De l'OTC à la marq ue dans les gondoles des hypers italiens - Le Moniteur des Pharmacies n° 2733 du 07/06/2008 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2733 du 07/06/2008
 

L'ÉVÉNEMENT

Actualité

Moins de deux ans après le passage en GMS de médicaments OTC en Italie, le leader de la grande distribution italien Coop va encore plus loin en lançant ses propres médicaments à la marque. Du coup, les laboratoires menacent de distribuer eux-mêmes leurs produits. Un scénario-catastrophe... qui pourrait passer les Alpes. C'est Coop qui le prédit.

Coop a été le premier à ouvrir des espaces « pharmacie » dans ses hypers en 2006. La loi d'août 2006 autorisant la vente de médicaments en GMS avait pour ainsi dire été faite pour lui... Le leader italien de la grande distribution va aujourd'hui encore plus loin en proposant sur les gondoles de ses 81 Coop Salute - des « espaces santé » créés en 2006 - des boîtes de 20 comprimés effervescents d'aspirine et de vitamine C Coop à 2 euros, soit moitié prix par rapport aux marques de laboratoires que Coop vend à 5 euros dans ses propres espaces et que l'on trouve à 6 euros, en moyenne, dans les officines.

La mise au point du projet, la présentation de son dossier auprès de l'Agence italienne du médicament (notice, informations indiquées sur la boîte...) et l'autorisation de commercialiser ce générique a coûté quelques centaines de milliers d'euros et un an et demi de démarches en tous genres. Eh oui ! le parcours est bien plus complexe que pour mettre sur pied un traditionnel assortiment de denrées alimentaires... « Les produits alimentaires en marque propre ont chacun leur formule et peu importe si l'on change de producteur en cours de route. Alors qu'avec les médicaments l'autorisation de vente est liée au producteur, découvre Vincenzo Santaniello, à la direction du développement et de l'innovation du groupe Coop. La moindre variation ou extension de la ligne pour le même médicament requiert à chaque fois une nouvelle autorisation. » Il a fallu des mois au distributeur pour comprendre les procédures et, surtout, pour voir si un tel projet était rentable. « Nous avons cherché et trouvé sur le marché ce que l'on appelle un "dossier", c'est-à-dire un produit déjà mis au point par un laboratoire pharmaceutique avec toutes les informations et les vérifications requises. Puis nous avons acquis ce dossier auprès de cet industriel qui est devenu notre fournisseur. Mais trouver des entreprises sérieuses et d'un certain niveau disposées à produire des médicaments pour nous n'a pas été facile », se lamente Vincenzo Santaniello. E-Pharma, l'entreprise de Trente, dans le Trentin-Haut-Adige, qui produit ce générique pour Coop refuse d'ailleurs de parler à la presse... Sous couvert d'anonymat, un cadre travaillant pour un grand laboratoire pharmaceutique à Milan révèle tout de même que « les industriels ne sont pas opposés à fabriquer des génériques pour tous les clients. Au contraire. Mais les pressions sont nombreuses car en Italie les pharmaciens représentent une véritable caste ».

« Notre démarche va faire bouger la France »

« Personne ne nous a tendu les bras, déplore encore Vincenzo Santaniello, dont le groupe fait figure d'épouvantail en Italie. Mais pour notre pays c'est révolutionnaire ! Et notre démarche ne manquera pas de faire bouger les choses aussi dans d'autres pays européens, telle la France. Nous avons rompu les équilibres assez solides d'un marché pharmaceutique jusqu'ici très protégé. »

Si industriels et pharmaciens d'officine accusent le coup, ils tentent néanmoins d'en minimiser l'impact. « Les producteurs de médicaments en Italie sont nombreux, et le fait qu'aujourd'hui il y en ait un nouveau ne constitue pas en soi un élément de préoccupation, déclare ainsi Sergio Dompé, président de Farmindustria, l'association fédérant les principales entreprises du secteur. Il est évident que ce nouveau producteur doit respecter lui aussi toutes les prescriptions de garantie du produit prévues par la loi, mais ceci est, je crois, hors de discussion. En ce qui nous concerne, nous demandons seulement à pouvoir nous battre à armes égales : si ceux qui vendent se mettent à produire, personne ne devra s'étonner que l'on s'ouvre à notre tour, demain, à la distribution... »

« Seuls les produits à la marque permettent une marge correcte »

« La concurrence est un bon stimulant, réagit Annarosa Racca, présidente de la fédération des pharmaciens italiens Federfarma. Nous aussi, nous proposons des rabais sur les OTC, mais nous n'avons pas les mêmes moyens que la grande distribution pour nous faire une telle publicité. C'est une injustice, car en produisant et en vendant ils gagnent sur les deux tableaux. Qu'ils commencent à faire le même type de rabais sur leurs produits alimentaires ! La pharmacie n'est pas chère, nous offrons nous aussi des génériques à des prix équivalents. Eux proposent davantage de remises, mais sur quelques produits seulement. De toute façon, nous ne resterons pas à les regarder les bras croisés ! »

Alberto Roda, titulaire à Milan, est amer : « Le problème, c'est que nous nous sommes mis nous-mêmes des bâtons dans les roues en laissant se créer des espaces externes avec des pharmaciens. Se sont ainsi créées d'autres structures de vente, qui se révèlent désormais de dangereux concurrents pour nous, car il est évident qu'elles iront plus loin. » Effectivement, Coop n'a pas l'intention d'en rester là. Le distributeur s'apprête à compléter sa gamme avec une dizaine d'autres produits.

Coop travaille actuellement sur 4 à 5 autres génériques et sur des compléments alimentaires. « Seuls les médicaments en marque propre nous permettent de réduire radicalement les prix tout en faisant une marge correcte, conclut Vincenzo Santaniello. Ce premier générique Coop est un produit économiquement soutenable et compétitif, alors que nous ne gagnons presque rien sur les autres produits pharmaceutiques que nous vendons. » Coop pourrait même le vendre moins cher s'il disposait d'un réseau de vente beaucoup plus étendu, comme c'est le cas pour les distributeurs anglais.

En 2007, le chiffre d'affaires des Coop Salute, qui propose quelque 450 références (OTC, para, homéopathie et vétérinaire), s'est élevé à 50 millions d'euros, à l'équilibre. Les points de vente devraient passer de 81 à 90 d'ici à la fin de l'année. Mais la vente de ces produits ne permet pas encore au leader italien de la grande distribution d'engranger des bénéfices car il a dû considérablement réduire ses marges pour proposer des prix moins chers à sa clientèle. Pour l'instant, la grande distribution a atteint une part de marché de 2 % sur ce segment. « L'objectif serait d'arriver avec nos génériques en marque propre à une part de 30 % sur toutes nos ventes OTC », souhaite le distributeur.

2 223 points de vente face aux officines

Depuis le libre accès aux médicaments sans prescription (OTC) en août 2006, la GMS italienne, dont Coop, Auchan, Carrefour et Conad-Leclerc, a investi en force ce nouveau marché. Fin mars, on comptait 2 223 points de vente, dont 1 862 parapharmacies et 431 espaces aménagés dans des grandes surfaces. L'an dernier, le marché de l'OTC a pesé 2,138 milliards d'euros contre 2,03 milliards en 2006. Lors du dernier trimestre, 95,8 % de ces ventes sont passées par le canal des pharmacies et 4,2 % en dehors (1,9 % en GMS et 2,3 % dans les parapharmacies). Mais, en 2010, les GMS et parapharmacies pourraient avoir pris 15 % de parts de marché, craignent les pharmaciens. Le marché total des pharmacies italiennes représente 24,6 milliards d'euros.

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