L'amibiase - Le Moniteur des Pharmacies n° 2622 du 01/04/2006 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2622 du 01/04/2006
 

Cahier formation

l'essentiel L'amibiase est une parasitose fréquente dans les pays en voie de développement et directement liée au péril fécal. L'homme se contamine en ingérant les kystes qui sont éliminés dans les selles aussi bien des malades que des porteurs sains. Après ingestion, ces kystes se transforment en trophozoïtes qui peuvent devenir pathogènes en se multipliant dans la paroi colique, provoquant un syndrome dysentérique. D'autres localisations, essentiellement hépatiques, peuvent conduire à la formation d'un abcès amibien du foie. Le traitement ne repose surtout pas sur les ralentisseurs du transit. Il fait appel à des amoebicides tissulaires, les nitro-5-imidazolés, et à un amoebicide de contact (Intétrix) chargés d'éliminer à la fois les parasites actifs et les kystes. L'entourage du malade doit lui aussi être traité par Intétrix pour éviter la contamination et canaliser le risque que représentent les porteurs sains.

ORDONNANCE : Un jeune homme souffrant d'un syndrome dysentérique

Sept jours après son retour de Côte d'Ivoire, Idriss K., 19 ans, est pris de violentes douleurs abdominales associées à une diarrhée l'ayant amené à consulter rapidement. Son oncle se présente avec une ordonnance comportant deux antiparasitaires (Flagyl et Intétrix) et un antispasmodique (Spasfon).

LA PRESCRIPTION

Docteur Patrick Loiseau

Omnipraticien

1, avenue de la République

93770 Perreux

Tél. : 01 41 55 44 22

93 1 99999 1

Le 29 mars 2006

M. Idriss K., 19 ans, 71 kg

Arrêter Imodium et Ercéfuryl.

Flagyl 500 mg : 1 comprimé matin, midi et soir pendant 7 jours

Intétrix : après le traitement par Flagyl, 2 gélules matin et soir pendant 10 jours

Spasfon-Lyoc : ne pas dépasser 6 comprimés par jour pendant 15 jours

LE CAS

Ce que vous savez du patient

- Idriss K., étudiant de 19 ans, vit en France chez son oncle et sa tante. Il vient de rendre visite à sa famille en Côte d'Ivoire où il a passé 5 semaines. Avant son départ, le jeune homme était venu à la pharmacie avec une ordonnance comportant les médicaments à détenir pour un séjour en Afrique : chimioprophylaxie antipaludéenne (atovaquone-proguanil), vaccins, diarrhée du voyageur (nifuroxazide et lopéramide).

Ce dont le patient se plaint

- Après un séjour sans problème en Afrique, l'oncle explique que, une semaine après le retour, son neveu a été pris d'un très fort mal de ventre avec envie fréquente d'aller à la selle accompagnée d'une diarrhée contenant du sang et un peu de glaires, sans fièvre. Lui-même ayant présenté des symptômes identiques lors d'une épidémie plusieurs années auparavant, il a reconnu la dysenterie et a appelé le médecin.

Ce que le médecin lui a dit

Le tableau clinique est évocateur d'une dysenterie amibienne, endémique en Côte d'Ivoire. La mise en place rapide du traitement, l'absence de fièvre et de complications apparentes à l'examen clinique (déshydratation et atteinte hépatique) et la conservation d'un bon état général autorisent une prise en charge ambulatoire.

Le docteur a insisté pour que l'entourage soit également traité par Intétrix.

Les analyses biologiques

- Réalisation d'une « goutte épaisse » : résultat négatif.

- Examen parasitologique des selles : présence de kystes et de trophozoïtes d'amibes pathogènes, de leucocytes et d'hématies.

- Coproculture et sérologie « amibiase » : en attente de résultats.

DÉTECTION DES INTERACTIONS

Il n'existe pas d'interaction médicamenteuse problématique.

ANALYSE DES POSOLOGIES

Les posologies de l'ordonnance sont celles attendues dans le traitement d'une amibiase intestinale.

AVIS PHARMACEUTIQUE

En France, la dysenterie amibienne peut se rencontrer chez un voyageur de retour d'une zone endémique. Idriss K. a certainement été infesté lors de son séjour en Côte d'Ivoire par l'intermédiaire d'eaux contaminées.

Les médicaments antidiarrhéiques pour prévenir une éventuelle turista ont été inefficaces voire potentiellement néfastes pour soigner la diarrhée. En effet, l'antiseptique intestinal (nifuroxazide) n'est d'aucune utilité dans les étiologies parasitaires des diarrhées et le ralentisseur du transit (lopéramide) ne doit pas être utilisé dans les épisodes diarrhéiques glairosanglants.

Les symptômes se sont manifestés loin du lieu de séjour, l'antécédent de voyage a orienté le médecin pour reconnaître la dysenterie amibienne et prescrire le traitement et les examens diagnostiques adéquats.

-#gt; Il faut s'assurer que l'oncle et la tante de Idriss K. soient eux aussi traités par Intétrix. Cela est indispensable pour éviter une contamination par le porteur symptomatique de l'entourage qui, même en ne développant pas la maladie, peut devenir porteur sain d'amibes intestinales, ce qui peut être une source d'infestations récurrentes et de dissémination des amibes. Idriss, son oncle et sa tante devront tous suivre le traitement par Intétrix en même temps. Le médecin leur a d'ailleurs déjà fait la prescription.

