Une microbiologiste sur tous les fronts

Nom de code : CIBU. Créée après les attentats du 11 septembre à la demande de la Direction générale de la santé, la Cellule d'intervention biologique d'urgence de l'Institut Pasteur reste sur le qui-vive depuis quatre ans. Ana Maria Burguière, pharmacienne biologiste, spécialisée en virologie et bactériologie, en est la directrice adjointe. C'est durant ses études de pharmacie, au Portugal, qu'elle a découvert la virologie, lorsqu'un coopérant français est venu à la faculté de pharmacie de Lisbonne pour travailler sur un projet de laboratoire de virologie. Sa passion pour cette discipline ne l'a quasiment plus quittée depuis.

Coups de foudre à Paris.

Jeune diplômée, Ana Maria décroche une bourse du ministère des Affaires étrangères pour étudier la virologie à Paris. Une étape décisive dans sa vie professionnelle et privée puisqu'elle y rencontre son époux et fait le choix d'une carrière dans l'Hexagone. En stage au laboratoire de virologie à l'hôpital Trousseau, elle rejoint ensuite l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière, d'abord en virologie puis en bactériologie. « J'ai passé mes certificats d'études supérieures pour être biologiste tout en travaillant, puis je suis devenue attachée des hôpitaux, raconte-t-elle. Lorsque le Portugal est entré dans l'Union européenne, j'ai enfin pu obtenir la reconnaissance de mon diplôme de pharmacien. » Après treize années passées à l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris, la jeune femme saisit cette opportunité pour se tourner vers un laboratoire de ville. « J'ai trouvé un poste de directrice adjointe dans un très gros laboratoire privé d'analyses médicales dans le 15e arrondissement. Nous étions une centaine de salariés », se souvient-elle.

Le costume se révèle finalement trop étroit pour Ana Maria Burguière qui quitte rapidement son poste. S'ouvre alors une période de transition qu'elle met à profit en s'inscrivant en maîtrise au Kremlin-Bicêtre. « La procréation médicalement assistée m'intéressait depuis longtemps, c'était le moment propice pour approfondir le sujet », explique-t-elle. Ce nouveau diplôme lui permet de rebondir rapidement. « J'ai appris que l'hôpital de Courbevoie recherchait un biologiste intéressé par la procréation médicalement assistée, j'y suis entrée en faisant fonction de praticien hospitalier, puis j'ai passé le concours. »

Au coeur de la sécurité virale.

Au cours de la même période, une petite annonce attise la curiosité de Ana Maria : l'Institut Pasteur cherche un médecin expert en bactériologie et virologie pour son Centre de biologie médicale spécialisée. « Excepté le diplôme de médecin, le poste correspondait à mes compétences, j'ai donc postulé. » Sa candidature n'est pas retenue mais elle est vite recontactée et intègre l'équipe à mi-temps avant d'obtenir un an plus tard un temps plein comme directrice adjointe. Lorsque L'Institut Pasteur cède son activité de biologie médicale fin 1999, elle choisit d'y rester et intègre Texcell, un autre laboratoire de l'Institut spécialisé dans la sécurité virale. « Nous réalisions des études pour les industriels sur l'efficacité d'antiseptiques et de désinfectants, nous validions des process industriels pour sécuriser les produits utilisés en thérapie, » précise-t-elle.

Lorsque Texcell sort à son tour du giron de l'Institut Pasteur, la microbiologiste privilégie une fois de plus la santé publique. Elle obtient un poste de directrice adjointe au Centre national de référence de la grippe. Elle y rencontre Jean-Claude Manuguerra, codirecteur de l'établissement.

En alerte sur le front biologique.

Quand l'Institut Pasteur demande à Jean-Claude Manuguerra de prendre en charge la Cellule d'intervention biologique d'urgence, c'est tout naturellement qu'il y implique Ana Maria. « Au début nous n'avions pas d'existence à part entière, c'était une activité en plus. Peu à peu la cellule s'est structurée avec une équipe technique, des locaux. Aujourd'hui nous y consacrons tout notre temps. » Et la tâche est grande puisqu'il s'agit de rester constamment en alerte pour pouvoir répondre à tout moment à une demande des autorités de tutelle, de l'Institut national de veille sanitaire, de la DGS ou de l'Organisation mondiale de la santé pour intervenir dans un condiv épidémique, grippal notamment, ou dans un condiv infectieux malveillant.

« Nous sommes le seul laboratoire à Pasteur à fonctionner 24 heures sur 24 et 365 jours par an », précise Ana Maria. Un poste d'autant plus motivant pour la microbiologiste qu'il lui offre la possibilité d'être non seulement au coeur de l'actualité mais aussi d'intervenir sur le terrain. Elle est ainsi partie en Afrique en juin dernier en tant qu'experte pour participer à la mise en place d'un réseau de surveillance et de diagnostic des fièvres hémorragiques virales. « Aucune journée ne ressemble à une autre. Nous sommes aussi beaucoup sollicités sur divers congrès dans le monde entier, comme au Brésil très bientôt. »

Une vie professionnelle rêvée qui permet à Ana Maria Burguière de mettre à l'épreuve son dynamisme au sein d'une équipe soudée. Tout autant que la biologie, elle apprécie la qualité des relations humaines qu'elle entretient avec ses collaborateurs : « Le côté humain est capital, je ne peux travailler que dans la confiance... »