Une nouvelle conception de la contraception - Le Moniteur des Pharmacies n° 2826 du 10/04/2010 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2826 du 10/04/2010
 

Enquête

Depuis près de dix ans, les pharmaciens jouent un rôle essentiel dans la délivrance de la contraception d'urgence. Avec la loi HPST, qui élargit leurs compétences en matière de contraception, d'indispensables, les officinaux vont devenir incontournables.

Les pharmaciens sont au centre du dispositif de prévention des grossesses non désirées à travers la contraception d'urgence », notent Claire Aubin et Danièle Jourdain-Menninger, les deux inspectrices de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas), dives du rapport sur l'évaluation des politiques de prévention des grossesses non désirées et de prise en charge des interruptions volontaires de grossesse (IVG), remis le 2 février 2010 à Roselyne Bachelot. « Le rôle des pharmaciens va bien au-delà de la simple délivrance. Généralement seul interlocuteur d'une femme en situation de fragilité [...], le pharmacien est appelé à jouer un rôle particulièrement important d'information et de conseil dans une circonstance et sur un sujet particulièrement délicats », poursuivent-elles.

La délivrance de la pilule du lendemain dans les officines a largement progressé depuis 2002, année de mise en oeuvre du dispositif, notamment pour les mineures. En 2002, l'Assurance-maladie a ainsi remboursé 80 110 boîtes de contraception d'urgence, dont 50 476 pour des mineures. En 2007, 332 383 boîtes ont été délivrées, dont 289 376 à des jeunes filles de moins de 18 ans, soit 5,7 fois plus. Cependant, les conditions de délivrance ne sont pas toujours optimales. Le décret du 9 janvier 2002 précise que le professionnel doit s'entretenir avec la mineure sur sa situation et l'informer sur la contraception. La configuration de l'officine ne permet pas toujours de préserver la confidentialité et d'accueillir les mineures dans un espace séparé du comptoir. En période d'affluence ou de garde, ce problème est encore plus accentué. Enfin, il est difficile pour les mineures, voire pour les femmes, de conserver l'anonymat dans la pharmacie de son quartier ou d'une petite ville. « Dans un petit village, les clientes préfèrent s'adresser à des pharmacies hors de la commune par mesure de discrétion », explique un pharmacien lors de l'enquête réalisée par la Direction régionale des affaires sanitaires et sociales (DRASS) d'Alsace à la demande de l'Igas, auprès des 462 pharmacies, de ville et hospitalières, de la région. Le manque de temps et de réceptivité des femmes, en particulier des jeunes, constitue aussi une difficulté pour les professionnels. Dans la même enquête, des pharmaciens remarquent qu'il est « impossible de communiquer », les mineures et les femmes refusant des explications - « elles prétendent toujours savoir » - ou n'en tenant pas compte. « Nous essayons toujours d'engager le dialogue, mais nous avons parfois des réponses peu aimables comme "je m'en fous, j'ai le droit à la pilule du lendemain" », commente Francis Woltz, pharmacien à Molsheim en Alsace, et partenaire du réseau Info-Ado (voir page 39). La gêne et la timidité empêchent également un dialogue plus approfondi. Ces problèmes sont peut-être à l'origine de la différence négative entre le nombre de brochures distribuées et celui de boîtes délivrées.

Quant aux refus de principe, si, comme le souligne l'Igas, ils « sont devenus rares », ils existent néanmoins. Il arrive également que certains pharmaciens ne facilitent pas la demande des mineures qui s'adressent à eux. « Ils réclament la carte d'identité et certains la photocopient. Ou alors, ils veulent que la mineure paye la boîte de contraception d'urgence », relate Caroline Rebhi, conseillère conjugale au Planning familial à Paris et dans les Hauts-de-Seine. Un témoignage qui n'est pas unique. « Le code de déontologie des pharmaciens ne comporte pas de clause de conscience. Les officinaux ne peuvent pas s'en prévaloir pour refuser de délivrer une contraception d'urgence », observe Jean Lamarche, pharmacien à Paris et président de l'association Croix verte et ruban rouge. Isabelle Adenot, présidente du Conseil national de l'ordre des pharmaciens, est moins formelle : « Le pharmacien doit agir en tant que professionnel de santé et ne jamais laisser un être humain en attente. Il doit soit répondre lui-même à la demande, soit orienter la personne vers un autre confrère. » En revanche, Danièle Jourdain-Menninger est claire. « Un pharmacien ne peut pas refuser de délivrer une boîte de contraception d'urgence. Il y a alors refus de vente », déclare l'inspectrice de l'Igas. Enfin, il n'est pas inutile de rappeler que la pilule du lendemain n'est pas une pilule abortive.