-#gt; Ces circonstances ne doivent pas faire oublier la nécessité de poursuivre la chimioprophylaxie antipaludéenne. Dans le cas de Idriss, la prise de Malarone cesse 7 jours après le retour, ce qui lui permet d'arrêter dès maintenant et ainsi d'éviter une éventuelle exacerbation des désordres gastro-intestinaux.

INITIATION DU TRAITEMENT

-#gt; Le diagnostic d'amibiase intestinale aiguë a principalement été étayé par la clinique (syndrome dysentérique apyrétique) et la biologie (présence, entre autres, de kystes et de trophozoïtes amibiens à l'examen parasitologique des selles). Le biologiste a rapidement confirmé par téléphone la présence d'amibes dans les prélèvements.

-#gt; Il est probable que les résultats de la coproculture demandée, nécessitant un temps plus long de réalisation, infirment l'hypothèse d'une diarrhée bactérienne (diagnostic différentiel).

Quant à la réalisation de la « goutte épaisse », elle écarte le diagnostic de crise palustre.

-#gt; Seul le traitement par un amoebicide diffusible dans les tissus (Flagyl) peut soulager en quelques jours. Il dispose d'une très bonne absorption.

Il ne faut pas utiliser un ralentisseur du transit (lopéramide) ou un antisécrétoire (racécadotril).

-#gt; Comme le temps de présence du métronidazole dans la lumière intestinale est trop court pour une bonne activité sur les formes kystiques, Intétrix est administré dans un second temps en renfort pour son action amoebicide de contact qui élimine les derniers kystes et les trophozoïtes du tube digestif.

-#gt; Ce protocole, s'il est bien respecté, doit guérir l'amibiase intestinale et éviter que ne subsistent d'éventuelles amibes dans l'intestin.

-#gt; Spasfon-Lyoc est prescrit pour tenter de diminuer les douleurs abdominales souvent violentes dans cette maladie.

SUIVI DU TRAITEMENT

-#gt; L'efficacité du traitement antiparasitaire est contrôlée par la disparition du syndrome dysentérique et la réalisation d'un examen parasitologique des selles, répété trois fois (pour une meilleure sensibilité du test), montrant l'absence totale de parasites à l'examen direct. Grâce à cela, un portage asymptomatique de kystes amibiens pourra également être écarté.

L'efficacité du traitement antiparasitaire ne nécessite pas forcément d'être contrôlée exactement 17 jours après le début du traitement. Mais il faut l'envisager rapidement après la fin du traitement (trois à quatre semaines après).

-#gt; Flagyl peut être parfois à l'origine d'effets indésirables (troubles digestifs, glossite, dysgueusie, vertiges, troubles neurosensoriels...).

-#gt; Dans certains cas (fièvre, douleurs dans l'hypocondre droit, hépatomégalie), une échographie hépatique peut être pratiquée pour rechercher une dissémination du parasite dans le foie (amibiase hépatique). Cette localisation extra-intestinale du parasite est également responsable d'une anomalie des paramètres biologiques généralement normaux dans l'amibiase intestinale : numération-formule sanguine (hyperleucocytose à polynucléaires neutrophiles), augmentation importante des marqueurs de l'inflammation (vitesse de sédimentation, CRP).

VALIDATION DU CHOIX DES MÉDICAMENTS

- Flagyl 500 mg (métronidazole)

- Antibiotique antiparasitaire tissulaire de la famille des nitro-5-imidazolés exerçant une activité amoebicide sur Entamoeba histolytica.

- La posologie moyenne dans l'amibiase intestinale est de 1,5 g par jour, ce qui correspond à trois comprimés pendant 7 jours.

- Intétrix (tiliquinol, tiliquinol laurylsulfate, tilbroquinol)

- Antiparasitaire caractérisé par une action amoebicide de contact.

- Indiqué en complément d'un amoebicide tissulaire, dans le traitement des amibiases intestinales.

- La posologie moyenne est de deux gélules matin et soir par cure de 10 jours.

- Spasfon-Lyoc (phloroglucinol)

- Antispasmodique musculotrope.

- Indiqué, entre autres, dans les douleurs fonctionnelles digestives.

- La posologie maximale est de six lyophilisats oraux par jour.

PLAN DE PRISE CONSEILLÉ -#gt; Flagyl 500 mg : impérativement en trois prises quotidiennes. La prise d'aliments n'affecte pas la biodisponibilité. -#gt; Intétrix : à prendre de préférence au début des repas. -#gt; Spasfon-Lyoc : les lyophilisats oraux sont à dissoudre dans un verre d'eau ou à laisser fondre sous la langue pour obtenir un effet plus rapide.

CONSEILS AU PATIENT

Avec les antiparasitaires

Pour être efficace, les médicaments antiamibiens doivent impérativement être pris selon le schéma indiqué par le médecin. L'équipe officinale doit s'assurer que les explications données à l'oncle du malade aient été suffisamment claires pour qu'il puisse à son tour bien expliquer à Idriss l'importance du traitement en deux temps.

- Avec Flagyl

- S'abstenir de toute consommation d'alcool (attention à l'éthanol dans certains médicaments !). Le risque d'effet antabuse est réel.

- Une coloration brun rougeâtre des urines est possible pendant le traitement.

