Antitussifs et mucolytiques - Le Moniteur des Pharmacies n° 2829 du 01/05/2010 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2829 du 01/05/2010
 

Cahiers Formation du Moniteur

Iatrogénie

Effets indésirables

Jimmy s’endort au volant

Jimmy, 27 ans, est chauffeur routier. Il repasse aujourd’hui à la pharmacie, furieux, raconter sa mésaventure. La semaine dernière, il est venu acheter un sirop contre la toux et une étudiante lui a délivré du Broncalène (chlorphénamine et pholcodine). Après deux prises, il a dû arrêter son véhicule en raison d’une envie irrésistible de dormir. Il ne s’est réveillé que quatre heures plus tard. Lorsque la pharmacienne lui demande quelle dose de sirop il a pris, Jimmy explique que n’ayant pas de cuillère sous la main, il a pris au goulot ce qu’il pensait être l’équivalent d’une cuillère à soupe.

Que répondre au patient ?

Effectivement, le sirop Broncalène renferme une molécule antihistaminique et un dérivé codéiné, tous deux à effet sédatif.

ANALYSE DU CAS

Lors de sa demande, Jimmy n’a pas précisé qu’il était chauffeur routier et l’étudiante n’a pas indiqué que le sirop présentait un risque de somnolence. De plus, en buvant directement au goulot pour des raisons de commodité, le patient a dépassé la dose maximale recommandée (1 cuillère à soupe, à renouveler après un délai de 4 heures si besoin), ce qui majore la sédation et les effets indésirables.

ATTITUDE À ADOPTER

La pharmacienne est très ennuyée car l’absence de conseils prodigués lors de la délivrance aurait pu être responsable d’un accident grave. Les patients ayant recours aux antitussifs sédatifs (opiacés ou anti-H1) doivent systématiquement être avertis du risque de troubles de la vigilance, incompatibles avec la conduite automobile (les pictogrammes apposés sur les boîtes rappellent d’ailleurs ce risque). Rappeler également qu’un sirop n’est pas un médicament anodin et qu’il convient de bien respecter les doses prescrites.

Effets indésirables

Mes douleurs à l’estomac reprennent !

Anthony prend ses repas de midi sur le pouce. Depuis un an, il ressent régulièrement des gastralgies qu’il soigne lui-même par des antiacides. Devant l’aggravation des symptômes, il consulte son médecin qui lui prescrit un inhibiteur de la pompe à protons (IPP). Depuis quelques jours, il a une toux très grasse et prend dans l’armoire à pharmacie familiale Fluimucil (acétylcystéine). Deux jours après, les douleurs à l’estomac reprennent. Anthony vient à la pharmacie demander une boîte de Maalox.

Quelle doit être la réaction du pharmacien ?

Le pharmacien, qui a délivré quelques jours auparavant l’IPP, s’interroge sur la recrudescence des symptômes gastriques. Lorsque le patient signale la prise du mucolytique pour sa toux grasse, le pharmacien comprend la raison de la réapparition des douleurs gastriques.

ANALYSE DU CAS

L’acétylcystéine présente dans Fluimucil est un agent mucolytique favorisant l’expectoration au niveau des bronches. Mais son action s’exerce également sur le mucus de l’estomac dont la fonction de protection est ainsi diminuée. Le RCP des spécialités à base d’acétylcystéine (ou de carbocistéine) mentionne que la prudence est recommandée chez les sujets atteints d’ulcères gastroduodénaux.

ATTITUDE À ADOPTER

Anthony doit arrêter Fluimucil. Lui conseiller de bien s’hydrater (pour aider à fluidifier les sécrétions). La toux grasse étant favorisé, par un écoulement rhinopharyngé postérieur, le mouchage et l’utilisation de solutions d’eau de mer ou de sérum physiologique sont préconisés.

Par ailleurs, toujours s’enquérir de la présence de problèmes gastroduodénaux. La prise de mucolytiques peut aggraver un ulcère en évolution.

Effets indésirables

Eruption sous carbocistéine

Laura, 45 ans, a été grippée voilà une semaine et sa toux, sèche au départ, est devenue productive. Elle vient chercher à la pharmacie un sirop pour toux grasse. Deux jours plus tard, après avoir pris 3 cuillères à soupe par jour de carbocistéine, elle revient à la pharmacie montrer des plaques érythémateuses qui se sont développées sur son avant-bras gauche.

Que répondre à Laura ?

La pharmacienne est étonnée. Les plaques érythémateuse lui font penser à une réaction allergique mais Laura n’a appliqué aucun produit sur son bras et n’a pris comme traitement que le sirop mucolytique. La pharmacienne sait que le mucolytique est impliqué dans la survenue d’intolérances digestives mais n’a pas connaissance de réactions cutanées.

ANALYSE DU CAS

Devant une toux productive, un mucolytique à base de carbocistéine a logiquement été proposé à Laura (après s’être assuré qu’elle ne souffrait pas d’ulcère). Après avoir consulté ses bases de données et le centre de pharmacovigilance de sa région, la pharmacienne constate que la carbocistéine peut être impliquée dans la survenue d’un érythème pigmenté fixe. Les plaques érythémateuses peuvent parfois être vésiculeuses, bulleuses et se généraliser, mimant alors un syndrome de Lyell. Ce n’est qu’en réalisant un test épicutané dans le cadre d’une consultation de dermatologie que la preuve de la responsabilité de la molécule peut être démontrée. Cette toxidermie a la particularité de se reproduire au même endroit sur la peau si le médicament est repris plus tard.

ATTITUDE À ADOPTER

La pharmacienne conseille à Laura d’arrêter le médicament et de noter cet effet indésirable dans son carnet de santé afin d’éliminer définitivement toute prise de cette classe pharmacologique. Si les plaques ne disparaissent pas rapidement ou en cas d’aggravation, une consultation médicale sera nécessaire.

Contre-indications

Pas d’anti-H1 avant 2 ans

Léonard, 16 mois, souffre depuis hier d’une rhinopharyngite que sa maman soigne par du paracétamol et un lavage des fosses nasales avec du sérum physiologique. Léonard ayant beaucoup toussé cette nuit, sa maman se rend à la pharmacie. Elle demande un flacon de sirop Toplexil (oxomémazine), qu’elle connaît bien car le pédiatre de Léonard lui en avait prescrit il y a 3 mois. Le pharmacien déconseille ce sirop pour Léonard…

Pourquoi le pharmacien refuse-t-il la délivrance ?