Malgré ces points négatifs, le dispositif fonctionne globalement et s'est même amélioré au fil des ans. Pour autant, l'accès à la contraception d'urgence n'a pas abouti à une diminution du nombre d'IVG. En 2006, le nombre d'IVG a été évalué à 209 699 en France métropolitaine et à 13 455 dans les départements d'outre-mer. Alors même que les femmes rencontrent, plus de 35 ans après la légalisation de l'avortement, des difficultés pour accéder à l'IVG : centres moins nombreux et surchargés ; délais d'attente supérieurs (8 jours) à ceux recommandés par la Haute Autorité de santé (5 jours) ; IVG médicamenteuse insuffisamment proposée... Une situation encore plus paradoxale, lorsque l'on sait que les femmes françaises se placent à la première place mondiale dans l'utilisation de méthodes médicales de contraception comme la pilule et le stérilet.

Le paradoxe français

L'enquête COCON, première enquête quantitative sur la contraception menée auprès de 3 000 femmes entre 2001 et 2004, montre que la pilule et le stérilet représentent plus de 80 % de la couverture contraceptive (60 % des femmes utilisant la pilule, 23 % le stérilet et 10 % le préservatif). Le dernier baromètre santé de l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé (INPES), réalisé en 2005, confirme ces résultats : 58,70 % des Françaises prennent la pilule et 24,20 % ont un stérilet. Ce qui est loin d'être le cas dans d'autres pays. Par exemple, aux Etats-Unis, 20 % des femmes utilisent la pilule et 1 % le stérilet (source : Nations unies). Comment expliquer ce paradoxe ?

Il y a en France une norme contraceptive. Les travaux de recherche révèlent que certaines méthodes sont, souvent implicitement, associées aux différentes phases de la vie sexuelle des femmes. Ainsi, le préservatif masculin est préconisé, seul ou avec la pilule, en début de vie sexuelle. La pilule devient ensuite le contraceptif de référence pour les femmes jeunes dès qu'elles ont une relation de couple stable. Enfin, le stérilet est recommandé aux femmes déjà mères. Les méthodes les plus récentes tels l'implant, le patch et l'anneau vaginal restent marginales, voire très peu connues, tant par les utilisatrices potentielles que par les prescripteurs. En outre, des moyens de contraception gardent une image liée à une situation bien précise. C'est le cas du stérilet, envisagé uniquement comme une méthode destinée aux multipares. Or, il peut tout à fait être utilisé chez les jeunes filles et les femmes nullipares. Enfin, la stérilisation n'existe pratiquement pas en France, alors qu'elle est utilisée par près d'un couple sur deux sur la plupart des continents. Il faut dire que la stérilisation à visée contraceptive n'est légale que depuis la loi du 4 juillet 2001.