- Avec Intétrix

Ce médicament n'est quasiment pas absorbé. La durée de traitement est suffisamment courte pour éviter les effets indésirables : neuropathies périphériques ou atteintes du nerf optique heureusement exceptionnelles.

- La prise d'autres médicaments

Ne pas prendre d'autres médicaments sans l'avis du médecin ou du pharmacien. Les antidiarrhéiques prescrits à l'origine pour la diarrhée du voyageur (turista) ne doivent en aucun cas être utilisés. Les symptômes extrêmement pénibles accompagnant le syndrome dysentérique régressent en quelques jours grâce au traitement prescrit.

Respecter le calendrier des examens biologiques

Même en cas de disparition des symptômes digestifs, procéder à trois reprises à un examen parasitologique des selles à distance du traitement. Cela a pour but de vérifier que toutes les amibes ont bien été éliminées des intestins et éviter ainsi une rechute.

Organiser la chambre

- Se laver les mains aussi souvent que nécessaire avec une solution moussante antiseptique : Cytéal, Dermacide, Mercryl Solution moussante, Septivon...

- Afin d'améliorer le confort du malade, il est possible de recourir à un bassin de lit ou des protections absorbantes (alèzes) car, au début de la maladie, avant que le traitement soit efficace, l'émission des selles peut être extrêmement fréquente (jusqu'à 20 fois par jour).

- Désinfecter les toilettes plusieurs fois par jour à l'aide d'une solution d'eau de Javel non diluée.

- La literie, les vêtements, le linge de toilette doivent être lavés à haute température.

- Prudence enfin avec la vaisselle ou les objets familiers en contact avec le malade.

S'alimenter correctement

- Une alimentation solide est préconisée dans les diarrhées infectieuses : éviter pendant quelques jours les laitages, crudités, fruits, légumes verts et privilégier le riz, les pâtes, les pommes de terre, les poissons, les bananes.

- Assurer des apports hydriques suffisants pour contrebalancer les pertes liquidiennes de la diarrhée et empêcher la déshydratation.

Traiter le proche entourage

- Il est logique d'entreprendre un traitement par Intétrix chez l'oncle et la tante de Idriss car ils ont pu se contaminer précédemment lors de leurs séjours en Côte d'Ivoire et devenir porteurs sains. Qui plus est, le fait que leur neveu souffre actuellement de dysenterie est un risque important de transmission du parasite.

- Enfin, il est important de s'assurer que l'entourage resté en Côte d'Ivoire soit prévenu de la situation afin de prendre des mesures prophylactiques ou curatives adéquates.

Par Vivien Veyrat, pharmacien, professeur associé à la faculté de pharmacie de Paris-XI

PATHOLOGIE : Qu'est-ce que l'amibiase ?

L'amibiase causée par Entamoeba histolytica est une parasitose liée au péril fécal. Fréquente en zone climatique chaude, elle est rare chez les voyageurs. Elle peut être responsable d'un syndrome dysentérique sévère ou d'un abcès du foie.

ÉPIDÉMIOLOGIE

L'amibiase est, avec le paludisme et la bilharziose, l'une des principales maladies parasitaires à l'échelle de la planète. L'incidence de cette parasitose rare en Europe et très fréquente en zone chaude est directement liée au péril fécal, plutôt qu'aux facteurs climatiques. Moins de 5 % des diarrhées infectieuses des voyageurs sont causées par Entamoeba. Environ cent mille personnes meurent chaque année d'amibiase colique ou tissulaire, 50 millions présentent des signes d'amibiase intestinale et 500 millions sont porteurs d'amibes non pathogènes. Il existe donc deux situations distinctes : celle causée par Entamoeba histolytica, responsable d'amibiases intestinales ou tissulaires parfois sévères voire mortelles, et celle causée par Entamoeba dispar. Cette dernière reste asymptomatique, y compris chez les patients atteints de sida. Elle est responsable de l'essentiel du portage asymptomatique. Faire la distinction entre Entamoeba histolytica, seule amibe pathogène du tube digestif de l'homme, et Entamoeba dispar, morphologiquement identique mais toujours non pathogène. Ce point est important pour la prise en charge des patients.

Les autres terminologies « classiques » (E. histolytica histolytica, E. histolytica. minuta...) doivent être abandonnées. D'autres amibes du tube digestif (E. coli...) ou présentes dans le milieu extérieur (amibes libres) existent mais n'entrent pas dans le cadre de l'amibiase intestinale ou tissulaire.

RÉPARTITION GÉOGRAPHIQUE DE L'AMIBIASE

CONTAMINATION/FACTEURS DE RISQUE

-#gt; L'amibiase est plus fréquente dans les pays en voie de développement où les conditions d'hygiène sont insuffisantes et altérées par la surpopulation, l'ignorance et la pauvreté. La plupart des patients se contaminent par ingestion d'eau ou d'aliments souillés par des déjections contenant des kystes d'E. histolytica. Ces kystes, éliminés dans les selles des malades ou des porteurs sains, résistent plusieurs semaines dans le milieu extérieur humide et jusqu'à trois mois dans l'eau à + 4 °C. -#gt; L'homme est le principal réservoir du parasite. Le Mexique, l'Inde, certains pays d'Afrique sont particulièrement touchés, mais la maladie peut apparaître sous forme sporadique ou épidémique dans toute zone où l'eau de boisson entre en contact avec les déjections humaines, comme c'est le cas au cours d'inondations ou de catastrophes naturelles.

