Anticoagulants - Deuxième partie : Les antivitamines K - Le Moniteur des Pharmacies n° 2625 du 22/04/2006 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2625 du 22/04/2006
 

Cahier formation

14 cas pratiques pour montrer que la vigilance doit rester de mise tout au long du traitement anticoagulant oral. Dans une grande partie des cas, les accidents sont dus à des surdosages et à une mauvaise surveillance biologique du traitement. Parcourez les rappels de pharmacologie pour mieux comprendre l'origine des accidents. Et adoptez la grille d'aide à la délivrance des AVK qui vous permettra en toute circonstance de sécuriser la délivrance.

CAS PRATIQUES

1 Erreurs de posologie : Prescription d'emblée de Préviscan sans HBPM

Madame P., 52 ans, 61 kg, patiente habituée de la pharmacie, se présente avec une ordonnance du service des urgences de l'hôpital voisin : Préviscan, 1 comprimé par jour. Posologie à modifier selon résultats par le médecin traitant.

C'est la première fois qu'elle reçoit cette prescription d'antivitamine K (AVK). Interrogée, madame P. raconte qu'elle s'est rendue la veille au soir aux urgences pour une crampe au mollet qui lui faisait « atrocement » mal. L'interne des urgences qui l'a prise en charge aurait parlé de "phlébite". Après avoir reçu une injection, l'interne lui a remis cette ordonnance avec du Préviscan sans autres explications...

Analyse

- Nécessité de l'héparinothérapie

Le traitement d'une thrombose veineuse profonde (« phlébite ») est basé sur l'anticoagulation qui permet de lyser le caillot et d'éviter le risque d'embolie pulmonaire lié à la migration du thrombus. Si madame P. a bien une « phlébite » (confirmée par un Echo-doppler), il est indispensable de débuter un traitement anticoagulant qui soit efficace immédiatement, c'est-à-dire par héparine. L'efficacité d'un traitement par Préviscan (antivitamine K) implique un temps de latence de 24 à 48 heures. Il ne peut donc être utilisé pour un effet immédiat.

- Risque d'embolie pulmonaire

En l'absence de traitement héparinique, pendant la phase de latence de l'AVK, le caillot sanguin peut s'étendre dans la veine voire se détacher et être à l'origine d'une embolie pulmonaire potentiellement mortelle. Il est donc indispensable de faire pratiquer des injections d'héparine de bas poids moléculaire (HBPM) ou d'héparine non fractionnée tant que le traitement par AVK n'a pas atteint sa cible (INR entre 2 et 3, voir page 5).

Conduite à tenir

La pharmacienne appelle les urgences de l'hôpital. Elle est mise en contact avec le chef de service des urgences de l'hôpital. Après s'être assurée que le diagnostic de phlébite rapporté par madame P. est exact, la pharmacienne explique qu'elle s'étonne de n'avoir qu'une prescription de Préviscan sans HBPM. Le médecin se rappelle effectivement avoir vu son interne avec la patiente. Il lui avait conseillé d'écarter le risque de phlébite, mais n'a pas vu sa prescription de sortie. Mis au courant, le médecin souhaite que madame P. retourne tout de suite aux urgences où il la prendra alors immédiatement en charge.

Comme l'hôpital est tout proche et que la patiente est conduite par son mari, le médecin ne juge pas nécessaire de faire appel à un transport médicalisé (pompiers, SAMU).

Dans un autre condiv, cela aurait été indispensable puisque la patiente court un risque d'embolie pulmonaire si son caillot migre suite à une déambulation sans traitement anticoagulant.

Pour en savoir plus sur les traitements par héparines, se reporter au Cahier Formation Iatrogénie n° 2 du 15/04/2006, disponible également sur http://www.moniteurpharmacies.com #gt; Documentation.

A savoir

Les antivitamines K n'agissent qu'après un temps de latence de 24 à 48 heures. Pour obtenir un effet anticoagulant immédiat, ce qui est indispensable pour éviter le risque d'embolie pulmonaire, il est prescrit une HBPM (ou une héparine standard en cas de contre-indication). Le traitement par AVK est démarré dès le premier jour ou le lendemain au plus tard, sous couvert de l'héparinothérapie, jusqu'à obtention de l'INR cible.

Mise en place du relais de l'HBPM par antivitamine K

-#gt; Lorsqu'un traitement anticoagulant au long cours est nécessaire, un relais de l'héparinothérapie par une antivitamine K est instauré. L'antivitamine K peut être introduite très précocement, dès le premier ou au plus tard le deuxième jour du traitement par héparine, ce qui diminue la durée du relais héparine/AVK. Un relais court entraîne moins de risque de thrombopénie induite par l'héparine puisque la durée de l'héparinothérapie est limitée, et diminue le risque hémorragique lié à l'association des deux traitements anticoagulants.

-#gt; D'après les recommandations de l'Afssaps, l'héparine n'est arrêtée que lorsque deux INR consécutifs à 24 heures d'intervalle sont dans la zone thérapeutique. En cas de thrombose récente, l'héparinothérapie et le traitement AVK devraient se chevaucher pendant cinq à six jours, même si l'INR est rapidement supérieur à 2.

(Afssaps, « Fiche de transparence AVK », 2000, http://agmed.sante.gouv.fr/pdf/5/tavk.pdf).