Outre la norme, les professionnels constatent des problèmes d'observance de la pilule. L'efficacité de cette contraception est théoriquement très élevée. Mais, dans la pratique, elle ne l'est pas : 20,9 % des grossesses non prévues interviennent alors que les femmes étaient sous pilule. Oubli, horaires de travail décalés, vie affective et sexuelle complexe sont à l'origine des problèmes d'observance. L'Igas souligne qu'une femme doit gérer au quotidien plus de 8 000 comprimés durant sa durée de vie féconde (de 17 à 50 ans). « On comprend [...] la difficulté d'effectuer un tel parcours "sans faute" », notent les divs. Sans compter l'information mal diffusée et mal comprise sur ce type de contraception. « Les médecins n'expliquent pas toujours bien la prise de la pilule et les jeunes filles ne comprennent pas forcément bien l'utilisation de ce moyen contraceptif. Par exemple, une jeune fille enceinte m'a expliqué qu'elle prenait la pilule uniquement les jours où elle avait un rapport sexuel », explique Caroline Rebhi. Claire Aubin et Danièle Jourdain-Menninger font le même constat : les conditions de prescription d'une contraception ne sont pas optimales. Outre un problème de formation initiale des médecins généralistes, voire des gynécologues, les praticiens n'accordent pas suffisamment de temps et d'attention aux patientes. En matière de contraception, les professionnels de santé doivent prendre en compte non seulement les critères médicaux, mais également psychologiques, sociologiques et économiques.

« La meilleure contraception, c'est celle que l'on choisit. » Ce slogan, thème de la dernière campagne grand public sur la contraception, n'est pas anodin. Professionnels de santé et, plus récemment, pouvoirs publics sont effectivement parvenus à cette conclusion. Pour qu'une méthode de contraception soit efficace, elle ne doit pas être « imposée » par le prescripteur, mais doit véritablement répondre aux besoins et attentes de l'utilisatrice. Si la prise quotidienne à heures fixes de la pilule constitue une contrainte trop grande pour elle, il faut pouvoir lui proposer une autre méthode, peut-être moins efficace en théorie, mais dont l'observance sera respectée. Ce qui suppose que prescripteurs et patientes disposent d'informations complètes sur l'ensemble des moyens de contraception, leurs avantages et leurs inconvénients, leur coût et leur prise en charge par l'Assurance-maladie.

Ce qui implique également une information le plus tôt possible, c'est-à-dire durant la scolarité. La loi du 4 juillet 2001 a rendu obligatoire l'éducation à la sexualité en milieu scolaire, mais son application présente d'importantes carences. Ainsi, il n'y a pas de politique nationale en ce domaine, chaque rectorat étant maître en la matière. Pour améliorer l'information et l'accès à la contraception et à l'IVG, l'Igas propose dans son rapport une série de recommandations. Le 8 mars dernier, à l'occasion de la Journée de la femme, Roselyne Bachelot a annoncé la mise en oeuvre de douze mesures, inspirées directement du rapport. Les futures agences régionales de santé (ARS) doivent intégrer la prévention et la prise en charge des grossesses non désirées comme « une composante à part entière de l'offre de soins et de prévention », pour reprendre les termes de Roselyne Bachelot. Il est certain que la « démédicalisation de la contraception » devient inévitable pour des raisons de santé publique (diminution du nombre d'IVG), d'organisation et d'économie (démographie des médecins et réduction des coûts). La loi HPST (art. L 5 125-23-1) permet ainsi aux pharmaciens de délivrer une contraception orale pour une durée supplémentaire de six mois maximum aux patientes ayant une ordonnance périmée datant de moins d'un an (l'arrêté fixant une liste des produits remboursables doit être publié). Dans ce condiv, les pharmaciens vont devenir incontournables tant pour la délivrance de la contraception que pour l'information et le conseil des patients. Ce qui sera d'autant plus vrai si l'expérimentation de prescription directe par les pharmaciens d'une contraception orale inscrite dans le projet de loi HPST, mais retoquée par le Conseil constitutionnel pour une question de forme (la durée de l'expérimentation n'était pas précisée), se concrétise.

Les pharmaciens s'impliquent

Sur le terrain, de nombreux pharmaciens sont déjà mobilisés dans des réseaux qui favorisent l'accès des mineurs à la contraception. Tour d'horizon.

Annoncée par Roselyne Bachelot en mars, la possibilité pour les mineures de consulter un médecin généraliste de façon anonyme et gratuite n'est pas une nouveauté. Ce dispositif est déjà expérimenté sur le terrain grâce à des réseaux regroupant médecins, pharmaciens et, dans certains cas, centres de planification.

