Antiasthmatiques 14 cas pratiques - Le Moniteur des Pharmacies n° 2747 du 11/10/2008 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2747 du 11/10/2008
 

Cahiers Formation du Moniteur

Iatrogénie

1-inobservance

Pas facile pour Kevin

Madame C. a 3 enfants. Son fils cadet, Kevin, 11 ans, fait 5 à 6 crises d'asthme par an depuis l'âge de 8 ans. Le médecin généraliste lui a prescrit l'an dernier de la Ventoline à utiliser en cas de nécessité. Fin juillet, madame C. est venue renouveler l'ordonnance. En consultant l'historique, vous aviez constaté qu'un flacon avait déjà été dispensé en mai, et la maman de Kevin avait expliqué qu'il faisait des crises un peu plus souvent. Vous aviez suggéré que Kevin revoie le médecin. Celui-ci avait alors prescrit Qvar, une bouffée matin et soir et Ventoline en cas de crise. Lors de la dispensation, vous aviez montré à Kevin comment utiliser l'Autohaler et vous lui aviez demandé de noter sur une feuille les jours où il avait besoin de Ventoline. Aujourd'hui, vous faites le point avec madame C. : Kevin semble toujours utiliser fréquemment sa Ventoline malgré le traitement corticoïde. Il a complété sa feuille par intermittence mais, cette semaine, il a pris de la Ventoline chaque jour.

Que se passe-t-il ?

Le traitement anti-inflammatoire stéroïdien (AIS) n'a pas une efficacité immédiate mais, après deux mois, on devrait constater une amélioration des symptômes du patient, avec une diminution de la fréquence des crises. Il est important d'essayer de comprendre les raisons de l'inefficacité apparente de ce nouveau traitement.

Analyse du cas

L'augmentation de fréquence d'utilisation de la Ventoline a logiquement conduit à la prescription d'un traitement de fond anti-inflammatoire par béclométasone (Qvar). Les AIS par voie inhalée ont pour objectif de diminuer l'inflammation bronchique présente chez le patient asthmatique. Ils représentent à l'heure actuelle le seul traitement efficace pour réduire l'hyperréactivité bronchique et, par là même, la fréquence des crises.

L'introduction de ce traitement est réalisée le plus souvent avec 2 prises par jour et le bénéfice clinique et fonctionnel requiert entre 1 et 3 mois de traitement continu. Une absence de diminution de la fréquence de recours à la Ventoline après 2 mois de traitement nécessite de rechercher la ou les causes de cette inefficacité. Dans le cas présent, l'observance du traitement AIS doit être vérifiée : fréquence des prises et bonne utilisation du dispositif inhalateur.

Attitude à adopter

Le pharmacien décide de revoir le jeune patient pour vérifier le mode d'utilisation des dispositifs d'inhalation. Kevin a effectivement de grosses difficultés à inspirer avec Qvar et, visiblement, l'administration du produit est incomplète. Quant à la prise de Ventoline, Kévin utilise 2 ou 3 pressions successives pour la même inspiration, en ne maintenant son inspiration que très peu de temps avant d'expirer. Cette utilisation inappropriée explique peut-être en partie la forte consommation de Ventoline.

Il est conseillé à madame C. de revoir le médecin généraliste rapidement. Celui-ci préfère adresser son jeune patient à un confrère pneumologue afin de faire un bilan complet de l'asthme. Finalement, Kevin reviendra avec une prescription de Flixotide et d'une chambre d'inhalation pour la prise de la Ventoline et du Flixotide.

2-inobservance

« Il me reste un flacon de Bécotide ! »

Mademoiselle R, 24 ans, a un asthme qui ne la préoccupe pas vraiment. Elle n'a jamais vu de pneumologue. Elle vient par intermittence à l'officine et vous avez l'impression qu'elle ne suit pas très bien son traitement. Il y a 3 mois, elle avait eu une prescription de Solupred pour une exacerbation de son asthme. Aujourd'hui, elle vient renouveler sa prescription : Bécotide 250, 2 bouffées matin et soir, Serevent 1 bouffée matin et soir et Ventoline si besoin. Elle vous signale qu'elle ne veut pas de Bécotide car il lui en reste. Cela vous intrigue.

Que faut-il vérifier ?

La vérification de l'historique médicamenteux est indispensable. Elle permet de contrôler l'observance d'achat des médicaments : chez cette patiente, sur les 6 derniers mois, on note 5 Ventoline, 3 Serevent et 1 seul Bécotide, il y a 3 mois. La surconsommation de Ventoline et l'absence d'achat du Bécotide doivent être approfondies.

Analyse du cas

L'inflammation et l'hyperréactivité bronchique présentes dans l'asthme ne peuvent être traitées que par la corticothérapie par voie inhalée. L'amélioration clinique est lente, difficilement perceptible par le patient, et nécessite l'utilisation continue d'un anti-inflammatoire stéroïdien (AIS) par voie inhalée pendant un à plusieurs mois. A l'inverse, l'utilisation de bêta-2-agoniste de longue durée d'action (BALA) apporte, par son effet bronchodilatateur immédiat et intense, un confort rapidement ressenti par le patient. De ce fait, l'inobservance à l'AIS est fréquente et très préjudiciable à l'évolution de la pathologie : l'inflammation des bronches peut s'aggraver sans que le patient n'en prenne réellement conscience, et parfois évoluer vers un asthme aigu grave. En 2003, une étude chez des patients asthmatiques traités uniquement par BALA a montré une augmentation du nombre de décès par asthme aigu grave.

Attitude à adopter

L'inobservance aux AIS est fréquente et a différentes causes. Parmi les plus fréquentes : la sous-estimation de la gravité de la pathologie et de ses conséquences potentielles, la méconnaissance de la place respective des médicaments et des objectifs des traitements, la négligence... Une information précise sur ces points, la discussion avec les patients, la mise en place d'objectifs à court et moyen terme peuvent les aider à se remotiver pour la prise de leur traitement.

Dans le cas présent, informer la patiente de l'existence de médicaments associés (AIS + BALA) facilitant la prise peut être une solution. On lui proposera d'en discuter avec son médecin. La remise de documentation peut également apporter une aide au patient. Enfin, une consultation en pneumologie avec une épreuve fonctionnelle respiratoire serait utile.

Néanmoins, le problème de l'observance du patient asthmatique reste entier du fait de traitements parfois insuffisamment adaptés : posologie inchangée d'AIS pendant une longue période amenant le patient à changer lui-même son traitement, prescription de Ventoline systématique et non pas seulement en cas de besoin... Par ailleurs, un certain nombre de patients paraissent peu ouverts à la discussion, vraisemblablement par déni de la pathologie. Utilisant leurs médicaments depuis longtemps, ils pensent gérer correctement leur asthme et s'habituent à la gêne induite par son mauvais contrôle. Engager le dialogue est une priorité.

