ou d’un inhibiteur de la 5-alpharéductase seul. Une bithérapie de ce type est ainsi envisageable en cas de symptômes sévères non contrôlés par une monothérapie. En 2009, le résumé des caractéristiques du produit d’Avodart a été modifié : il est désormais précisé que ce médi­cament peut être associé avec l’alphabloquant tamsulosine (réponse 2). La tamsulosine agit par blocage des récepteurs alpha-1α, récepteurs spécifiques de la prostate. Ce blocage sélectif permettrait d’éviter les effets indésirables vasculaires, notamment de type hypotension orthostatique.

Y a-t-il des médicaments à marge thérapeutique étroite ?

Non.

Y a-t-il des contre-indications pour ce patient ?

Il n’y a pas de contre-indication physiopathologique. Comme il s’agit d’un patient âgé, il est toujours intéressant de pouvoir appréhender la fonction rénale par l’évaluation de la clairance de la créatinine. Dans le cas de M. P. cette donnée n’est pas connue. Mais cela est sans conséquence puisque aucun des médicaments prescrits ne nécessite une adaptation posologique en cas d’insuffisance rénale.

Les posologies sont-elles cohérentes ?

Oui.

La prescription pose-t-elle problème ?

Non.

Y a-t-il des interactions ?

→ Il existe une interaction médicamenteuse de niveau « A prendre en compte » entre Amlor et le bêtabloquant (timolol) présent dans le collyre et qui peut diffuser dans la circulation sanguine : ces deux traitements majorent le risque d’hypotension. Manifestement, M. P. ne se plaint pas de symptômes de type sensations vertigineuses, fatigue, sueurs.

→ La prescription de Josir introduit un risque supplémentaire d’hypotension. La prudence s’impose chez les sujets traités par des médicaments antihypertenseurs, dont les antagonistes calciques comme Amlor. Il convient de tenir compte de la potentialisation qui peut en résulter et de réduire la posologie des antihypertenseurs en conséquence. Monsieur P. reçoit déjà la plus faible posologie d’Amlor.

Le traitement requiert-il une surveillance particulière ?

Non.

QUELS CONSEILS DE PRISE DONNER ?

Concernant Josir LP

Il s’agit d’un nouveau traitement pour lequel des conseils sont à donner.

Modalités de prise

Les gélules doivent être avalées avec un verre d’eau sans être croquées ni mâchées sous peine d’interférer sur la libération prolongée du médicament.

QU’EN PENSEZ-VOUS

La prise de Josir LP

1 doit se faire le matin à jeun

2 doit avoir lieu à heure fixe, de préférence le matin à la fin d’un petit déjeuner consistant

Il est recommandé de les prendre à heure fixe, de préférence à la fin d’un petit déjeuner consistant ou, à défaut, à la fin d’un autre repas (réponse 2).

Quand commencer le traitement ?

Le patient commencera son traitement le lendemain matin après le petit déjeuner.

Que faire en cas d’oubli ?

Ne pas doubler la prise. Continuer le traitement le jour suivant en respectant la prise à heure fixe.

Le patient pourra-t-il juger de l’efficacité du traitement ?

Les alphabloquants agissent rapidement : le patient pourra juger de l’efficacité du traitement dans les jours qui viennent. La réponse au traitement sera évaluée par le médecin dans 3 mois.

Quels sont les effets indésirables ?

Chez M P., déjà sous Amlor et collyre bêtabloquant, l’introduction d’un alphabloquant (tamsulosine) majore le risque d’hypotension sévère. Le vieillissement augmente encore ce risque car, au-delà de 65 ans, les barorécepteurs qui régulent la pression artérielle sont moins efficaces.

D’autres effets indésirables peuvent être observés : étourdissement et troubles de l’éjaculation (anéjaculation).

Quels sont ceux gérables à l’officine ?

Le patient doit être clairement informé du risque d’hypotension orthostatique qui peut survenir – surtout en début de traitement – mais qui n’empêche pas sa poursuite. En cas de symptômes annonciateurs d’hypotension orthostatique (sensations vertigineuses, étourdissements, faiblesse), le patient devra se mettre en position assise ou allongée jusqu’à leur disparition complète.

Quels signes nécessiteraient d’appeler le médecin ?

Des étourdissements, des vertiges ou des malaises trop fréquents doivent alerter. Le pharmacien doit faire prendre conscience à monsieur P. qu’il ne doit pas banaliser ces pertes d’équilibre. Toute chute, même bénigne, doit être signalée au médecin traitant. Elle peut avoir pour cause l’un de ces traitements, qui devra alors être reconsidéré. Par ailleurs, le patient doit consulter son médecin devant toute aggravation des signes urinaires.

Suivi biologique

Pas de suivi particulier pour l’adénome de la prostate.

Demande du patient

Le patient explique que ses troubles urinaires sont devenus particulièrement gênants.

– J’ai souvent envie d’uriner de façon urgente et subite. Cela provoque parfois la perte involontaire de gouttes d’urine. C’est très handicapant !

– C’est en raison de l’aggravation de ces troubles que le médecin vous a prescrit un second médicament. En attendant qu’il agisse, je peux vous montrer des protections qui se fixent dans le slip par un adhésif et qui éviteront, dès à présent, les désagréments des fuites urinaires incontrôlées. Ces absorbants* ont des formes qui épousent l’anatomie, ce qui assure confort et discrétion.

– Parfait. Montrez-moi ce que vous avez !

Concernant le reste du traitement

Efficacité du traitement

Vérifier avec le patient ses chiffres tensionnels. M. P. précise que le médecin a contrôlé sa tension et qu’il est satisfait de l’efficacité d’Amlor.

Effets indésirables

Les traitements de M. P. justifient la surveillance d’une éventuelle hypotension orthostatique. Il est donc logique de lui demander si le médecin a évalué le risque d’hypotension orthostatique : en pratique, le patient est laissé allongé 5 minutes, puis la pression artérielle est mesurée à plusieurs reprises dans les 3 minutes qui suivent le lever. La Haute Autorité de santé recommande la recherche systématique de cette hypotension orthostatique chez le sujet âgé.

Rechercher également les effets indésirables classiques sous Amlor : « Avez-vous ressenti des sensations de chaleur à la face ou un œdème des chevilles ? »

Avodart peut entraîner une diminution de la libido et des troubles de l’érection ainsi que des vertiges.

