L'orthopédie placée sur un piédestal - Le Moniteur des Pharmacies n° 2758 du 13/12/2008 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2758 du 13/12/2008
 

CLERMONT-L'HÉRAULT

Initiatives

Développer l'orthopédie en milieu rural et loin des grands pôles hospitaliers, tel est le pari relevé avec brio par Martine Azémar et son équipe. Et ce grâce à l'instauration d'une relation privilégiée avec les patients. Chronique d'une spécialisation réussie.

Juchée dans l'arrière-pays héraultais, tout près du lac du Salagou, Clermont-l'Hérault est une jolie bourgade viticole où il fait bon vivre. A la Pharmacie de l'Olivier, on cultive l'art de répondre au mieux aux attentes de la clientèle, surtout depuis que Martine Azémar et son associé, Didier Blaise, se sont transférés, en 1998, dans une ancienne entreprise de matériel pour la viticulture d'une superficie de 900 mètres carrés ! « J'ai enfin pu disposer de la place qu'il me manquait pour créer un espace orthopédie », se réjouit Martine Azémar, qui exerce depuis 22 ans à Clermont-l'Hérault.

Le rayon orthopédie occupe aujourd'hui 300 mètres carrés de l'officine. « C'est un luxe de travailler dans de telles conditions ! », reconnaît Martine Azémar, titulaire d'un DU d'orthopédie. Le challenge n'était pourtant pas gagné d'avance, d'autant que les grandes villes sont éloignées (Montpellier et Béziers sont à 40 kilomètres !). La pharmacienne y voit même quelques atouts. « Ici, les gens n'ont pas à subir les embouteillages et peuvent se garer facilement. Il y a d'ailleurs un parking devant la pharmacie. Ils arrivent sans stress. » Et à la Pharmacie de l'Olivier, qui ne lésine pas sur l'étendue de l'offre, ils sont sûrs d'obtenir une réponse à leurs besoins. Des genouillères aux prothèses mammaires en passant par les orthèses de main, l'appareillage pour stomie et les articles de contention, tout y est ou presque. L'officine dispose également d'un atelier sur mesure où oeuvrent un orthopédiste et une préparatrice diplômée en orthopédie. Plus d'une trentaine de semelles y sont fabriquées chaque mois.

Savoir-faire technique et approche technologique

Côté référencement, le choix des marques (avec les échantillons correspondants) est de rigueur. « L'idée n'est pas de proposer un appareillage mais d'adapter au mieux l'appareillage à chaque personne », explique Stéphanie Hirou, la préparatrice-orthésiste. Six personnes gèrent le rayon : la préparatrice, les deux titulaires, deux adjoints et un orthopédiste. Chacun a la responsabilité d'un secteur bien défini. Mais la démarche de l'équipe ne s'arrête pas au savoir-faire technique. « Nous sommes persuadés que l'approche psychologique du patient compte beaucoup également. Prenez l'exemple de la contention. A quoi sert de proposer un article parfaitement adapté si la personne concernée est hermétique à l'idée de porter de la compression médicale ? Il est important de la rassurer auparavant », explique Martine Azémar.

Pour le bien-être des patients (et de l'équipe aussi), la pharmacienne a voulu offrir un lieu différent d'une cabine d'hôpital froide et austère. Des salons personnalisés ont été créés selon leur fonctionnalité et leurs cibles. Ainsi, la cabine de contention a été transformée en bonneterie à l'ancienne. Le coin pour les semelles a été rendu ludique pour séduire et rassurer les enfants. Les patientes opérées d'un cancer du sein sont accueillies dans une ambiance boudoir : joli canapé, tableau reproduisant une oeuvre de Rodin (femme nue vue de dos)...

« Je peux rester deux à trois heures avec une personne »

C'est Martine Azémar qui a pensé l'aménagement et le décor de chacune des pièces. Tous les meubles ont été fabriqués ensuite sur mesure. Ambiance agréable et « cocoon ». Rien n'a été laissé au hasard pour faire naître une relation de confiance entre le professionnel de santé et le patient. « L'orthopédie apprend au patient à sortir de son comptoir et à aller au-devant du malade, constate Martine Azémar, qui met un point d'honneur à préserver la confidentialité des échanges. Une fois que la personne est entrée dans le salon, je n'hésite pas à fermer la porte à clef. Ainsi, elle peut s'exprimer en toute sécurité mais aussi se déshabiller en toute tranquillité. » Les barrières existant entre le soignant et le soigné s'effacent au fur et à mesure que s'instaure le dialogue.