1-effets indésirables

Un début d'angine

Monsieur T. vous demande de la Lysopaïne pour un début d'angine : il est enroué depuis quelques jours, a une sensation de brûlure au moment d'avaler et a remarqué un enduit blanchâtre au fond de la gorge. Vous savez que monsieur T. est asthmatique et qu'il est traité régulièrement par du Seretide.

Que penser de l'affection de monsieur T ?

Les symptômes décrits et les dépôts blancs sur la muqueuse buccale évoquent une mycose buccale. La Lysopaïne n'est pas du tout indiquée !

Analyse du cas

Les mycoses buccales sont dues essentiellement à Candida albicans. Cet hôte saprophyte des muqueuses ne devient pathogène que dans certaines conditions favorisantes, par exemple la perturbation de la flore microbienne lors d'une antibiothérapie ou une réponse immunitaire diminuée.

Chez le patient asthmatique, le traitement par corticothérapie inhalée peut favoriser le développement de candidose au niveau buccopharyngé. Le rinçage de la bouche après utilisation de corticoïdes limite cet effet indésirable. En pratique, on conseille de se laver les dents ou de se gargariser puis de cracher.

Attitude adoptée

Vous expliquez à monsieur T. qu'il n'a vraisemblablement pas d'angine mais plutôt une mycose buccale nécessitant d'aller consulter son médecin pour avoir un diagnostic et un traitement appropriés.

Le lendemain soir, monsieur T. revient avec une ordonnance de Daktarin gel buccal, deux cuillères-mesures 4 fois par jour pendant 7 jours. Vous précisez à monsieur T. qu'il faut éviter la déglutition immédiate du gel. Vous en profitez pour lui rappeler les mesures préventives à suivre pour éviter la réapparition d'atteintes buccales, mesures que les patients oublient souvent au fil du temps.

2-effets indésirables

Des douleurs de croissance

Charlotte G., 16 ans, est traitée pour son asthme par Bécotide, Singulair et Spréor. Sa mère vient renouveler ce traitement. L'asthme de sa fille est bien contrôlé en ce moment, mais Charlotte se plaint souvent de douleurs dans les muscles et les articulations. Madame G. pense qu'il s'agit sûrement de la croissance et vous demande ce qu'elle peut donner à sa fille pour la soulager.

Que penser des douleurs de Charlotte ?

On peut penser à une pathologie infectieuse (grippe...) ou, effectivement, à des douleurs de croissance, mais, devant un symptôme dont l'étiologie n'est pas évidente, il faut également systématiquement évoquer un effet iatrogène.

Analyse du cas

Le montélukast (Singulair), seul antileucotriène commercialisé en France, est fréquemment ajouté au traitement antiasthmatique pour son activité anti-inflammatoire. Après sa mise sur le marché, il a été décrit, très rarement, des myalgies et des arthralgies sans que le mécanisme précis ne soit identifié. Le seul moyen de vérifier l'origine iatrogène des douleurs serait de suspendre le traitement ; la disparition des douleurs serait un argument en faveur d'une origine iatrogène.

Attitude adoptée

Il est conseillé à Charlotte du paracétamol 500 mg, à prendre au moment des douleurs pendant 3 jours. La semaine suivante, madame G. repasse à l'officine : le paracétamol améliore transitoirement les douleurs mais elles sont toujours présentes. Le médecin, contacté par téléphone, choisit de suspendre le traitement.

Une semaine plus tard, les douleurs ont disparu, évoquant la responsabilité du médicament. Il est possible de réaliser une notification au centre régional de pharmacovigilance, même si cet effet est connu. Seule la réapparition des douleurs après réintroduction du médicament permettrait de vérifier l'imputabilité du montélukast

3-effets indésirables

« Lucas va-t-il arrêter de grandir ? »

A 7 ans Lucas, le fils de madame F., avait fait à quelques reprises des crises d'asthme peu sévères, traitées sans problème par 2 bouffées de bêta-2-agoniste. L'an dernier, les crises étaient devenues plus fréquentes et le médecin avait prescrit du Singulair 5 mg, 1 cp à croquer le soir. Après 6 mois de traitement, l'état de l'enfant ne s'était pas réellement amélioré. Lors de sa dernière consultation, le médecin a donc jugé nécessaire de remplacer le Singulair par du Flixotide 50 mg, 1 bouffée matin et soir, à utiliser avec une chambre d'inhalation. Madame F. repasse à l'officine l'après-midi et vous fait part de son inquiétude : elle a lu sur la notice du Flixotide qu'il pouvait y avoir un ralentissement de la croissance. Son fils n'est déjà pas très grand pour son âge et elle se demande si ce médicament est bien nécessaire pour un asthme finalement pas bien grave...

Qu'en pensez-vous ?

L'augmentation de la fréquence des crises chez Lucas signe une inflammation des bronches qu'il est impératif de juguler. Le seul traitement réellement efficace est la corticothérapie par voie inhalée, à des posologies adaptées à la gravité de l'affection.

Analyse du cas

L'emploi des corticoïdes par voie systémique (voie orale ou injectable) au long cours est connu pour freinage la croissance de l'enfant. Cet effet passe par la soudure du cartilage de conjugaison et dépend à la fois de la dose administrée et de la durée du traitement. Utilisés par voie inhalée, les corticoïdes présentent des effets indésirables généraux moindres, fonction de leur passage systémique. Celui-ci dépend de la fraction déposée dans l'oropharynx et donc déglutie, ainsi que du dépôt pulmonaire puisque aucun anti-inflammatoire stéroïdien (AIS) n'est inactivé dans le poumon. Des études réalisées chez des enfants asthmatiques traités au long cours par des AIS ont montré une diminution de la vitesse de croissance de l'ordre de 20 % la première année, suivie d'une normalisation de cette croissance par la suite. Dans tous les cas, il ne semble pas y avoir de retentissement sur la taille adulte supposée être obtenue.

Attitude à adopter

Il faut rassurer madame F. tout en valorisant la nouvelle prescription. En effet, le traitement par Singulair n'ayant pas donné l'efficacité escomptée, il est nécessaire de passer au traitement anti-inflammatoire de référence pour améliorer la qualité de vie de l'enfant et éviter la dégradation de sa fonction respiratoire.

Flixotide est un produit connu pour sa bonne efficacité s'il est administré très régulièrement. L'objectif de ce traitement est de supprimer les épisodes de gêne respiratoire, ce que l'on pourra vérifier dans un ou deux mois avec la diminution de consommation de Ventoline. L'effet sur la croissance ne se manifeste qu'à des posologies élevées de fluticasone, alors que la prescription comporte une dose quotidienne faible (50 mg deux fois par jour). Il est important d'avoir une observance optimale pour diminuer l'inflammation bronchique, ce qui permettra d'utiliser la dose minimale efficace voire la suspension du traitement AIS en cas de contrôle total de l'asthme. Chez l'adulte comme chez l'enfant, on doit toujours rechercher la dose minimale efficace de corticoïdes par voie inhalée pour éviter l'apparition d'effets indésirables.

