Satellisé par Rouen et la région parisienne ! - Le Moniteur des Pharmacies n° 2633 du 17/06/2006 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2633 du 17/06/2006
 

EMPLOI DANS L'EURE

Carrières

L'Eure, qui ne bénéficie pas d'un « réservoir universitaire », subit de plus l'attraction des agglomérations rouennaise et parisienne la prive de diplômés. La quadrature du cercle. Qui plus est, le maillage territorial est malaisé.

L'Eure occupe la situation la plus délicate qui soit : un département à la fois trop proche et trop éloigné de deux métropoles régionales qui le laissent en marge des « flux de diplômés ». A l'opposé, la densité de population de l'Eure n'est que de 90 habitants par km2, ce qui complique la tâche en matière de maillage territorial en professions de santé. Sur les 675 communes de ce département très rural, 651 comptent moins de 3 000 habitants ; seule Evreux dépasse les 50 000 habitants ! Certes, on qualifie les vallées de l'Est de « troisième couronne » parisienne, et le Nord bénéficie économiquement de la proximité de Rouen. Mais cette situation se retourne contre d'éventuels recruteurs.

Coefficient 600 et logement gratuit.

Le département compte 157 officines pour une moyenne de près de 3 500 habitants par officine : « Ce ratio joue plutôt en faveur des officines, explique Dominique Brasseur, installé à Bernay et président du conseil régional de l'ordre de Haute-Normandie. Globalement, elles ont une assise plus importante que celles de Seine-Maritime en termes de chiffre d'affaires moyen : 1,646 million d'euros contre 1,5 million d'euros. » Mais, selon le « Rapport cantonal sur l'offre de soins de proximité en Haute-Normandie », « 54 % des cantons présentent une faible densité d'officines et 30 % une faible densité de professionnels. Le sud et l'ouest de l'Eure [...] présentent de faibles densités de professionnels ».

Le département présente un paradoxe. Si l'on considère la population globale, il lui manque des officines. Or, si l'on considère les normes fixées par la loi, il est en excédent de dix licences... La faculté de Rouen n'alimente pas la région. « La ruralité de l'Eure, explique Dominique Brasseur, induit des difficultés de recrutement. Sur les 157 officines, on peut estimer qu'un peu plus de 10 % manquent d'adjoints, soit 15 à 20. »

L'Eure souffre de ne pas disposer d'équipements universitaires. « A Evreux, il n'y a rien, nous dépendons de la faculté de Rouen d'où sortent 79 diplômés par an, dont une quarantaine d'officinaux. Sur la Haute-Normandie, il manque quelque 70 adjoints. Notre déficit est donc de deux promotions. Il est vrai qu'une trentaine des diplômés s'orientent vers l'industrie pour répondre aux besoins du bassin chimique de basse Seine », poursuit Dominique Brasseur. L'éloignement de la ville est donc un facteur discriminant : « Nous avons une pénurie d'adjoints, confirme Michel Batard, installé à Breteuil-sur-Iton. Le sud du département fait plutôt appel à la faculté de Caen, mais les étudiants ne veulent pas quitter une ville de faculté. Je ne pense pas que ce soit un problème d'argent. » « Trouver un remplaçant, c'est mission impossible. Il faut compter un coefficient entre 600 et 650 plus le logement gratuit », analyse Jean-Christophe Larant, de Vernon. « Nous sommes dans une société de loisirs qui exige que cinéma et restaurants soient à proximité du lieu de résidence », avance de son côté Philippe Bausière, installé à La Saussaye près d'Elbeuf.

« La situation est très variable, précise Michel Caillaud, président départemental de l'UNPF, installé à Aubevoye. La région d'Evreux est peut-être celle qui présente le plus de facilités au niveau du recrutement, l'ouest du département n'est pas évident. La faculté de Rouen ne suffit pas pour alimenter la Haute-Normandie... » Et Guy Frackowiak, de la FSPF, de résumer : « Avec 157 pharmacies, l'Eure est un petit département et cela rejaillit sur l'emploi, le syndicalisme, les structures... » Sur la trentaine d'offres recensées par l'établissement de Bourg-Achard de l'OCP, une dizaine proviennent de l'Eure : « La campagne a du mal à trouver preneur, commente le directeur de l'OCP Jacques Touminet, même si la situation est un peu meilleure qu'il y a quelques années, quand certains ne pouvaient partir en vacances. Il y a toujours davantage d'offres que de candidats. »

Préparateurs fidèles mais vieillissants.

Plus satisfaisant semble être le nombre de préparateurs. Rares sont les officinaux qui font état d'une réelle tension. Sur les 344 élèves en formation au CFA de Mont-Saint-Aignan, en Seine-Maritime, 74 sont originaires de l'Eure. « Nos effectifs correspondent aux capacités d'accueil, indique Denise Heudron, responsable de la filière pharmacie. La demande s'est stabilisée depuis plusieurs années. L'an dernier, le taux de placement à six mois atteignait 94 %. » Pour autant, la demande persiste : « Sur les huit offres d'emplois affichées aujourd'hui, cinq n'ont pas encore trouvé preneurs. »

Quant au CFA de Poissy, dans les Yvelines, il n'accueille que cinq jeunes ayant un stage dans l'Eure. Mais on peut s'attendre à ce que les préparateurs viennent à manquer : « Le personnel est vieillissant et calé sur le papy-boom. Nous risquons d'être frappés de plein fouet par ces évolutions démographiques à venir », constate Dominique Brasseur qui, comme Denise Heudron, plaide pour une amélioration de leur qualification.

Démographie médicale inquiétante.

Si aujourd'hui on peut considérer que la démographie pharmaceutique correspond globalement aux besoins du département, l'inquiétude est plus vive en termes de démographie médicale : « L'Eure compte aujourd'hui 480 généralistes, ils ne seront plus que 220 dans quatre à cinq ans », s'inquiète Jean-Christophe Larant, comme nombre de ses confrères. « Des bourgs comme Broglie ou Serquigny n'ont plus qu'un médecin, d'autres n'en ont même aucun... De plus en plus, en campagne, ils se regroupent en maison médicale. Notre logique de proximité n'est pas la même et nous nous interrogeons sur l'avenir, commente Dominique Brasseur. Les pharmacies doivent-elles s'associer avec les cabinets médicaux pour créer des centres de soins ? Qu'en sera-t-il dans dix ans ? »

Autre incidence, le choix de la localisation des maisons médicales peut poser problème comme à Verneuil ou Breteuil qui comptent deux pharmacies sur leur territoire. La récente tendance au regroupement observée dans le département s'amplifiera-t-elle ? Que ce soit sur Evreux, où il y a des licences excédentaires - une officine pour 2 872 habitants -, ou dans de gros bourgs comme Cormeilles, Pont-Audemer et Bernay... Les choix en matière de politique de santé influeront sur la réalité officinale de demain.

L'EURE EN CHIFFRES

- 541 054 habitants. - Densité de population : 90 habitants/km2. - 157 officines, 191 titulaires, 145 adjoints et 318 préparateurs. - Une officine pour 3 446 habitants. - Taux de chômage : 9,5 %.

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