Précurseur, le réseau Info-Ado de la vallée de la Bruche, en Alsace, a été lancé en 2003. Il compte sept médecins généralistes ou gynécologues et douze pharmaciens des communes de la vallée. « Nous sommes dans une zone de semi-campagne. Le centre de planification le plus proche est à Strasbourg, à 25 kilomètres. Il est donc difficile d'accès pour les jeunes, explique Jacques Machu, médecin gynécologue et responsable du réseau. Pour faire face au nombre élevé d'IVG chez les 16-18 ans, nous avons cherché avec Info-Ado une solution avec différents partenaires. Le réseau permet aux mineures de consulter un médecin gratuitement et anonymement pour obtenir une contraception. Nous remplissons une feuille de soins spécifique avec le sigle "Info-Ado". Les mineures peuvent alors s'adresser au pharmacien qui s'engage à les recevoir discrètement et à leur délivrer la contraception gratuitement. Dès le départ, les pharmaciens se sont mobilisés. Leur rôle est aussi d'informer et d'orienter les jeunes vers le réseau. » Pour Jacques Machu, le bilan est positif, la demande d'IVG de la part de mineures ayant largement diminué. « Le dispositif fonctionne très bien, commente Francis Woltz, pharmacien à Molsheim, dans la vallée. Notre équipe est sensibilisée et nous avons un bureau pour recevoir les mineures. »

Des pharmaciens partenaires actifs

Mis en place fin 2009 sous la houlette du CHU de Limoges, le dispositif Info-Ado 87 couvre dix communes de la Haute-Vienne et leurs pharmacies, ainsi qu'une vingtaine de médecins. « Lorsque nous avons lancé le réseau, les pharmaciens se sont rapidement impliqués alors que les médecins étaient moins demandeurs », déclare le Dr Joëlle Mollard, médecin gynécologue au CHU de Limoges. « Nous avons été sollicités par le réseau en raison de notre éloignement géographique du centre de planification, explique Sylvain Moreau, pharmacien à Chalus, ville de 1 800 habitants et comprenant un collège. Nous avons tout de suite accepté, car nous constatons une surconsommation de Norlevo. Le réseau a réellement démarré depuis trois à quatre mois et nous avons délivré entre cinq et sept boîtes mensuelles ou trimestrielles. » A Saint-Mathieu, autre commune de la Haute-Vienne, Patricia Thepault, pharmacienne titulaire, n'avait, en février dernier, pas encore délivré de contraception dans le cadre d'Info-Ado, malgré la présence d'un collège et d'une Maison familiale et rurale à proximité. « Les jeunes laissent venir... Ils n'anticipent pas. Nous vendons d'ailleurs très peu de préservatifs », remarque la pharmacienne.

Informer les jeunes

Autre expérience, qui a suscité bien des polémiques : celle du « Pass'contraception » lancé en Poitou-Charentes pour les mineures. Après des débuts difficiles dus au refus du rectorat de participer à l'opération, 1 400 chéquiers « Pass'contraception » ont été diffusés en novembre 2009 aux 99 infirmières scolaires de la région. Le « Pass » ouvre droit à une consultation médicale, une prise de sang, des analyses médicales et à des contraceptifs gratuits, financés entièrement par le conseil régional. L'ensemble des professionnels de santé sont impliqués dans le dispositif. En décembre 2009, seuls deux « Pass'contraception » ont été distribués par l'infirmière d'un lycée de Poitiers (chiffres fournis par le conseil régional le 8 mars 2010). La région veut élargir la diffusion de cet outil aux jeunes femmes en situation difficile et va récupérer ces chéquiers pour les mettre à disposition des médecins.