Depuis octobre 2009, le laboratoire commercialisant Toplexil s’est aligné sur la décision des autorités de santé européennes contre-indiquant son utilisation chez les enfants de moins de 2 ans.

ANALYSE DU CAS

Pour des raisons de sécurité d’emploi (effet sédatif marqué) et dans la mesure où les phénothiazines ont été incriminées comme facteurs de risque possible de la survenue de mort subite du nourrisson, certaines autorités de santé (Etats-Unis, Pays-Bas, Suisse…) ont recommandé de ne plus utiliser ce sirop chez l’enfant de moins de 2 ans. Dans ce condiv, le laboratoire fabricant a décidé en octo­bre 2009 de contreindiquer les spécialités Toplexil chez l’enfant de moins de deux ans.

ATTITUDE À ADOPTER

Le sirop Toplexil ne doit pas être délivré.Attention ! Depuis le 29 avril 2010, Hélicidine, autre traitement symptomatique des toux non productives gênantes, est également contre-indiqué chez les enfants de moins de 2 ans, de même que les fluidifiants à base de carbocistéine, acétylcistéine ou benzoate de méglumine (notification de plusieurs cas d’encombrement respiratoire grave chez les nourrissons).

Contre-indications

L’asthme de Julie s’est aggravé

Julie, 8 ans, est asthmatique. Sa maman veille à ce qu’elle prenne régulièrement ses médicaments : un corticoïde inhalé en traitement de fond et un bronchodilatateur de courte durée d’action à la demande. Les allergènes du printemps déstabilisent chaque année l’asthme de Julie. Le traitement est alors renforcé par un bêta-2-agoniste d’action prolongée et les doses du corticoïde sont augmentées. Invitée chez sa cousine, Julie prend froid au cours d’une baignade dans un ruisseau et tousse dès le lendemain. Madame M., sa tante, la soigne avec le sirop Biocalyptol (pholcodine) de l’armoire à pharmacie à la posologie de 3 cuillères à café par jour. Le lendemain, l’enfant ressent de grandes difficultés respiratoires et sa tante court demander conseil dès l’ouverture de la pharmacie.

L’asthme de Julie s’est-il aggravé ?

Oui, la fonction respiratoire de Julie s’est détériorée du fait d’une probable infection et de la prise concomitante d’un opiacé.

ANALYSE DU CAS

L’asthme est une maladie inflammatoire chronique des voies aériennes. Cette pathologie se caractérise par une hyperréactivité bronchique à différents stimuli, associée à un spasme de la musculature lisse des bronches qui entraîne une bronchoconstriction. Pour diminuer les quintes de toux de Julie, sa tante lui a administré un sirop à base de pholcodine. Or la pholcodine, un opiacé, entraîne une dépression des centres respiratoires. De ce fait, elle est contre-indiquée chez l’asthmatique. De plus, madame M. n’a pas utilisé le godet doseur. La dose administrée a été le double de celle préconisée : 2,5 ml par prise.

ATTITUDE À ADOPTER

Julie est en période d’exacerbation de son asthme suite à un syndrome infectieux. La dépression respiratoire est aggravée par la prise d’un sirop à base de pholcodine. Sachant que la dyspnée de la fillette est un critère de gravité qui nécessite la mise en place d’un traitement en urgence, la pharmacienne conseille à Mme M. de consulter rapidement un médecin et l’oriente même vers les urgences où sera sans doute mis en place un traitement par bronchodilatateurs d’action rapide. Elle lui suggère de s’abstenir, à l’avenir, de soigner elle-même Julie car tout état infectieux dans son cas nécessite un avis médical et une prise en charge adaptée.

Contre-indications

Attention à la prostate de Jean-Paul !

Jean-Paul, 72 ans, est traité depuis plusieurs années pour des problèmes cardiovasculaires et une hypertrophie bénigne de la prostate. Malgré le traitement par un inhibiteur de la 5-alpharéductase, les troubles urinaires s’accentuent et le médecin a évoqué à la dernière consultation le recours à la chirurgie. Jean-Paul passe les fêtes de fin d’année dans son chalet de montagne. Trois jours après son arrivée, il commence à tousser. Le jeune médecin de la station diagnostique une bronchite et lui prescrit Fluisédal (prométhazine) pour calmer ses quintes de toux, surtout nocturnes. Après avoir lu la carte Vitale de Jean-Paul, le pharmacien se montre réticent à lui délivrer le flacon de sirop.

Pourquoi cette prescription alerte-t-elle le pharmacien ?

Le dossier pharmaceutique (DP) de Jean-Paul permet au pharmacien de savoir que celui-ci souffre d’une hypertrophie bénigne de la prostate (prescription d’Avodart). Or, c’est une pathologie dans laquelle Fluisédal est contre-indiqué.

ANALYSE DU CAS

Jean-Paul est suivi pour un adénome de la prostate, caractérisé par des troubles urinaires irritatifs et obstructifs. Ils occasionnent une pollakiurie (besoin fréquent d’uriner) surtout nocturne, des mictions soudaines et impérieuses, des difficultés à uriner (diminution de la force du jet mictionnel ou dysurie).

La rétention des urines est une des complications de l’hypertrophie bénigne de la prostate (HBP). Elle peut être chronique (de survenue progressive) et avoir alors des conséquences multiples : infection, fuites urinaires, calcul vésical, atteinte rénale. Elle peut également survenir de façon aiguë et provoquer une impossibilité brutale et totale d’uriner. Très douloureuse, la rétention aiguë d’urine nécessite un traitement en urgence : l’évacuation des urines se fait à l’aide d’une sonde.

Fluisédal est un sirop antitussif contenant du benzoate de méglumine, un expectorant et de la prométhazine, un antihistaminique H1 de type phénothiazinique (association non justifiée de deux classes pharmacologiques, l’une fluidifiante, l’autre antitussive). Outre un effet sédatif marqué aux doses usuelles (d’origine antihistaminergique et adrénolytique centrale) et un risque d’hypotension orthostatique (d’origine adrénolytique périphérique), la prométhazine possède un effet anticholinergique pouvant induire des effets indésirables périphériques dont une rétention urinaire. De ce fait, l’utilisation de ce médicament chez un patient atteint d’un adénome de la prostate est contre-indiquée. La phénothiazine peut majorer le risque de rétention urinaire.

