Jeux interdits pour les gro upements et leurs adhérents - Le Moniteur des Pharmacies n° 2684 du 30/06/2007 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2684 du 30/06/2007
 

COMMUNICATION

Entreprise

L'évolution des concepts d'enseigne ou de réseau pose des problèmes à ce jour non résolus au regard des dispositions légales et réglementaires qui encadrent la profession. Notamment en matière de publicité, de communication et d'indépendance. Quels sont les risques pour les adhérents. Réponses d'avocats.

Les réseaux et enseignes de pharmacie qui ressemblent étrangement à des réseaux de franchise ne peuvent se développer qu'en modifiant sensiblement un certain nombre de règles qui constituent l'armature du droit pharmaceutique », alerte Alain Fallourd, avocat. Dans les réseaux ou enseignes constitués, le pharmacien qui les intègre reste propriétaire et exploitant de la pharmacie. Toutefois, « ces systèmes entraînent nécessairement des risques d'infraction aux exigences d'indépendance du pharmacien et de non-respect des règles en matière de publicité », précise-t-il.

Puis-je informer le client de mon appartenance à une enseigne ?

Le Code de la santé publique laisse l'opportunité au pharmacien d'informer le public de son appartenance à un groupement ou réseau. Ainsi, les officinaux sont autorisés à faire figurer sur leurs en-têtes de lettres ou papiers d'affaires l'appartenance à une association, groupement ou réseau professionnel à condition que le nom ou le sigle réseau ne prévale pas sur la dénomination de l'officine (art. R. 4235-24).

Par ailleurs, la signalisation extérieure de l'officine ne peut comporter, outre sa dénomination, que les emblèmes et indications suivants : le nom ou le sigle de l'association, du groupement ou du réseau professionnel dont le pharmacien est membre ; ce nom ou ce sigle ne pouvant prévaloir sur la dénomination de l'officine (art. R. 4235-53). Sur Internet, l'accès exhaustif à l'ensemble des noms des pharmacies appartenant à un réseau déterminé ne saurait être accepté. Selon le conseil central A, il s'agit d'une forme de publicité, quand bien même restreinte aux internautes.

Dois-je appliquer la politique de prix proposée par mon groupement ?

Gare aux ententes commerciales non compatibles avec le droit à la concurrence, susceptibles de s'attirer les foudres de la DGCCRF ! Les pharmaciens de groupements, enseignes ou réseaux peuvent se retrouver en porte à faux avec l'ordonnance de 1986, selon laquelle « les opérations promotionnelles ne peuvent conduire à une entente pour pratiquer des prix de revente identiques ou fixer des prix de revente minimum [...] ». « En imposant une politique commerciale commune à l'ensemble de leurs adhérents, les groupements pourraient se voir reprocher de mettre en oeuvre des pratiques concertées anticoncurrentielles s'ils ne veillaient pas à sélectionner des officinaux qui ne sont pas en concurrence directe », souligne Guillaume Fallourd. En d'autres termes, un groupement peut imposer les mêmes prix à ses adhérents uniquement si ceux-ci sont suffisamment éloignés géographiquement et, par conséquence non concurrents.

Mon groupement peut-il faire de la publicité ?

La responsabilité délictuelle des groupements peut être engagée. Les règles leur interdisent de faire de la publicité en faveur des officines qui les constituent. Par ailleurs, le Conseil d'Etat justifie l'interdiction de publicité faite aux groupements, notamment par une autre règle du code de déontologie qui interdit au pharmacien de solliciter la clientèle par des procédés et moyens contraires à la dignité de la profession. « Aucune publicité ne peut être faite auprès du public pour un groupement ou un réseau constitué entre officines », confirme Guillaume Fallourd, également avocat. Les opérations de communication spécifiques aux groupements, même si elles représentent avantageusement la profession, ne doivent pas avoir pour objectif ou pour conséquence, de faire connaître et reconnaître le nom d'une enseigne ou d'un réseau auprès du public.

Peut-on communiquer sur les services d'une enseigne ?

Les groupements recherchent à travers leur politique d'enseigne une reconnaissance de qualité auprès du public. Or, « la position actuelle du président du Conseil national de l'ordre des pharmaciens tend à limiter la concurrence entre pharmaciens, ce dernier ayant rappelé dans son bulletin, en 2000, que les pharmaciens ne doivent pas chercher à se distinguer les uns des autres par des emblèmes dit de qualité », indique Guillaume Fallourd.

Prudence donc sur la communication des services au nom de l'enseigne, le pharmacien ne peut vanter la qualité des services offerts dans son officine, ceci pouvant être interprété par l'Ordre comme un acte de dénigrement et de concurrence déloyale à l'égard de ses confrères.

Enfin, l'avocat rappelle l'article R. 4235-54 du Code de la santé publique, qui précise « qu'il est interdit au pharmacien d'aliéner son indépendance à l'occasion de l'utilisation d'une marque ou d'un emblème collectif ».

L'adhésion à un groupement peut-elle aliéner mon indépendance ?

Suite à différentes actions de communication menées par des groupements ou enseignes (campagnes, sites Internet, articles de presse...), le conseil central A de l'ordre des pharmaciens a jugé nécessaire de rappeler aux pharmaciens adhérents à ces groupes ou réseaux les règles éthiques et déontologiques qui s'imposent à eux. Les pharmaciens d'officine ne doivent pas « se soumettre à aucune contrainte financière, commerciale, technique ou morale [...] qui serait susceptible de porter atteinte à leur indépendance dans l'exercice de leur profession, notamment à l'occasion de contrats, conventions ou avenants à objet professionnel (article R. 4253-18) ».

Quels sont les risques ?

Même si les pharmaciens ne sont pas directement à l'origine des communications engagées, leur appartenance au réseau, par signature d'un accord de partenariat ou d'un contrat, permet théoriquement de les poursuivre pour violation des articles R. 5125-26 et 29 du Code de la santé publique. Toute forme de promotion d'un réseau ou de son activité promeut, même indirectement, les membres du réseau. Pour l'Ordre, cela les place en infraction avec le Code de la santé publique.

Les adhérents risquent de passer en chambre disciplinaire à titre individuel, même si le groupement est à l'initiative des distorsions à la réglementation

Faut-il modifier le Code de la santé publique ?

Force est de constater que le cadre réglementaire n'est aujourd'hui plus adapté... La profession et ses enjeux évoluant, pourquoi ne pas faire également évoluer le Code de la santé publique ? « Les règles de déontologie devraient nécessairement être modifiées pour rendre compatible la technique du réseau de franchise avec les exigences d'indépendance et l'exigence générale qui pèse sur le pharmacien d'officine », reconnaît Alain Fallourd, avocat. Cependant, rappelant la double appartenance du pharmacien à la catégorie des commerçants et à celle des professions libérales, il souligne « qu'il est toujours extrêmement délicat de modifier un équilibre entre l'exigence d'une profession libérale et d'une profession commerciale. En bougeant une pièce de l'édifice que constitue le Code de la santé publique, on risque, semble-t-il, d'en faire bouger d'autres ».

L'une des premières conséquences possibles de ces modifications est le changement des structures juridiques de l'entreprise officinale. Pour Alain Fallourd, la concurrence doit être ramenée à une juste limite afin de ne pas porter préjudice à la moralité de la profession. « En voulant utiliser les techniques du droit commercial les plus élaborées, on risque de fragiliser la règle de la répartition géographique des officines, car on ne peut pas à la fois rester protégé par les règles de la concurrence et vouloir utiliser des instruments qui sont, au contraire, ceux que l'on utilise dans les professions les plus concurrentielles », conclut Alain Fallourd

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