2 Erreurs de posologie : Oubli de prise de Coumadine

Madame R., 59 ans, 85 kg, traitée depuis 3 mois par Coumadine suite à une embolie pulmonaire, appelle la pharmacie tôt le matin parce qu'elle a oublié, la veille au repas du soir, de prendre son demi-comprimé de Coumadine 10 mg. Elle veut alors savoir si elle doit prendre immédiatement son demi-comprimé oublié.

Analyse

En cas d'oubli, il est possible de prendre la dose manquée dans un délai de 8 heures après l'heure habituelle de prise. Passé ce délai, il est préférable de « sauter » cette prise et de prendre la suivante à l'heure habituelle le lendemain. Il ne faut en aucun cas doubler la dose.

Le médecin doit alors être averti et peut éventuellement décider de réaliser des INR plus fréquemment.

Etant donné la demi-vie longue (35 à 45 h) de la Coumadine, un oubli chez un patient équilibré n'expose qu'à un risque de thrombose très faible.

Il est à noter que des vomissements ou des diarrhées répétées peuvent également exposer un patient à un risque de sous-dosage et donc de thrombose. Il convient alors d'augmenter la fréquence des INR.

Conduite à tenir

Madame R. ne doit pas prendre son comprimé oublié (délai supérieur à 8 heures) et sa prochaine prise se fera au repas du soir, comme d'habitude. Elle doit noter cet oubli dans son carnet de suivi. La pharmacienne lui conseille également de prévenir son médecin ainsi que son biologiste si l'oubli survient peu de temps avant le contrôle programmé de l'INR.

A savoir

Une prise oubliée d'AVK ne peut être « rattrapée » que dans un délai de 8 heures. Au-delà, la prise doit être sautée et l'oubli de prise noté dans le carnet de suivi. En cas de doute, ne pas pas prendre le risque de doubler la dose.

Grille d'aide à la délivrance des AVK

Tout comme la délivrance des HBPM, celle d'une AVK (Sintrom, Mini-Sintrom, Coumadine ou Préviscan) nécessite de suivre un protocole précis pour minimiser le risque d'iatrogénie.

Une grille d'aide à la délivrance vous est proposée en page IV de la partie Pharmacologie. En la remplissant systématiquement à chaque délivrance, vous vous assurez de détecter les principales situations qui nécessitent de contacter le médecin avant de poursuivre la délivrance.

Cette grille comprend 3 parties :

- renseignements sur le patient ;

- renseignements concernant le traitement ;

- détection des situations à risque : mauvais contrôle de l'INR, relais héparine/AVK, signes d'appel d'un surdosage, interaction médicamenteuse.

Vous trouverez une version pdf de cette grille accompagnée d'explications, à imprimer ou à remplir en ligne, sur http://www.moniteurpharmacies.com #gt; Documentation #gt; Documents de référence.

3 Erreurs de posologie : Un INR à 6

Madame V., 42 ans, traitée par Previscan suite à une thrombose veineuse profonde diagnostiquée trois semaines auparavant, se présente à la pharmacie un samedi après-midi avec les résultats de sa prise de sang. Son INR est alors à 6.

Analyse

Un INR supérieur à 5 correspond à un surdosage significatif (sur le plan du risque hémorragique) en AVK. Face à un INR supérieur à 5 et inférieur à 9 et si le patient n'a pas de saignements ou s'ils sont minimes, les recommandations de l'Afssaps sont d'arrêter les prises, de prescrire 1 à 2 mg de vitamine K1 per os, des INR quotidiens et de reprendre l'AVK à plus faible dose lorsque l'INR revient dans la zone thérapeutique.

Conduite à tenir

- Appel du médecin en urgence

Le pharmacien appelle le médecin traitant de madame V., mais ce dernier ne consulte pas le samedi après-midi. Il est donc décidé d'appeler le SAMU (15) où un médecin est toujours joignable.

Compte tenu du fait que la patiente ne présente pas de manifestation hémorragique, le médecin lui demande de supprimer sa prise d'AVK du samedi et du dimanche soir et de refaire une prise de sang lundi matin. Il serait même préférable de faire un INR de contrôle dès le lendemain si les circonstances locales permettent d'avoir un dosage le dimanche matin. Madame V. devra bien sûr consulter son médecin traitant dès lundi afin qu'il recherche l'origine de cet INR élevé et planifie de nouveau le suivi de l'INR.

- Rédaction d'une opinion pharmaceutique

Le pharmacien reprécise alors par écrit la démarche à suivre par la patiente et rédige une opinion pharmaceutique (voir http://www.opinion-pharmaceutique.fr) qu'il garde et dont il envoie une copie au médecin traitant de madame V. Attention ! Le pharmacien ne peut pas prendre la responsabilité de la modification de traitement (supprimer 2 prises d'AVK). Cette modification doit être entreprise uniquement après un avis médical.

La rédaction d'une opinion pharmaceutique est dans ce cas primordiale afin de garder une trace écrite de cette intervention et doit être transmise au médecin traitant.

Attention !

Un INR supérieur à 5 correspond à un risque hémorragique important. Il faut immédiatement contacter un médecin qui pourra éventuellement décider d'arrêter la prise d'AVK.