ATTITUDE À ADOPTER

Le pharmacien décide de contacter le médecin prescripteur pour évoquer ce problème. Le médecin, surchargé de travail durant la période hivernale, avoue ne pas connaître ce patient et remercie le pharmacien de l’avoir contacté. Ce dernier propose de substituer le sirop phénothiazinique par un antitussif codéiné qui n’est pas contre-indiqué dans l’HBP. Jean-Paul se félicite d’avoir ouvert un DP, grâce auquel l’interaction a été découverte.

Interactions médicamenteuses

Risque léthal sous IMAO !

Valérie est suivie depuis plusieurs années pour un trouble bipolaire. Son traitement, bien équilibré, comporte Moclamine et Zyprexa. Elle se réveille un matin avec une température de 38,5 °C et une toux gênante. Son médecin traitant étant absent, elle consulte un autre médecin puis se rend à la pharmacie pour acheter les médicaments prescrits : amoxicilline, paracétamol et sirop Tussidane (dextrométhorphane). Le logiciel informatique signale une interaction entre Moclamine et Tussidane.

Peut-on délivrer Tussidane ?

En aucun cas. Il s’agit d’une contre-indication absolue qui expose à un risque d’apparition d’un syndrome sérotoninergique.

ANALYSE DU CAS

Le moclobémide (Moclamine) est un antidépresseur inhibiteur sélectif de la monoamine-oxydase de type A (IMAO-A). L’inhibition de la monoamine-oxydase A se traduit par une augmentation de la concentration des médiateurs monoaminergiques centraux qui font défaut dans la dépression (noradrénaline, sérotonine et dopamine). Le sirop Tussidane renferme du dextrométhorphane. Or, associée à un IMAO, cette molécule expose à un syndrome sérotoninergique pouvant nécessiter une hospitalisation. Les symptômes possibles sont les suivants : agitation, confusion, tremblements, rigidité, diarrhées, hypotension ou hypertension, tachycardie, frissons, hyperthermie, voire coma.

ATTITUDE À ADOPTER

Joint par téléphone, le médecin propose de remplacer le sirop Tussidane par Biocalyptol (pholcodine). Le pharmacien conseille à Valérie de rappeler systématiquement à tout médecin consulté la prise de son traitement antidépresseur et antipsychotique.

Interactions médicamenteuses

Un sirop anti-bébé

Clémence, 27 ans, est suivie depuis 2 mois par un gynécologue pour stérilité. Les examens biologiques ayant montré un taux trop important de prolactine, le spécialiste a initié un traitement par Norprolac (quinagolide). Au cours d’un week-end à la montagne, Clémence prend froid. L’ordonnance émanant de son médecin généraliste comporte du paracétamol, Dérinox et Fluisédal (prométhazine). La pharmacienne, qui consulte systématiquement l’historique médicamenteux de ses patients, détecte une interaction.

De quelle nature est l’interaction ?

Il s’agit d’une interaction par antagonisme réciproque entre la prométhazine, présente dans Fluisédal, et le quinagolide.

ANALYSE DU CAS

L’ovulation de Clémence est bloquée par un taux anormalement élevé de prolactine, cause de sa stérilité. Le quinagolide est un agoniste dopaminergique central, comme la bromocriptine (Parlodel), qui freine la sécrétion de prolactine.

Or, Fluisédal prescrit par le médecin généraliste renferme de la prométhazine, un neuroleptique de type phénothiazinique qui bloque les récepteurs dopaminergiques. L’antagonisme est réciproque. Le traitement de la stérilité de Marion peut être compromis.

Le RCP de Fluisédal ne mentionne pas cette interaction pourtant commune à tous les dérivés phénothiaziniques (elle est notifiée pour la spécialité Toplexil, qui renferme de l’oxomémazine).

ATTITUDE À ADOPTER

La pharmacienne contacte le médecin généraliste qui n’était pas au courant de cette interaction. Il remplace Fluisédal par un sirop à base de dextrométhorphane.

La pharmacienne profite de cet entretien pour signaler à Clémence qu’elle ne doit pas prendre d’antiémétique comme Primpéran, Motilium ou Vogalène tant qu’elle sera traitée par Norprolac.

Prise en charge de la toux

→ La toux est un phénomène réflexe de défense de l’organisme. Elle a pour but d’évacuer les sécrétions bronchiques, les particules inhalées et les corps étrangers. Elle doit donc être respectée. Cependant, elle a pour inconvénient de disséminer les agents infectieux et d’affecter la qualité de vie du malade et de son entourage.

→ Très souvent, la toux résulte d’une infection pharyngée ou bronchique, mais elle peut être retrouvée dans d’autres pathologies : asthme, mucoviscidose, embolie pulmonaire, coqueluche, RGO, cancer bronchique… Elle peut également avoir une origine iatrogène (IEC).

→ Elle peut être aggravée par des facteurs environnementaux tels que tabac, allergènes, pollution, atmosphère sèche, changements brusques de température…

OBJECTIF DU TRAITEMENT

L’objectif est de soulager le malade en calmant la toux pour la rendre moins irritante et fatigante.

Dans tous les cas le traitement n’est que symptomatique.

STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE

Il est impératif de faire préciser au patient le caractère aigu (moins de 3 semaines), subaigu (entre 3 et 8 semaines) ou chronique (au-delà de 8 semaines) de la toux. L’interrogatoire vise ensuite à préciser si la toux s’accompagne ou non d’expectorations. Ceci permet de distinguer 4 situations :

→ les toux sèches aiguës (rhume, bronchite aiguë, coqueluche, laryngite, asthme…),

→ les toux sèches chroniques (toux allergiques, cancers bronchiques…),

→ les toux aiguës avec expectorations (infections virales, surinfections bactériennes…),

→ les toux chroniques avec expectorations (bronchites chroniques…).

Au-delà de 3 semaines, un avis médical s’impose.

Si un antitussif s’avère nécessaire, celui-ci n’aura qu’un rôle limité et transitoire. Une toux persistante malgré un traitement doit être un signe d’alerte : il est nécessaire d’en déterminer la cause.

Pharmacologie des antitussifs et mucolytiques

TRAITEMENT DES TOUX SÈCHES

Les antitussifs sont indiqués dans le traitement symptomatique des toux non productives gênantes.

Antitussifs opiacés

Principes actifs : codéine, codéthyline (ou éthylmorphine), dextrométhorphane, noscapine (dans Tussisédal) et pholcodine.