4-effets indésirables

Madame O. se sent nerveuse

Il y a 15 jours, suite à un épisode d'asthme aigu grave, madame O. a présenté une ordonnance comportant Seretide, Maxair, Virlix et Nasacort (deux pulvérisations le matin dans chaque narine). Aujourd'hui, elle revient car elle a déjà terminé le flacon de Nasacort. Elle se plaint d'être un peu nerveuse et vous demande si ça peut être dû aux médicaments ?

Qu'en pensez-vous ?

La patiente a doublé la posologie du Nasacort (une prise quotidienne) puisqu'elle a fini le flacon de 120 doses en 15 jours au lieu d'un mois. Ce surdosage en corticoïde nasal, ajouté au traitement antiasthmatique également à base de corticoïdes inhalés, a-t-il pu entraîner nervosité et anxiété chez madame O. ? C'est peu probable, même si ces effets indésirables ont pu être décrits après utilisation de fortes doses de corticothérapie par voie inhalée ou nasale.

Analyse du cas

La corticothérapie par voie générale est connue pour ses effets psychiques : nervosité, euphorie, insomnie, boulimie, anxiété, agitation. Tous ces signes sont réversibles à l'arrêt du traitement. L'utilisation de voies locales ne met pas complètement à l'abri de la survenue de ces complications, même chez des patients indemnes de tout antécédent psychiatrique. Toutefois, c'est plus souvent la maladie elle-même, comme toute maladie chronique, qui peut générer de l'anxiété.

Attitude à adopter

On insistera sur le respect de la posologie du Nasacort, avec une seule prise quotidienne (et non une prise matin et soir), tout en maintenant inchangé le traitement par Seretide.

En effet, l'ajustement de la dose de corticoïde ne doit pas se faire aux dépens du traitement de fond de l'asthme.

5-effets indésirables

Du Donormyl pour mon mari

Madame L. vous demande une boîte de Donormyl pour son mari qui ne dort plus bien. Monsieur L. pense d'ailleurs que c'est son traitement pour l'asthme qui l'empêche de dormir ; il l'a arrêté quelque temps mais cela n'a rien changé. Il s'endort normalement mais se réveille au milieu de la nuit, souvent en toussant. En plus, comme il dort mal, monsieur L. se sent fatigué durant la journée.

Le Donormyl est-il une bonne solution ?

Pas sûr... Dans l'asthme, les troubles du sommeil reflètent souvent un contrôle insuffisant de la pathologie.

Analyse du cas

Il existe une variation naturelle de l'asthme au cours du nycthémère, avec une diminution du débit expiratoire de pointe la nuit et le matin pouvant provoquer des réveils nocturnes. L'asthmatique est alors réveillé par des quintes de toux ou une respiration sifflante, le forçant à s'asseoir. Il peut aussi être oppressé au lever, même si le sommeil n'a pas été perturbé.

Attitude à adopter

Il faut expliquer à cette dame que les réveils nocturnes peuvent être liés à un contrôle insuffisant de l'asthme. Arrêter le traitement n'est donc pas une bonne solution et c'est normal que cela n'ait pas soulagé son mari ! La seule solution est de reprendre scrupuleusement le traitement anti-inflammatoire stéroïdien prescrit pour améliorer l'état des bronches. Malheureusement, l'efficacité demande environ un mois. En cas de non-amélioration de l'état du patient dans un mois, on convaincra celui-ci de retourner consulter pour une éventuelle modification de son traitement.

Physiopathologie de l'asthme

L'asthme est une pathologie inflammatoire persistante des voies aériennes responsable d'une aggravation de l'hyperréactivité bronchique naturelle de l'asthmatique. Cette hyperréactivité bronchique se traduit par une instabilité du calibre bronchique en réponse à des agressions parfois minimes. Elle s'associe à un spasme plus ou moins permanent du muscle lisse bronchique qui s'intensifie lors des crises : ces épisodes de bronchoconstriction sont réversibles spontanément ou sous l'influence de médicaments.

La bronchoconstriction est un phénomène musculaire rapide ; à l'inverse, l'inflammation de la muqueuse bronchique est de survenue lente : la muqueuse oedémateuse ainsi que l'hypersécrétion de mucus rétrécissent la lumière bronchique, contribuant à une hypoxie en l'absence de traitement.

Actuellement, on dispose de traitements contre la bronchoconstriction (bronchodilatateurs d'action rapide) et contre l'inflammation (anti-inflammatoire corticoïde ou antileucotriène) ; en revanche, aucune molécule ne permet de combattre spécifiquement l'hypersécrétion de mucus bronchique.

Comment agissent les antiasthmatiques ?

Les bronchodilatateurs

- Les bêta-2-agonistes stimulent les récepteurs bêta-2 des voies aériennes, entraînant le relâchement du muscle lisse bronchique et donc une bronchodilatation.

- On distingue :

- les bêta-2-agonistes à courte durée d'action (action rapide mais courte) utilisés à la demande en cas de crise ou en prévention de l'asthme d'effort ;

- les bêta-2-agonistes à longue durée d'action prescrits au long cours toujours en association avec un traitement anti-inflammatoire bronchique.

Les anti-inflammatoires

- Les corticoïdes inhalés activent les récepteurs intracytoplasmiques des glucocorticoïdes et inhibent la transcription de gènes impliqués dans la synthèse de molécules protéiques pro-inflammatoires (cytokines, enzymes). Ils réduisent l'inflammation des bronches et l'hyperréactivité bronchique. Leur action est lente et nécessite un traitement continu à ajuster par paliers de 1 à 3 mois.

- Le montélukast bloque les récepteurs cyst-LT1 des leucotriènes, médiateurs à action inflammatoire et bronchoconstrictrice puissante. L'activité anti-inflammatoire est inférieure à celle des corticoïdes.

Traitements de crise et de fond

En se fixant sur les récepteurs bêta des fibres musculaires lisses, les bêta-2-agonistes entraînent une bronchodilatation.

Bronchodilatateurs

Bêta-2-agonistes

Mode d'action

Les bêta-2-agonistes entraînent un relâchement de la musculature lisse bronchique.

Indications

- Bêta-2-agonistes de courte durée d'action

Salbutamol, terbutaline, pirbutérol et fénotérol ont une action rapide en une à deux minutes, qui persiste de 4 à 6 heures. Ils s'utilisent en traitement de la crise ou en prévention de l'asthme d'effort (voie inhalée) et s'administrent à l'aide de différents dispositifs d'inhalation : aérosol doseur, système d'inhalation de poudre sèche, système autodéclenchant.