-#gt; Les pratiques sexuelles orales et anales sont également un mode de contamination, mais il est plus souvent associé à E. dispar, non pathogène.

-#gt; L'immunodépression causée par le VIH n'est pas un facteur de risque pour l'amibiase maladie.

-#gt; En revanche, le diabète est un facteur favorisant les complications lors des amibiases intestinales. Par exemple, la colique fulminante ne représente que 0,5 % des cas de complications, mais, dans presque 50 % des cas, il s'agit de malades diabétiques. De même, l'amoebome, pseudo-tumeur colique, peut entraîner une sténose digestive, rare mais plus fréquente au cours du diabète.

PHYSIO-PATHOLOGIE

-#gt; Après ingestion, les kystes se transforment en formes mobiles, végétatives, dans le côlon. Ces formes végétatives (trophozoïtes) se multiplient et peuvent soit donner de nouveaux kystes qui seront éliminés dans les selles, soit devenir pathogènes en envahissant la paroi colique. On ne sait pas ce qui oriente vers l'une ou l'autre des situations, mais les facteurs de virulence parasitaires et la réponse inflammatoire de l'hôte ont certainement un rôle.

-#gt; Les trophozoïtes adhèrent au mucus intestinal. Le parasite sécrète des enzymes qui vont dégrader ce mucus protecteur et permettre la pénétration du parasite dans la paroi intestinale. Ce contact provoque l'apoptose, la nécrose des cellules épithéliales et une réaction inflammatoire locale. Le parasite pénètre profondément dans le tissu colique et peut arriver en contact avec la circulation sanguine, probablement à l'origine de sa diffusion hématogène et de ses localisations secondaires au niveau du foie. La réaction inflammatoire initiale est intense et participe grandement à l'extension des lésions tissulaires, mais elle diminue autour des ulcères chroniques et des abcès amibiens. En limitant la réponse inflammatoire par la création d'un abcès, le parasite échappe à la présence de substances toxiques libérées dans un foyer inflammatoire, comme les radicaux libres ou les enzymes lysosomiales.

SIGNES CLINIQUES

L'amibiase causée par E. histolytica peut être responsable de deux syndromes très différents : l'amibiase intestinale aiguë (ou dysenterie amibienne) et l'amibiase tissulaire (ou abcès amibien). L'amibiase intestinale atteint les enfants ou les adultes des deux sexes alors que les abcès amibiens sont retrouvés essentiellement chez les hommes entre 18 et 50 ans.

Amibiase intestinale aiguë

-#gt; Le tableau de cette dysenterie amibienne est celui d'un syndrome dysentérique avec émission de nombreuses selles liquides afécales avec présence de glaires et de sang (10 à 15 par jour). On dit d'ailleurs que le malade « crache ses selles ». Il reste apyrétique la plupart du temps et ses symptômes sont accompagnés d'épreintes et de ténesmes. La conservation de l'état général et l'absence de fièvre permettent de faire la différence avec les syndromes dysentériques de cause bactérienne.

-#gt; En l'absence de traitement, l'évolution se fait vers une aggravation rapide accompagnée de déshydratation et pouvant même évoluer vers des localisations viscérales secondaires.

-#gt; La colite chronique postamibienne est une séquelle invalidante, à craindre au décours de la phase aiguë. Souvent, dans ce cas, les symptômes sont atténués.

Amibiase tissulaire

-#gt; Après avoir traversé la paroi intestinale, les amibes peuvent pénétrer dans le foie à partir de la circulation porte et provoquer un abcès amibien du foie. Cette localisation hépatique est la plus fréquente.

-#gt; Les localisations secondaires sont toujours consécutives à une atteinte colique, mais le syndrome dysentérique peut avoir été absent et le tableau hépatique apparaître comme inaugural. Le délai entre la contamination et les signes d'abcès peut osciller de quelques jours à plusieurs mois. Fièvre, douleur, hépatomégalie (triade de Fontan) sont les symptômes principaux. Ce tableau se manifeste par une hépatite diffuse présuppurative qui évolue rapidement vers un tableau d'abcès collecté du foie avec altération de l'état général, fièvre élevée et oscillante et aggravation rapide. A l'examen clinique, l'hépatomégalie est très douloureuse et s'accompagne parfois d'un syndrome pleuropulmonaire de la base droite.

-#gt; Les autres localisations sont moins fréquentes, mais des abcès amibiens pleuropulmonaires, cérébraux, et cutanés peuvent être retrouvés dans de rares cas.

DIAGNOSTIC

Amibiase intestinale aiguë

-#gt; Lors de l'amibiase intestinale aiguë les paramètres biologiques sanguins sont normaux, en dehors des conséquences éventuelles d'une déshydratation tardive.

-#gt; Une rectoscopie effectuée en dehors de la phase aiguë et douloureuse de la maladie peut éventuellement aider au diagnostic en mettant en évidence une muqueuse inflammatoire avec des ulcérations multiples recouvertes de glaires.

-#gt; L'examen parasitologique des selles doit être effectué sur des selles fraîches et répété au moins à trois reprises en cas de négativité. L'observation microscopique extemporanée réalisée par un biologiste entraîné permet de retrouver des formes végétatives ou des kystes de Entamoeba, et donc de confirmer le diagnostic.

-#gt; La recherche d'antigènes solubles dans les selles permet de compléter le diagnostic biologique, mais la place de cet examen reste à confirmer.