Principaux effets indésirables

→ Aux doses thérapeutiques, les effets indésirables sont de type morphinique : constipation, somnolence, états vertigineux, nausées, vomissements… Ils peuvent provoquer, mais de façon plus rare, un bronchospasme et une dépression respiratoire (surtout pour la codéine). Aux doses thérapeutiques, le dextrométhorphane et la noscapine n’entraînent ni dépression des centres respiratoires, ni accoutumance, ni toxicomanie. L’effet sédatif est majoré par la prise concomitante d’alcool ou de dépresseurs du SNC.

→ Aux doses suprathérapeutiques, un risque de dépendance et de syndrome de sevrage suite à un arrêt brutal peut être observé chez l’utilisateur et chez le nouveau-né de mère intoxiquée à la codéine.

Principales contre-indications

Les antitussifs opiacés sont contre-indiqués chez l’enfant de moins de 30 mois, l’insuffisant respiratoire, en cas d’asthme et au cours de l’allaitement (sauf codéine en traitement bref).

Antitussifs antihistaminiques anticholinergiques

Principes actifs : pimétixène (dans Calmixène), prométhazine (dans Fluisédal…), chlorphénamine (dans Broncalène, Hexapneumine…), alimémazine, oxomémazine.

Indications

Ils sont indiqués dans les toux non productives gênantes, en particulier à prédominance nocturne. Leur effet antihistaminique est mis à profit dans les toux de nature allergique.

Principaux effets indésirables

Ce sont des molécules antihistaminiques de type phénothiazinique. Les effets indésirables sont particulièrement nombreux et découlent de leurs propriétés anticholinergiques et adrénolytiques : sécheresse des muqueuses, constipation, troubles de l’accommodation, mydriase, risque de rétention urinaire (effets anticholinergiques), sédation marquée (d’origine antihistaminique et adrénolytique centrale), hypotension orthostatique (effet adrénolytique périphérique), troubles de l’équilibre, vertiges, tremblements, confusion mentale, réactions paradoxales, particulièrement chez le nourrisson, effets hématologiques et réactions de sensibilisation (érythème, eczéma, urticaire, œdème, choc anaphylactique).

Contre-indications

Les antitussifs antihistaminiques sont contre-indiqués en cas de risque de glaucome par fermeture de l’angle et de troubles urétroprostatiques (risque de rétention urinaire). En outre, ils ne doivent pas être utilisés en cas d’antécédents d’agranulocytose à d’autres phénothiazines.

Antitussifs non opiacés non antihistaminiques

Principes actifs : pentoxyvérine (Toclase, Vicks) et oxéladine (Paxéladine).

Mode d’action

Ces molécules dépriment directement le centre de la toux mais sans agir sur les récepteurs mu. De plus, elles possèdent des propriétés anesthésiques et spasmolytiques locales au niveau des bronches.

Principaux effets indésirables

Ils peuvent entraîner des réactions allergiques cutanées, des nausées et des vomissements ainsi qu’une sécheresse buccale et une constipation. Vertiges et somnolence ont également été décrits.

Contre-indications

La pentoxyvérine est contre-indiquée chez l’enfant de moins de 15 ans, en cas de toux chez l’asthmatique, dans l’insuffisance respiratoire, en cas de risque de glaucome par fermeture de l’angle et de risque de rétention urinaire lié à des troubles urétroprostatiques (effets atropiniques).

Pas de contre-indications notifiées pour l’oxéladine.

Autres antitussifs

Ils peuvent être classés en 2 catégories.

Produits allopathiques

Hélicidine, à base de mucoglycoprotéine extraite d’Helix pomatia L. (escargot de Bourgogne), est un traitement symptomatique des toux non productives gênantes qui possède des propriétés bronchorelaxantes. Il est contre-indiqué chez l’enfant de moins de 2 ans.

Phytothérapie

Les spécialités Activox et Prospan sont à base de lierre grimpant. Ces médicaments sont indiqués à tout âge au cours des épisodes de toux bénignes occasionnelles et au cours des affections bronchiques aiguës bénignes.

Tussidoron, à base de thym et de teinture de droséra, est réservé à l’adulte et à l’enfant de plus de 6 ans. Toutefois, en raison de sa teneur en alcool, le RCP précise qu’il est déconseillé chez l’enfant de moins de 12 ans ainsi que chez les patients souffrant d’une pathologie hépatique, d’alcoolisme, d’épilepsie et chez les femmes enceintes.

TRAITEMENT DES TOUX GRASSES

Mucolytiques et fluidifiants ne sont plus remboursés par l’assurance maladie depuis le 1er mars 2006 (en raison d’un service médical rendu insuffisant). Ils sont cependant préconisés dans les états d’encombrements des bronches, en particulier lors des épisodes aigus de bronchite. Ils sont contre-indiqués chez les enfants de moins de 2 ans (risque d’encombrement bronchique grave).

Mucolytiques vrais

Principe actif : acétylcystéine (dans Mucomyst, Fluimucil, Exomuc…).

Mode d’action

L’acétylcystéine scinde les ponts disulfure des protéines du mucus. Celui-ci devenant moins visqueux et élastique, l’expectoration est ainsi facilitée.

Effets indésirables

L’acétylcystéine peut occasionner des phénomènes d’intolérance digestive (gastralgies, nausées, diarrhées). Il est alors conseillé de réduire la dose et de privilégier une prise au milieu des repas. La prudence est recommandée chez les sujets atteints d’ulcères gastroduodénaux. Des réactions cutanées allergiques sont possibles.

Mucorégulateurs

Principe actif : carbocistéine (dans Bronchokod, Rhinathiol…).

Mode d’action

La carbocistéine rompt également les ponts disulfure des protéines du mucus. Elle stimule aussi la formation de sialomucines qui inhibent l’action inflammatoire et spasmogène de certaines kinines.

Effets indésirables

Ce sont ceux de l’acétylcystéine. Le RCP mentionne par ailleurs quelques cas d’érythème pigmenté fixe.

Autres mucolytiques

Principes actifs : ambroxol (Surbronc, Muxol…), bromhexine (Bisolvon), erdostéine (Vectrine).

Mode d’action

L’ambroxol favorise la production d’un mucus plus mobilisable et augmente également l’activité ciliaire.

La bromhexine active la synthèse des sialomucines.

L’erdostéine est un mucomodificateur qui agit sur la phase gel du mucus.

Effets indésirables

Des réactions cutanées et des troubles digestifs sont possibles (gastralgies, nausées, vomissements, diarrhées).