4 Erreurs de posologie : Une alternance jours pairs/jours impairs

Jeudi 6 avril, monsieur F., 53 ans, 85 kg, se présente à la pharmacie pour le renouvellement de son ordonnance de Préviscan qu'il prend suite à la pose de sa prothèse valvulaire. Préviscan : 1/2, 1 comprimé. 1 mois à renouveler. La pharmacienne demande à monsieur F. comment se passe son traitement et s'il a eu le résultat de sa dernière prise de sang. Monsieur F. lui montre son carnet de surveillance (voir page 6) et lui répond qu'il n'a pas été facile de trouver au début la bonne dose de Préviscan, c'est pourquoi il doit alterner la prise de un comprimé avec celle d'un demi. Pour ne pas se tromper, il prend une moitié de comprimé les jours pairs et un comprimé les jours impairs. Le dernier INR, qui date du 3 avril, est de 3,6. Le médecin est satisfait.

Analyse

- Valeur cible de l'INR

Monsieur F. est porteur d'une prothèse valvulaire mécanique. La zone thérapeutique de son INR se situe entre 3 et 4,5 (INR cible = 3,7). Chez un patient équilibré, l'INR doit être effectué au minimum toutes les 4 semaines. Il faut donc vérifier à chaque délivrance d'AVK que le patient a fait sa prise de sang et lui demander si son résultat était correct.

- Alternance des prises

Le fait de se fier aux jours pairs et impairs peut sembler astucieux, mais cela signifie que le patient prendra, les mois de 31 jours, un comprimé entier le 31 et également un comprimé entier le 1er du mois suivant, ce qui modifie le rythme d'administration !

- Conséquences cliniques potentielles

Cette « astuce » n'est pas complètement fiable. D'une part, prendre deux jours de suite un comprimé entier peut faire augmenter le risque hémorragique du patient. D'autre part, si la prise de sang est faite en début de mois avec un mois précédent à 31 jours, l'INR mesuré pourra être plus élevé - de façon involontaire. Le médecin peut alors être amené à prescrire une réduction de dose alors qu'elle n'a pas lieu d'être. Il y aura un risque potentiel de sous-dosage en AVK et donc un risque de thrombose.

Conduite à tenir

La pharmacienne propose au patient de noter tout simplement sur un calendrier la dose qu'il prend en regardant ce qu'il a déjà pris la veille. Il est intéressant de ne pas inscrire les doses à l'avance mais au jour le jour. Ainsi le patient note quand il a effectivement pris sa dose, ce qui permet de savoir s'il l'a déjà prise ou non et de ne pas doubler la dose en cas de doute. Il est judicieux de noter dans le dossier patient la posologie exacte de l'AVK.

A savoir

Le maintien de l'INR dans la zone cible nécessite parfois de faire varier le nombre de comprimés d'AVK par prise, sur 2 ou 3 jours. Un calendrier de prise écrit, rempli par le patient au fur et à mesure, permet d'éviter les oublis ou les prises erronées.

L'INR est l'outil de surveillance des traitements par antivitamine K

Qu'est-ce que l'INR ?

- La surveillance biologique du traitement par AVK est indispensable en raison de grandes variations pharmacocinétiques interindividuelles. Cette surveillance permet de déterminer la dose optimale pour chaque patient afin d'obtenir l'efficacité maximale, avec un risque minimum.

- Le test biologique adapté est la mesure du temps de Quick (TQ) exprimé en INR (international normalized ratio).

INR = Temps de Quick malade

Temps de Quick témoin

ISI : indice de sensibilité international du réactif (thromboplastine)

- Le temps de Quick, ou taux de prothrombine (TP), est le temps de coagulation du plasma d'un patient mis en présence de thromboplastine, dans des conditions opératoires définies. Le temps de Quick permet d'explorer les facteurs II, VII, X qui sont déprimés par les antivitamines K (voir page I des pages Pharmacologie).

- De nombreux facteurs influencent le temps de Quick, et en particulier le réactif utilisé.

- Un index de sensibilité, appelé ISI (international sensibility index), a donc été défini pour chaque thromboplastine. Dans ces conditions, le résultat ne dépend plus du réactif lui-même.

- Seul l'INR doit être réalisé pour surveiller les traitements par AVK. Le TP doit être abandonné. Malgré cette standardisation, il reste souhaitable que le patient fasse mesurer son INR dans le même laboratoire.

Quand contrôler l'INR ?

- Premier contrôle de l'INR 48 h ± 12 h après la première prise, puis 3 à 6 jours après la première prise.

- Contrôles ultérieurs tous les 2 à 4 jours jusqu'à stabilisation de l'INR avec espacement progressif. Minimum un INR toutes les quatre semaines, même chez un patient correctement équilibré.

- En cas de changement de posologie, de maladie intercurrente, d'introduction ou de retrait d'un médicament, de vomissements, de diarrhée, les contrôles doivent être faits de façon rapprochée jusqu'à stabilisation.

Quelles sont les valeurs cibles ?

Dans la plupart des indications, l'INR cible est de 2,5 (fourchette tolérée entre 2 et 3). Il est de 3,7 (entre 3,5 et 4,5) en cas de valves mécaniques mitrales, de valves aortiques de 1re génération ou aortique de 2e génération avec facteur de risque thromboembolique artériel associé.

Que faire en cas d'INR hors de la zone cible ?

En cas d'INR élevé par rapport à la fourchette cible, une intervention adaptée est nécessaire pour limiter le risque hémorragique ou ses conséquences. Il faut, dans la mesure du possible, éviter l'utilisation systématique de fortes doses de vitamine K1 qui vont rendre impossible l'équilibration du traitement pendant plusieurs jours, avec un risque de thrombose non négligeable.

