L'éducation du patient au coeur du salon - Le Moniteur des Pharmacies n° 2627 du 06/05/2006 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2627 du 06/05/2006
 

Actualité

Reportage

La pharmacien est-il, devient-il, deviendra-t-il éducateur de santé ? Pharmagora 2006 a brassé les idées sur ce thème. A commencer par le débat et les Rendez-vous formation organisés par « Le Moniteur ». Et les idées n'ont pas manqué.

Même si, selon l'enquête menée par Ipsos en janvier dernier pour Pharmagora, les pharmaciens sont unanimes pour estimer que l'éducation santé fait déjà partie du rôle du pharmacien et que cette tendance ira en augmentant, la réalité est plus nuancée. « C'est le côté optimiste, tempère le Pr Deccache, spécialiste belge de l'éducation santé. L'éducation pour la santé est un concept complexe, souvent mal compris, qu'il convient de différencier de l'information et du conseil, les rôles clés du pharmacien. Cette pratique est loin d'être généralisée. »

L'éducation qui aide les patients à comprendre, à s'approprier l'information et à l'adapter à leur situation s'inscrit dans la durée. Et la pratiquer ne s'improvise pas. Acquérir un savoir-faire au niveau pédagogique nécessite une formation. « Il faut sensibiliser les pharmaciens à ce qu'est réellement l'éducation, explique Jeanne Elie, pharmacienne adjointe, titulaire d'un DESS « Promotion de la santé et développement social ». Tant qu'ils pensent déjà en faire, ils n'éprouvent pas le besoin de se former. » L'éducation santé est en réalité très rarement systématique, a ajouté le Pr Jean-François Collin, lors d'une conférence sur le sujet et il met les pharmaciens en garde : « Attention à ne pas céder à la tentation de laisser l'éducation du patient à l'industrie ! »

Eduquer le patient, c'est aussi gagner du temps.

Parmi les freins le plus souvent évoqués : le manque de temps (insuffisant pour un tiers des pharmaciens interrogés par IPSOS), de supports validés, de formation... Pourtant l'éducation du patient peut aussi amener à un gain de temps ! « Si on part de ce que sait le patient, on va plus vite, développe Jeanne Elie, il n'est pas question de faire un cours mais de compléter ce qu'il sait déjà. » Et le plus souvent la disponibilité est fonction du degré d'attention accordée au patient plus que du temps qui lui est consacré, comme le précise le Pr Deccache, qui ajoute : « L'éducation s'inscrit dans la durée et chaque patient vient en moyenne plus d'une fois par mois. » « C'est toute l'équipe qui doit prendre en charge le patient de façon homogène, en s'appuyant sur le dossier patient », insiste Jean-Charles Tellier, vice-président de la section A de l'ordre des pharmaciens.

S'inspirer du Québec.

L'officine dispose de nombreux atouts pour mettre en place une démarche d'éducation. Outre une connaissance fréquente de l'historique médicamenteux du patient et un rôle pivot dans les relations entre les différents professionnels de santé, plusieurs pistes doivent être explorées. A commencer par l'adoption d'une posture éducative, quelle que soit la pathologie, avec un questionnement minimal de façon à faire apparaître les représentations et les connaissances du patient. Ce qui permet d'orienter le patient vers un processus de changement de comportement. Il faut vérifier la bonne compréhension du message, l'apprentissage passant par la manipulation, par exemple lorsqu'il s'agit d'utiliser un appareil (lecteur de glycémie, autotensiomètre...).

Il est possible aussi d'organiser des rendez-vous dédiés à l'éducation avec des objectifs précis, comme le fait Jeanne Elie dans sa pratique quotidienne auprès des patients sous antivitamines K. « En termes d'éducation, le mot clé est "personnalisation" explique-t-elle, puis "accompagnement" et «suivi". » Le pharmacien devient alors un référent pour le patient et valorise ainsi son image de professionnel de santé qui s'adapte à son patient.

Il est temps de regarder la relation pharmacien-patient différemment et de s'inspirer des expériences étrangères, comme de celle du Québec, souvent citée en exemple. Diane Lamarre, officinale et professeur de clinique à la faculté de pharmacie de Montréal, s'en est fait la porte-parole : « Le pharmacien doit se sentir responsable du résultat attendu du traitement. Il doit suivre le patient jusqu'à ce que l'objectif soit atteint. Et pour cela dégager le temps nécessaire pour écouter et parler au patient. » Tous les professionnels de santé doivent se mobiliser pour obtenir ce résultat.

« Le développement de l'éducation santé nécessite de rompre les barrières culturelles entre médecins et pharmaciens », remarque Robert Pujol, pharmacien et enseignant dans le Sud-Ouest. « Mais ce n'est pas encore souvent le cas, déplore Christophe Aveline, anesthésiste-réanimateur à Rennes. Quand on prescrit un traitement médicamenteux, on se fixe un objectif thérapeutique, résultat qui ne peut être acquis que si l'ensemble des professionnels de santé vont dans le même sens et partagent l'information, une démarche qu'il est important de débuter dès la faculté. »

Vers une rémunération ?

L'éducation pour la santé doit donc être enseignée à tous les professionnels de santé. Les facultés de pharmacie commencent à se mobiliser. Par exemple, Robert Pujol débute à la rentrée prochaine un enseignement auprès des étudiants de 5e année sur ce thème à Toulouse, en s'appuyant sur la définition de l'Organisation mondiale de la santé de l'éducation thérapeutique du patient : « Aider les patients à acquérir ou maintenir les compétences dont ils ont besoin pour gérer au mieux leur vie avec une maladie chronique. » En effet, il ne faut pas rester centré sur le médicament, souligne le Pr Deccache : « Huit patients sur dix souffrent d'une maladie chronique nécessitant une éducation santé élargie à la diététique, l'hygiène de vie... Les facteurs psychosociaux sont également à prendre en compte. »

L'évolution du métier de pharmacien semble donc passer par une implication accrue dans un rôle d'éducateur de santé. Rôle cité plusieurs fois dans la toute nouvelle convention signée avec l'Assurance maladie. Reste à prouver l'action incontournable de la profession au bénéfice du patient... pour ensuite envisager une rémunération.

Ne pas confondre

Information : elle est axée sur le contenu scientifique ou technique (actuel et validé).

Conseil : il est centré sur celui qui délivre et qui dit ce qu'il pense être bon pour le patient.

Education : elle est ciblée sur le patient et sur la relation soignant-patient, sur un apprentissage et un accompagnement, avec pour objectif l'amélioration des compétences du patient afin qu'il puisse faire ses propres choix.

- L'éducation thérapeutique s'adresse en général au patient chronique et concerne la gestion des traitements.

- L'éducation à la maladie englobe en plus la gestion du vécu de la maladie et son impact sur la vie quotidienne.

- L'éducation pour la santé, qui concerne aussi bien le patient chronique que bien portant, la prévention, est une démarche globale de promotion de la santé.

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