Acquérir une officine avec des parts en industrie - Le Moniteur des Pharmacies n° 2758 du 13/12/2008 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2758 du 13/12/2008
 

JURIDIQUE

Entreprise

Les parts en industrie permettent d'accéder progressivement à la propriété de l'officine sans un apport initial conséquent. Séduisant sur le papier, ce mécanisme, qui existe depuis trois ans, est peu prisé des officinaux. Il reste néanmoins une opportunité intéressante pour acquérir ou transmettre une officine.

Est-ce par méconnaissance ou peur de l'inconnu ? Les parts en industrie ne remportent guère de succès auprès des pharmaciens en quête d'une première installation. « Sur l'ensemble de nos clients, il n'y a pas eu une seule demande ! », constate sans grand étonnement Philippe Becker, directeur du département pharmacie de Fiducial Expertise. La réciproque est vraie s'agissant des titulaires aspirant à exercer en commun. « Le système est trop abstrait pour nos clients, analyse l'expert-comptable. En pratique, cela reste un concept et personne n'a encore donné de mode d'emploi. »

1 Fonctionnement des parts en industrie

Qu'est-ce que c'est ?

Si l'apport en industrie donne lieu à l'attribution de parts, il n'ouvre pas droit au partage des bénéfices qui ne participent pas à la formation du capital social. Dans la loi en faveur des PME du 2 août 2005 à l'origine de ce mécanisme en officine, l'associé dispose d'un délai compris entre 5 à 8 ans pour transformer ses parts en industrie en parts sociales, représentatives des titres de propriété de la société. Mais les parts en industrie donnent droit à la qualité d'associé ainsi qu'à la fonction de gérant ou de cogérant.

Quelles sont les conditions ?

Pour pouvoir réaliser des apports en industrie, il faut s'acquitter d'un ticket d'entrée : l'acquisition au minimum de 5 % des parts en capital et des droits de vote. Par exemple, avec un apport de 35 % de parts en industrie, il est possible de percevoir 40 % des bénéfices de la société en ayant seulement pris une participation au départ de 5 % dans le capital.

L'apport en industrie ne concerne que les SNC, les SARL et les SELARL. En outre, les parts en industrie ne sont pas cessibles à un tiers ni transmissibles aux héritiers en cas de décès de l'apporteur. Par conséquent, si les ex-adjoints s'engagent dans cette voie, c'est de préférence pour aller jusqu'au terme de la période convenue. Toutefois, l'associé en industrie pourra se retirer de la société à tout moment, sous certaines conditions de forme, et demander l'annulation ou le remboursement de ses parts. La société devra indemniser l'associé en industrie de l'enrichissement procuré par son travail, mais les associés restants peuvent aussi, de leur côté, réclamer des dommages et intérêts.

Comment formaliser les parts en industrie ?

La rémunération des parts en industrie doit être formalisée dans les statuts de la société. L'apporteur en industrie négocie avec les autres associés la valeur de ses parts. Celle-ci doit rester en rapport avec la valeur du travail apporté. Les parts ouvrent alors droit (dans une proportion à définir dans les statuts) à un partage des bénéfices entre les parties, en fonction des participations dans le capital et des apports de chaque associé en industrie. Par exemple, les associés peuvent décider que 65 % des bénéfices de la société vont rémunérer les parts en capital, le reste étant consacré aux parts en industrie. La répartition de cette dernière quote-part dépendra du nombre de parts en industrie détenues par chaque associé, mais elle pourra aussi tenir compte des temps de travail de chacun.

2 Des avantages pour les plus jeunes

Le premier intérêt des parts en industrie est de permettre à celui qui commence à acheter une faible part de capital de valoriser également son apport de travail et de percevoir la rémunération correspondante. Cela lui permettra à la fois d'en vivre et de financer partiellement l'acquisition progressive de parts de capital (le solde étant financé par un emprunt classique). C'est donc pour un jeune qui a un faible apport un bon moyen d'intégrer le capital à moindre coût.