- Si l'INR est trop élevé (supérieur à la valeur haute de la fourchette fixée par le médecin et inférieur à 5), ou en cas de saignement anormal, téléphoner immédiatement au médecin traitant. S'il n'est pas joignable, appeler un médecin de garde ou le 15. Il est nécessaire de recueillir un avis médical dans la journée.

- Si l'INR est très élevé, supérieur à 5, ou en cas de saignement important, appeler le SAMU (15) où un médecin indiquera la meilleure conduite à tenir : consultation immédiate avec le médecin traitant ou le médecin de garde, ou hospitalisation en urgence.

- Si l'INR est trop bas (inférieur à la valeur basse de la fourchette fixée par le médecin), appeler le médecin traitant (ou un remplaçant) pour adapter le traitement. Joindre impérativement un médecin dans la demi-journée.

1 Effets indésirables : Saignement sous Préviscan

Monsieur B., 64 ans, 70 kg, se présente à l'officine et demande au pharmacien un grand flacon d'Hextril. Il en profite pour renouveler son ordonnance :

- Préviscan : 1, 3/4 un jour sur deux.

- Hémigoxine 0,125 mg : 1 cp par jour.

- Cordarone : 1 cp par jour 5 jours sur 7.

- Metformine 850 mg : 1 cp 3 fois par jour.

Le pharmacien connaît bien monsieur B. Avant de délivrer le flacon d'Hextril, il lui demande si c'est pour lui. Effectivement, monsieur B. explique qu'il souffre de saignements des gencives inhabituels qui lui donnent un mauvais goût dans la bouche.

Analyse

- Condiv de prescription

Le patient, diabétique de type 2, traité par metformine, a des antécédents de fibrillation auriculaire. Pour cela il a été mis sous Préviscan, et son traitement cardiaque vise à corriger les troubles du rythme : antiarythmique de classe III (Cordarone) et digitalique (Hémigoxine). Il prend ces médicaments depuis 3 ans et maîtrise bien son traitement. Il réalise une fois par mois un INR dans le même laboratoire et ne prend pas d'autres traitements.

- Signes d'appel d'un surdosage

Le pharmacien avise monsieur B. que ses gingivorragies peuvent être un des signes de surdosage des AVK. Il lui demande si son dernier INR était correct et s'il a bien pris son Préviscan. Monsieur B. lui tend alors son carnet d'information et de suivi des AVK. Le dernier INR date de 15 jours. Il était alors à 2,6, donc dans la fourchette correcte (dans le cas d'une fibrillation auriculaire 2 #lt; INR #lt; 3).

Conduite à tenir

Le pharmacien s'assure qu'aucun médicament d'automédication n'ait été associé et que l'AVK a été prise correctement. Il engage son patient à contacter son médecin pour aller refaire contrôler son INR dans les plus brefs délais afin d'écarter l'hypothèse d'un surdosage en Préviscan. Dans le cas d'un INR normal, il l'incite à reconsulter son médecin qui pourra examiner sa bouche et poser un éventuel diagnostic sur les raisons des saignements.

Le carnet d'information et de suivi des AVK

Ce carnet a été conçu pour aider les professionnels de santé à prévenir le risque iatrogène des AVK, en effectuant une prise en charge, un suivi et une éducation adaptés des patients sous AVK.

Il rappelle les règles de bon usage des AVK et permet au patient :

- de mieux comprendre son traitement anticoagulant,

- de répondre à quelques questions pratiques,

- de signaler systématiquement la prise d'AVK à tout professionnel de santé (médecin, pharmacien, biologiste, chirurgien-dentiste, kinésithérapeute, infirmière...).

Dans ce carnet, le patient doit remplir à chaque contrôle la date de l'INR, sa valeur, la date du prochain INR, la posologie de l'AVK, mais aussi les éventuels oublis de prise, saignements, changement de traitement. Les carnets peuvent être placés dans les rayons, avec les médicaments anticoagulants oraux.

Ce carnet est mis à la disposition des pharmaciens par le CESPHARM (4, avenue de Ruysdaël, TSA 500 36,

75008 Paris, fax : 01 56 21 35 09, cespharm@ordre.pharmacien.fr ).

A savoir

Les premiers signes de surdosage en AVK doivent être connus des patients. Ils sont, par ordre d'urgence croissante de prise en charge : gingivorragies, hémorragies conjonctivales, épistaxis, ecchymoses et, plus graves, ménorragies, rectorragies, hémoptysie, hématurie et douleurs abdominales.

2 Effets indésirables :Un suivi catastrophique

Voilà trois semaines que M. G., 80 ans, n'était pas venu à la pharmacie. Il arrive ce matin, les traits tirés, avec un sac de médicaments qu'il vient rapporter. Sa femme est décédée il y a deux jours. M. G. vous explique que sa femme, sous Sintrom depuis des années, contrôlait rarement son INR car elle avait de « mauvaises veines » et redoutait les prises de sang. Impotente, madame G. se déplaçait difficilement. Lors d'une chute il y a trois semaines, elle a beaucoup saigné d'une plaie à la tête. L'INR pratiqué en urgence était alors à 5,3. L'hémorragie très importante a entraîné la décompensation des troubles cardiaques dont souffrait Mme G. Elle est décédée après 3 semaines d'hospitalisation.