Dans la région des Pays de la Loire, le Planning familial met en oeuvre un autre type de dispositif. « Nous avons été sollicités par des communes rurales pour favoriser l'accès des mineurs à la contraception. Le principe est de créer des antennes du Planning au sein des communes éloignées du centre de planification de Nantes afin de recevoir les mineurs et de les orienter vers le réseau de soins de ville », détaille Martine Leroy, présidente de la Fédération régionale du mouvement français du planning familial des Pays de Loire. Les communes volontaires, six actuellement en Loire-Atlantique, dans le Maine-et-Loire et dans la Sarthe, fournissent les locaux et organisent le réseau des partenaires, médecins, pharmaciens et laboratoires d'analyses médicales. Les conseillères conjugales du Planning assurent des permanences de 4 heures par semaine. Les consultations et analyses médicales, et les délivrances de contraception sont prises en charge par le Planning qui rembourse les professionnels de santé. « Notre objectif est de développer et de pérenniser les antennes dans tous les départements de la région et de former des conseillères issues des communes. Mais il faut du temps pour que le dispositif soit connu des jeunes et que le bouche-à-oreille marche. Reconnaître que les jeunes ont une sexualité est nécessaire », commente Martine Leroy.

Informer les jeunes est, en effet, la condition sine qua non pour qu'ils s'adressent à ces structures. « Il n'est pas facile pour un jeune, que je suis depuis qu'il est bébé, de venir me voir pour parler de sexualité », explique Bertrand Grebaux, médecin généraliste à Saint-Mathieu et partenaire d'Info-Ado 87. « On doit communiquer plus, car le réseau commence à s'essouffler. En 2009, nous n'avons effectué que trois délivrances Info-Ado », constate Francis Woltz. Et de conclure : « Nous devons faire rentrer les jeunes dans les pharmacies, mais il y a encore beaucoup de tabous et de freins. »

Sondage direct medica

Sondage réalisé par téléphone entre le 15 et le 16 mars 2010 sur un échantillon représentatif de 100 pharmaciens titulaires, en fonction de leur répartition géographique et de leur chiffre d'affaires.

Vous est-il arrivé de refuser de délivrer la contraception d'urgence ?

Remettez-vous systématiquement une brochure d'information sur la contraception d'urgence lors de la délivrance d'une pilule du lendemain ?

Avez-vous toujours un entretien confidentiel avec la personne qui vient chercher une contraception d'urgence ?

Estimez-vous être suffisamment formé pour répondre aux questions sur la contraception ?

Seriez-vous prêt à adhérer à un réseau avec des médecins pour délivrer une contraception gratuite et anonyme aux mineures ?

Seriez-vous prêt à prescrire, dans un cadre réglementé, une première contraception à des jeunes filles et à des femmes ?

Pensez-vous que les pharmaciens jouent un rôle de conseil et d'information suffisant sur la contraception et les IST ?

repère

Le décret du 9 janvier 2002

Article 1 : La délivrance aux mineures des médicaments indiqués dans la contraception d'urgence et non soumis à prescription médicale obligatoire tels que définis au deuxième alinéa de l'article L. 5134-1 du code de la santé publique est effectuée dans les conditions définies à l'article R. 5015-48 et au quatrième alinéa de l'article R. 5089-9 du même code. La délivrance par le pharmacien est précédée d'un entretien visant à s'assurer que la situation de la personne mineure correspond aux critères d'urgence et aux conditions d'utilisation de cette contraception. L'entretien permet également au pharmacien de fournir à la mineure une information sur l'accès à une contraception régulière, sur la prévention des maladies sexuellement transmissibles et sur l'intérêt d'un suivi médical. Cette information est complétée par la remise de la documentation dont dispose le pharmacien sur ces sujets. Le pharmacien communique également à la mineure les coordonnées du centre de planification ou d'éducation familiale le plus proche.

Article 2 : La minorité à laquelle est subordonnée la gratuité de la délivrance prévue à l'article L. 5134-1 est justifiée par la simple déclaration orale faite au pharmacien par l'intéressée.

Les principales mesures annoncées le 8 mars 2010

-L'Igas est chargée de réaliser un bilan de la situation de l'ensemble des organismes de planification, d'éducation et de conseil familial.

-Pour répondre au problème spécifique des zones non couvertes, notamment en milieu rural, il sera mis en place une organisation permettant le recours, dans les mêmes conditions de gratuité et d'anonymat que les centres de planification, aux médecins généralistes volontaires.