Les parts en industrie sont également particulièrement indiquées pour les transmissions familiales. De l'avis de Michel Watrelos, expert-comptable (cabinet Conseils et Auditeurs Associés), « le dispositif peut fonctionner avec un titulaire qui voudrait donner une partie du capital de l'officine à son enfant pharmacien tout en conservant le pouvoir de direction, même s'il est amené avec cette association à se désengager progressivement du capital et à moins travailler dans l'officine. La détention de parts en industrie n'est là que pour permettre à l'enfant d'avoir une rémunération élevée qui lui servira à racheter la participation de son parent le jour où celui-ci arrêtera définitivement ». Les faits donnent raison à Michel Watrelos : la majorité des cas de parts en industrie est faite dans le cadre familial (lire Le Moniteur n° 2692, rubrique « Transactions »).

3 Une solution hybride existe déjà

Mais si le dispositif des parts en industrie est délaissé, c'est peut-être aussi parce que les pharmaciens ont recours à une solution voisine des parts en industrie. « En pharmacie, depuis très longtemps les praticiens utilisent la rémunération du travail couplée à la rémunération du capital pour permettre aux jeunes pharmaciens d'acquérir des parts, explique Philippe Becker. Bien évidemment, cela ne peut fonctionner qu'à la condition d'un investissement en temps inégalitaire entre les associés. C'est souvent le cas lorsqu'un jeune intègre une officine détenue par un pharmacien proche de la retraite. »

La ventilation des bénéfices de la société peut être modulée de telle sorte qu'elle fasse la part belle à la rémunération du travail, donc au jeune qui travaille plus que son associé. Ainsi, bien que minoritaire en capital, sa rémunération globale (travail et capital) sera supérieure à ce qu'il aurait pu espérer du fait de sa position capitalistique. L'objectif est de lui donner les moyens financiers d'acquérir des parts ou des actions dans un délai assez court.

Cas pratique

Prenons l'exemple d'un pharmacien proche de la retraite qui souhaite transmettre son officine à son fils, fraîchement diplômé.

- Répartition du capital de l'officine

- Le père détient 95 % du capital.

- Le fils a racheté 5 % des parts sociales à son père mais détient 100 % des parts en industrie.

- Répartition du temps de travail

- Pour « lâcher du lest », le père est présent un jour par semaine seulement.

- Le fils, lui, est présent à plein temps six jours sur sept.

- Répartition du bénéfice de la pharmacie

Il est décidé entre les deux associés que 65 % des bénéfices seront liés aux parts sociales, tandis que les 35 % restants correspondront aux parts en industrie. Le fils, compte tenu de son temps de travail, percevra donc 40 % des bénéfices de l'officine (35 % pour les parts en industrie + 5 % de parts sociales).

Les adjointes peu séduites

Etre cotitulaire en parts en industrie suppose, en contrepartie d'un faible investissement initial dans le capital, un fort engagement au niveau de l'officine pour capitaliser des revenus du travail qui permettront ensuite d'accroître sa participation. « Or souvent, les adjointes, lorsqu'elles sont mères de jeunes enfants, ne souhaitent pas accéder aux responsabilités que réclame une titularisation aux dépens de leur vie de famille », analyse Jérôme Paresys-Barbier, président de la section D de l'ordre des pharmaciens.

De manière plus générale, le représentant ordinal estime que le « marché des adjoints » manque de stabilité : « Il faut fidéliser les adjoints et créer un esprit de famille dans la pharmacie pour les aider à devenir cotitulaires. Il faut que le transfert du capital se fasse à leur rythme et, sur ce plan, les SPFPL peuvent répondre à leurs désirs d'accéder au capital tout en conservant leur statut d'adjoint. »

Selon Jérôme Paresys-Barbier, les holdings, en permettant aux adjoints de gravir la première marche de l'entrée dans le capital, peuvent relancer l'intéressement et les parts en industrie.

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