Abcès hépatique

-#gt; Au cours de l'abcès amibien du foie, une hyperleucocytose à polynucléaires neutrophiles est observée associée à une augmentation de la vitesse de sédimentation et des protéines de l'inflammation.

-#gt; En revanche, les enzymes hépatiques restent à des taux proches de la normale.

-#gt; Le diagnostic est rapidement confirmé par une échographie abdominale montrant une zone liquidienne anéchogène, souvent localisée dans le lobe droit du foie.

-#gt; La ponction sous échographie d'un abcès amibien du foie, après avoir éliminé toutes les contre-indications à ce geste, permet de ramener un pus « chocolat », témoignant d'une hémolyse intense mais où les amibes sont généralement absentes.

-#gt; La sérologie de l'amibiase permet dans la majorité des cas de confirmer le diagnostic d'abcès amibien du foie, alors que cette méthode reste généralement peu informative lors des localisations purement intestinales.

-#gt; Des méthodes complémentaires permettent de faire la différence entre Entamoeba histolytica et Entamoeba dispar, mais elles ne sont pas utiles pour le diagnostic de la phase aiguë de la maladie où la clinique est parlante.

ÉVOLUTION

-#gt; Il n'existe pas de certitude concernant l'évolution spontanée du portage asymptomatique de kystes d'amibes. Il s'agit généralement d'un signal d'alarme témoignant d'un déficit de l'hygiène et de l'existence d'un risque infectieux microbien au sens large. Les mesures à prendre sont l'utilisation systématique d'un traitement antiamibien de contact associé à une prophylaxie individuelle et collective visant à lutter contre le péril fécal.

-#gt; En l'absence de traitement, l'amibiase intestinale peut évoluer vers la guérison spontanée accompagnée de séquelles fonctionnelles parfois invalidantes sous la forme de colite chronique postamibienne. Ce risque justifie le traitement systématique de toutes les amibiases intestinales par l'association d'antiamibiens tissulaires puis de contact.

-#gt; L'abcès amibien évolue toujours défavorablement et doit faire l'objet d'une prise en charge hospitalière en urgence.

-#gt; Aucune prophylaxie de l'amibiase par un médicament, quelle que soit sa nature, n'est efficace. Au contraire, la chimioprophylaxie supposée apporte une fausse sensation de sécurité, réduit les précautions d'hygiène et favorise l'installation de pathogènes au sein d'une flore intestinale altérée.

Par le Pr Stéphane Picot, service de parasitologie, mycologie médicale et maladies tropicales, hôpital Edouard-Herriot, Lyon

THÉRAPEUTIQUE : Comment traiter l'amibiase ?

L'amoebicide de contact est la pierre angulaire du traitement de l'amibiase, quel que soit sa forme clinique. En dehors des formes chroniques asymptomatiques, il doit être systématiquement associé à un amoebicide tissulaire.

LES MÉDICAMENTS

Les antiparasitaires ne sont pas géographiquement représentés de manière homogène. Nombreux sont ceux qui ne sont pas commercialisés en France, surtout pour des raisons de rentabilité. Néanmoins, certains peuvent être obtenus sous autorisation temporaire d'utilisation nominative.

Les amoebicides tissulaires

- Les nitro-5-imidazolés

Les médicaments de la famille des nitro-5-imidazolés (métronidazole, ornidazole, tinidazole, secnidazole) possèdent une activité antiparasitaire sur les amibes, giardiases et trichomonas, ainsi qu'une activité antibactérienne sur les bactéries anaérobies.

L'activité antiparasitaire est vraisemblablement liée au groupement nitré de la molécule, qui forme des composés chimiques très réactifs lors de sa réduction en hydroxylamine.

-#gt; Les nitro-5-imidazolés se concentrent électivement dans le foie, les rendant particulièrement intéressants dans les amibiases hépatiques, puis ils subissent un cycle entérohépatique avec une large diffusion tissulaire.

Des phénomènes de résistance peuvent apparaître mais ils cèdent généralement sous l'effet d'une augmentation de la dose ou de la durée du traitement.

-#gt; La demi-vie d'élimination de l'ornidazole (Tibéral à l'hôpital) et du tinidazole (Fasigyne) est un peu plus longue (13 heures versus 8 heures) que celle du métronidazole (Flagyl), permettant avec ces médicaments des schémas thérapeutiques simplifiés.

-#gt; Le secnidazole (Secnol) possède une demi-vie d'élimination longue (25 heures) permettant une prise unique journalière.

-#gt; Dans la mesure où leur résorption intestinale est rapide, ces molécules ne sont pas d'une excellente activité sur les parasites intestinaux et nécessitent donc d'être associées à un antiparasitaire de contact.

-#gt; La durée du traitement est généralement comprise entre 5 et 10 jours pour le métronidazole et l'ornidazole ; elle n'est en revanche que de 2 à 3 jours pour le tinidazole en cas d'amibiase intestinale et de 3 à 5 jours en cas d'amibiase hépatique. Le secnidazole se prend en traitement monodose en cas d'amibiase intestinale et sur 5 jours en cas d'amibiase hépatique.

-#gt; Les effets indésirables sont généralement modérés et dose-dépendants. Pour la prise en charge des formes graves, de type dysenterie amibienne ou abcès hépatique, la voie parentérale est préférée. Le patient est alors hospitalisé, puisque les formes injectables sont réservées à l'usage hospitalier.

