La croix verte vire au rouge

Les pharmaciens, victimes de la crise ? Tandis que l'an dernier l'analyse de la trésorerie des officines suscitait une vive inquiétude, c'est aujourd'hui un cri d'alarme que pousse la FSPF. C'est ce que révèle la deuxième édition de son baromètre qui décortique la situation économique des pharmacies (sur un échantillon de 4 320 pharmaciens). Or, d'après les résultats, 48 % des officines avaient leur trésorerie dans le rouge à la fin de l'année 2009, contre 36 % en 2008. Par ailleurs, des statistiques du cabinet Interfimo constatent que les procédures collectives ont crû de 40 % en 2009.

Les problèmes de trésorerie se sont étendus en 2009. Cette dégradation est en effet visible dans toutes les régions, quels que soient le profil et la taille de la pharmacie. Elle frappe aussi les officines avec un solde de trésorerie positif, car celles-ci souffrent de la contraction des délais de paiement. En effet, les pharmaciens ont perdu 17 jours de crédit fournisseurs l'an dernier, conduisant un pharmacien sur cinq (22 %) à négocier un découvert auprès de sa banque. Par ailleurs, ces difficultés de trésorerie ont conduit 14 % des officines à licencier du personnel.

Les officines de banlieue en difficulté

Le profil de l'officine déficitaire se dégage des résultats. Les officines de banlieues situées en périphérie des grandes agglomérations, desservant des populations économiquement plus fragiles, sont celles qui souffrent le plus.

Certains secteurs ou communes critiques ont été clairement identifiés, comme Mantes-la-Jolie, Saint-Denis ou Bondy en Ile-de-France, la banlieue de Rouen ou certains quartiers du Havre, mais également les pharmacies dites « 1.1 » (un seul médecin et une seule officine dans la commune) en zone rurale.

Les défaillances multipliées par quatre

La FSPF déplore plus de 80 défaillances et 120 fermetures de pharmacies en 2009. Même si ce chiffre reste très faible en valeur absolue, le nombre de défaillances a été multiplié par quatre en 4 ans. Celles-ci se concentrent en Ile-de-France (25 %), dans le Sud (24 %) et en outre-mer (17 %).

Philippe Besset, président de la Commission économie de la FSPF, n'est pas surpris par cette déroute économique : « C'est une catastrophe annoncée. Il suffit de regarder l'évolution de la marge de dispensation à l'intérieur de l'Ondam (objectif national des dépenses de l'assurance-maladie). Or, si elle avait normalement suivi l'évolution de l'Ondam voté, le réseau aurait dû récupérer 550 millions d'euros de gain de marge. Le directeur de l'Uncam (union nationale des caisses d'assurance-maladie) a reconnu que la correction de la marge des pharmaciens a été trop forte ».

Si les pouvoirs publics ne consentent pas à prendre des mesures d'urgence sur la structure de la rémunération, et si la tendance se poursuit en 2010, la FSPF prévoit le pire. Selon elle, 200 à 300 pharmacies risquent de se retrouver en procédure collective cette année et 1 500 pourraient disparaître à l'horizon 2015.