- Bêta-2-agonistes de longue durée d'action

Salmétérol et formotérol possèdent une action qui persiste 12 heures. Le formotérol agit plus rapidement que le salmétérol (3 minutes contre 15 minutes). Ils s'utilisent en traitement symptomatique continu de l'asthme, en association avec un traitement anti-inflammatoire continu comme les corticoïdes inhalés. Ils n'ont pas d'indication pour le traitement de la crise. Le formotérol peut être utilisé en prévention de l'asthme d'effort. Salmétérol et formotérol se présentent sous forme d'aérosol doseur ou de système d'inhalation de poudre sèche.

Les comprimés de terbutaline ou de bambutérol, moins efficaces, ne sont plus guère prescrits.

Effets indésirables

Ils sont plus rares aux doses inhalées que lors d'une administration par voie orale. On peut observer :

- tachycardies, palpitations (à doses importantes),

- tremblements des extrémités (habituellement transitoires, disparaissant à la poursuite du traitement),

- céphalées, crampes musculaires, vertiges, agitation,

- hypokaliémie, hyperglycémie, variation tensionnelle,

- irritation de la gorge avec toux ou enrouement chez les malades sensibles à l'inhalation d'une poudre sèche (prévenu par rinçage de la bouche après inhalation).

Interactions médicamenteuses

Risque de bronchospasme sévère en cas d'association avec les bêtabloquants.

Cas particulier

En cas d'exacerbation sévère ou de crise d'asthme aigu grave, salbutamol et terbutaline peuvent être utilisés en nébulisation ou par voie injectable. La prescription initiale et le renouvellement des formes nébulisées sont réservés aux spécialistes en pneumologie ou en pédiatrie.

Anticholinergique

Mode d'action

L'ipratropium exerce un blocage compétitif des récepteurs cholinergiques du muscle lisse bronchique entraînant une bronchodilatation (moindre qu'avec les bêta-2-agonistes). Son action, rapide (3 minutes), dure de 4 à 6 heures.

Indication

L'ipratropium est indiqué en traitement symptomatique de la crise ou de l'exacerbation de l'asthme, associé à un bêta-2-agoniste d'action rapide et de courte durée par voie inhalée.

Effets indésirables

Sécheresse de la bouche, irritation pharyngée, toux, irritation locale. Rares cas de céphalées, de nausées et de diarrhées. Troubles oculaires en cas de projection dans les yeux (utilisation inadaptée du système d'inhalation).

Cas particulier

En cas d'exacerbation sévère ou de crise d'asthme aigu grave, utilisation possible par nébulisation (prescription initiale et renouvellement réservés aux spécialistes en pneumologie ou en pédiatrie).

Théophylline

Elle n'est pratiquement plus utilisée dans le traitement de l'asthme, parfois dans des situations d'urgence en plus des autres médicaments de l'asthme.

Les corticoïdes inhibent la synthèse des cytokines pro-inflammatoires et activent certaines protéines anti-inflammatoires.

Anti-inflammatoires

Corticoïdes inhalés

Mode d'action

Béclométasone, budésonide et fluticasone agissent par inhibition des cytokines pro-inflammatoires.

Indication

Traitement continu anti-inflammatoire de l'asthme persistant, posologie adaptée par paliers de 1 à 3 mois en fonction du degré de contrôle de l'asthme et du traitement en cours. Utilisation possible en nébulisation pour l'asthme persistant sévère de l'enfant.

Effets indésirables

- Mycoses oropharyngées, prévenues par le rinçage de la bouche après administration.

- Dysphonie avec raucité de la voix : apparaît à forte posologie (laxité des cordes vocales), réversible après diminution de la posologie.

- Troubles neuropsychiques : euphorie, agitation.

- Troubles cutanés et oculaires ont été décrits chez des patients sous traitement à fortes doses depuis de nombreuses années. La voie inhalée entraîne un passage systémique moindre réduisant l'apparition des effets indésirables de la corticothérapie ; néanmoins, pour les limiter, il est justifié de rechercher la dose minimale efficace.

Antileucotriènes

Mode d'action

Le montélukast, seul représentant de cette classe, agit en bloquant les récepteurs des leucotriènes (cyst-LT1), eicosanoïdes intervenant dans la physiopathologie de l'asthme et de la rhinite allergique.

Indication

Traitement additif de l'asthme persistant léger à modéré insuffisamment contrôlé par corticothérapie inhalée (effet anti-inflammatoire moindre que celui des corticoïdes). Traitement préventif de l'asthme induit par l'effort.

Effets indésirables

Céphalées, fièvre, myalgies, arthralgies.

Associations

Plusieurs spécialités proposent une association fixe d'un corticoïde et d'un bronchodilatateur de longue durée d'action. Innovair bénéficie d'une nouvelle galénique nécessitant l'utilisation de doses inférieures. Ces associations sont indiquées en traitement continu de l'asthme persistant et permettent d'améliorer l'observance des corticoïdes inhalés. Symbicort 100/6 et 200/6 est également indiqué dans le soulagement des symptômes, en cas de recours fréquent aux bêta-2-agonistes de courte action ou antécédents d'exacerbations sévères. Les effets indésirables cumulent ceux des 2 molécules.

Le montélukast, en se fixant sur les récepteurs cyst-LT1, inhibe la bronchoconstriction, l'inflammation et l'hypersécrétion bronchique.

Traitement de l'asthme allergique

Anticorps monoclonal

On peut dans certains cas utiliser un anticorps monoclonal humanisé recombinant, dont le seul représentant actuel est l'omalizumab (Xolair).

Mode d'action

L'omalizumab est un anticorps monoclonal qui se lie aux IgE sériques. Il s'utilise par voie sous-cutanée.

Indication

Traitement de l'asthme allergique non contrôlé malgré un traitement de fond classique à dose maximale, en plus du traitement antérieur de l'asthme jugé insuffisamment efficace. La dose et la fréquence des injections sont déterminées en fonction du poids et du taux d'IgE. Les antihistaminiques ne représentent pas un traitement de l'asthme. En cas d'asthme allergique, l'éviction des allergènes est toujours souhaitable.

Effets indésirables

Réactions d'hypersensibilité avec choc anaphylactique, angio-oedèmes, réactions cutanées. Réactions locales au site d'injection. Céphalées, fatigue.

Traitement des exacerbations

Corticoïdes par voie orale

Utilisés uniquement pour le traitement d'exacerbations sévères, en cure courte, de 0,5 à 1 mg/kg/j de prednisone ou prednisolone, sur 5 à 10 jours. Le traitement par voie inhalée doit être poursuivi.