-La formation initiale des médecins sur la contraception sera améliorée : les internes pourront effectuer des stages dans les centres de planification et d'éducation familiale ; la prescription de la contraception devra être une compétence acquise durant la formation en stage à l'hôpital ou auprès des médecins généralistes maîtres de stage.

-Les laboratoires pharmaceutiques sont fortement incités à s'engager dans une démarche de remboursement des nouvelles formes de contraception hormonale non orale (patch et anneau).

-Il sera proposé à la Haute Autorité de santé d'établir des recommandations pour la contraception d'urgence.

-Les forfaits IVG seront augmentés de près de 50 % dès 2010.

-Un groupe de travail sera mis en place pour élaborer un cahier des charges sur la pratique des IVG médicamenteuses, qui peuvent maintenant être pratiquées en ville.

HRA Pharma forme les pharmaciens à la contraception d'urgence

Depuis octobre 2009, HRA Pharma propose aux pharmaciens une formation e-learning sur la contraception d'urgence Ellaone. D'une durée d'une demi-heure, ce module réalisé par l'UTIP aborde différents points : histoire de la contraception d'urgence, mécanisme de la molécule (ulipristal acétate), réponses pratiques aux demandes des patientes (efficacité, utilisation, effets secondaires, conduite à avoir en cas d'oubli de pilule...). HRA Pharma met également à la disposition des pharmaciens de la documentation à destination du grand public. L'objectif du laboratoire est de former environ 5 000 pharmaciens. Début mars, seulement 500 professionnels s'étaient inscrits auprès de HRA Pharma.

Toujours en partenariat avec l'UTIP, la société organise également des soirées formation sur la contraception d'urgence depuis 2007 (une douzaine par an). Environ 1 800 pharmaciens ont été formés dans ce cadre.

Danièle Jourdain-Menninger, inspectrice de l'IGAS

« Les pharmaciens ont un rôle à jouer »Vous avez travaillé durant un an pour rédiger les cinq rapports sur la contraception et l'IVG. Quelle est votre conclusion globale ?

La pilule ne constitue pas une réponse pour toutes les femmes. D'autres moyens de contraception correspondraient mieux à certaines situations. Tous les intervenants rencontrés lors de notre mission ont souligné ce point, notamment ceux qui travaillent dans les centres d'IVG.

Que préconisez-vous ?

Nous préconisons le remboursement de l'anneau vaginal et du patch. Nous recommandons aussi une meilleure formation des médecins concernant l'IVG et la contraception.

Quel rôle peut jouer le pharmacien ?

Les pharmaciens ont un rôle de conseil. En fait, tout ce qui peut faciliter l'information des femmes, des hommes et des jeunes doit être favorisé. Les réseaux sont donc importants pour démédicaliser la contraception. Les pharmaciens ont aussi un rôle à jouer dans l'éducation à l'école. De façon générale, les professionnels de santé doivent participer à l'éducation sexuelle pour faire face aux idées reçues et aux tabous.

« Se former à la contraception, c'est indispensable »

Brigitte Courtois, pharmacienne à Brissac (Maine-et-Loire)

« J'avais déjà suivi une formation sur la contraception d'urgence, mais je n'avais pas encore tous les éléments pour poser les bonnes questions aux jeunes filles et aux femmes, et les informer plus complètement. Françoise Tourmen (interview page 41) est donc venue en officine deux journées complètes pour former l'équipe - trois pharmaciens dont un adjoint et cinq préparateurs - sur la contraception d'urgence mais aussi sur les contraceptifs en général. Nous délivrons, en effet, peu de contraception d'urgence. En revanche, beaucoup de jeunes filles sont sous pilule. Nous nous sommes d'ailleurs rendu compte que les médecins prescrivaient facilement la pilule. Le rôle du pharmacien est de compléter l'information fournie par le médecin et de faire connaître d'autres moyens de contraception, comme le stérilet, auprès des jeunes filles et des femmes. Nous avons de nombreuses clientes qui ont la quarantaine. Il est aussi très important de parler de contraception avec des femmes qui viennent d'accoucher. D'ailleurs, nous disposons d'un espace confidentiel.