-#gt; Les nitro-5-imidazolés peuvent augmenter l'effet des anticoagulants oraux et donc le risque hémorragique par diminution du métabolisme hépatique.

La surveillance de l'INR doit être renforcée.

- Les antipaludiques

-#gt; Certains médicaments antipaludiques sont susceptibles de bénéficier d'une activité antiprotozoaire intéressante. C'est le cas de la chloroquine (Nivaquine) qui présente une activité amoebicide ainsi qu'une distribution tissulaire large, notamment au niveau hépatique. Elle est utilisée en cas d'amibiase hépatique associée à un amoebicide de contact, si le patient est résistant aux nitro-5-imidazolés.

-#gt; Le traitement débute par une dose de charge de 1 g par jour durant deux jours, avant de se poursuivre à la posologie de 500 mg par jour sur 2 à 3 semaines. Néanmoins, l'utilisation de la chloroquine dans cette indication reste très marginale et hors autorisation de mise sur le marché.

Les amoebicides de contact

Les amoebicides de contact sont actifs sur les formes mobiles dans la lumière colique. Ils s'administrent tous per os.

LES INTERACTIONS DES NITRO-5-IMIDAZOLÉS

- Les hydroxyquinoléines

Les dérivés substitués de la 8-hydroxyquinoléine sont l'iodoquinol, le clioquinol, le tiliquinol et le tilbroquinol.

En France, tilbroquinol et tiliquinol sont associés dans Intétrix. Le clioquinol a été retiré du marché car à l'origine de troubles neurologiques graves et l'iodoquinol n'est pas disponible.

-#gt; Leur mécanisme d'action reste à ce jour incertain. Ils possèdent une activité amoebicide de contact sur les formes végétatives de Entamoeba histolytica.

-#gt; Intétrix s'utilise en cure de 10 à 20 jours après traitement par un amoebicide diffusible, aussi bien dans l'amibiase intestinale qu'hépatique. Il s'utilise aussi en monothérapie chez le porteur sain d'amibes intraluminales. Il n'est absolument pas indiqué chez l'enfant.

- Les antibiotiques

-#gt; Certains antibiotiques présentent une activité antiprotozoaire intéressante. C'est le cas de la paromomycine (Humatin), disponible dans plusieurs pays mais plus commercialisée en France. Cet antibiotique de la famille des aminosides n'est quasiment pas résorbé par voie orale. Il est utilisé pour ses propriétés amoebicide de contact, en association aux autres amoebicides, chez les porteurs sains d'amibes intraluminales. Il n'est jamais utilisé seul en raison des risques de rechute trop fréquents.

-#gt; Les tétracyclines ont aussi été employées avec succès dans le traitement des amibiases intestinales, mais hors AMM.

- Les dérivés du dichloroacétamide

Il existe trois représentants dérivés du dichloroacétamide : diloxanide (Furamid), étofamide (Kitnos) et téclozan (Falmonox), mais aucun n'est commercialisé en France, bien qu'ils soient considérés comme amoebicides de choix dans les pays anglo-saxons et latino-américains.

Leur mécanisme d'action n'est pas connu à ce jour. Leur profil de tolérance est intéressant, avec principalement des troubles gastro-intestinaux. Utilisés en monothérapie, ils sont indiqués chez le porteur asymptomatique d'amibes intraluminales. Associés aux nitro-5-imidazolés, ils sont indiqués dans les cas d'amibiases invasives.

STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE

Amibiase chronique asymptomatique

L'amibiase chronique non dysentérique, avec présence de kystes et de formes mobiles, se traite par amoebicide de contact, soit Intétrix durant 10 jours. Il est éventuellement possible de faire précéder cette cure d'une prise unique de secnidazole.

Amibiase aiguë intestinale

Dans les formes aiguës non compliquées, on préfère souvent le secnidazole en une cure unique d'un jour au métronidazole, qui nécessite pour un coût de traitement comparable une cure de 7 jours consécutifs avec un risque d'apparition d'effets indésirables plus important. En cas de vomissements, recourir aux perfusions intraveineuses en milieu hospitalier, soit de métronidazole soit d'ornidazole. Le relais per os est pris dès la fin des vomissements.

Le traitement par nitro-5-imidazolé est suivi de 10 jours d'Intétrix.

La disparition des signes cliniques et des formes hématophages du parasite à l'examen des selles s'effectue en 2 à 3 jours. En revanche, la disparition des ulcérations rectales éventuellement présentes peut nécessiter 2 à 3 semaines. S'il persiste une colopathie postamibienne, celle-ci relève d'un traitement symptomatique associant pansements intestinaux et antispasmodiques.

Amibiase hépatique

Nitro-5-imidazolés et hydroxyquinoléines sont utilisés. On leur associe parfois une ponction évacuatrice sous échographie en cas d'abcès de grande taille, superficiel, prêt à rompre ou comprimant un organe ou un vaisseau. Ensuite, un drainage de l'abcès peut être nécessaire. Dans les autres cas, les médicaments suffisent, la ponction n'améliorant ni la durée, ni l'évolution, ni la qualité de la guérison.

SUIVI THÉRAPEUTIQUE

Une coproculture est effectuée 3 à 4 semaines après le traitement des formes intestinales. Cet examen parasitologique des selles sera renouvelé trois fois (idéalement tous les 2 à 3 jours) afin d'éliminer le risque de faux négatifs, dans la mesure où l'excrétion des kystes est intermittente.