Analyse du cas

Après consultation de l'historique, il s'avère qu'il était délivré chaque mois une ou deux boîtes de Sintrom sur l'ordonnance assez complexe de madame G., mais personne dans l'équipe n'a jamais demandé à monsieur G. si les contrôles d'INR de sa femme étaient prescrits et faits régulièrement. L'attention du pharmacien aurait été attirée si l'INR était noté régulièrement dans les dossiers patients.

Attention !

Demander systématiquement à chaque ordonnance ou renouvellement d'ordonnance d'antivitamine K quand a eu lieu le dernier INR et quelle est sa valeur.

5 000 morts par an

En 1998, une étude menée en France par les centres régionaux de pharmacovigilance montrait que 13 % des hospitalisations pour effets indésirables étaient liés à une hémorragie sous anticoagulants. De plus, les accidents hémorragiques des AVK venaient au premier rang des accidents iatrogènes.

En 2000, les résultats de trois études réalisées par l'Afssaps pour évaluer la surveillance des traitements par AVK en France montraient que seuls 45 % des patients avaient un INR dans la zone adéquate. 80 % des patients étaient informés des risques du traitement mais plus de la moitié ignoraient les signes annonciateurs d'un surdosage.

En France, 600 000 patients sont sous AVK entraînant 17 000 hospitalisations pour effet iatrogène par an et 5 000 décès.

3 Effets indésirables : Une diarrhée sous Coumadine

Madame Y., 50 ans, 52 kg, se plaint depuis une semaine de diarrhée aqueuse. Elle va alors consulter son médecin généraliste qui lui prescrit :

- Lopéramide 2 mg : 2 gélules d'emblée, puis 1 après chaque selle liquide.

- Ultra-levure : 6 gélules par jour.

- Boire +++. Régime adapté.

Elle revient à la pharmacie quelques jours plus tard en disant que la diarrhée continue malgré le traitement terminé, sans autre signe associé. Le pharmacien pense alors à regarder l'historique médicamenteux de madame Y. et s'aperçoit qu'elle prend depuis 2 semaines de la Coumadine 5 mg en prévention des récidives de thrombose veineuse profonde, en relais d'un traitement par héparine.

Analyse

- Suspecter l'origine iatrogène

L'ordonnance comprend un ralentisseur du transit. Celui-ci a eu une réelle efficacité pendant le traitement, mais le fait que cette diarrhée se poursuive sans autre signe malgré un régime adapté (riz, pâtes, carottes cuites...) laisse penser au pharmacien que l'étiologie de la diarrhée n'est pas infectieuse mais iatrogène : c'est peut-être un effet indésirable de la Coumadine (dérivé coumarinique).

- Conséquences cliniques potentielles

Toute diarrhée peut entraîner une modification de la flore intestinale. Or la vitamine K, essentielle dans la régulation de l'hémostase, provient en grande partie de la synthèse intestinale par la flore bactérienne. La modification de la flore intestinale peut donc perturber l'activité de l'anticoagulant et déstabiliser l'INR. Cela peut augmenter le risque hémorragique.

Conduite à tenir

Le pharmacien engage madame Y. à prendre contact avec son cardiologue pour faire une visite de contrôle dans les plus brefs délais.

La semaine suivante, la patiente revient en remerciant son pharmacien, car depuis que son cardiologue a remplacé la Coumadine par du Préviscan (dérivé de l'indanedione) elle ne présente plus de diarrhée.

A savoir

Une diarrhée tenace peut avoir une origine iatrogène. Penser à vérifier l'historique médicamenteux du patient.

1 Interactions médicamenteuses : Daktarin et Mini-Sintrom

Monsieur V., 58 ans, 60 kg, sous Mini-Sintrom depuis 2 ans, souffre d'un asthme persistant modéré traité par Seretide Diskus 500 (une bouffée matin et soir) et Ventoline à la demande. Aujourd'hui, le pneumologue a rajouté sur l'ordonnance : Daktarin gel buccal, 1 cuillère-mesure, 4 fois par jour pendant 10 jours.

Analyse

- Mycose buccale

Le miconazole (Daktarin) en gel buccal a pour objectif de traiter une mycose buccale, sans doute déclenchée par le corticoïde inhalé (dans Seretide). Monsieur V. confirme souffrir d'une mycose buccale car il ne se rinçait pas la bouche systématiquement après utilisation du Seretide.

- Conséquences cliniques potentielles

Le miconazole (antifongique azolé) augmente les concentrations plasmatique du Mini-Sintrom en accroissant sa forme libre circulante par déplacement de la liaison aux protéines plasmatiques, et en inhibant le cytochrome P450, enzyme responsable de la dégradation de l'AVK. Il y a donc un risque potentiel d'hémorragie. C'est une association formellement contre-indiquée.

Conduite à tenir

Le pneumologue, contacté par téléphone, décide de remplacer le Daktarin par de la Fungizone solution buvable. Le médecin précise qu'il souhaite que son patient réalise un INR 3 à 4 jours après introduction de ce nouveau médicament, même s'il n'y a pas d'interaction décrite avec Fungizone. Une opinion pharmaceutique est réalisée par le pharmacien et faxée au médecin.

Il est conseillé à monsieur V. d'utiliser le Seretide juste avant de se brosser les dents afin de ne pas oublier de se rincer la bouche.