Suivi biologique

Une surveillance biologique au moins 2 fois par an est recommandée chez le sujet hypertendu de plus de 65 ans (créatinine, kaliémie, natrémie notamment).

Observance

Elle est bonne ?: le patient vient chercher régulièrement ses médicaments.

Modalités de prise

Concernant Amlor

Aucune modalité de prise particulière n’est préconisée.

Concernant Avodart

Pour Avodart (dutastéride), les capsules doivent être avalées entières car le contenu de la capsule peut entraîner une irritation de la muqueuse oropharyngée. Par ail­leurs, le dutastéride étant absorbé au niveau cutané, tout contact avec des capsules endommagées doit être évité (en particulier pour les femmes enceintes). Les inhibiteurs de la 5-alpharéductase peuvent en effet entraîner des anomalies des organes génitaux externes chez le fœtus mâle. En cas de contact accidentel, la zone doit être lavée à l’eau et au savon.

L’ordonnance précise qu’Avodart doit être pris le soir. Afin de faciliter l’observance du traitement, il n’y a aucun inconvénient à prendre ce médicament le matin. Le patient pourra s’il le désire prendre Josir, Avodart et Amlor tous les matins, à heure fixe, au petit déjeuner.

CONSEILS COMPLÉMENTAIRES

Le pharmacien peut rappeler à M. P. qu’il doit systématiquement informer les professionnels de santé de son traitement pour l’adénome de la prostate lorsqu’il demande un conseil médicamenteux, même pour une pathologie d’apparence bénigne (rhume, conjonctivite…).

Il est important de maintenir un apport hydrique suffisant dans la journée pour éviter les infections urinaires (1,5 litre d’eau par jour). Concernant le risque de cancer, le pharmacien doit rassurer le patient : adénome et cancer sont deux pathologies distinctes. Toutefois, en cas d’aggravation de la pathologie, lorsque le patient est suivi par un médecin généraliste, il peut être utile de lui conseiller de consulter un urologue pour un bilan urinaire complet. Les associations d’urologue conseil­lent un dosage du taux de PSA tous les ans (mais cette recommandation est controversée).

Pathologie

L’adénome de la prostate en 6 questions

L’hypertrophie bénigne de la prostate ou adénome de la prostate est une affection non cancéreuse dont l’incidence est liée à l’âge. D’évolution progressive, elle provoque des troubles urinaires chez plus d’un homme sur deux après 60 ans.

L’hypertrophie bénigne de la prostate est liée à une hyperplasie du tissu prostatique pouvant être à l’origine d’une compression de l’urètre.

QUELS SONT LES SIGNES CLINIQUES ?

Troubles urinaires

La pathologie peut être silencieuse pendant des années et le rester. L’apparition d’éventuels symptômes correspond à la compression progressive de l’urètre. Regroupés sous le terme de « troubles urinaires du bas appareil » (TUBA), les signes peuvent être classés en deux catégories.

→ Les troubles urinaires irritatifs, très gênants pour le patient, constituent souvent le premier motif de consultation : pollakiurie diurne et/ou nocturne (augmentation anormale du nombre de miction qui est normalement compris entre 0 et 1 la nuit, 4 et 5 le jour), envies impérieuses d’uriner éventuellement accompagnées de fuites urinaires et parfois provoquées par certaines situations (croisement des jambes, marche dans le froid…).

→ Les troubles urinaires obstructifs, à l’obstacle mécanique (augmentation du volume de la prostate), gênent progressivement la contraction des muscles et la vidange de la vessie : dysurie (difficulté à initier le jet, jets intermittents, nécessité de forcer pour évacuer le contenu de la vessie), diminution de la force du jet, gouttes retardataires.

Autres signes

Des signes non urinaires, hernies inguinales ou hémorroïdes, peuvent également apparaître quand le patient compense en « poussant » avec les muscles abdominaux lors de la miction.

QUELS SONT LES FACTEURS DE RISQUE ?

En dehors de l’âge, fortement lié à la prévalence de l’adénome, aucun facteur de risque n’a été formellement démontré.

COMMENT SE FAIT LE DIAGNOSTIC ?

→ L’interrogatoire permet d’identifier des symptômes évocateurs chez un patient de plus de 50 ans (qualité du jet, mictions nocturnes, impériosités ou besoin pressant d’uriner…) et toute autre cause de troubles urinaires (diabète, antécédent d’AVC…).

→ L’examen clinique des organes génitaux externes recherche une hernie ou une distension vésicale palpable. Le toucher rectal permet d’apprécier la taille, la consistance, la symétrie de la prostate.

→ En cas d’hypertrophie bénigne de la prostate diagnostiquée, le bilan initial comprend :

– un questionnaire standardisé, qui évalue le retentissement des signes urinaires (TUBA). Le score international symptomatique de la prostate est établi en évaluant l’intensité et la fréquence des symptômes urinaires et des levers nocturnes. Selon les résultats (score de 0 à 35), la symptomatologie est classée comme légère, modérée ou sévère. La qualité de vie globale (ou gêne ressentie) est aussi évaluée sur une échelle de 1 à 6 ;

– une échographie vésicoprostatique et rénale par voie sus-pubienne, pour mesurer la taille de la prostate, le résidu urinaire après miction, et recherche d’éventuels calculs vésicaux ou une dilatation rénale ;

– le dosage du taux de PSA, systématique, pour détecter un éventuel cancer de la prostate coexistant. Il n’a aucune valeur pour le diagnostic ou le suivi de l’adénome. Le PSA est spécifique du tissu prostatique mais pas du cancer de la prostate : sa valeur peut être augmentée dans toute affection prostatique, prostatite et adénome compris. La valeur normale supérieure varie selon l’âge mais se situe autour de 4 ng/ml. Si le taux est inférieur à 4 ng/ml avec un toucher rectal normal, le diagnostic de cancer est a priori écarté. Si le taux est supérieur à 10 ng/ml en dehors d’un épisode infectieux (prostatite), c’est une indication systématique à des biopsies pour rechercher un éventuel cancer. Si le taux se situe entre 4 et 10 ng/ml avec un toucher rectal normal, on mesure le ratio PSA libre/PSA total. Un taux de PSA libre diminué correspond à un risque accru de cancer. Un ratio PSA libre/PSA total inférieur à 15 % permet de détecter environ 90 % des cancers, ce qui diminue le risque de biopsies inutiles ;

– le dosage de la créatinine, à la recherche une éventuelle insuffisance rénale ;

– un test par bandelette urinaire, afin de vérifier la stérilité des urines. Un ECBU est indiqué en cas de signes d’infections urinaires ou d’hématurie.

