Suivez la filière - Le Moniteur des Pharmacies n° 2697 du 20/10/2007 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2697 du 20/10/2007
 

Enquête

Comment s'organisent les filières officine en 5e et 6e années ? Comment allient-elles enseignements théoriques et préparation à l'exercice du métier de pharmacien d'officine ? Tour de France des facultés.

Les dernières modifications concernant les enseignements de la filière officine datent de l'arrêté du 2 octobre 2003. A l'époque, l'objectif était de mieux adapter les cours à la pratique officinale : la commission nationale pédagogique a donc introduit les enseignements coordonnés afin que les étudiants abordent les pathologies dans leur globalité et non plus discipline par discipline. La réforme redéfinissait également les contours de la 5e et de la 6e années.

Quatre ans après, où en est-on ? C'est la question que s'est posée Olivier Catala, professeur associé à la fac de Lyon, qui a interrogé les responsables des filières officine de 15 UFR. « L'intérêt de cette étude était de se rendre compte comment les facultés s'organisaient. Si la réforme trace un cadre précis, elles conservent en effet chacune une part d'autonomie. Je trouvais intéressant de faire un état des lieux, que j'ai présenté à l'Association pour la promotion des pharmacies expérimentales en mai, afin de voir si des améliorations pouvaient être apportées et que chacun puisse échanger ses idées. » Résultat : les pratiques différent dans la répartition des unités d'enseignement en 5e et 6e années, dans les heures accordées aux enseignements et dans l'organisation des examens de validation du stage de 6e année (voir tableaux). L'objectif reste cependant le même partout : accentuer la professionnalisation des études.

Commentaires d'ordonnances dès la 4e année à Besançon

« En ce qui concerne l'organisation de ces deux années, il serait certainement possible de réduire le volume d'enseignements et de mettre l'accent sur certains aspects de la pratique officinale, notamment dans le cadre de la pharmacie-école (opinion pharmaceutique...), explique Marie-Laure Groult, responsable de la filière officine à Rouen. Quelques enseignements sont dispensés dans la pharmacie expérimentale dont des mises en situation en médication familiale ou mycologie. Nous réfléchissons à y introduire des commentaires d'ordonnances, tout cela bien sûr en accord avec le nombre total d'heures et les possibilités des intervenants. »

A Bordeaux, depuis l'an dernier, les 6e année sont organisés en groupes de huit à dix et travaillent sur un sujet officinal (15 heures pratiques) à présenter sous forme de poster ou de vidéo et à argumenter devant un jury de pharmaciens d'officine et d'universitaires. « La première année, nous leur avons laissé le choix des sujets. Parmi les thèmes traités, on peut citer "Le conseil officinal au fil des saisons" ou "Le pharmacien et l'avenir de la profession" », précise Michel Guyot, responsable de la filière. Pour motiver les étudiants, un prix a été organisé avec un sponsor afin de récompenser la meilleure présentation.

A Amiens, des réunions ont été organisées avec les étudiants et les enseignants pour connaître les attentes des uns et des autres. « Nous nous sommes aperçus qu'ils souhaitaient plus de conseils à l'officine, souligne Michel Brazier, doyen de la faculté d'Amiens et président de la confédération des doyens. Cela a démarré l'an dernier avec la mise en place de conseils (en dermatologie, en ophtalmologie...) dispensés par des spécialistes. »

A Nantes, le conseil officinal est développé sous forme d'enseignements en petits groupes avec des officinaux et des enseignants et des cas pratiques du type « Je tousse », « Je suis enrhumé ». « Cette année nous avons également intégré dans l'enseignement le conseil officinal en infectiologie (cas cliniques et de cours), qui était auparavant en spécialisation, souligne Nicole Grimaud, responsable de la filière officine. Les cours ont été plus adaptés à l'officine, notamment pour les enseignements de dermocosmétique, de phytothérapie et d'homéopathie. Il est prévu des cas de comptoir dans une salle d'enseignement dirigé qui fera office de pharmacie expérimentale. Une partie des cours sera réalisée en anglais. Les étudiants veulent vraiment être opérationnels. »

A Besançon, les commentaires d'ordonnances sont étudiés tout au long des 4e, 5e et 6e années. « Nous voulons y faire participer les maîtres de stage dans le cadre d'une formation continue », précise Marie-Christine Woronoff-Lemsi, coresponsable de la filière officine.

Les officinaux tourangeaux donnent leur avis

A Tours, en octobre 2006, a été mise en place une commission officine avec le responsable de la pédagogie, les responsables de la filière officine, six pharmaciens d'officine maîtres de stage et une ancienne étudiante. « Nous leur avons montré les maquettes des enseignements - qui n'avaient pas été modifiées depuis plusieurs années - pour qu'ils nous donnent leur point de vue, explique Alain Gueiffier, nouveau doyen de la faculté de pharmacie de Tours et ancien responsable de la filière officine. Parmi les changements, nous avons créé des travaux dirigés spécifiques aux médicaments du système nerveux central et de l'appareil cardiovasculaire sur une durée de 12 heures. Les officinaux estimaient que les étudiants manquaient de connaissances en la matière. Nous avons également introduit l'assurance qualité à l'officine en sixième année sur une dizaine d'heures. »

A Bordeaux, des thèmes nouveaux ont été introduits. « Il y a deux ans, nous avons mis en place des cours de diététique et de nutrition en 5e année (15 heures) et nous allons augmenter la part consacrée à l'opinion pharmaceutique et à l'évaluation des traitements médicamenteux », explique Michel Guyot.

A Besançon, une place plus large est prévue en 5e année pour la pharmacie clinique. « Nous avons récemment développé une partie infectiologie et cancérologie. En 6e année, une UE de 20 heures sur les pathologies chroniques lourdes à l'officine a été introduite pour l'année 2007-2008 », précise Marie-Christine Woronoff-Lemsi.

A Amiens et à Nantes, nombre d'étudiants suivent le DU de maintien à domicile. « Nous nous organisons pour qu'ils en aient le temps, ajoute Michel Brazier. Nous réfléchissons à l'idée de restructurer la 5e année pour donner plus de place au MAD, particulièrement sur les traitements du cancer et des soins palliatifs. »

Quinze heures de management à Nantes en 5e année

Faut-il consacrer plus d'enseignement à la gestion d'entreprise ? Les avis sont partagés. Des cours sont prévus par l'arrêté de 2003. A charge pour les facultés de choisir la meilleure formule. « La gestion et le management sont des enseignements que réclament effectivement les étudiants car ils se trouvent insuffisamment formés, souligne Guillaume Bardy, président de l'Association nationale des étudiants en pharmacie de France (ANEPF). Le métier de pharmacien est plus difficile. On parle aujourd'hui de regroupements qui créeront des officines plus importantes, plus de salariés, et augmenteront le travail de gestion et de management d'équipe. »

A Bordeaux, le constat a également été fait : « Les titulaires que nous avons interrogés se disaient satisfaits des cours dispensés mais mettaient aussi en avant leur rôle de chef d'entreprise et son approche de la gestion humaine et logistique », souligne Michel Guyot.

Selon Michel Brazier, doyen de la faculté d'Amiens, « la faculté n'a pas vocation et l'expertise à former des gestionnaires d'entreprise mais à dispenser des enseignements généraux leur donnant les bases nécessaires à l'exercice du métier »? Reste que des enseignements spécifiques supplémentaires ont été introduits à la demande des étudiants ou des pharmaciens d'officine.

A Nantes, en 5e année, une quinzaine d'heures d'enseignement sur le management ont été introduites cette année dans l'UE de pratique officinale. 10 heures de techniques de vente ont été mises en place et le nombre d'heures de gestion passe de 20 à 25 heures. « Il n'est pas possible de faire un enseignement complet sur la gestion et la comptabilité, mais l'idée est que les étudiants soient capables de lire un bilan, précise Nicole Grimaud. Nous verrons les résultats cette année et nous ferons un point avec eux pour savoir si l'enseignement en management leur convient. »

A Paris-XI, les étudiants de 6e année démarrent fin octobre deux études de cas calquées sur celles réalisées en filière industrie. Ils travailleront sur un projet professionnel, c'est-à-dire l'installation et l'évolution d'une officine. Pour Hélène Van Den Brink, responsable de la filière officine à la faculté de Châtenay-Malabry, l'idée était de renforcer les 20 heures d'enseignement déjà dispensés en 5e année sur le merchandising et le marketing officinal, le management et la comptabilité.

A Lyon, le stage de 6e année débute mi-octobre

Des rencontres sont organisées par les facultés pour les officinaux maîtres de stage, souvent une demi-journée, afin de rappeler le contenu des six mois de stage de la 6e année. Et un « Guide de stage de pratique professionnelle en officine », réalisé par le Collège français des pharmaciens conseillers et maîtres de stage, rappelle les thématiques à aborder. Dans la plupart des facultés, les stages démarrent en janvier. Seules exceptions, Nantes, où il débute en décembre, et Lyon, où il a lieu à partir de la mi-octobre. C'est « à la demande des pharmaciens qui souhaitaient que les deux sessions d'examens soient organisées avant juin pour que les étudiants soient sur le marché du travail à l'été », souligne Bernadette Astier, responsable de la filière officine de Lyon.

Une nouvelle convention de stage élaborée par le Collège français des pharmaciens conseillers et maîtres de stage est en cours de validation. Elle se base sur la loi sur l'égalité des chances adoptée en 2006. Cela ne change pas réellement le contenu des stages. Concrètement, ajoute cependant Henri Lepage, à Tours, membre de ce collège, le nouveau div permet bien de préciser que le stagiaire « est là pour apprendre et non pour effectuer les tâches d'un salarié ». Stagiaire et pharmacien doivent contresigner le document. La convention détaille également le montant précis de la gratification.

10 sur 20 minimum à Lille pour être reçu au stage

Selon Guillaume Bardy, à l'ANEPF, si les stages sont bénéfiques, il existe « une proportion non négligeable de stages qui sont des emplois cachés. La visite par le conseiller de stage est fondamental ».

A Lille, les visites des stagiaires sont réalisées en binôme, universitaire et pharmacien d'officine, souligne Jean Arnoult, pharmacien à Cambrai et président du Collège français des pharmaciens conseillers et maîtres de stage. Pour faciliter leur tâche, une « aide à la visite des stages » pour les conseillers de stage, chargés de visiter les officines où ont lieu les stages, a été réalisée à Lille il y a deux ans et diffusée plus largement dans les différentes régions. Selon les points abordés au cours du stage (actes pharmaceutiques accomplis, gestion des achats, télétransmissions, réalisations de préparations), une appréciation « bien », « moyen », « insuffisant » ou « pas du tout » est prévue. Le souhait général est qu'une fiche d'appréciation de stage soit remplie par l'étudiant. A Bordeaux, l'étudiant remplit une fiche qu'il remet lors de l'examen de stage. A Tours, c'est même une obligation : les étudiants ne peuvent passer l'examen de validation de stage s'ils ne remettent pas le document. « Une synthèse de l'ensemble des documents est faite, permettant lors de réunions avec les maîtres de stage de développer tel ou tel point », précise Henri Lepage. A Paris-XI, à mi-stage, un bilan est réalisé à la faculté avec les stagiaires pour rappeler ce qui est prévu durant les six mois.

A Lille, les examens ont fait l'objet de modifications. « A partir de l'an prochain, un entretien consacré spécifiquement au stage sera ajouté aux autres épreuves, précise Jean Arnoult. L'idée n'est pas de réaliser une enquête mais d'améliorer la qualité des stages. » La note donnée par le maître de stage lors de l'examen est tout aussi importante. « Si elle est inférieure à 10/20, le stage ne sera pas validé, ce qui implique que l'étudiant refasse une période de stage dont la durée sera fixée par le jury. »

La réforme de 2003 a introduit la possibilité de réaliser le stage de 6e année dans deux officines différentes. Une possibilité qu'aucune des facultés ne souhaite rendre obligatoire. Tout simplement pour une raison de praticité. « A tours, nous avons constaté que les étudiants avaient tendance, du premier au dernier stage, à rester dans la même pharmacie, explique Henri Lepage. Pour des raisons financières et/ou personnelles, ils ne bougent pas et ainsi ne découvrent pas d'autre manière d'exercer. Nous avons proposé des stages de deux fois trois mois pour la 6e année. L'idée est que les étudiants puissent changer de type d'officine en cours de stage. Nous avons recensé et leur avons transmis une liste de maîtres de stage susceptibles de les héberger chez eux ainsi que leurs activités (MAD, vétérinaire...). Nous avons demandé également aux officinaux s'ils acceptaient de devenir directeurs de thèse ou de proposer des sujets pour éviter que les thèses ne restent trop scolaires. »