La surveillance postthérapeutique des formes viscérales est clinique, échographique et biologique avec sérologie et mesure de la vitesse de sédimentation. La douleur disparaît en 2 à 3 jours et la température se normalise généralement en moins d'une semaine.

Le bilan est renouvelé à un, trois, six, douze et dix-huit mois, la sérologie se négativant généralement au bout de 12 à 14 mois et les images échographiques disparaissant progressivement sur plusieurs mois.

PERSPECTIVES THÉRAPEUTIQUES

Les progrès récents accomplis dans la caractérisation des facteurs locaux de virulence des amibes et de la réponse immunitaire locale laissent supposer qu'un vaccin spécifique est un objectif possible à long terme. En attendant, les seules mesures efficaces de lutte contre cette maladie restent l'éducation, l'amélioration de l'hygiène et la lutte contre le péril fécal.

Par Frédéric Chauvelot, pharmacien hospitalier

L'AVIS DU SPÉCIALISTE : « Les diabétiques cumulent deux facteurs de risque »

Doit-on conseiller à un patient voyageant dans un pays où il risque d'attraper des amibes de partir avec un nitro-5-imidazolé dans sa trousse ?

Oui et non. Non dans 80 à 90 % des cas, c'est-à-dire pour les voyages avec hébergement dans des hôtels où le risque est très faible. Oui, pour des séjours au long cours (comme les tours du monde de six mois à un an) ou des voyages itinérants prolongés au-delà de un mois, d'autant plus que le périple se fait au contact proche de la population. Une étude a d'ailleurs montré que les treks et les expéditions majoraient le risque d'être infecté par des parasites et notamment les amibes par rapport aux autres germes intestinaux. Oui encore pour les expatriés, uniquement s'ils vivent dans des conditions d'isolement médical, c'est-à-dire qu'ils ne disposent pas d'un accès simple et rapide (48 heures) à une offre de santé de bonne qualité (comme un village de brousse).

Lors de la délivrance avant le départ, il est essentiel de repréciser les signes cliniques justifiant l'autotraitement par imidazolés, en l'absence de diagnostic médical : une diarrhée traînante, plutôt fréquente (le fameux crachat rectal), sans fièvre ou avec une fièvre minime, a fortiori avec des glaires ou du sang et des douleurs abdominales.

Pourquoi les diabétiques doivent-ils prendre plus de précautions ?

Les diabétiques cumulent deux facteurs de risque. Ils vont moins bien se défendre contre l'inoculum infectieux qu'ils absorbent et déclencher la maladie plus facilement que la population en bonne santé. Cela passe par une moindre efficacité de la barrière de l'acidité gastrique et vraisemblablement par une immunité locale moins performante. Ensuite, quand une diarrhée se déclenche, elle risque d'avoir plus de conséquences : déshydratation, décompensation de l'état diabétique. Sans compter que dans cette situation, les patients diminuent souvent leur prise alimentaire.

Quelles mesures de prévention leur conseiller ? Des probiotiques ?

Si on se réfère à l'« evidence-based medicine », aucun argument ne permet d'affirmer que les probiotiques ont une action préventive sur la diarrhée du voyageur ou liée à l'amibiase. Tout repose donc sur la prévention du péril fécal, avec en premier lieu le lavage des mains avant les repas et après être allé aux toilettes. Le seul fait de passer ses mains sous l'eau élimine une grande partie des germes. Attention aux torchons s'ils sont d'une propreté douteuse ! On peut aussi se munir de lingettes alcoolisées ou de gels lavants sans eau.

Pr Olivier Bouchaud, interrogé par Laurent Lefort, pharmacien

CONSEILS AUX PATIENTS

Avant de partir

-#gt; Avant d'entreprendre un voyage à l'étranger dans des zones considérées comme à risque, mieux vaut bien se documenter sur la destination choisie, en particulier en ce qui concerne le volet sanitaire. Il est d'ailleurs toujours préférable de contracter une assurance rapatriement.

-#gt; Comme il n'existe pas de traitement préventif de l'amibiase, toute la stratégie va reposer sur des mesures non médicamenteuses d'hygiène !

-#gt; Une utilisation préventive des antidiarrhéiques peut même favoriser la survenue d'amibiase. Provoquer un ralentissement du transit peut favoriser la multiplication des amibes et leur passage de l'état quiescent à l'état pathogène. La voie intestinale est en effet la voie principale d'élimination des amibes.

Mesures préventives d'hygiène sur place

-#gt; Se laver les mains fréquemment à l'aide de savon ou d'une solution moussante antiseptique. Cela doit devenir un réflexe avant de passer à table, avant de faire la cuisine ou de toucher des aliments, après avoir été aux toilettes. S'il n'y a pas d'eau disponible à proximité (toilettes de fortune), un gel nettoyant sans eau (Anios, Assanis, Baccide) peut présenter un réel intérêt.

-#gt; Dans un pays à niveau d'hygiène précaire, boire de l'eau minérale (s'assurer impérativement de la réelle décapsulation) ou des boissons encapsulées. Si c'est impossible, filtrer l'eau, la désinfecter (attention, le chlore est peu actif sur les amibes !) ou la faire bouillir au moins 5 minutes.