Attention au millepertuis !

Le millepertuis, traditionnellement utilisé dans les manifestations dépressives légères, est un inducteur enzymatique du cytochrome P450, enzyme responsable de la dégradation des antivitamines K. Pris au cours d'un traitement par AVK, il conduit à une diminution de la concentration plasmatique de l'AVK et de l'effet anticoagulant. Cette association est formellement contre-indiquée (risque de complications thromboemboliques graves).

A savoir

Trois principes actifs sont contre-indiqués en association avec les AVK car ils déplacent l'anticoagulant de ses liaisons aux protéines et augmentent la fraction libre : le miconazole, l'aspirine à forte dose (3 500 mg par prise et/ou 3 à 3 g/jour) et la phénylbutazone (Butazolidine), anti-inflammatoire désormais peu prescrit. Ils exposent à un risque hémorragique grave, notamment en cas d'antécédent d'ulcère gastroduodénal.

2 Interactions médicamenteuses : Antibiothérapie sous Préviscan

Monsieur Z., 58 ans, 70 kg, vient à l'officine pour renouveler une ordonnance de son cardiologue prescrite en postinfarctus avec troubles du rythme ventriculaire, et comportant Flécaïne 100 mg, acébutolol 200 mg, Aprovel 75 mg, Tahor 10 mg et Préviscan pour six mois. Il présente en même temps une ordonnance de son médecin généraliste pour une angine, comportant Monozeclar 1 cp/jour pendant 5 jours, Hexaspray et Efferalgan 500 mg.

Analyse

- Ordonnance du cardiologue

L'AVK a été prescrite en prévention des complications thromboemboliques de l'infarctus du myocarde.

- Traitement de l'angine

La seconde ordonnance comporte un macrolide (Monozeclar) et un traitement symptomatique de l'angine (Hexaspray et Efferalgan).

- Conséquences cliniques potentielles

Les antibiotiques peuvent détruire la flore intestinale productrice de vitamine K. L'organisme en absorbe alors moins, ce qui perturbe l'action des AVK et accroît le risque hémorragique. Les fluroquinolones, macrolides, cyclines, et certaines céphalosporines sont particulièrement impliquées.

Conduite à tenir

Le pharmacien souligne l'importance de réaliser un INR de contrôle 3 à 4 jours après le début de l'antibiothérapie.

A savoir

L'association d'un nouveau médicament à un traitement par AVK peut déstabiliser l'INR. Il convient de pratiquer un INR 3 à 4 jours après le début du nouveau traitement.

2 Interactions médicamenteuses : De l'Upfen sous Sintrom

Monsieur N., 45 ans, 65 kg, vient à la pharmacie chercher son nouveau traitement suite à une thrombose veineuse profonde du membre inférieur (« phlébite »).

- Sintrom : 1 cp le soir, à adapter en fonction de l'INR.

- Lovenox 0,8 ml : 6 500 UI matin et soir pendant 5 jours, à renouveler en fonction de l'INR.

- Une paire de bas de contention de classe II.

En même temps, monsieur N. demande 2 boîtes d'Upfen pour soulager des maux de tête récurrents.

Analyse

- Première prescription d'AVK

Le traitement comporte un relais héparine/AVK en traitement curatif d'une thrombose veineuse profonde. L'HBPM sera arrêtée lorsque 2 INR consécutifs seront identiques et compris entre 2 et 3.

- Education du patient

Devant l'initiation de traitement par AVK, le pharmacien remet au patient un carnet d'information et de suivi et en explique le contenu. Le médecin a déjà remis au patient une carte signalant un traitement par AVK.

Le pharmacien précise à monsieur N. qu'il est important de prendre l'AVK le soir pour pouvoir modifier la posologie immédiatement après avoir eu les valeurs d'INR, et de réaliser le dosage toujours dans le même laboratoire. Le médecin a bien informé son patient sur les valeurs de l'INR cible ainsi que sur la conduite à tenir en cas d'INR anormal. Enfin, il est expliqué au patient les risques liés à l'utilisation des anti-inflammatoires pendant un traitement anticoagulant.

- Conséquences cliniques potentielles

Les AINS peuvent augmenter le risque hémorragique par inhibition de la fonction plaquettaire et agression de la muqueuse digestive.

Conduite à tenir

Le pharmacien conseille donc à monsieur N. de prendre plutôt du paracétamol pour soulager dans l'immédiat ses céphalées, le patient lui ayant dit qu'il n'avait pas encore essayé. Il l'engage également à parler de ses maux de tête fréquents à son médecin généraliste pour diagnostiquer leur origine et les traiter d'une façon plus adaptée et compatible avec un traitement anticoagulant.

Attention !

Tout AINS a un effet antiagrégant plaquettaire et peut être agressif pour la muqueuse digestive. L'utilisation avec un AVK risque de provoquer des hémorragies. En pratique, cette association déconseillée est tout de même possible, mais pas en automédication car elle doit se faire sous réserve d'un suivi attentif et régulier de l'INR et d'une surveillance clinique adaptée. Attention : la phénylbutazone (autre AINS) est contre-indiquée avec les AVK !

1 Profils particuliers : Une boîte de Previscan en trop

La fille de monsieur P. se présente à la pharmacie pour obtenir le renouvellement de l'ordonnance de son père, 69 ans :

Previscan : 1/jour, Ogast 30 mg : 1 le soir, Dextropropoxyphène-paracétamol : 2 gélules 3 fois/jour, Lexomil 1/4 si besoin, 3 mois.