Fluidifiants bronchiques

Principes actifs : guaïfénésine (Vicks Expectorant Adulte, dans Pulmofluide Simple…), sulfogaïacol (dans Passédyl…), terpine (dans Pulmofluide Simple, Terpine Gonnon…).

Mode d’action

Ce sont des agents hydratants. Par effet osmotique, l’eau est attirée à la surface et les mucosités ainsi hydratées sont alors plus facilement transportées par les cils bronchiques.

Effets indésirables

Ils peuvent provoquer des troubles digestifs de type nausées, vomissements et gastralgies.

Interactions médicamenteuses

Une association illogique

Juliette, 24 ans, fumeuse, tousse depuis quelques jours et se rend chez son médecin pour se faire examiner. A la pharmacie où elle présente son ordonnance, le titulaire est étonné de la prescription. Celle-ci comporte un aérosol de Bécotide, du sirop Poléry (codéine) et une boîte de Surbronc (ambroxol) en comprimés. L’association des deux derniers médicaments interpelle le pharmacien.

Quelle est la conduite à tenir ?

Le pharmacien s’interroge sur le bien-fondé de la prescription concomitante d’un antitussif et d’un mucolytique. Il décide de joindre le médecin par téléphone. Celui-ci justifie sa stratégie thérapeutique : il a bien expliqué à la patiente de ne pas prendre les deux médicaments en même temps.

ANALYSE DU CAS

Au cabinet médical, Juliette s’est plainte d’avoir une toux sèche et le médecin a diagnostiqué une trachéite, sans doute d’origine virale. De plus, elle a précisé au médecin qu’après chaque épisode de toux sèche, ses voies respiratoires s’encombraient de mucosités.

La prescription peut prêter à confusion car la prise simultanée d’un mucolytique et d’un antitussif est illogique. L’ambroxol contenu dans Surbronc possède des propriétés mucocinétiques et expectorantes. Lors de la prise de ce sirop, la sécrétion bronchique est stimulée et ne doit en aucune façon être entravée par la prise concomitante d’un antitussif (codéine contenue dans Poléry).

ATTITUDE À ADOPTER

Les consignes du médecin sont relayées par le pharmacien, permettant ainsi une bonne prise en charge de la toux : Juliette doit d’abord prendre le sirop Poléry tant que la toux est sèche. Quand celle-ci deviendra productive, le sirop devra être stoppé et la patiente pourra commencer à prendre les comprimés de Surbronc afin de fluidifier les sécrétions.

Profils particuliers

Une glycémie inquiétante

Angélique, 18 ans, est diabétique depuis 5 mois. Lors d’un week-end organisé chez des amis, elle prend froid et se rend à la pharmacie pour demander du sirop Biocalyptol, lequel lui a déjà été prescrit pour une toux. Après avoir pris la dose journalière du sirop conseillé par le pharmacien, une bandelette capillaire faite le soir lui indique que sa glycémie atteint 2,2 g/l. Inquiète, Angélique retourne à la pharmacie le lendemain matin.

Quel est le problème ?

Angélique n’a pas précisé qu’elle désirait la présentation sans sucre du sirop (ne sachant pas que deux formes, avec et sans sucre, étaient disponibles).

ANALYSE DU CAS

Angélique est diabétique depuis seulement quelques mois. Elle a été formée à l’éducation thérapeutique dans le cadre d’un séjour hospitalier dès le diagnostic de sa maladie.

Elle a encore du mal à gérer correctement son traitement et reconnaît qu’il lui arrive parfois d’oublier une injection d’insuline dans la semaine, mais cela n’a pas été le cas hier.

Elle avoue également ne contrôler ses glycémies capillaires que le soir pour l’instant. Elle a cru prendre un sirop sans sucre, ce qui n’était pas le cas.

ATTITUDE À ADOPTER

Angélique ne semble a priori pas souffrir d’une infection sous-jacente qui pourrait être à l’origine de la déstabilisation de son diabète.

Le pharmacien demande donc à Angélique d’arrêter la prise du sirop délivré la veille et lui propose à la place un sirop sans sucre. Il lui recommande de bien signaler à tout professionnel de santé son statut de diabétique.

Profils particuliers

Toplexil ne réussit pas à Marie-Thérèse

Depuis deux ans, Marie-Thérèse G., 78 ans, souffre de maladie d’Alzheimer. Elle vit encore à son domicile avec son mari qui s’occupe de l’organisation de la maison et veille à ce que sa femme prenne quotidiennement ses médicaments, en particulier Aricept le soir au coucher à la posologie de 10 mg. Marie-Thérèse tousse depuis quelques jours. Son mari décide de lui administrer du sirop Toplexil (oxomémazine) laissé dans l’armoire à pharmacie par sa fille lors d’une dernière visite. Le soir même, après 3 prises de sirop, Marie-Thérèse présente des troubles confusionnels et de l’équilibre. Son mari profite du renouvellement de son ordonnance le lendemain pour en parler au pharmacien. Celui-ci s’étonne de la détérioration soudaine de l’état de santé de Marie-Thérèse. Il interroge son mari sur la bonne observance du traitement mis en place par le neurologue. M.G. évoque alors la toux de sa femme et le sirop qu’il lui a donné.

Y a-t-il un rapport entre l’apparition de troubles confusionnels et la prise de l’antitussif ?

M. G. a administré à sa femme le sirop antitussif Toplexil à raison de 3 cuillères à soupe (15 ml/prise), dépassant ainsi la posologie recommandée de 10 ml par prise. Or, Toplexil renferme de l’oxomémazine, un antihistaminique H1 de structure phénothiazinique possédant entre autres des propriétés anticholinergiques. Ces dérivés ne sont pas recommandés chez la personne âgée, en particulier en cas de maladie d’Alzheimer, pathologie caractérisée par un déficit en acétylcholine.

ANALYSE DU CAS

L’oxomémazine est un dérivé phénothiazinique pouvant provoquer une sédation marquée du fait de ses propriétés antihistaminiques et adrénolytiques centrales.

D’autres effets indésirables peuvent se manifester, liés à des propriétés anticholinergiques : constipation, sécheresse des muqueuses, troubles de l’accommodation, mydriase, risque de rétention urinaire. Or, tout médicament ayant une activité anticholinergique peut aggraver les troubles cognitifs et favoriser la survenue d’une confusion chez une personne souffrant de maladie d’Alzheimer. En effet, cette pathologie se caractérise par un déficit en acétylcholine.

Aricept, indiqué dans cette pathologie, est un anticholinestérasique. L’administration de la phénothiazine représente donc un antagonisme pharmacologique.