Lors de ces deux journées, nous avons également reçu des groupes de jeunes. Françoise Tourmen avait apporté une mallette avec des contraceptifs factices. Nous avons pu mettre en pratique ce que nous avions appris avec les jeunes et nos clientes ! Par exemple, une femme est venue avec sa fille pour s'informer sur le vaccin contre le papillomavirus. Nous avions aussi réalisé une vitrine entièrement consacrée à la contraception sur le thème de la dernière campagne de communication "Choisir sa contraception". Je crois que les pharmaciens doivent comprendre que ce sujet est essentiel et qu'il ne faut pas refuser de délivrer la contraception d'urgence. Nous pouvons ainsi créer des liens avec la clientèle. »

« L'AFC plaide pour la démédicalisation de la contraception »

Françoise Tourmen, médecin gynécologue et vice-présidente de l'Association française pour la contraception (AFC)

Vous êtes favorable à la coopération interprofessionnelle en matière de contraception. Pour quelles raisons ?

Au sein de l'AFC, nous avons beaucoup milité pour la libéralisation de la contraception, mais dans la limite du raisonnable. Il s'agit de mettre en place une coopération interprofessionnelle avec les médecins, les infirmières, les sages-femmes et les pharmaciens. La loi HPST constituerait une avancée, avec notamment le renouvellement d'ordonnances de pilules par les pharmaciens, ainsi que la prescription de contraceptifs et la pose de dispositifs intra-utérins par les sages-femmes. Mais ce n'est pas gagné, car nous constatons déjà des résistances de la part des médecins, et des polémiques. Le système français est figé. On ne compte en France que 146 000 implants et que 80 000 anneaux vaginaux posés pour un an. Nous disposons de treize contraceptifs, mais nous fonctionnons seulement avec trois : la pilule, le stérilet et le préservatif. Il faut que cela change !

Certains médecins estiment que les professionnels de santé concernés doivent être formés.

La démédicalisation implique, en effet, une formation des professionnels et un important effort d'information de la population. Il est vrai qu'en France, on adopte des divs sans préparer les professionnels ! Cela a été le cas pour la délivrance de la contraception d'urgence par les pharmaciens. Ces derniers se sont donc formés par la suite. Pour autant, la formation doit se poursuivre, y compris pour la contraception d'urgence. Je pense qu'il faudrait aussi plus d'outils, comme des contraceptifs factices fournis par les fabricants. Il est important, par exemple, de montrer aux femmes qu'un stérilet est petit et ne pèse que deux grammes, alors que son conditionnement leur paraît énorme ! Disposer d'une « mallette de contraception » serait intéressant, mais les pouvoirs publics nous renvoient vers l'industrie pharmaceutique !

Vous êtes aussi à l'origine de la proposition d'expérimentation d'une prescription directe d'une contraception orale par les pharmaciens. En quoi consiste ce projet ?

Il s'agit de permettre à des pharmaciens volontaires et formés de délivrer trois mois de contraception hormonale à des femmes de plus de 15 ans et de moins de 35 ans. Cette expérimentation serait bien sûr cadrée, avec un protocole. Les femmes doivent être en bonne santé et répondre à un questionnaire d'éligibilité. Elles sont aussi systématiquement orientées vers un médecin. De plus, la prescription n'est pas renouvelable. Enfin, l'expérimentation ferait l'objet d'une évaluation indépendante. L'Igas préconise un nouveau projet législatif pour mettre en oeuvre cette expérimentation. J'ai d'ailleurs été contactée par le ministère de la Santé après le 8 mars 2010 pour lui transmettre des éléments détaillés. L'Igas recommande aussi de faire le bilan d'une expérience similaire menée à Londres. Le condiv anglais est cependant différent, car le Royaume-Uni fait face à un nombre très élevé de grossesses chez les mineures. Il y aura donc peut-être une suite en France.

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