Toi l'Auvergnate... - Le Moniteur des Pharmacies n° 2728 du 03/05/2008 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2728 du 03/05/2008
 

CLERMONT-FERRAND

Initiatives

Informer sur les médicaments non utilisés, donner des conférences, s'impliquer pour des organisations humanitaires dans sa ville mais aussi à l'étranger tout en travaillant à l'officine. Odile Pestre, adjointe clermontoise membre de Pharmaciens sans frontières, se dépense sans compter pour les autres. Sans façon.

Clermont-Ferrand, 18 heures. Le public investit la salle prêtée par la mairie. Une conférence y est donnée sur les médicaments non utilisés (MNU) par Odile Pestre et Catherine Vorilhon. Tant pis s'il n'y a pas foule. Les deux pharmaciennes ne désarmeront pas. Des conférences, elles en organiseront bien d'autres, prêtes à se déplacer chez un particulier, à la faculté de pharmacie ou auprès d'un groupe de médecins. « Nous en avons eu l'idée en 2005, raconte Odile Pestre. C'est Pharmaciens sans frontières qui nous a sensibilisées, lesquels ont longtemps milité pour l'arrêt des dons de MNU. En tant qu'assistante, je vois aussi très régulièrement des clients qui amènent des MNU en nous demandant de les donner à Cyclamed. »

Création d'un diaporama

Devant l'évident manque d'information du public, les deux femmes décident de réaliser un diaporama : une cinquantaine de diapositives, agrémentées d'illustrations et de nombreux exemples, des divs courts, des phrases clés, des chiffres chocs. « En termes de conception, cela s'est avéré relativement rapide et le format PowerPoint nous a permis de considérablement limiter le coût, explique Odile Pestre. Le diaporama s'adresse à tous les publics, professionnels de santé ou non. Notre volonté est de faire comprendre à tous l'importance de sécuriser et d'adapter le don de médicaments aux pays qui en ont besoin. »

« Nous avons travaillé les points fondamentaux », reprend Odile Pestre. Sont ainsi abordés la définition des MNU, les problèmes qu'ils engendrent dans les pays en voie de développement, la loi de février 2007 et ses amendements interdisant leur réutilisation à des fins humanitaires, la notion de médicaments essentiels, le réseau de distribution dans les pays concernés et, surtout, un document de référence : les principes directeurs applicables aux dons de médicaments édictés par l'OMS... « Au comptoir aussi, lorsque des clients apportent des médicaments en me demandant de les offrir à une association humanitaire, je leur réponds que les pays concernés veulent au contraire que cette pratique cesse, indique Odile Pestre. Puis je leur réexplique les méfaits de ce type de distribution. » Un message qui passe bien et fait son chemin.

L'information aux clients porte ses fruits

« Quand nous organisons une conférence, le public est très réceptif à notre message et se montre facilement convaincu, note la pharmacienne. A ceux qui semblent vraiment fermés à notre discours, ce qui est rare, je leur demande s'ils accepteraient, eux, de prendre un médicament provenant d'une boîte entamée et dont le nom et la notice figurent dans une langue étrangère ! » Autre argument percutant brandi par les deux consoeurs : les chiffres, particulièrement éloquents. En 1995, en ex-Yougoslavie, ce sont 340 tonnes de médicaments périmés qui ont été envoyés. Le quart des MNU arrivés à Banda Aceh, en Indonésie, étaient périmés ou sans date ; 60 % d'entre eux n'appartenaient pas à la liste des médicaments essentiels dans ce pays et 70 % étaient libellés dans des langues étrangères. Au total, 600 tonnes de médicaments ont dû être détruites, soit un coût de 2,4 millions d'euros !

Avec un support visuel bien ficelé, facile à exploiter quelle que soit la salle, les deux pharmaciennes se déplacent dès qu'une occasion se présente. Un investissement en terme de temps pas toujours facile à gérer, entre le quotidien à l'officine et les nombreuses autres implications d'Odile Pestre dans l'humanitaire. « En tant que PSF, je suis aussi investie dans le milieu associatif clermontois », reprend-t-elle. Un autre versant de son activité qui la mène dans les quartiers réputés difficiles aux côtés des populations migrantes et des plus démunis. « A l'officine, j'ai une orientation phytothérapie, homéopathie et aussi nutrition. Cette dernière m'est très utile lorsque je dois tenir des réunions d'information et d'éducation à la santé pour ces diverses populations. »

Peu à peu, Odile Pestre s'est fait un nom et de nombreux clients se présentent à l'officine pour lui demander conseil ou pour une délivrance. « Ils savent que je suis un point de relais, que je ne vais pas les rejeter en tant que migrants. Il m'arrive parfois d'avancer des médicaments à des malades dont les dossiers sont en passe d'être régularisés. »

« Odile nous apporte énormément »

« Je connais bien souvent leur situation et je prends le temps de les écouter », poursuit-elle. Mais l'investissement connaît ses limites. « Je suis beaucoup sollicitée et ne peux évidemment pas répondre à toutes les demandes. » D'autant que la pharmacienne participe également à des missions à l'étranger, toujours dans le cadre de sa collaboration à PSF mais aussi avec l'association ANIMA. Après une première mission au Cap-Vert pour la première, Odile Pestre a rejoint une équipe médicalisée de la seconde et est repartie ce mois-ci en Casamance. « J'assure la distribution des médicaments ainsi que la supervision d'une case de santé », explique-t-elle. Des missions qui supposent de jongler avec son emploi du temps et de prendre sur ses vacances. « Heureusement, mes titulaires comprennent le sens de mes multiples engagements. Nous arrivons à mettre en place un emploi du temps qui me permet de continuer les conférences et les missions à l'étranger. De plus, il leur arrive souvent de parler de mes actions à des clients. »

Une entente essentielle sans laquelle ces activités ne pourraient être développées. « L'officine est suffisamment importante pour laisser plus d'autonomie à Odile, la plus ancienne de nos collaboratrices, précise Stéphane Laporte, titulaire de l'officine. Bien sûr, elle passe beaucoup de temps à l'extérieur, mais elle nous apporte énormément grâce à ses connaissances et son conseil. Elle joue un rôle important dans l'équipe, notamment de formation. Elle est très appréciée et connaît beaucoup de monde. »

Au sein de l'équipe justement, les réactions sont plutôt positives. « Lorsque des clients apportent des MNU, mes collègues les orientent vers moi car ils savent que je leur donnerai toutes les explications nécessaires. C'est un peu une spécialisation ! », sourit Odile Pestre. Qui, en vingt-sept années passées dans la même officine clermontoise, a su autant faire passer son engagement dans l'humanitaire que l'intégrer dans son exercice professionnel.

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Les avantages

- Cela permet de se sentir utile.

- C'est un moyen de faire autre chose que du comptoir.

- Cela valorise l'image du pharmacien et de l'équipe officinale : les clients sont souvent contents de parler d'humanitaire.

- Cela peut constituer une source de motivation pour toute l'équipe.

Les difficultés

- Quand on organise une conférence, il est difficile de faire venir les gens, même si au départ ils se sont montrés enthousiastes. Ce qui peut parfois décourager !

- Ce type d'investissement demande beaucoup de disponibilité et suppose de ne pas compter son temps.

- Répondre à toutes les demandes peut s'avérer compliqué.

Les conseils d'Odile Pestre

- « N'hésitez pas à en parler autour de vous et en particulier aux clients. »

- « L'information sur les MNU à petite échelle, dans chaque officine, sous forme pourquoi pas d'une vitrine ou d'une affiche, permettrait de sensibiliser l'ensemble des Français. »

- « Quel que soit le type d'action que l'on souhaite mener, il est préférable de se rapprocher des associations humanitaires à proximité, PSF ou autre. »

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