De plus, et en particulier chez la personne âgée, l’oxomémazine peut occasionner des troubles de l’équilibre, des vertiges, une baisse de la mémoire ou de la concentration, une incoordination motrice, des tremblements, une confusion mentale, des hallucinations. Enfin, elle peut provoquer une hypotension orthostatique (effet adrénolytique périphérique).

ATTITUDE À ADOPTER

Le pharmacien conseille à M. G. d’arrêter Toplexil. Un sirop à base de dérivé opiacé, qui risque d’entraîner une sédation marquée, n’est pas non plus recommandé chez cette patiente dont les capacités cognitives doivent être préservées.

Le choix peut se porter sur Hélicidine. Le pharmacien recommande à monsieur G. de consulter un médecin si la toux persiste au-delà de 5 jours.

Profils particuliers

Des plantes pour une femme enceinte

Alexandra, enceinte de 7mois, vient se reposer quelques jours chez une amie à la campagne. Elle tousse depuis deux ou trois jours et son amie, très portée sur les médecines dites « naturelles », lui conseille un sirop à base de plantes, Tussidoron. Alexandra se rend donc à la pharmacie pour en acheter.

La prise du sirop Tussidoron est-elle la meilleure alternative possible ?

Dès l’arrivée d’Alexandra, le pharmacien a noté son état de grossesse. Il sait qu’il doit porter une attention toute particulière aux traitements prescrits et ne conseiller que les molécules dont les données sont suffisamment fiables. Ce qui n’est pas forcément le cas de toutes les plantes.

ANALYSE DU CAS

La base de données indique que le sirop Tussidoron contient du thym, de la teinture de droséra et de l’alcool.

En premier lieu, l’alcool contenu dans le sirop le contre-indique formellement chez la femme enceinte. Une consommation d’alcool, même ponctuelle ou modérée, n’est pas anodine et peut entraîner des risques importants pour l’enfant à naître. Son foie, insuffisamment fonctionnel, ne peut éliminer correctement l’alcool, ce qui en fait un produit extrêmement toxique pour lui, spécialement au niveau du cortex cérébral.

Pour pouvoir mieux conseiller la patiente, le pharmacien décide de consulter le site du CRAT (Centre de référence sur les agents tératogènes). Ce dernier indique que les spécialités contenant des plantes sont peu évaluées chez la femme enceinte et dépourvues, le plus souvent, d’études de tératogenèse chez l’animal.

Selon le CRAT, deux molécules antitussives sont suffisamment évaluées et peuvent être administrées à la femme enceinte quel que soit le stade de la grossesse : le dextrométhorphane et la codéine.

Dans ce dernier cas, il est important de respecter la posologie recommandée par le dictionnaire Vidal car un surdosage peut provoquer un syndrome de sevrage chez le nouveau-né en cas d’administration en fin de grossesse. Il se manifeste par une irritabilité, des trémulations, un cri aigu et une hypertonie, survenant à distance de la naissance. Son délai d’apparition dépend de la demi-vie d’élimination du médicament.

En ce qui concerne Hélicidine, le CRAT précise qu’aucun élément inquiétant n’a été signalé mais qu’il faut préférer la codéine ou le dextrométhorphane.

Enfin, il faut éviter de donner un sirop antihistaminique anticholinergique qui, à l’approche de l’accouchement, est susceptible d’entraîner des effets sédatifs et atropiniques chez le nouveau-né.

ATTITUDE À ADOPTER

Le pharmacien convie Alexandra à décrire sa toux. La jeune femme explique qu’elle a une toux sèche, sans autres symptômes, et qu’elle souhaite se soigner avec des plantes, « pour ne pas prendre de risque pour son bébé ».

Le pharmacien explique à Alexandra que les plantes utilisées en médecine ont une activité thérapeutique mais également une possible toxicité pour certaines d’entre elles. La toux étant sans gravité, il lui propose un sirop à base de dextrométhorphane sans alcool.

Profils particuliers

Alice ne se réveille plus de sa sieste

Alice, 3 ans, 16 kg, souffre d’un second épisode de toux en 6 semaines. Le pédiatre lui prescrit des gouttes nasales et du sirop Poléry à raison de 1 ml par prise, sans dépasser 6 prises par jour. Au moment d’administrer le sirop, un coup de téléphone éloigne Juliette, la maman d’Alice. L’enfant, alors seule, manipule le flacon et en extrait la seringue. Par la suite, ne trouvant pas de seringue ni de cuillère dans l’emballage, Juliette donne à Alice 1cuillère à café de sirop qu’elle renouvelle au bout de 4 heures. Un peu plus tard, elle appelle la pharmacie très inquiète : elle a du mal à réveiller Alice de sa sieste.

Pourquoi Alice est-elle si profondément endormie ?

Juliette a commis une erreur en administrant le sirop à l’aide d’une cuillère à café, dépassant de beaucoup la dose maximale préconisée.

ANALYSE DU CAS

Le sirop Poléry est conditionné avec une seringue graduée. La posologie pour un enfant de 16 kg est de 1 ml soit 1mg de pholcodine par prise, sans dépasser 6 prises par jour. Chez l’enfant de 30 mois à 6 ans, la dose quotidienne de pholcodine à ne pas dépasser est de 0,5 mg/kg, soit 8 mg pour Alice. Or Juliette a donné à sa fille une cuillère à café soit 5 ml de sirop, multipliant par cinq la posologie préconisée. Déjà somnolente à la première prise, Alice s’est profondément endormie à la seconde.

ATTITUDE À ADOPTER

La pharmacienne appelle le centre de pharmacovigilance qui conseille d’arrêter l’administration du sirop pour cette journée et de reprendre le traitement le lendemain à la posologie adéquate.

Profils particuliers

Pas de mucolytique en cas de bronchiolite

Kylian, 6 mois, est soigné pour un premier épisode de bronchiolite. Le médecin consulté préconise des mesures hygiénodiététiques et des séances de kinésithérapie. La toux, au départ sèche, est devenue productive. La maman de Kylian souhaite lui administrer des sachets d’Exomuc (acétylcystéine) qui se sont révélés efficaces pour traiter la toux grasse d’Enzo, son fils aîné. Elle en demande une boîte à la pharmacie.

Cette demande est-elle justifiée ?