Elle ne souhaite pas renouveler le Previscan car il en reste plus d'une boîte à la maison.

Etonné du fait qu'il reste autant de comprimés à monsieur P., le pharmacien demande à sa fille si son père prend régulièrement son traitement et s'il a fait récemment une prise de sang pour vérifier son INR. Elle confie alors au pharmacien que depuis la mort de sa mère, qui s'occupait des médicaments de son père, elle ne sait pas trop comment il se « débrouille ».

Analyse du cas

Monsieur P. ne semble pas très rigoureux dans le suivi de son traitement puisqu'il lui reste une boîte de Préviscan non entamée. Or l'observance d'un traitement anticoagulant est cruciale. Monsieur P. est peut-être en sous-dosage d'AVK, ce qui lui fait courir un risque important de thrombose, ou en surdosage, qui pourrait entraîner un risque d'hémorragie. Sa fille, qui habite loin, ne peut pas surveiller les prises.

Conduite à tenir

- Appel du médecin

Le pharmacien décide d'appeler le médecin traitant pour en savoir plus. Celui-ci confirme ne pas avoir vu monsieur P. depuis au moins 2 mois. Monsieur P. est sous Previscan suite à une phlébite. Le dernier INR (2,4) est satisfaisant mais date d'il y a 2 mois. Le médecin propose de faire pratiquer une prise de sang dès le lendemain et éventuellement d'effectuer un suivi par téléphone ou à domicile.

- Une aide extérieure

Le pharmacien insiste sur le fait que M. P. a des difficultés à gérer ses médicaments. Il propose l'utilisation d'un pilulier hebdomadaire et demande au médecin s'il est possible d'envisager le passage une fois par semaine d'une infirmière pour préparer le pilulier étant donné que sa fille, habitant loin, ne peut s'en charger.

Médecin et pharmacien doivent rester en contact régulier pour un meilleur suivi du patient, compte-tenu du risque de thrombose ou d'hémorragie en cas d'INR hors des valeurs cibles.

- A expliquer au patient

Previscan nécessite une prise régulière tous les jours à la même heure et de préférence le soir. La prise de sang pour mesurer l'INR étant généralement réalisée le matin, cela permet d'adapter la dose dès la prise suivante.

Vers un autocontrôle de l'INR ?

Dans de nombreux pays européens, les patients réalisent eux-mêmes leur surveillance biologique à l'aide de petits appareils portatifs permettant de réaliser un INR sur sang capillaire. En France, les analyses réalisées sur ces appareils ne peuvent être validées et donner lieu à un remboursement que si elles sont faites par un biologiste et dans un laboratoire, ce qui en réduit l'intérêt.

A savoir

Il est impératif de s'assurer de l'observance rigoureuse des traitements par antivitamines K. Il faut surveiller le nombre de boîtes délivrées et vérifier qu'il s'accorde bien avec la posologie prescrite.

2 Profils particuliers : Extraction dentaire sous Sintrom

Une fois n'est pas coutume : le Dr M., chirurgienne-dentiste en ville, appelle la pharmacienne pour lui demander conseil au sujet de monsieur H., 47 ans, traité, entre autres, par Sintrom 4 mg (1 matin et soir) depuis des années pour fibrillation auriculaire. Elle a prévu de lui réaliser une extraction dentaire, mais, installée depuis peu, elle avoue n'avoir jamais réalisé un tel acte sur un patient sous AVK et demande à la pharmacienne les précautions à prendre.

Analyse

- Traitement anticoagulant

Le Sintrom (acénocoumarol) est une AVK à demi-vie courte. C'est la seule AVK qui peut être administrée en 2 prises par jour à 12 heures d'intervalle. Cependant une prise unique améliore l'observance. Dans le cas du traitement d'une fibrillation auriculaire, l'INR doit être maintenu entre 2 et 3.

- Extraction dentaire

Le traitement anticoagulant peut favoriser une hémorragie au cours ou au décours de l'extraction dentaire. Mais l'interruption du traitement par AVK exposerait à un risque de thrombose.

Conduite à tenir

Après consultation des recommandations de l'Afssaps, la pharmacienne confirme à la dentiste qu'elle peut réaliser une extraction dentaire simple sur monsieur H sans avoir à lui faire interrompre son traitement anticoagulant, sous réserve de vérifier la veille que son INR se trouve bien entre 2 et 2,5. La pharmacienne lui conseille de demander également l'avis du cardiologue de monsieur H. La dentiste décide alors de ne pas interrompre le traitement de monsieur H., mais préfère réaliser l'extraction dentaire à l'hôpital pour pouvoir bénéficier d'une assistance médicale en cas de problème.