→ Des examens complémentaires peuvent être prescrits pour écarter d’autres affections et affiner le diagnostic (débitmétrie qui mesure la durée, le volume et le débit de la miction, uroscanner…).

QUELLE EST L’ÉVOLUTION ?

L’évolution des symptômes est très inégale selon les individus. Certains n’auront qu’une gêne minime toute leur vie. Mais le plus souvent, en l’absence de traitement, la maladie s’aggrave progressivement.

QUELLES SONT LES COMPLICATIONS ?

L’hypertrophie bénigne de la prostate expose à certaines complications.

→ La rétention aiguë d’urine est la plus redoutée : elle nécessite un sondage vésical en urgence. Cette complication peut apparaître d’emblée et révéler l’adénome prostatique.

→ Les infections urinaires sont favorisées par la stase vésicale.

→ Lorsque l’obstruction est importante, des mictions par regorgement peuvent apparaître, éventuellement accompagnées d’incontinence urinaire.

→ La stase urinaire favorise l’apparition de calculs vésicaux.

→ L’épaississement du muscle vésical (lié à l’obstruction) aboutit à une « vessie de lutte », avec pour conséquence la formation de trabéculations ou de diverticules.

→ A un stade évolué, l’hyperpression constante de la vessie retentit sur les uretères et les reins et peut aboutir à une insuffisance rénale.

QUELLE EST LA SURVEILLANCE ?

La surveillance repose essentiellement sur l’évolution des troubles ressentis par le patient. En l’absence d’aggravation, une consultation annuelle est recommandée.

Selon les médecins, un ECBU et/ou un test sur bandelette urinaire est pratiqué ainsi qu’un dosage du taux de PSA. Ce dernier est recommandé par les associations d’urologues à partir de 50 ans (45 ans si antécédents familiaux) et jusqu’à 75 ans. L’échographie vésicoprostatique est indiquée tous les 2 ou 3 ans.

Thérapeutique

Comment traiter l’adénome de la prostate ?

En dehors des indications de la chirurgie, la mise en place d’un traitement médicamenteux (extraits de plantes, alphabloquants et inhibiteurs de la 5-alpharéductase) dépend surtout de la gêne occasionnée. Dans tous les cas, une discussion patient-médecin est primordiale pour décider du traitement le plus adapté.

STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE

→ Les conséquences cliniques de l’hypertrophie bénigne prostatique étant très variables d’un individu à l’autre, la stratégie thérapeutique offre plusieurs alternatives : de la simple surveillance sans traitement pharmacologique au traitement chirurgical en passant par le traitement médicamenteux. La chirurgie est plutôt conseillée en cas de complications et la simple surveillance en l’absence de gêne urinaire importante. Des mesures générales comme d’éviter l’absorption de grandes quantités de liquide le soir peuvent être utiles.

→ Dans tous les cas, si la mise en route d’un traitement se justifie, le choix de la classe médicamenteuse est décidé en accord avec le patient. L’objectif étant d’améliorer le confort du patient et sa qualité de vie tout en prévenant les complications éventuelles.

→ Les patients ont généralement tendance à aller vers le traitement le moins agressif et le moins susceptible d’entraîner des complications, même si son efficacité est moindre.

Symptômes légers

La simple surveillance se justifie lorsque les symptômes sont légers (voir « Pathologie » page 7) et en l’absence de complication. L’évaluation de leur retentissement sur la qualité de vie du patient et la vérification de l’absence de complications par un interrogatoire sont réalisées au cours d’un examen clinique annuel.

Symptômes gênants

→ Lorsque la gêne occasionnée par l’hypertrophie est jugée modérée par le patient, et en l’absence de toute complication, l’alternative de choix est le traitement médicamenteux.

→ Trois classes pharmacologiques peuvent être utilisées : alpha-1-bloquants, inhibiteurs de la 5-alpharéductase et extraits de plantes. Toutes ont une efficacité qualifiée de modérée par l’Afssaps.

→ Les alpha-1-bloquants sont un peu plus efficaces que les inhibiteurs de la 5-alpharéductase en ce qui concerne l’amélioration des symptômes. Mais les deux classes n’ont pas été comparées entre elles en ce qui concerne la prévention des complications.

→ Les inhibiteurs de la 5-alpharéductase sont surtout efficaces lorsque le volume prostatique est supérieur à 40 ml, la normale étant aux alentours de 20 ml. Ils trouvent également une place chez les sujets chez qui les alpha-1-bloquants n’ont pas été efficaces ou sont mal supportés. Leur délai d’action est plus long (3 à 6 mois) que celui des alpha-1-bloquants (2 à 4 semaines).

→ Les extraits de plantes bénéficient d’une excellente tolérance et font l’objet d’études ayant démontré leur efficacité. Permixon et Tadenan, les deux médicaments commercialisés de cette classe, sont jugés similaires en termes d’efficacité et comparables aux alpha-1-bloquants et inhibiteurs de la 5-alpharéductase sur le débit urinaire maximal et les scores symptomatiques.

→ Le profil de tolérance des molécules est également un des critères de choix. Les alpha-1-bloquants sont à l’origine de sensations vertigineuses, d’hypotensions orthostatiques et de troubles de l’éjaculation. Les inhibiteurs de la 5-alpharéductase entraînent des troubles essentiellement sexuels de type troubles de l’érection, baisse de la libido ou encore troubles de l’éjaculation. Les extraits de plantes sont bien tolérés et entraînent peu d’effets indésirables.

→ L’efficacité du traitement est évaluée 3 à 6 mois après son instauration. Si le patient n’est pas soulagé, un changement de thérapie est effectué au sein de la même classe thérapeutique ou d’une autre classe. L’association médicamenteuse d’un alpha-1-bloquant et d’un inhibiteur de la 5-alpharéductase (finastéride-doxazosine et dutastéride-tamsulosine) peut s’avérer utile en cas d’échec d’une monothérapie.

Symptômes très gênants ou complications

→ Le traitement peut être médical ou chirurgical.