Les difficultés respiratoires inquiètent les parents de Kylian qui constatent que le médecin n’a prescrit aucun médicament à leur fils. Le pharmacien conforte les mesures préconisées par le médecin et explique à la maman qu’un mucolytique n’a pas sa place dans le traitement de la bronchiolite.

ANALYSE DU CAS

La bronchiolite est une infection virale respiratoire épidémique saisonnière survenant chez des enfants de moins de deux ans. Elle débute par une rhinopharyngite caractérisée par une rhinorrhée, une toux sèche et une obstruction nasale. Après 24 à 72 heures, la bronchiolite s’installe avec une polypnée et une distension thoracique, des râles crépitants en fin d’inspiration et des sibilances expiratoires. La toux, d’abord sèche et irritative, devient grasse. La maman de Kylian pense que la respiration de l’enfant serait améliorée par la prise d’un mucolytique.

ATTITUDE À ADOPTER

Le pharmacien explique que les mucolytiques modifient la viscosité du mucus et peuvent gêner les manœuvres de drainage bronchique effectuées par le kinésithérapeute. De plus, une enquête officielle de pharmacovigilance, présentée en mars 2009 sur les effets indésirables des mucolytiques chez le nourrisson de moins de deux ans, a montré qu’ils peuvent entraîner une aggravation de l’atteinte respiratoire : aggravation de la respiration et de la bronchiolite, augmentation de la toux et des sécrétions bronchiques, dyspnée, gêne ou détresse respiratoire.

Profils particuliers

Patrick est sous Aotal depuis 3 mois

Chômage et dépression ont conduit Patrick, 32 ans, à devenir dépendant à l’alcool. Il est traité depuis 3 mois par Aotal, Valium et zolpidem (1 cp le soir). En visite chez ses parents, il présente une toux sèche depuis 2 jours. Il a terminé le flacon de Poléry de sa mère, prescrit dans le cadre d’un syndrome grippal. Devant l’amélioration des symptômes, il désire poursuivre le traitement. Il vient chercher spontanément un flacon de Poléry à la pharmacie, où il est connu.

Faut-il accéder à la demande du patient ?

Sachant que Patrick est abstinent depuis quelques mois, le pharmacien vérifie la composition du sirop. Il constate que le sirop Poléry renferme de l’alcool.

ANALYSE DU CAS

Patrick est traité depuis 6 mois par Aotal à la suite d’une cure ambulatoire de sevrage alcoolique. L’objectif est d’aider le patient à rester abstinent. Valium a été poursuivi au-delà de la durée maximale recommandée de 10 jours (pour un sevrage alcoolique) du fait de crises d’angoisse fréquentes ne répondant plus à l’alprazolam. Son sommeil n’étant pas normalisé, Patrick continue à prendre chaque soir un comprimé de zolpidem. La toux qu’il présente depuis hier a été calmée par la prise de Poléry, mais le titre alcoolique de celui-ci est de 2 % v/v.

ATTITUDE À ADOPTER

Dans le cadre d’un sevrage alcoolique, le médecin et le pharmacien doivent évincer, tant au niveau de la prescription qu’au niveau du conseil, tout médicament qui renferme de l’alcool dans sa composition.

De plus, il convient d’éviter un dérivé opiacé ou un antitussif antihistaminique pour ne pas majorer la sédation provoquée par le traitement en court. Un sirop à base d’hélicidine ou d’oxéladine peut être conseillé durant 5 jours.

Profils particuliers

Du Néo-Codion pour Julien en sevrage aux opiacés !

Jean-François est suivi depuis plusieurs années pour un sevrage aux opiacés. Il vient chaque semaine à la pharmacie chercher sa boîte de Subutex (buprénorphine). Il est actuellement stabilisé à la posologie de 8 mg/jour. Un matin, il arrive à la pharmacie en toussant et demande du sirop Néo-Codion. La pharmacienne, qui connaît très bien Jean-François, s’étonne d’une telle demande.

Quel risque pour Julien ?

Le sirop Néo-Codion peut faire évoquer à Jean-François son addiction et être à l’origine d’effets indésirables.

ANALYSE DU CAS

La buprénorphine est une molécule agoniste-antagoniste des récepteurs mu. La codéine contenue dans Néo-Codion est un agoniste faible des récepteurs morphiniques. Si Jean-François prend la codéine et ensuite la buprénorphine, cette dernière va déplacer la première de ses récepteurs, risquant de provoquer un syndrome de sevrage. Si la codéine est administrée après la buprénorphine, la codéine ne pourra pas se fixer sur les récepteurs morphiniques et n’exercera donc pas d’effet pharmacologique. Il y a diminution d’efficacité de chacun des produits. De plus, il y a addition des effets sédatifs des deux produits et risque de dépression respiratoire. L’alcool présent dans le sirop majore également la sédation.

ATTITUDE À ADOPTER

La pharmacienne opte pour un sirop non sédatif à base d’oxéladine ou d’hélicidine, sans alcool. Elle conseille à Jean-François d’éviter les dérivés opiacés, qui pourraient lui rappeler sa dépendance.

ATTENTION !

Antitussifs opiacés et antitussifs antihistaminiques peuvent provoquer une somnolence. Ils doivent être déconseillés en cas de conduite.

À RETENIR

Déconseiller la prise de mucolytique (acétylcystéine) ou de mucorégulateur (carbocistéine) aux patients atteints d’ulcères gastroduodénaux.

À RETENIR

Des réactions cutanées et/ou allergiques (prurit, urticaire, éruption érythémateuse, œdème du visage) sont des effets indésirables possibles de l’acétylcystéine et de la carbocistéine.

ATTENTION !

La plupart des sirops contre la toux sont contre-indiqués en-dessous de 2 ans : Toplexil, Hélicidine, ainsi que toutes les spécialités à base d’acétylcystéine, carbocistéine ou benzoate de méglumine..

ATTENTION !

Les opiacés sont contre-indiqués dans les insuffisances respiratoires, en particulier l’asthme. Une toux chez un asthmatique nécessite un avis médical.

La toux chez l’enfant

→ Chez l’enfant, les toux sèches peuvent être provoquées par la coqueluche, les pneumopathies virales, les trachéobronchites allergiques, les corps étrangers.

→ Les bronchites, les bronchiolites, la mucoviscidose, les bronchopathies par inhalation, les sinusites occasionnent des toux grasses.

→ Les toux rauques traduisent une laryngite et une toux avec expectoration sifflante, un asthme.