A Montpellier, rapport de stage avec un thème imposé

Les modalités de l'examen de validation des stages varient selon les facultés (voir tableaux). L'examen comporte ou non un écrit, un oral, des reconnaissances, une épreuve de posologie, de la galénique, une note du maître de stage et un rapport écrit de stage : une « inégalité dans la forme qui ne signifie pas une inégalité dans le fond », insistent les membres du Collège Français des pharmaciens conseillers et maîtres de stage. La plupart des 15 facultés interrogées conservent une épreuve de galénique. « Même si le pharmacien les fait réaliser par les préparateurs, sous sa responsabilité, il doit savoir faire des préparations », estime Jean Arnoult.

« A Nantes nous voulons que les questions portent sur l'exercice et la pratique officinale, insiste Nicole Grimaud. Il y a également une épreuve de reconnaissances de plantes. En revanche, nous n'avons plus d'examen de posologie écrit depuis deux ans. Des questions sur le sujet peuvent être posées à l'oral sur la dose toxique d'un médicament courant par exemple. Il n'y a pas non plus d'examens écrits mais un oral. Nous ne demandons pas de rapport. »

A Montpellier, l'examen comporte la validation du stage par le pharmacien, un écrit portant surtout sur le commentaire d'ordonnances, un oral et un rapport de stage. Ce dernier porte sur des commentaires d'ordonnances auxquels s'ajoute très souvent un thème à développer en particulier. Le prochain thème de stage portera très certainement sur le conseil en pédiatrie, un choix établi en concertation avec le conseil régional de l'ordre des pharmaciens et la présidente de l'Association des conseillers et maîtres de stage du Languedoc-Roussillon. Comme l'explique Jean-Marie Gazengel, responsable de la filière officine à la faculté de Caen, « la 6e année a été créée il y a une vingtaine d'années pour, d'une part, permettre un stage à l'hôpital sur un an et, d'autre part, pour permettre aux étudiants de soutenir une thèse leur donnant un doctorat d'exercice, cette thèse pouvant être soutenue au cours de cette 6e année ou dans un proche prolongement ».«

A Tours, la faculté a constaté la nécessité de mettre en place, à partir de cette année, une unité optionnelle « préparation à la thèse d'exercice » en 5e année avec l'intervention de bibliothécaires et d'universitaires. « L'objectif est de les inciter à rédiger leurs thèses le plus tôt possible, précise Alain Gueiffier, nouveau doyen de la faculté. Nous nous sommes aperçus qu'il y avait plus de 50 % des étudiants en filière officine qui sortaient de la faculté sans avoir soutenu leur thèse. Ils disposent de l'attestation de sixième année avec laquelle ils peuvent travailler comme adjoints, même s'ils ne peuvent pas être titulaires et ne peuvent faire de remplacement que pendant une durée limitée. L'idéal est de la rédiger en cinquième année et de la soutenir en sixième année. Nous allons voir si cette UE suffira ou s'il faudra mettre en place plus d'incitations. »

L'ANEPF soutient la réforme LMD

« L'apport de la réforme licence-master-doctorat sera important sur l'organisation des études, estime Guillaume Bardy, président de l'Association nationale des étudiants en pharmacie de France. L'étudiant pourra personnaliser son parcours tout au long de ses études via des unités d'enseignements spécifiques. Il pourra par exemple sortir de la faculté en étant spécialisé en phytothérapie ou dans une autre discipline. L'idée n'est pas de remettre en cause l'unicité du diplôme : le tronc commun d'enseignements doit rester très fort mais l'étudiant pourra diversifier les enseignements suivis. Aujourd'hui, une fois engagé dans la filière officine, l'étudiant n'a malheureusement plus (ou presque) le choix d'options. Le parcours est "tubulaire", ce qui ne sera pas le cas avec la réforme LMD. »

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