Chirurgie programmée sous AVK

En cas de chirurgie programmée sous AVK, l'attitude quant au traitement anticoagulant doit intégrer le risque thrombotique lié à un arrêt momentané de l'anticoagulant, le risque hémorragique chirurgical et le risque thromboembolique veineux lié à l'intervention. D'après l'Afssaps, sous réserve de vérifier que l'INR se situe entre 2 et 2,5, il semble possible de poursuivre le traitement par AVK lors de ponctions ou de cathétérismes de veines superficielles ou d'artères, de ponction sternale, de biopsie ou petite chirurgie cutanée, d'examens endoscopiques sans biopsie ou d'extractions dentaires simples. En cas d'intervention chirurgicale plus lourde, la décision est prise en concertation entre le médecin traitant, l'anesthésiste et le chirurgien. En cas d'intervention programmée, il est recommandé d'interrompre l'AVK 3 à 4 jours avant l'intervention qui sera réalisée quand l'INR sera inférieur à 1,5. Dans les situations à risque thrombotique élevé, une héparinothérapie doit être introduite quand l'INR est inférieur à 2. L'intervention pourra être réalisée après une interruption de 4 heures pour l'héparine non fractionnée et de 12 heures pour les HBPM. L'héparine sera reprise après le geste chirurgical jusqu'à l'obtention d'un INR supérieur à 2 sous AVK.

A savoir

Lorsqu'un traitement par AVK doit être interrompu en prévision d'une intervention chirurgicale lourde, un relais par héparine ou HBPM doit être instauré. Celle-ci ayant une demi-vie courte, elle peut être suspendue simplement quelques heures, pendant l'opération, ce qui minimise le risque de thrombose.

3 Profils particuliers : Une série d'intramusculaires

Madame N., 60 ans, 56 kg, revient d'une consultation chez sa dermatologue. Voilà quelques semaines qu'elle perd ses cheveux par « poignées ». Pour elle, c'est l'opération qu'elle a subie pour ses prothèses valvulaires qui en est à l'origine. L'ordonnance du dermatologue comporte : Biotine 3 boîtes de 6, Bepanthène 3 boîte de 6. Une injection de chaque 3 fois par semaine pendant 6 semaines par IDE. Les piqûres n'inquiètent nullement madame N.

Analyse de l'ordonnance

- Prescription de Bépanthène/Biotine

La Biotine (vitamine H) et le Bépanthène (vitamine B5) sont deux vitamines indiquées dans le traitement d'appoint des alopécies diffuses, à raison de 1 à 2 ampoules 3 fois par semaine pendant 6 semaines par voie intramusculaire.

Madame N. ayant subi une pose de prothèse valvulaire, il est possible qu'elle ait un traitement anti-coagulant afin de réduire le risque thromboembolique induit par cette pose. Après vérification de l'historique informatique, il s'avère que madame N. est effectivement traitée par Previscan.

- Conséquences cliniques potentielles

Au cours d'un traitement anticoagulant, il faut éviter les injections intramusculaires qui peuvent provoquer des hématomes, d'autant qu'il est prévu une série de 18 injections au total.

Conduite à tenir

La pharmacienne appelle la dermatologue pour lui proposer une prise orale de Biotine et de Bépanthène. Apprenant que madame K. est sous AVK, elle accepte volontiers de modifier sa prescription pour 3 comprimés par jour de chaque pendant 6 semaines.

A savoir

Les injections intramusculaires étant déconseillées lors d'un traitement anticoagulant pour éviter les hématomes, ce mode d'administration est évité lorsqu'il peut être remplacé par une administration orale.

4 Profils particuliers : Lovenox, Previscan et allaitement

Madame D., 39 ans, 60 kg, vient d'accoucher. Porteuse d'une valve mécanique, elle a été traitée pendant toute sa grossesse par héparine. Tout juste sortie de la maternité, elle vient avec une ordonnance de Lovenox 0,4 ml : 1 injection par jour pendant 1 mois. Madame D. a décidé d'allaiter son bébé, et précise qu'elle « en a marre des piqûres ». Elle vous demande si elle ne pourrait pas reprendre les comprimés de Previscan comme avant sa grossesse.

Analyse de l'ordonnance

- Prescription d'HBPM

Toutes les AVK sont contre-indiquées aux 1er et 3e trimestres de grossesse. C'est pourquoi madame D. a dû stopper Previscan et être traitée par héparine pendant sa grossesse. La résorption digestive chez le nouveau-né étant a priori improbable, un traitement par HBPM n'est pas contre-indiqué en cas d'allaitement.

- AVK et allaitement

Les indanediones (Previscan) sont contre-indiquées pendant l'allaitement. Les coumariniques (Coumadine, Sintrom, Mini-Sintrom) sont « à éviter » (Afssaps 2001), mais il y a peu de données. Le consensus nord-américain considère que l'allaitement n'est pas une contre-indication à la warfarine (Coumadine), cette AVK n'étant pas éliminée sous forme active dans le lait.

Conduite à tenir

Madame D. envisage d'arrêter l'allaitement car elle ne supporte plus les injections quotidiennes d'héparine. Il est souhaitable de trouver une solution pour éviter cet arrêt prématuré. Le pharmacien appelle donc le cardiologue qui suit madame D. Celui-ci est d'accord pour prescrire Coumadine 5 mg, 1 comprimé par jour. En pratique, les injections de Lovenox seront maintenues tant que 2 INR consécutifs à 24 heures ne seront pas dans la zone thérapeutique souhaitée (entre 3 et 4,5).

La pharmacienne insiste sur l'importance de la supplémentation en vitamine K1 du nourrisson durant l'allaitement.

A retenir

En cas d'allaitement, Previscan est contre-indiqué. En France, Sintrom et Coumadine sont classés « à éviter » mais la warfarine (Coumadine) peut éventuellement être utilisée. Il est recommandé de supplémenter le nourrisson en vitamine K.

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