1-interactions médicamenteuses

L'aérosol ne marche plus

Vous connaissez depuis longtemps monsieur T., 50 ans, qui souffre d'un asthme persistant modéré. Il n'a jamais vu de pneumologue et ne prend pas son traitement très au sérieux, même s'il présente plusieurs exacerbations par an. Il y a 4 jours, il est allé consulter pour une aggravation de son état et son médecin traitant lui a prescrit pour 15 jours 2 séances quotidiennes d'aérosolthérapie avec Célestène 4 mg, 1 ampoule, et Nebcine 75 mg, 1 ampoule. Vous lui avez dispensé les médicaments (bien que hors AMM), un appareil pneumatique et donné tous les conseils nécessaires pour réaliser les séances dans de bonnes conditions. Aujourd'hui, il vient à l'officine et vous dit qu'il a l'impression que l'appareil ne fonctionne plus. Il l'a laissé chez lui mais il peut vous l'apporter si vous voulez vérifier.

Qu'est-ce qui a pu se passer ?

Bien que les appareils pneumatiques soient en général robustes, on n'est bien sûr pas à l'abri d'une panne ! Mais il faudra questionner le patient sur le déroulement exact d'une séance, en particulier sur la préparation des solutions pour bien vérifier qu'il n'a pas mélangé les deux produits.

Analyse du cas

Le patient vous explique que les deux premiers jours il a préparé les solutions comme vous le lui aviez expliqué, enchaînant deux séances de suite, une pour chacun des médicaments. Mais le médecin a prescrit les séances deux fois par jour et c'est très long. Il a donc pensé qu'il pouvait mélanger les deux ampoules de Célestène et de Nebcine juste avant de les mettre dans la cuve et faire la séance tout de suite après...

La tobramycine ne doit pas être mélangée avec un autre médicament, quel qu'il soit (sauf Ventoline), sous peine de précipiter. Le mélange de Célestène et Nebcine préparé par le patient a sans doute précipité dans la cuve et bouché la tubulure.

Attitude à adopter

Monsieur T. devra rapporter son appareil pour effectuer un démontage et nettoyage complets ; après séchage soigneux, on le fera fonctionner à vide un instant. Cela pourra être l'occasion de lui montrer à nouveau comment procéder au nettoyage quotidien de l'appareil.

En règle générale, il semble préférable, si plusieurs médicaments sont à nébuliser, de les utiliser successivement en jetant le reste de médicament qui peut rester au fond de la cuve. Cette recommandation est impérative avec Nebcine, connu pour son incompatibilité physicochimique avec la plupart des autres médicaments.

La ou les solutions doivent être préparées immédiatement avant la séance d'aérosol pour éviter un risque de contamination ou de dégradation des molécules. Le nettoyage de l'appareillage après la séance ou au moins une fois par jour vise à éliminer tous les résidus favorisant la croissance de germes. Ces différentes recommandations seront rappelées au patient, sans oublier la nécessité de se rincer la bouche en fin de séance.

Les prescriptions d'antibiothérapie en nébulisation pour des cas d'exacerbations d'asthme émanent généralement de médecins généralistes. L'efficacité de ce traitement n'est pas prouvée. Les pneumologues optent plutôt pour une modification du traitement de fond du patient : augmentation de l'anti-inflammatoire stéroïdien inhalé ou, dans les cas sévères, ajout de corticoïde per os.

2-interactions médicamenteuses

Du Kestin chez un asthmatique diabétique

Monsieur C. souffre de diabète de type 1 et d'un asthme allergique sévère difficile à gérer vu le nombre d'allergènes auxquels il est sensible. Actuellement, son diabète est équilibré avec Lantus et Apidra. Pour son asthme, le pneumologue a augmenté la posologie de Symbicort 400 à 2 bouffées matin et soir. L'an dernier, l'utilisation de Virlix au printemps avait été peu concluante pour prévenir son allergie aux pollens. Aujourd'hui, monsieur C. vous présente une prescription de Kestin et de Béconase.

Peut-on dispenser ?

L'ébastine est un antihistaminique potentiellement torsadogène ; sa dispensation nécessite une vigilance accrue : vérifier l'absence de situations favorisant les torsades de pointes.

Analyse du cas

L'asthme sévère représente une situation à risque d'hypokaliémie du fait de l'utilisation de posologies relativement élevées d'anti-inflammatoires stéroïdiens et de bêta-2-agonistes, deux médicaments potentiellement hypokaliémiants. Ce risque est ici aggravé par la prise d'insuline, elle-même hypokaliémiante. Une hypokaliémie majore le risque de torsades de pointes en cas d'allongement de l'espace QT, par exemple lors de l'utilisation de médicaments ayant cette propriété. Parmi les antiallergiques, l'ébastine et la mizolastine sont potentiellement torsadogènes.

Attitude adoptée

Si le traitement nouvellement introduit était indispensable et sans alternative, il faudrait envisager un dosage de kaliémie chez ce patient. Dans le cas présent, le rapport bénéfice/risque de l'utilisation de Kestin apparaît défavorable, alors qu'il existe des alternatives. Le prescripteur, contacté pour en discuter, préfère remplacer Kestin par Aerius, anti-H1 non sédatif ne présentant aucun risque d'allongement de l'espace QT.

1-contre-indications

Steve tousse depuis 15 jours

Steve, 25 ans, vous demande un sirop contre la toux. Suite à vos questions, vous apprenez qu'il tousse parfois un peu le matin (Steve fume 4 ou 5 cigarettes par jour). Mais, depuis une quinzaine de jours, cela le gêne parfois la nuit et surtout le matin. Cela ne dure pas très longtemps mais c'est désagréable et l'oblige à cracher un peu. Il n'a pas de fièvre, ne sait pas s'il a des allergies. Il n'a jamais fait de crise d'asthme.

Que répondre à Steve ?

Une toux présente depuis plus de 15 jours est un symptôme qui demande un diagnostic précis et qui sort du cadre du conseil du pharmacien.

Analyse du cas

La toux est un réflexe physiologique protecteur du tractus respiratoire. Chez ce patient, elle pourrait avoir plusieurs origines : allergie aux pollens, tabagisme (étiologie peu probable vu l'âge du patient), asthme atypique.

En effet, certains patients présentent des manifestations atypiques, avec des épisodes de toux sans jamais développer de réelles crises d'asthme. Cette toux s'accompagne d'expectorations particulières « en grains de tapioca ».

Les antitussifs sont bien sûr inappropriés dans ce cas. L'emploi d'un mucolytique (acétylcystéine ou carbocistéine) pour faciliter l'expectoration peut se discuter bien que la preuve de l'efficacité clinique n'ait jamais été réellement démontrée.

Évolution du cas

Vu la durée de l'encombrement bronchique de ce patient (plus de 15 jours), la seule solution était de le convaincre d'aller consulter un médecin, ce qu'il a fait.

Quelques semaines plus tard, son médecin traitant lui a prescrit une épreuve fonctionnelle respiratoire ainsi que des tests d'allergie. Trois mois plus tard, Steve est venu avec une ordonnance de Ventoline, en cas de besoin, et Aerius, un comprimé par jour. Lors de la dispensation, la préparatrice a insisté sur les risques du tabagisme et lui a remis une brochure d'information.