→ Les traitements chirurgicaux sont indispensables en cas de complications de type rétention aiguë d’urine, infections urinaires récidivantes, lithiase vésicale, diverticules vésicaux symptomatiques, rétention chronique d’urine avec mictions par regorgement pouvant conduire à une insuffisance rénale obstructive. Ils sont également justifiés en présence de signes fonctionnels invalidants malgré un traitement médical bien suivi.

Parmi les trois techniques chirurgicales proposées, la résection endoscopique transurétrale reste la technique de référence : l’adénome est retiré en laissant la coque prostatique. Cette technique entraîne dans 80 % des cas une éjaculation rétrograde et le risque de réintervention est de 2 % par an.

→ L’incision cervicoprostatique est recommandée pour les prostates de faible volume (inférieur à 40 ml). Elle entraîne une éjaculation rétrograde dans 25 % des cas, et le taux de réintervention est de 25 % à 3 ans.

→ L’adénomectomie prostatique par voie sus-pubienne est envisagée pour les adénomes très volumineux (supérieurs à 60-100 ml). Les effets indésirables sont identiques à ceux observés au cours d’une résection transurétrale.

→ Pour ces techniques, le risque d’incontinence postopératoire est de 1 ?%.

→ La thermothérapie par radiofréquence est une alternative au traitement chirurgical, offrant à un an des scores de symptômes inférieurs à la résection transurétrale, mais avec moins d’effets indésirables.

LES TRAITEMENTS MÉDICAUX

Alpha-1-bloquants

Cette classe médicamenteuse regroupe l’alfuzosine (Xatral, Urion), la doxazosine (Zoxan), la tamsulosine (Josir, Omix, Mecir, Omexel), la térazosine (Dysalfa, Hytrine) et la prazosine (Minipress).

Mécanisme d’action

Les alpha-1-bloquants agissent par blocage des récepteurs alpha-1 stimulés par les catécholamines endogènes. Ils entraînent ainsi une relaxation du col vésical et des fibres musculaires lisses intraprostatiques. Ils agissent essentiellement sur la composante dynamique de l’obstacle prostatique, améliorant à la fois les symptômes mictionnels et le débit urinaire. Ils n’ont pas d’effet sur le volume de la prostate. D’autres mécanismes d’action sont avancés, leur conférant une éventuelle activité dans l’apoptose prostatique et dans la diminution de la progression de l’hypertrophie par inhibition de la production de facteurs de croissance.

Efficacité

→ Ces médicaments n’ont qu’un effet limité sur les scores et les paramètres urodynamiques et n’ont pas d’influence sur les complications. Les bénéfices apparaissent rapidement dans les 2 à 4 semaines suivant l’initiation du traitement et persistent durant plusieurs années. Il n’existe pas d’étude permettant de mettre en évidence une différence d’efficacité sur le plan symptomatique entre les différents principes actifs de la classe.

→ L’alfuzosine se démarque des autres médicaments de la classe dans la mesure où elle a obtenu l’AMM en traitement adjuvant du sondage vésical dans la rétention aiguë d’urine compliquant l’hypertrophie bénigne prostatique.

Effets indésirables

→ L’absence de sélectivité de ces médicaments les fait agir aussi sur les récepteurs alpha-1 situés sur le cœur et la paroi des vaisseaux. Ainsi, leur effet indésirable le plus fréquent est l’hypotension orthostatique, qui peut se révéler invalidante, notamment chez le sujet âgé. D’autres effets indésirables peuvent être observés, de type vertiges, palpitations, rhinite, fatigue ou sédation. Ces effets indésirables étant dose-dépendants et pouvant toucher jusqu’à 15 % des patients traités, il est indispensable de commencer le traitement à faible dose puis de l’augmenter progressivement. Les formes à libération prolongée donnent des taux plasmatiques plus constants et offriraient un meilleur profil de tolérance.

→ La tamsulosine bloque spécifiquement les récepteurs alpha-1α au niveau de la prostate : elle permettrait de limiter les effets secondaires vasculaires telles obstruction nasale, asthénie ou hypotension orthostatique. Toutefois, des troubles de l’éjaculation de type anéjaculation peuvent survenir avec cette molécule.

Inhibiteurs de la 5-alpharéductase

Deux molécules sont utilisées : finastéride (Chibro-Proscar) et dutastéride (Avodart).

Mécanisme d’action

Les inhibiteurs de la 5-alpharéductase agissent en inhibant la synthèse de la dihydrotestostérone (DHT), androgène impliqué dans la croissance prostatique. Ainsi, le finastéride fait chuter le taux de DHT de 70 % dans le sang, sans affecter le taux de testostérone, essentiel pour le maintien de la libido et d’une fonction sexuelle normale. La baisse de concentration en DHT provoque un arrêt de croissance du tissu prostatique tant normal qu’hyperplasique, objectivé par une baisse du PSA.

Efficacité

Les inhibiteurs de la 5-alpharéductase sont surtout efficaces lorsque le volume prostatique est supérieur à 40 ml, la normale étant aux alentours de 20 ml. Cet effet thérapeutique apparaît lentement, après environ 3 à 6 mois de traitement. S’ils ont un effet très limité sur les symptômes (amélioration du débit urinaire de 1 à 2 ml/seconde correspondant aux variations journalières normales), ils peuvent diminuer les complications pouvant survenir chez les sujets dont la prostate est fortement hypertrophiée. Cependant, cette amélioration n’est que de 1 à 4 points sur une échelle qui en compte 35. Aucune différence d’efficacité n’est retrouvée entre les deux principes actifs commercialisés de cette classe. Un traitement d’au moins 6 mois peut-être nécessaire pour obtenir une réponse optimale.

Effets indésirables

→ Les effets indésirables les plus fréquents sont essentiellement de type androgènes, se manifestant par l’apparition de troubles de l’érection et de l’éjaculation, une diminution de la libido, une gynécomastie ou des éruptions cutanées.

→ Les deux représentants de cette classe étant tératogènes et retrouvés dans le sperme, il convient d’utiliser un préservatif avec une partenaire enceinte ou susceptible de l’être. Dans tous les cas, il convient d’éviter tout contact avec des capsules ou des comprimés endommagés. Si c’est le cas, la zone de contact doit être immédiatement lavée à l’eau et au savon.

→ Par ailleurs, ces médicaments abaissant le taux de PSA, marqueur du cancer de la prostate, d’environ 50 %, il faut en tenir compte dans l’interprétation des dosages biologiques : chez les patients traités par 5-alpharéductase, le taux de PSA doit être multiplié par deux pour pouvoir être interprété par rapport aux valeurs de référence des hommes non traités.

Extraits de plantes

Les traitements phytothérapiques sont indiqués dans le traitement des troubles mictionnels modérés liés à l’hypertrophie bénigne de la prostate.

Serenoa repens (Permixon) et Pygeum africanum (Tadenan) sont les deux médicaments commercialisés.

Mécanisme d’action

→ La principale action mise en avant est antiproliférative (inhibition de l’action des facteurs de croissance des cellules prostatiques).

→ Les études menées in vitro sur Serenoa repens (palmier nain) ont rapporté par ailleurs une inhibition non compétitive de la 5-alpharéductase ainsi qu’un effet anti-inflammatoire (inhibition de la formation de prostaglandines et de leucotriènes). D’autres études auraient rapporté un effet antiestrogène par diminution de la dihydrotestostérone intraprostatique.

→ Pygeum africanum inhibe in vitro la prolifération des fibroblastes prostatiques et aurait une activité anti-inflammatoire en inhibant notamment la production de leucotriènes.

Efficacité

→ La plupart des études ayant permis de juger l’efficacité des traitements phytothérapiques ont été menées à partir de l’extrait de Serenoa repens.

→ Par rapport au placebo, il améliore le score des symptômes urinaires et les symptômes et paramètres urodynamiques. Les deux médicaments sont jugés similaires en termes d’efficacité et comparables aux alpha-1-bloquants et inhibiteurs de la 5-alpharéductase sur le débit urinaire maximal et les scores symptomatiques.

Effets indésirables

Ces médicaments sont très bien tolérés. Des troubles gastro-intestinaux peuvent parfois survenir.

TRAITEMENTS CHIRURGICAUX

Ils concernent 20 à 30 % des cas.

Résection endoscopique transurétrale

La résection endoscopique transurétrale (RETU) est la technique la plus fréquemment pratiquée et le traitement de référence chez les patients présentant des symptômes sévères ou des complications. Elle réduit la sévérité des troubles urinaires et augmente le débit urinaire maximal.

Le geste consiste à introduire par l’urètre un résecteur qui va raboter l’adénome, laissant en place la capsule prostatique. Une très nette amélioration des symptômes est observée chez 80 % des patients. Pour les 20 % restants, il n’y a pas d’amélioration et il peut même y avoir une aggravation des troubles.

Certains symptômes comme la miction fréquente, la miction impérieuse ou l’incontinence d’urgence font penser à une hyperactivité du détrusor et sont associés à de mauvais résultats. L’éjaculation rétrograde postopératoire est très fréquente (80 %). En revanche, le risque d’incontinence est faible (2 %) et les érections ne sont pas modifiées. Le taux de réintervention est de 2 % à 3 ans.

Incision cervicoprostatique

Elle réduit la sévérité des troubles urinaires lorsque le volume prostatique est inférieur à 40 ml. Le geste consiste en une incision transurétrale du col vésical et de la prostate. Il s’agit d’un geste simple et rapide à la suite duquel le risque d’éjaculation rétrograde est moindre qu’avec la résection transurétrale (25 %). Il s’adresse aux sujets jeunes (moins de 60 ans) ayant une obstruction liée à une petite prostate avec un PSA normal. Le taux de réintervention est de 25 % à 3 ans.

Adénomectomie prostatique par voie sus-pubienne

Alternative chirurgicale à la résection transurétrale lorsque la prostate est volumineuse (supérieure à 60-100 ml), l’ablation est le plus souvent réalisée par voie transvésicale. Les effets indésirables de cette intervention sont les mêmes que ceux de la résection endoscopique. L’éjaculation rétrograde postopératoire est très fréquente, mais le risque d’incontinence est très faible.

Cette intervention, réalisée lors d’un adénome bénin, laisse la coque prostatique et ne doit pas être confondue avec la prostatectomie réalisée en cas de cancer (qui enlève l’ensemble de la prostate, avec des conséquences différentes sur la continence urinaire et les érections).

Alternatives endochirurgicales

La seule technique pour laquelle le recul est suffisant à ce jour est la thermothérapie par radiofréquence, encore appelée TUNA (transuretral needle ablation). Il s’agit d’une procédure de thermothérapie à haute énergie, un courant de radiofréquences entraînant une nécrose de coagulation par chauffage.

Un sondage postopératoire est systématique. Cette technique offre à 1 an des scores de symptômes inférieurs à la résection transurétrale, mais avec moins d’effets indésirables.

Stents

La mise en place de stents, résorbables ou permanents, dans l’urètre prostatique maintient perméable la lumière urétrale. Elle est réservée aux patients ayant une contre-indication chirurgicale absolue.

PERSPECTIVES THÉRAPEUTIQUES

→ Deux médicaments, Urorec (en comprimés) et Silodyx (en gélules), viennent d’obtenir une AMM européenne dans le traitement de l’hypertrophie bénigne de la prostate. Ils renferment tous deux de la silodosine qui bloque sélectivement les récepteurs alpha-1α.

→ Les techniques instrumentales de type laser, thermothérapie par micro-ondes ou ultrasons montrent des résultats prometteurs mais qui doivent être confirmés afin de bien évaluer leur rapport bénéfices/risques et leur efficacité à long terme. Leur utilisation aujourd’hui ne doit s’inscrire que dans le cadre d’essais cliniques.

→ Des observations récentes semblent démontrer une pathogenèse commune entre hypertrophie béni­gne de la prostate et déficience érectile. Dès lors, de nouvelles perspectives thérapeutiques pour l’une et l’autre de ces pathologies s’ouvriraient, en particulier un usage plus étendu des inhibiteurs des 5-phosphodiestérases (sildénafil, tadalafil et vardénafil). Ces derniers ont démontré une réduction de la contraction des cellules prostatiques soumises à différents stimuli contractiles. Ces effets dose-dépendants, accrus lors de l’association avec un alphabloquant, pourraient donner prochainement une nouvelle solution thérapeutique.

→ La toxine botulique, neurotoxine qui par ses propriétés de blocage de la jonction neuromusculaire a permis de traiter avec succès de nombreuses pathologies, a récemment été proposée pour le traitement des symptômes liés à l’hypertrophie bénigne de la prostate.

→ Enfin, un nouvel antagoniste de la LH-RH, améliorant les symptômes et le débit maximal des patients pourrait être rapidement mis à la disposition des urologues.

Accompagner le patient

L’ADÉNOME VU PAR LES PATIENTS

Impact social

→ Les envies impérieuses d’uriner engendrent souvent une appréhension des sorties par crainte d’éventuelles fuites et de ne pas trouver des toilettes à disposition. Le patient peut avoir tendance à se désociabiliser.

→ Les patients peuvent, par appréhension, avoir tendance à limiter certains loisirs qui favorisent le risque de rétention urinaire aiguë, en particulier s’ils nécessitent de longs déplacements en voiture, en train ou en avion.

Impact sur le sommeil

La dysurie nocturne fragmente le sommeil et peut à la longue provoquer une asthénie chronique.

Impact sur la sexualité

→ L’adénome en lui-même a peu de retentissement sur la sexualité. Il peut provoquer des érections nocturnes douloureuses dues à une mauvaise vidange de la vessie et une diminution du volume de sperme éjaculé qui peuvent perturber le patient mais n’empêchent en rien une vie sexuelle normale.

→ Les traitements médicamenteux peuvent provoquer une diminution du volume d’éjaculation, des troubles de la libido ou une éjaculation rétrograde (le sperme passe dans la vessie au lieu de sortir par la verge). Après un traitement chirurgical, l’éjaculation rétrograde apparaît dans 80 % des cas. Les troubles de l’érection et de l’orgasme (certains patients se plaignent de l’absence de plaisir) sont rares.

Impact psychologique

→ L’appréhension des douleurs à la miction, les éventuelles fuites urinaires et les éventuels troubles sexuels dus au traitement peuvent générer une anxiété et retentir à divers degrés sur le moral du patient et ses relations de couple.

À DIRE AUX PATIENTS

A propos de la maladie

→ L’adénome de la prostate est une tumeur bénigne qui n’a pas de lien avec le cancer. Ces deux affections distinctes pouvant néanmoins coexister, lors du diagnostic de la pathologie le dosage du taux de PSA est fait de manière systématique. Dans la population générale, il est recommandé à partir de 50 ans (et dès 45 ans en cas d’antécédents familiaux de cancer de la prostate du père ou d’un frère) pour dépister un éventuel cancer de la prostate.

→ La rétention urinaire aiguë (souvent redoutée par les patients) n’est pas une complication fréquente.

→ Les symptômes peuvent varier au cours du temps, s’améliorer périodiquement ou au contraire se détériorer, d’où la nécessité de respecter les visites de suivi prévues.

→ Attention à l’automédication ! Les médicaments ayant des propriétés anticholinergiques (anti-H1 utilisés contre le rhume, la toux, les nausées, les allergies ou les insomnies passagères) peuvent augmenter les difficultés urinaires voire provoquer une rétention urinaire.

A propos des traitements

Sous alphabloquants

Le risque principal est une hypotension orthostatique dans les 30 à 90 minutes suivant la prise, notamment lors de la première prise. En cas de sensation de malaise lorsqu’il se lève, le patient doit s’allonger en attendant que le malaise disparaisse. Pour limiter ce risque, il doit prendre de préférence le traitement à la fin d’un repas.

Sous inhibiteur de la 5-alpharéductase

Les troubles sexuels constituent le principal effet indésirable de ces traitements : diminution de la libido, voire impuissance, augmentation du volume des seins… Par ailleurs, ces médicaments étant absorbés au niveau cutané, les femmes (en particulier enceintes), les enfants et adolescents doivent éviter tout contact avec les capsules ou comprimés endommagés. Si c’est le cas, se laver les mains immédiatement à l’eau et au savon. Des faibles traces de ces produits se retrouvant dans le sperme, utiliser un préservatif en cas de rapport avec une partenaire enceinte ou susceptible de l’être.

Après un traitement chirurgical

Les mictions peuvent être plus fréquentes et/ou douloureuses jusqu’à 2 mois après l’intervention. Une hématurie peut survenir deux à trois semaines après : si elle est modérée, augmenter les boissons, si elle est abondante, consulter. Eviter pendant un mois tout effort conséquent, les trajets longs et les rapports sexuels. Eviter la constipation en mangeant de préférence des aliments riches en fibres (légumes, fruits, pain complet) et boire régulièrement.

PRÉVENTION

Règles hygiénodiététiques

→ S’hydrater suffisamment tout au long de la journée car même si les envies impérieuses d’uriner sont angoissantes, les urines concentrées qui stagnent trop longtemps dans la vessie favorisent la survenue d’infections et de calculs. Le soir, au contraire, éviter la prise de liquide afin de limiter les levers nocturnes.

→ Aucun régime alimentaire particulier n’a prouvé son efficacité pour prévenir ou limiter les signes urinaires. Les avis des spécialistes restent divergent sur ce sujet : classiquement, certains recommandent d’éviter les aliments pouvant être à l’origine d’une exacerbation des troubles : épices, alcool (en particulier champagne, vin blanc, bière…), café fort. Dans tous les cas, se méfier des recommandations données par différents produits réputés « protecteurs » du cancer de la prostate : antioxydants (vitamine E, lycopènes de tomate, sélénium…), oméga-3, régimes sans graisses et, plus récemment, jus de grenade.

Activité physique

L’adénome de la prostate ne contre-indique pas la pratique d’une activité physique, y compris le vélo.

Suivi

Le suivi implique une consultation annuelle (plus si aggravation des signes) au cours de laquelle les symptômes et leur évolution éventuelle sont évalués par un interrogatoire.

Délivreriez-vous ces ordonnances ?

Ordonnance 1 : Oui, l’ordonnance peut être délivrée mais pas la boîte de Fervex. Fervex est une association de phéniramine, de paracétamol et d’acide ascorbique. La présence de phéniramine, anti-H1 aux propriétés anticholinergiques, contre-indique ce médicament en cas d’adénome de la prostate.

Ordonnance 2 : Oui. Mais l’efficacité du traitement ne pourra se juger qu’au bout de 3 à 6 mois. Compte tenu du condiv, une mise en garde s’avère nécessaire pour le médicament Chibro-Proscar. Comme pour tous les inhibiteurs de la 5-alpharéductase, il est recommandé que le patient utilise des préservatifs si sa partenaire est enceinte. De plus, les femmes enceintes ou susceptibles de l’être doivent éviter tout contact avec des comprimés endommagés (en cas de contact, laver à l’eau et au savon).

Mémo-délivrance

Concernant la pathologie

Le patient est-il sensibilisé au suivi ?

L’adénome de la prostate est une pathologie bénigne mais dont les symptômes peuvent évoluer au cours du temps. En l’absence de traitement, une consultation annuelle est recommandée. Dans tous les cas, que le patient suive ou non un traitement pharmacologique, toute aggravation des signes cliniques nécessite de consulter le médecin.

Cancer de la prostate et adénome sont deux pathologies différentes mais qui peuvent coexister. Le dosage du taux de PSA est réalisé systématiquement au moment du diagnostic. Un taux élevé fait suspecter un cancer de la prostate.

Connaît-il les risques liés à l’automédication ?

Proscrire la prise de médicaments susceptibles d’aggraver les difficultés urinaires voire de provoquer une rétention urinaire (antihistaminiques aux propriétés anticholinergiques présents dans les médicaments pour le rhume, la toux…).

Suit-il des règles hygiénodiététiques particulières ?

Il est conseillé de s’hydrater suffisamment tout au long de la journée (pour éviter le risque d’infections urinaires ou la formation de calculs) mais de limiter la prise de boisson en soirée (pour éviter les levers nocturnes).

Si le patient en tire bénéfice, il peut limiter la consommation d’alcool, de café, d’épices (qui favorisent l’exacerbation des troubles urinaires). Se méfier des produits réputés avoir un effet protecteur sur la prostate et qui n’ont fait l’objet d’aucune étude scientifiquement validée (lycopènes de tomate, sélénium…).

Concernant les traitements

Le patient est-il sensibilisé aux effets indésirables ?

Sous alphabloquant : risque d’hypotension orthostatique. Recommander de s’allonger en cas de sensation de malaise. Conseiller une prise en fin de repas.

Sous inhibiteurs de la 5-alpharéductase : essentiellement troubles sexuels (diminution de la libido, gynécomastie…). Recommander le port du préservatif en cas de rapport avec une partenaire enceinte ou susceptible de l’être. En cas de contact avec un comprimé ou une capsule endommagés, laver la zone avec de l’eau et du savon.

Sous extraits de plante : quelques effets indésirables de type digestifs.

Connaît-il les délais d’action des traitements ?

Sous alphabloquant : action rapide, évaluée par le médecin au bout de 3 mois.

Sous inhibiteurs de la 5-alpharéductase : action lente. Evaluation de l’efficacité au bout de 6 mois.

* Il peut s’agir par exemple de protections absorbantes (Tena for Men) ou de coquilles absorbantes (Conveen).

Vous avez été confronté à une ordonnance à problème ?

Contactez-nous :

ordonnance@wolters-kluwer.fr

Le cas

Pierre P. est un client habituel de la pharmacie. Il est traité pour un glaucome, une hypertension artérielle et une hypertrophie bénigne de la prostate. Il se présente à la pharmacie avec l’ordonnance de son généraliste. Celui-ci vient de lui prescrire un second médicament pour ses troubles prostatiques, Josir, en plus du traitement par Avodart.

Plan de prise conseillé

→ Amlor : prendre une gélule le matin pendant ou en dehors du repas.

→ Avodart : avaler une capsule sans la croquer ni la mâcher le matin pendant ou en dehors du repas.

→ Josir : avaler la gélule sans la croquer ni la mâcher à la fin d’un petit déjeuner consistant.

LES CHIFFRES

→ 50 % des hommes de plus de 50 ans présentent un adénome de la prostate, symptomatique ou non.

→ 6 millions de Français se plaignent de troubles urinaires liés un adénome de la prostate : 20 % des hommes autour de 40 ans, 50 % autour de 60 ans, 90 % vers 70-80 ans.

→ Entre 0,4 et 6 % des patients présentant un adénome de la prostate symptomatique souffrent d’une rétention aiguë d’urine dans l’année.

→ 460 décès par an seraient directement causés par un adénome de la prostate en France.

(Source : statistiques OMS pour la période 1985-1989.)

Physiopathologie de l’adénome de la prostate

→ La prostate est un organe ayant des composantes à la fois glandulaire, musculaire et fibreuse. Située sous la vessie en avant du rectum, elle entoure l’urètre et est traversée par les canaux éjaculateurs qui le rejoignent. La prostate sécrète le liquide prostatique (électrolytes, protéines, enzymes, antigène prostatique spécifique) qui entre dans la composition du sperme. L’augmentation du volume de la prostate à la puberté est contrôlée par la testostérone. Chez l’homme jeune, la prostate se stabilise à la taille d’une châtaigne de 15 à 20 g.

→ L’adénome associe une prolifération des cellules prostatiques et l’augmentation progressive du volume de la prostate. C’est une tumeur non cancéreuse, dite adénomyofibromateuse, qui comporte en proportion variable une prolifération d’épithélium glandulaire, musculaire et de tissu conjonctif. Son développement est quasi physiologique. Il commence généralement vers 35 ans mais est rarement symptomatique avant la cinquantaine.

→ Le mécanisme physiologique serait lié à un déséquilibre hormonal. La quantité de dihydrotestostérone, dérivé actif de la testostérone après action de l’enzyme 5-alpharéductase intraprostatique, semble jouer un rôle : le développement de la glande est empêché lors d’un déficit congénital en 5-alpharédutase.

→ La gêne est fonction de la composition de la tumeur plus que du volume de la prostate : à volume égal, une tumeur à forte composante fibreuse est plus obstructive.

Diagnostic différentiel

Il existe d’autres causes de troubles mictionnels :

→ d’origine urologique : anomalie du col vésical (sclérose postopératoire ou d’origine pathologique), infections urinaires, prostatite, tumeur de la vessie, rétrécissement de l’urètre ou du méat urétral, valves de l’urètre (malformation congénitale), présence d’un corps étranger, anomalies ou instabilité du muscle vésical, y compris d’origine psychogène, rétention urinaire médicamenteuse (alphastimulants) ;

→ d’origine neurologique : suites d’un AVC, neuropathie diabétique, hernie discale, maladie de Parkinson, tumeur du SNC…

TRABÉCULATIONS

Reliefs qui apparaissent sur la paroi de la vessie en cas d’obstruction chronique. La vessie a un aspect dit « trabéculé ».

Ce qui a changé

→ L’association d’un inhibiteur de la 5-alpharéductase à un alpha-1-bloquant a fait l’objet d’une publication en 2003. Elle concernait la doxazosine étudiée en association avec le finastéride (étude « MTOPS »).

→ Plus récemment, une seconde association de ce type a été évaluée : elle concerne le dutastéride (Avodart) avec la tamsulosine (étude « COMBAT »).

→ Depuis 2009, le libellé de la spécialité Avodart précise ainsi que celle-ci peut être administrée seule ou en association avec l’alphabloquant tamsulosine. Le bénéfice attendu est une amélioration discrète mais significative du score symptomatique et une réduction modérée du risque d’aggravation sous traitement. Le facteur limitant d’une bithérapie réside dans son profil de tolérance, exposant le patient à un risque accru d’effets indésirables.

ÉJACULATION RÉTROGRADE :

Le sperme passe dans la vessie lors de l’éjaculation et est éliminé avec l’urine.

Vigilance

Certaines contre-indications absolues des médicaments de l’hypertrophie bénigne de la prostate sont à connaître.

→ Alpha-1-bloquants : insuffisance hépatique sévère (sauf térazosine et prazosine), antécédents d’hypotension orthostatique.

De plus, pour alfuzosine : insuffisance rénale sévère ; pour prazosine : insuffisance cardiaque ; pour doxazosine : antécédents d’occlusion ou réduction de la lumière du tube digestif.

→ Finastéride et dutastéride : femmes enceintes ou susceptibles de l’être, enfant et adolescent (pas d’indication chez la femme, l’enfant et l’adolescent) et pour le dutastéride, insuffisance hépatique sévère.

Point de vue

« Les extraits de plantes n’ont aucun intérêt en association »

Y a-t-il un intérêt à associer un extrait de plante à un alphabloquant ou à un inhibiteur de la 5-alpharéductase ?

La seule bithérapie validée scientifiquement est celle associant un alphabloquant -agissant rapidement sur le tonus des fibres musculaires lisses de la prostate – et un inhibiteur de la 5-alpharéductase – permettant à plus long terme une diminution du volume de la prostate. L’association d’un extrait de plante à l’une ou l’autre de ces classes thérapeutiques est sans fondement car elle n’a jamais fait l’objet d’étude.

Quelles autres classes de médicaments sont utilisées ?

En dehors des alphabloquants, des inhibiteurs de la 5-alpharéductase et des extraits de plante, on peut avoir recours aux anticholinergiques pour soulager les hommes présentant des troubles mictionnels liés à l’hyperplasie bénigne de la prostate. Bien que classiquement contre-indiqués, les anticholinergiques se révèlent être efficaces en cas d’impériosité urinaire et/ou de pollakiurie sans dysurie. Ces médicaments montrent une réelle efficacité et peuvent être associés aux alphabloquants. Les antidiurétiques (desmopressine) sont aussi intéressants car ils permettent la diminution de production d’urine la nuit, cause de pollakiurie. Après avoir identifié une inversion de diurèse (urines émises la nuit plus importantes que la journée), il est possible de proposer ce type de médication chez les patients de moins de 65 ans.

PR ALEXANDRE DE LA TAILLE

Urologue, service d’urologie de l’hôpital Henri-Mondor à Créteil (Val-de-Marne)

Témoignage

JEAN, 72 ANS, RETRAITÉ

« C’est à 60 ans, au moment de ma retraite que j’ai commencé à avoir une gêne : je me levais la nuit, j’allais aux toilettes plusieurs fois par jour et j’urinais sur mes chaussures, à jet faible ! Au fil des années, ça s’est aggravé, je me levais trois fois par nuit, parfois plus, pour quelques gouttes seulement. C’était vraiment pénible, même si je n’ai jamais eu de douleurs particulières. J’ai continué le tennis de table et le vélo de manière importante sans autres problèmes que de devoir m’arrêter pour aller uriner… Mon médecin traitant m’a dit que ma prostate grossissait mais que tant que les signes étaient supportables, on n’opérait pas. Il m’a mis sous Xatral et les symptômes se sont améliorés un peu. Plus tard, c’est un ami qui a souffert d’une rétention urinaire qui m’a convaincu de voir un urologue. J’ai alors été opéré, c’était il y a un an. A la suite de l’opération, j’ai eu des brûlures assez fortes suite à une infection et on m’a traité par antibiotiques à forte dose pendant 15 jours ! En tout cas, les résultats du labo sont revenus tous négatifs, il n’y avait pas de cancer, heureusement. Depuis, tout va beaucoup mieux, je n’ai plus de symptômes. J’ai retrouvé une façon normale d’uriner : je pourrais même faire des concours de « Qui pisse le plus loin » avec mes petits enfants ! »

Questions de patients « L’opération chirurgicale met-elle à l’abri d’un cancer de la prostate ? » Non, car dans tous les cas la partie périphérique de la prostate est laissée en place. Or, c’est dans cette zone que se développe le plus souvent un cancer ; le risque reste donc le même que dans la population générale.

En savoir plus

Site Internet

www.uropage.fr

Créé par un urologue, le site Uropage répond de manière claire et concise aux questions les plus fréquemment posées par les patients sur les maladies de la prostate (diagnostic et traitements de l’adénome et du cancer de la prostate), mais aussi l’incontinence urinaire, l’impuissance, les infections urinaires…

Documents

Prise en charge diagnostique et thérapeutique de l’hypertrophie bénigne de la prostate. ANAES, Recommandations 2003 (téléchargeable sur www.has-sante.fr)

Ces recommandations, toujours, d’actualité, font le point sur l’hypertrophie bénigne de la prostate, le bilan initial à réaliser, le traitement et la surveillance.

Questions de patients « La chirurgie prostatique en cas d’adénome rend-elle stérile ? » Dans 80 % des cas, la chirurgie entraîne une éjaculation rétrograde qui limite très fortement la fertilité : le sperme étant évacué dans la vessie, la fécondation devient impossible ou presque (l’éjaculation rétrograde peut être partielle et du sperme peut parfois être encore éjaculé).

Vous sentez-vous régulièrement en insécurité dans vos officines ?


Décryptage

NOS FORMATIONS

1Healthformation propose un catalogue de formations en e-learning sur une quinzaine de thématiques liées à la pratique officinale. Certains modules permettent de valider l'obligation de DPC.

Les médicaments à délivrance particulière

Pour délivrer en toute sécurité

Le Pack

Moniteur Expert

Vous avez des questions ?
Des experts vous répondent !