→ Quelle que soit l’étiologie, l’automédication peut se révéler dangereuse ou inappropriée et les antitussifs doivent être limités au cas où l’enfant a du mal à supporter sa toux. Le traitement, symptomatique, ne doit pas dépasser 5 jours. Une toux persistante justifie une consultation médicale.

→ Les antitussifs opiacés à base de codéine, dextrométhorphane, pholcodine, éthylmorphine ou noscapine sont contre-indiqués chez l’enfant de moins de 30 mois et en cas d’insuffisance respiratoire ou d’asthme.

→ Les antitussifs antihistaminiques sont plutôt recommandés en cas de toux sèche survenant la nuit en raison de leur effet sédatif. Ils ne doivent pas être utilisés chez l’enfant de moins de 2 ans.

→ En cas de toux grasse, les fluidifiants bronchiques et les expectorants ont vu leur efficacité remise en cause. De plus, ils peuvent être à l’origine de réactions allergiques graves, notamment cutanés, et d’aggravations des troubles respiratoires. Ils sont déconseillés chez les enfants de moins de deux ans.

Les limites du conseil d’une toux

→ La toux est un motif fréquent de conseil officinal. Sa prise en charge nécessite une grande prudence du fait des multiples étiologies possibles.

→ A l’officine, il faut prendre en considération un condiv évocateur (épidémie, rhinopharyngite…) et se limiter à une toux débutante, sans signes de gravité (dyspnée, cyanose, douleur thoracique, asthénie…).

→ Avant de conseiller un médicament, il est impératif de tenir compte des particularités physiologiques et pathologiques du patient (âge, grossesse, asthme, diabète, adénome de la prostate…). S’informer également des traitements en cours afin d’éviter interactions et contre-indications éventuelles et d’éliminer une cause iatrogène de la toux (IEC, aérosols de corticoïdes…).

→ En cas de toux rebelle installée depuis plus de 3 semaines, le patient doit être orienté vers son médecin traitant qui réalisera un bilan étiologique en s’appuyant si nécessaire sur des examens radiologiques ou endoscopiques avant de décider du traitement. En effet, une toux chronique peut être la manifestation d’une pathologie ORL (laryngite, sinusite, amygdalite), bronchopulmonaire (asthme, bronchite, coqueluche), digestive (RGO) ou d’une pathologie plus grave (mucoviscidose, sida, cancer).

→ Dans tous les cas, en profiter pour aborder le statut tabagique du patient. Lui conseiller si nécessaire un sevrage tabagique.

À RETENIR

Les antihistaminiques exposent à un risque de rétention urinaire en cas de troubles urétroprostatiques. Prudence chez tout homme de plus de 50 ans !

À RETENIR

Les IMAO (iproniazide, moclobémide) font l’objet de nombreuses interactions. L’association au dextrométhorphane est contre-indiquée.

ATTENTION !

Les dérivés phénothiaziniques ne doivent pas être associés aux médicaments dopaminergiques (cabergoline, quinagolide).

À RETENIR

Il est illogique d’associer un antitussif et un mucolytique ou fluidifiant, qui favorise l’expectoration.

ATTENTION !

De nombreux sirops comportent du saccharose. Prudence chez les diabétiques !

À RETENIR

Du fait de leurs propriétés anticholinergiques, les antitussifs antihistaminiques ne sont pas recommandés chez les patients atteints de maladie d’Alzheimer.

La toux chez la personne âgée

→ Les personnes âgées étant souvent polymédiquées, de nombreuses molécules sont à éviter lorsqu’il s’agit de soigner leur toux.

→ Les dérivés opiacés entraînent constipation et sédation ; ces effets se surajoutent aux effets secondaires des médicaments souvent pris par cette classe d’âge : antalgiques de palier 2 ou 3, hypnotiques, antihypertenseurs centraux…

→ Les antitussifs antihistaminiques anticholinergiques (pimétixène, alimémazine, oxomémazine, chlorphénamine, prométhazine) occasionnent en plus vertiges, hypotension orthostatique, sécheresse buccale, confusions, désorientations… Ceci peut perturber l’état fonctionnel des personnes âgées dont les performances cognitives, les temps de réaction, la mémoire sont diminués. Le risque de chutes est augmenté. Ces différents effets sont majorés par la prise concomitante de médicaments aux mêmes propriétés : antispasmodiques anticholinergiques, neuroleptiques phénothiaziniques, antidépresseurs imipraminiques, antiparkinsoniens anticholinergiques, médicaments de l’instabilité vésicale… Dès lors, mieux vaut s’abstenir de proposer un antitussif antihistaminique aux personnes âgées.

Allaitement et toux

→ En cas de toux chez la femme qui allaite, le recours à la codéine, en traitement bref, est possible si l’enfant est en bonne santé. Il s’agit de l’opiacé pour lequel les données sont les plus nombreuses. La codéine est métabolisée en morphine. L’enfant allaité reçoit donc de la codéine et de la morphine par le lait de sa mère. La quantité de codéine retrouvée dans le lait est faible.

→ En raison des risques de dépression respiratoire, une surveillance s’impose chez le nourrisson allaité par une mère prenant de la codéine si celui-ci est un prématuré ou de faible poids, ou s’il est âgé de moins d’une semaine.

Si le nourrisson souffre d’un problème respiratoire, la prise de codéine est contre-indiquée chez la mère qui allaite. Des doses suprathérapeutiques ingérées par elle peuvent entraîner hypotonie et pauses respiratoires chez son bébé.

→ Dans tous les cas, il faut surveiller le transit intestinal de l’enfant et rechercher une somnolence.

→ En ce qui concerne les autres opiacés tels que pholcodine et dextrométhorphane, étant le manque de données publiées sur ces deux molécules en cas d’ allaitement, il est souhaitable de s’abstenir de les utiliser chez la femme qui allaite.

ATTENTION !

Ne préconiser chez la femme enceinte que les produits bien évalués. Proscrire ceux qui contiennent de l’alcool.

À RETENIR

Seringues ou gobelets doseurs doivent être replacés dans l’emballage après utilisation.

À RETENIR

Les mucolytiques ne sont pas indiqués dans la prise en charge de la bronchiolite.

ATTENTION !

De nombreux sirops contiennent de l’alcool. Le titre alcoolique peut monter jusqu’à 31,21 % v/v (Terpine Gonnon), soit 3,7 g d’alcool par cuillère à soupe.

À RETENIR

Pas de dérivés opiacés à un ex-héroïnomane, ni à un patient sous traitement de substitution aux opiacés (buprénorphine, méthadone) !

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