2-contre-indications

Asthmatique et migraineuse

Vous connaissez bien Léa V., 28 ans, asthmatique depuis son adolescence. A la suite d'une crise grave ayant nécessité une hospitalisation, elle est devenue très observante pour son traitement et son asthme est relativement bien contrôlé. Egalement migraineuse depuis plusieurs années, Léa a d'abord été soulagée par un triptan. Mais la fréquence des crises de migraine a nécessité la mise en place il y a 5 mois d'un traitement de fond par Avlocardyl qui les a nettement améliorées. Aujourd'hui, Léa V. vient renouveler ses médicaments pour l'asthme et vous fait part de son étonnement : malgré un suivi scrupuleux de son traitement, elle a besoin de plus en plus souvent de Ventoline, alors qu'auparavant, elle ne l'utilisait qu'une ou deux fois par mois.

Que penser de cette augmentation de consommation ?

Un traitement par bêtabloquant (Avlocardyl) chez un patient asthmatique peut conduire à une détérioration de l'état de contrôle de l'asthme, par blocage des récepteurs bêta-2-bronchiques.

Analyse du cas

Parmi les bêtabloquants, certaines molécules agissent à la fois sur les récepteurs bêta-1-cardiaques et bêta-2-bronchiques, alors que d'autres molécules sont plus spécifiques des récepteurs bêta-1-cardiaques. Toutefois, cette spécificité disparaît lors de l'augmentation des posologies. Le céliprolol, quant à lui, est présenté comme bêta-1-bloquant et bêta-2-agoniste, mais sans avoir prouvé cette particularité en clinique. Tous les bêtabloquants sont donc susceptibles, à différents degrés, de détériorer le contrôle de l'asthme voire de provoquer des bronchospasmes, et ce, quelle que soit la voie d'administration, y compris oculaire (collyre). C'est la raison de leur contre-indication chez les patients souffrant d'asthme sévère ou de bronchopneumopathie chronique obstructive.

Dans le cas présent, le propranolol est peu cardiosélectif, donc est à même d'interférer avec les récepteurs bronchiques, et il est fort possible que la détérioration du contrôle de l'asthme de la patiente soit due à la prise d'Avlocardyl.

Attitude à adopter

L'asthme étant une pathologie saisonnière, on ne peut bien sûr pas exclure une aggravation pour une cause allergique, mais on peut aussi envisager que le blocage des récepteurs bêta-2-bronchiques par le propranolol est à l'origine de l'aggravation de l'asthme. Il existe d'autres possibilités pour le traitement de fond de la migraine. Vous proposez à mademoiselle V. de téléphoner au prescripteur pour en discuter.

A l'issue de la discussion, le médecin souhaite revoir la patiente pour envisager un arrêt progressif de l'Avlocardyl. Quatre mois plus tard, la jeune femme n'a pas vu la fréquence de ses crises de migraine augmenter et son asthme s'est amélioré.

Test de contrôle de l'asthme

L'objectif de la prise en charge d'un asthme est de diminuer l'inflammation des bronches, de faire disparaître les crises et de réduire au minimum les symptômes cliniques. Souvent, le patient surestime le contrôle de son asthme ; ce test peut l'aider à faire le point. Un score inférieur à 20 amènera à rechercher avec le patient les causes possibles du contrôle insuffisant.

3-contre-indications

Du Profénid chez un patient asthmatique

Monsieur T. s'est fait une entorse à la cheville en marchant sur une balle de tennis. Le médecin de garde, vu aux urgences, a prescrit : Profénid 100 comprimés, thiocolchicoside et Doliprane. Monsieur T. vous demande s'il n'y a pas de problème car il est allergique à l'aspirine.

Peut-on délivrer l'ordonnance ?

Non, un antécédent d'asthme à l'aspirine contre-indique a priori l'utilisation de tout AINS.

Analyse du cas

L'aspirine comme tout AINS agit en inhibant la cyclo-oxygénase 1 (cox-1), limitant ainsi la biosynthèse des prostaglandines. Le blocage de cette voie enzymatique peut chez certains patients être compensé par une augmentation de la voie de la lipo-oxygénase et conduire à la production exagérée de leucotriènes, très bronchoconstricteurs. L'asthme à l'aspirine (syndrome de Widal) se déclenche dans les 3 heures suivant la prise. La crise est souvent grave et peut nécessiter une hospitalisation. 4 à 10 % des patients asthmatiques seraient intolérants à l'aspirine. Ils souffrent souvent d'asthme sévère, associé à une rhinite doublée d'une polypose nasale. Ces patients ne doivent pas prendre d'inhibiteur de cox-1 (aspirine ou AINS).

Attitude à adopter

Les antécédents de ce patient contre-indiquent l'usage du kétoprofène. Le prescripteur devra en être informé. Le choix se portera sur le paracétamol, de préférence associé à un antalgique opiacé faible (codéine ou dextropropoxyphène) pour en limiter la dose. En effet, à dose proche de 1 g par prise, le paracétamol se comporte comme un inhibiteur faible de la cox-1 et pourrait donc provoquer un bronchospasme chez ce patient.

1-profils particuliers

Un dépannage de Ventoline

Une jeune femme se présente au comptoir pour acheter un flacon de Ventoline. Elle s'excuse de ne pas avoir d'ordonnance sur elle. Elle est de passage pour le week-end chez un ami et a oublié son flacon chez elle. Comme elle sort ce soir, elle préférerait en avoir un « au cas où ».

Qu'en pensez-vous ?

Le cas n'est pas rare où un inconnu vient demander un flacon de Ventoline sans ordonnance. Il est légitime de se demander si cette personne est réellement asthmatique ou si elle réclame du salbutamol pour en faire un usage détourné, pour se doper par exemple ou pour dilater ses bronches avant d'inhaler un produit quelconque.

Analyse du cas

Légalement, la Ventoline ne peut pas être dispensée sans ordonnance. Néanmoins, le patient asthmatique doit toujours avoir un flacon de bêta-2-agoniste sur lui au cas où surviendrait une crise. Chez certains patients, l'anxiété générée par la crainte de déclencher une crise sans pouvoir inhaler immédiatement du salbutamol peut suffire à provoquer cette dernière. Bien sûr, l'usage détourné de bêta-2-agoniste existe du fait de la bronchodilatation générée même en l'absence de bronchospasme. Il est difficile d'estimer la fréquence de ce mésusage du fait du manque d'études dans ce domaine. Toutefois, il est fortement vraisemblable que la fréquence soit négligeable par rapport au grand nombre de patients asthmatiques.

Attitude à adopter

On questionne la jeune femme sur le traitement en cours de son asthme. Elle dit ne plus prendre régulièrement son Pulmicort car elle n'a plus qu'une ou deux crises par mois. Le mieux est de lui demander les coordonnées de son médecin ou de son pharmacien habituel pour vérifier son traitement. Malheureusement, le médecin est injoignable et la jeune femme ne sait pas donner les coordonnées de sa pharmacie habituelle. Dans le doute, il est difficile de refuser de dispenser la Ventoline, connaissant les risques potentiels en cas de crise grave.

2-profils particuliers

Eric est sportif et asthmatique

Eric G., 14 ans, a commencé des compétitions d'aviron depuis un an. Dans sa petite enfance, il avait été traité pendant deux ou trois ans pour des crises d'asthme, puis il n'a plus pris de médicament pendant près de 10 ans. L'année dernière, Eric avait été gêné par les pollens de printemps, avec une rhinite allergique et une conjonctivite légère. Cette année, malgré l'administration de cétirizine depuis 1 mois, il a développé de l'asthme et est à nouveau allé consulter son médecin. Celui-ci lui a prescrit Bécotide, 2 bouffées par jour, Ventoline en cas de besoin et 10 minutes avant l'effort, et Béconase, 1 pulvérisation 3 fois par jour dans chaque narine. Eric est inquiet car il pense devoir arrêter le sport ou au moins la compétition.

Qu'en pensez-vous ?

Non, l'asthme ne conduit pas à l'arrêt du sport ou de la compétition, mais il doit être pris en charge correctement. Eric peut utiliser les médicaments sans crainte, à condition de respecter certaines règles lors des compétitions.

Analyse du cas

Le salbutamol et les corticoïdes comptent parmi les produits interdits aux sportifs le plus souvent détectés dans les urines lors des contrôles antidopage (respectivement 12 et 42 % en 2004). En effet, les bêta-2-agonistes sont utilisés à forte dose (10 à 15 bouffées) pour augmenter le souffle lors des épreuves sportives, mais aussi pour leurs effets stimulants et euphorisants.

A une concentration urinaire supérieure à 1 000 ng/ml, le salbutamol est réputé anabolisant et le sportif encourt des sanctions. Pour autant, un résultat positif ne signifie pas nécessairement que le sportif est dopé. Ces substances sont autorisées dans le cadre du traitement de l'asthme et du bronchospasme induits par l'effort, à condition de respecter certaines règles : les bêta-2-agonistes de courte ou longue durée d'action et les corticoïdes sont autorisés uniquement par voie inhalée, et le sportif doit présenter avant toute compétition une notification écrite par un pneumologue ou un médecin d'équipe attestant qu'il souffre d'asthme ou d'asthme d'effort (arrêté du 11.1.2007). Depuis 2003, les sportifs doivent également fournir à leur fédération un dossier médical avec la description des symptômes, l'historique des troubles et les résultats aux épreuves fonctionnelles respiratoires.

Attitude adoptée

On pourra rassurer Eric : de très grands sportifs sont asthmatiques. On lui expliquera les objectifs du traitement de son asthme, en insistant sur la démonstration des appareils d'inhalation et sur les moyens de prévention vis-à-vis des pollens dans la vie de tous les jours (porter des lunettes, faire attention lorsqu'il vente, prendre régulièrement des médicaments antiallergiques...). Eric doit toujours avoir sur lui son traitement de crise et doit le prendre 10 minutes avant l'effort. L'asthme d'effort apparaît classiquement 10 minutes après l'arrêt de l'effort, avec toux et gêne respiratoire puis récupération dans l'heure qui suit. On s'assurera qu'Eric a informé son médecin de sa participation à des compétitions afin de constituer un dossier médical complet.

L'équitation est déconseillée chez l'asthmatique car potentiellement allergisante. La plongée sous-marine est contre-indiquée. Pour les autres sports, le risque d'asthme d'effort dépend des conditions atmosphériques et de la durée de l'effort.

Ce qu'il faut retenir

À RETENIR

En cas d'inefficacité du traitement de fond antiasthmatique, la première chose à vérifier est la bonne utilisation des dispositifs d'inhalation.

Les paliers de corticothérapie inhalée

L'objectif de la corticothérapie inhalée est de réduire voire de supprimer l'inflammation bronchique. Lors du suivi, la posologie est modifiée par paliers en fonction du degré de contrôle de l'asthme. L'efficacité du traitement se manifeste lentement. La durée des paliers thérapeutiques recommandée est de 1 à 3 mois et dépend de la réponse clinique. Une fois le contrôle de l'asthme obtenu, on recherche toujours la dose minimale efficace pour le maintien d'un contrôle acceptable.

La décroissance voire l'arrêt du traitement doit être progressif : diminution des doses de 25 à 50 % par palier de 3 mois. En pratique, les ordonnances le mentionnent rarement. Les patients arrêtent parfois seuls leur traitement et risquent une reprise de la symptomatologie.

À RETENIR

L'utilisation de bêta-2-agoniste de longue durée d'action sans corticoïde fait courir un risque au patient. L'observance doit être vérifiée lors de la dispensation.

Gérer la surconsommation de Ventoline

Un contrôle acceptable de l'asthme répond à plusieurs critères (cf. ANAES 2004) parmi lesquels une consommation inférieure à 4 doses par semaine de bêta-2-agoniste d'action rapide - encore appelé bêta-2-agoniste de courte action (BACA) -, ce qui correspond à un flacon (200 doses) par an, hors utilisation préventive en cas d'asthme d'effort. Les patients ayant besoin d'avoir des flacons en différents lieux (domicile, bureau...), on peut estimer à 3 unités par an une prescription « normale ».

D'après une étude récente réalisée à l'officine*, parmi les 70 % de patients asthmatiques ayant acheté un BACA dans l'année, 50 % ont acheté de 1 à 3 unités, la consommation annuelle moyenne était de 7,2 unités par an, avec 15 % des patients utilisant plus de 1 unité par mois. Cette surconsommation peut avoir plusieurs origines :

- mauvais contrôle de l'asthme avec insuffisance du traitement anti-inflammatoire ;

- mauvaise utilisation du dispositif inhalateur conduisant le patient à utiliser plus de 2 bouffées par crise ;

- utilisation fréquente avant effort ;

- mésusage ;

- prescription médicale continue de 1 unité par mois...

Dans tous les cas, il faut évaluer la raison de cette surconsommation apparente et vérifier la bonne utilisation et le nombre de bouffées nécessaires par épisode ainsi que l'état de contrôle de l'asthme. Si, malgré les conseils, la surconsommation se maintient, il est judicieux de contacter le prescripteur pour l'en informer car cette situation met en danger la santé du patient.

* Laforest et al., « Allergy » 2005, 60, 1505-1510.

À RETENIR

Rappeler périodiquement aux patients qu'ils doivent se rincer la bouche après utilisation de la corticothérapie par voie inhalée.

À RETENIR

Toujours penser à un effet iatrogène devant un symptôme sans étiologie évidente.

À RETENIR

Les AIS inhalés au long cours peuvent provoquer une diminution de la vitesse de croissance de l'ordre de 20 % la première année, suivie d'une normalisation de cette croissance par la suite.

Les examens respiratoires

Epreuve fonctionnelle respiratoire

- Cet examen est recommandé pour le suivi du patient asthmatique. Les déterminations du VEMS (volume expiratoire maximal par seconde) et des capacités vitales respiratoires sont réalisées avant et après inhalation d'un bronchodilatateur d'action rapide. En principe (mais pas toujours), le patient ne doit pas interrompre son traitement avant l'examen. Cela permet d'évaluer le degré d'obstruction bronchique sous traitement.

- La détermination de la réversibilité bronchique n'est pas nécessaire à chaque examen de spirométrie pour ajuster

la posologie de la corticothérapie inhalée.

- Une épreuve fonctionnelle respiratoire est conseillée tous les 3 à 6 mois en cas d'asthme sévère, tous les 6 à 12 mois pour l'asthme modéré ou léger et serait souhaitable une fois par an pour les asthmes intermittents.

Débit expiratoire de pointe

- La mesure du débit expiratoire de pointe (DEP) à l'aide d'un débitmètre de pointe est recommandée à chaque consultation. Le résultat s'exprime en pourcentage de la meilleure valeur obtenue par le patient.

- Le suivi du DEP peut aider le patient à évaluer son asthme ; néanmoins, il n'est pas démontré que le suivi systématique avec automesure à domicile améliore le contrôle de tous les patients. La mesure du DEP est intéressante chez les patients à risque d'asthme grave, en prévision des périodes à risque, au moment des modifications thérapeutiques. Elle peut être également proposée à l'officine.

Crise d'asthme aigu

L'asthme aigu grave est une crise inhabituelle dans son intensité, résistante au traitement usuel et mettant en jeu le pronostic vital du patient. Elle peut aboutir à un bronchospasme suraigu pouvant entraîner le décès du patient en quelques heures ou minutes (2 000 décès chaque année). Lorsque les patients parlent de « crise d'asthme », il s'agit en fait souvent de simples épisodes de « gêne respiratoire » en faisant du sport, d'essoufflement à la marche ou au repos, de réveil la nuit par de la toux, de sensation d'oppression...

À RETENIR

Les corticoïdes même par voie inhalée, à posologie élevée, peuvent entraîner des effets psychiques : nervosité, euphorie, insomnie...

À RETENIR

Etre attentif aux troubles du sommeil et à la fatigue des patients : ce sont souvent des signes d'un mauvais contrôle de l'asthme et non des effets iatrogènes.

À RETENIR

Lorsque des séances d'aérosolthérapie comportent plusieurs médicaments à nébuliser, il est toujours préférable de les passer l'un après l'autre, en particulier s'ils comportent de la Nebcine.

Repérer les patients à risque

- La crise d'asthme peut avoir différents degrés d'intensité, allant de la simple gêne à l'urgence vitale.

- Chaque année, environ 1 800 patients (surtout des adolescents ou des adultes de plus de 65 ans) décèdent d'asthme aigu grave suite à une insuffisance de traitement anti-inflammatoire.

- L'asthme aigu grave se manifeste par des crises d'intensité croissante résistant au traitement, il peut s'installer en 1 à 3 jours ou bien se manifester d'emblée en quelques heures ; il est caractérisé par divers signes lors de la crise :

- difficultés à parler, à tousser, à garder la position allongée ;

- sueurs, agitation, cyanose ;

- fréquence respiratoire > 25/min (adulte) ;

- fréquence cardiaque > 120/min.

- En attendant l'arrivée d'un service d'urgence (15), un bêta-2-agoniste d'action rapide et un corticoïde inhalé, si possible à l'aide d'une chambre d'inhalation pour faciliter la prise, sont indispensables.

- Il est utile de repérer les patients présentant des facteurs de risque d'asthme aigu grave pour augmenter la vigilance lors de la dispensation :

- conditions socio-économiques défavorisées ;

- caractère ancien et instable de l'asthme ;

- antécédents d'épisodes graves, visites fréquentes aux urgences ;

- mauvaise observance et/ou déni de la maladie ;

- sevrage récent de corticoïdes per os ou inhalés ;

- insuffisance de prise en charge.

À RETENIR

L'asthme sévère est une situation à risque d'hypokaliémie : attention à l'ajout de médicaments hypokaliémiants ou torsadogènes !

ATTENTION

L'inscription dans l'historique médicamenteux ou dans le dossier pharmaceutique d'antitussifs peut révéler une surconsommation induite par un asthme atypique.

À RETENIR

Chez un patient asthmatique, un traitement par bêtabloquant (pour pathologie cardiovasculaire, migraineuse ou oculaire) peut entraver l'efficacité du traitement antiasthmatique. Il faut y penser en cas de contrôle insuffisant de l'asthme et proposer une alternative médicamenteuse.

À RETENIR

Un antécédent d'asthme à l'aspirine contre-indique a priori l'utilisation de tout AINS et limite la prise de fortes doses de paracétamol.

À RETENIR

Le dossier pharmaceutique peut apporter une aide précieuse dans ce cas avec la visualisation des médicaments prescrits dans les autres officines au cours des 4 derniers mois.

À RETENIR

Il est possible d'utiliser des bêta-2-agonistes et des corticoïdes inhalés chez l'asthmatique même avant une compétition sportive, sur notification écrite d'un pneumologue ou d'un médecin d'équipe et dossier dûment étayé.

Le suivi du patient asthmatique

L'observance thérapeutique constitue un problème majeur dans le traitement de l'asthme (OMS, 2002). L'implication des soignants peut l'améliorer.

A chaque renouvellement

L'état de contrôle de l'asthme du patient peut se vérifier facilement à l'aide de 3 paramètres variant dès que l'asthme se détériore :

- augmentation de l'utilisation de bêta-2-agoniste d'action rapide ;

- apparition de gêne au cours d'activités courantes ;

- apparition d'une gêne nocturne.

L'absence de ces signes lors du renouvellement permet de s'assurer du bon état du patient. Dans le cas contraire, on recherchera avec lui (et les données de l'historique) les raisons de cette aggravation : allergies, infection, inobservance, tabagisme...

En cas d'inobservance

L'inobservance au traitement de fond a de nombreuses étiologies : mauvaise compréhension du traitement et de ses objectifs, méconnaissance du délai d'action et des paliers d'utilisation, survenue d'effets indésirables, corticophobie, mauvaise utilisation du dispositif, négligence... Dans tous les cas, l'information du patient sur l'asthme, ses conséquences et ses médicaments est essentielle et participe à son éducation thérapeutique.

Adaptation du traitement

Un patient asthmatique bien éduqué doit savoir évaluer son état de contrôle et adapter son traitement en réponse aux variations de cet état. Certains patients ont un plan d'action sur leur ordonnance (corticoïde per os si nécessaire en cas d'exacerbation sévère).

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