Les agents désinfectants amoebicides les plus adaptés sont ceux à base d'argent (Micropur Forte). D'une façon générale, les kystes sont sensibles à l'hypochlorite de sodium à 1 % (soit 10 g/l), au glutaraldéhyde à 2 % ou à l'acide acétique à 5 à 10 %.

-#gt; Laver les légumes et les fruits avec de l'eau traitée et les manger pelés ou cuits. Si cela n'est pas possible, éviter à tout prix de consommer des aliments crus, même les glaçons ou les crèmes glacées.

Survenue d'une diarrhée en zone endémique

-#gt; En zone d'endémie, devant toute diarrhée de surcroît glairosanglante, consulter si possible un médecin qui seul pourra diagnostiquer le cas échéant une amibiase intestinale et mettre en place un traitement spécifique adapté.

-#gt; Cependant, il ne faut pas pour autant inquiéter inutilement les patients. Tout épisode diarrhéique sur place ne signifie pas que l'on a des amibes. La plupart du temps il ne s'agit que d'une simple turista (apparaissant dans les 2 à 3 premiers jours) ne nécessitant généralement pas de traitement médicamenteux et dont la prise en charge vise à éviter avant tout la déshydratation.

-#gt; En revanche, la présence de sang ou de glaire dans les selles (c'est-à-dire une dysenterie) dans une zone infestée oriente vers une cause parasitaire, généralement amibienne. Cela nécessite impérativement une consultation médicale et un traitement en urgence.

S'abstenir dans ce cas de prendre avant l'avis du médecin local des médicaments antidiarrhéiques qui ne feraient que masquer les symptômes, voire même les aggraver. Un examen des selles devrait être réalisé systématiquement sur place et de nouveau de retour en France.

-#gt; Rappeler qu'en voyage, les antidiarrhéiques sans ordonnance ne s'utilisent qu'en présence d'une diarrhée isolée, supposée infectieuse, récente et en traitement bref, sans fièvre, sans sang ni mucus, en privilégiant les règles hygiénodiététiques.

L'avis d'un médecin est toujours indispensable car certaines situations nécessitent l'administration de médicaments bien spécifiques.

En cas de confirmation du diagnostic, le proche entourage peut lui aussi être soumis à des analyses parasitologiques des selles. Cet entourage ne doit pas être surpris, car le but est de dépister les porteurs sains.

Examen parasitologique des selles en pratique

Il est principalement demandé pour rechercher une parasitose intestinale avant de prescrire un traitement ou pour vérifier l'efficacité après un traitement.

Il nécessite d'être réalisé le plus vite possible après l'émission de selles pour garantir son efficacité.

A l'aide d'un pot stérile destiné à cet usage, une partie des selles est recueillie et transmise immédiatement à un laboratoire d'analyses médicales. Mal conservé (même au réfrigérateur) ou transmis trop tard, le prélèvement peut être à l'origine de résultats faussement négatifs.

Parfois, le biologiste demande à ce que le patient émette les selles directement au laboratoire.

Afin d'augmenter la sensibilité du test, il doit être répété trois fois afin d'être certain de l'absence de parasites.

Attention aux pratiques sexuelles à risque !

Des amibes peuvent être transmises lors de rapports oroanaux chez les sujets porteurs sains asymptomatiques. Ce mode de transmission est loin d'être négligeable. Il concerne 30 % des homosexuels et des bisexuels.

Pour les porteurs de lentilles de contact

En zone tropicale, préférer le port de lunettes aux lentilles cornéennes, qu'elles soient souples ou rigides. Les amibes peuvent contaminer ces dernières et être responsables de kératites amibiennes extrêmement graves, même si elles sont heureusement rares.

Pour les personnes qui sont porteuses de lentilles, la prévention passe par une hygiène et un entretien irréprochables (faire attention également à la propreté des mains !). Evidemment, la baignade en eau douce est contre-indiquée, et en aucun cas les lentilles ne doivent être rincées à l'eau du robinet.

Par Vivien Veyrat, pharmacien, professeur associé à la faculté de pharmacie de Paris-XI

POUR EN SAVOIR PLUS

INTERNET

Amoebose

http://www.med.univ-angers.fr/service_serveur/invite/anofel/C'est l'ANOFEL, l'Association des enseignants et des praticiens hospitaliers titulaires de parasitologie et mycologie médicales, qui est à l'origine du polycopié national de parasitologie. Destiné aux étudiants en médecine du second cycle, on y trouve un chapitre complet sur les amibes. L'objectif est de connaître l'épidémiologie de l'amibiase, la physiopathologie, les conséquences cliniques, les examens complémentaires utiles selon les formes d'amibiases, les principes du traitement antiamibien (de contact ou diffusibles) et de savoir comment interpréter l'examen parasitologique des selles.

Amibes et lentilles cornéennes

http://www.snof.org/maladies/amibes.htmlLe SNOF (Syndicat national des ophtalmologistes français) propose sur son site un dossier consacré aux kératites amibiennes. Outre un div décrivant la clinique, les moyens d'exploration, la clinique et l'évolution, on trouve des informations sur la prévention et le traitement. Des photos de bonne qualité complètent le propos.

L'amibiase

http://www.asnom.org/fr/443_amibiase. htmlEncore un dossier sur ce parasite. Celui-ci diffère des précédents par son approche délibérément historique. Sa lecture plonge à la fois dans un voyage dans le temps et à travers les continents. Quels médecins s'y sont intéressés ? Qui a fait quoi ? