Comment résister aux covenants bancaires - Le Moniteur des Pharmacies n° 2830 du 08/05/2010 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2830 du 08/05/2010
 
GESTION

Entreprise

Auteur(s) : Françoise Sigot

Derrière les « covenants » bancaires se cachent des clauses incluses dans les contrats de prêts contractés lors de l’acquisition d’une entreprise. Elles doivent faire l’objet d’une négociation scrupuleuse avant toute signature. Sous peine de se voir contraint de rembourser le prêt par anticipation. Les officines sont elles aussi concernées.

Obtenir un crédit permettant de financer l’acquisition d’une entreprise est bien souvent – et a fortiori en ces temps de crise – un parcours long et semé d’embûches. Aussi, nombre de futurs chefs d’entreprise pas toujours aguerris à la pratique bancaire ne pensent pas toujours à regarder les nombreuses clauses qui sont incluses dans un contrat de prêt. Parmi elles, se trouvent de plus en plus souvent des « covenants » bancaires, ou clauses de sauvegarde. Il s’agit d’un ensemble de dispositions contractuelles qui imposent à l’emprunteur de respecter un certain nombre de conditions financières. A défaut, le bénéficiaire du prêt peut se voir contraindre par la banque de rembourser le prêt par anticipation.

« Les covenants bancaires sont la plupart du temps des ratios financiers que l’emprunteur s’engage à respecter durant toute la durée du prêt. Même si ces clauses varient d’une banque à une autre, l’un des ratios le plus souvent utilisés par les banquiers est celui des dettes financières sur les fonds propres. On trouve également assez fréquemment la dette financière sur l’excédent brut d’exploitation », détaille Edouard Bertrand, avocat associé au sein du cabinet Lamy Lexel.

S’il n’existe pas de véritables règles pour définir les ratios pris en compte, il n’existe pas non plus d’ordre bien établi quand à la période sur laquelle sont calculés ces ratios. Certains doivent être fournis à la banque selon une périodicité annuelle, d’autres semestrielle ou encore annuelle. « La plupart du temps, les banques demandent que ces ratios soient validés par le commissaire aux comptes de l’entreprise », précise Edouard Bertrand. Mais, bien souvent, les banquiers ne se contentent pas d’imposer des ratios, ils veulent également que l’entreprise acquise grâce au prêt qu’ils accordent reste bien sous le contrôle majoritaire de l’acquéreur. Aussi cette condition fait elle souvent l’objet d’un covenant bancaire. Autant d’épées de Damoclès suspendues au-dessus de la tête du chef d’entreprise.

La banque peut exiger le remboursement du prêt

« C’est une garantie que prend la banque », résume Philippe Becker, directeur du département Pharmacie chez Fiducial Expertise. En effet, pour la banque, inclure ces ratios dans le contrat de prêt revient à lui donner les moyens de vérifier que l’entreprise à qui elle prête de l’argent à un moment donné continuera, sur toute la durée du crédit, à disposer d’une structure financière et d’une rentabilité qui lui permettront de rembourser ses échéances.

A défaut d’être en mesure de respecter ces covenants bancaires, la sanction est lourde. La banque peut aller jusqu’à demander le remboursement anticipé du prêt. Fort heureusement, dans la pratique, les banquiers se montrent en général compréhensifs et la seule rupture d’un covenant n’entraîne pas le remboursement anticipé. « Pour que la déchéance du terme, c’est-à-dire le remboursement anticipé soit exigible, il faut, selon l’expression consacrée, un événement significatif défavorable. Autrement dit, il faut démontrer que le covenant dont le respect ne perdure pas constitue cet événement significatif défavorable. De fait, la plupart du temps, il faut que plusieurs covenants ne soient pas respectés et que cette détérioration des ratios soit de nature à empêcher le remboursement du prêt pour déclencher un remboursement anticipé », tempère maître Edouard Bertrand. C’est pourquoi, le plus souvent, lorsqu’un covenant n’est pas respecté les banquiers privilégient la formule de la renégociation de prêt à celle du remboursement anticipé.

Bien négocier les clauses avant de s’engager

Même si les banques se montrent compréhensives, il n’en reste pas moins que la plus grande prudence doit être adoptée face à ces clauses. Et cette précaution doit être prise en amont de la signature du contrat de prêt. « Ces clauses doivent être négociées. Elles ne seront notamment pas les mêmes suivant le secteur d’activité et la taille de l’entreprise. Il est donc important de bien les considérer avant de s’engager et, donc, de ne pas accepter des ratios qui ne pourraient pas être tenus. Par ailleurs, mieux vaut se faire conseiller par un professionnel dans ce type de négociations », insiste Edouard Bertrand.

Plus qu’un passage obligé, ces covenants bancaires doivent donc être considérés comme des vecteurs de négociation et des outils de mise en concurrence entre les banques. « Il n’existe pas un covenant standard et encore moins un covenant standard entre les banques. Chacune a sa propre façon de calculer », souligne l’avocat. La vigilance est d’autant plus de mise que ces clauses constituent une source non négligeable de coûts induits. « Les banques imposent que ces covenants soient validés par le commissaire aux comptes. Par ailleurs, elles exigent également que les points de situation réguliers soient aussi faits par les commissaires aux comptes. Ces spécialistes vont bien évidemment devoir facturer ces prestations à l’entreprise. Il ne faut donc pas perdre de vue que tout covenant à un coût indirect », explique l’avocat.

Les pharmacies pourraient ne plus être épargnées

Bien négociés, les covenants bancaires restent toutefois des clauses acceptables par les chefs d’entreprise. Il faut dire qu’elles visent principalement les prêts accordés lors de rachats d’entreprises en LBO (everaged buy-out), c’est-à-dire des acquisitions financées par un fort recours à la dette, dont le remboursement est directement lié aux « performances » de l’entreprise achetée. C’est pourquoi les prêts liés aux transactions d’officines ont été épargnés par les covenants bancaires. « A ce jour, il est extrêmement rare de voir des covenants dans les contrats de prêts accordés aux pharmaciens, pour la bonne raison que ceux-ci étaient, jus­que-là, dans une situation où l’offre de crédit qui leur était proposée était importante. Sur le court terme, nous ne nous attendons pas à ce que les covenants bancaires fassent une entrée majeure dans les prêts accordés à l’occasion de l’acquisition d’une officine, commente Philippe Becker. Pour autant, nous sommes encore actuellement dans une logique où la pharmacie est un outil de travail, mais demain cette logique peut être bouleversée, notamment sous l’effet de divs nouveaux. Dès lors, si la pharmacie devient un outil d’investissement, il est fort possible que les banques instaurent de telles clauses puisque l’on se situera alors dans un cadre d’investissement économique semblable à celui observé à l’occasion de rachats d’entreprises financés par une dette. »

Dès lors, les officinaux vont devoir adopter une véritable stratégie financière et donc s’armer de conseils et de prudence pour ne pas accepter de clauses de nature à mettre en péril leur entreprise si toutefois les résultats économiques ne s’avéraient pas être à la hdiv des prévisions.

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