La titulaire, qui s'occupe des stomies et des prothèses mammaires, ne compte pas le temps passé auprès des patients. « Je peux rester deux à trois heures avec une même personne. Souvent, les femmes sortent de l'hôpital avec une ordonnance de prothèse mammaire et personne ne leur en a parlé. Je les invite à s'asseoir et à discuter. Je leur offre le café et elles se livrent... La prothèse mammaire n'est en fait qu'un prédiv pour parler du cancer et de ses aléas. Dans le cas des stomies, il peut y avoir des irritations et des douleurs, qui inquiètent beaucoup. On écoute, on rassure et on essaie de dédramatiser. On cherche toujours la meilleure solution, quitte à faire des retouches sur du matériel en série ou à fabriquer », confie la pharmacienne, qui n'a pas peur d'entrer dans l'intimité de ses patients. « C'est une démarche intellectuelle. A chaque fois j'en sors grandie. »

L'orthopédie représente 10 % du chiffre d'affaires

Stéphanie Hirou, spécialiste des orthèses de pieds et de mains, savoure quant à elle le fait d'exercer dans une pharmacie où elle dispose « de tous les moyens pour travailler au cas par cas et assurer un véritable suivi ». Les enfants qui portent des semelles sont revus tous les mois pour d'éventuelles corrections (gratuites). Chaque délivrance d'orthèse est intégrée dans le dossier patient afin que toute l'équipe puisse maîtriser un éventuel problème le jour où il se présente. Il arrive aussi à Stéphanie de se déplacer chez certains patients pour recouvrir une orthèse, d'en appeler d'autres pour s'assurer du soulagement.

Aujourd'hui, grâce à son « expertise » en orthopédie, la Pharmacie de l'Olivier draine une clientèle qui vient de tout le département, y compris des grandes villes. Certaines femmes arrivent ainsi de Nîmes pour l'achat de prothèses mammaires mais aussi et surtout pour bénéficier d'un accompagnement. Les meilleurs ambassadeurs de l'officine sont ses clients. Martine Azémar et son associé ont parié sur la qualité et le service, le bouche-à-oreille s'est chargé de faire leur réputation. L'orthopédie représente désormais 10 % du chiffre d'affaires de l'officine, qui dépasse les 3 millions d'euros.

« Il faut du temps pour se faire connaître, mais, qu'importe, je suis persuadée que le professionnalisme est beaucoup plus payant que la rentabilité à court terme, insiste la titulaire, qui reste lucide. Nous avons eu de la chance de pouvoir investir dans un condiv économique propice. » Prochaine étape ? « Nous avons pensé à concevoir un salon pour recevoir les mamans et leurs bébés dans la période qui suit l'accouchement. L'idée est de leur donner des conseils sur l'allaitement et les premiers soins. On a plein de choses à apprendre aux gens », assure Martine Azémar. Autre piste : la création d'un espace cosy et éducatif pour les personnes diabétiques.

Envie d'essayer ?

Les avantages

- Créer une relation privilégiée avec les patients.

- Faire de son expertise un atout de différenciation.

- Valoriser l'image du pharmacien, trop souvent cantonnée à celle de « distributeur du médicament ».

- Fidéliser et développer sa clientèle à travers la qualité d'une prestation.

- Avoir la satisfaction de rendre service aux malades

Les difficultés

- L'approche du patient demande beaucoup de temps et de disponibilité.

- Le rapport avec le handicap peut être difficile à assumer au début.

- La spécialisation en orthopédie immobilise beaucoup de stock.

- La rentabilité économique n'est pas immédiate.

Les conseils de Martine Azémar

- « Développer un service orthopédie, c'est avant tout chercher à satisfaire les clients. Il ne faut pas y voir qu'un intérêt économique. La rentabilité se conçoit sur du long terme et sur les bases d'une approche qualitative. »

- « Offrir un vaste choix de gammes et d'articles d'orthopédie est primordial pour pouvoir s'adapter aux besoins du patient. »

- « Il faut aller au-delà de la démarche médicale et valoriser le bien-être physique et psychologique du malade. »

- « L'équipe doit se faire plaisir. Cela entretient la motivation et aide à poursuivre l'accompagnement. »

Vous sentez-vous régulièrement en insécurité dans vos officines ?


Décryptage

NOS FORMATIONS

1Healthformation propose un catalogue de formations en e-learning sur une quinzaine de thématiques liées à la pratique officinale. Certains modules permettent de valider l'obligation de DPC.

Les médicaments à délivrance particulière

Pour délivrer en toute sécurité

Le Pack

Moniteur Expert

Vous avez des questions ?
Des experts vous répondent !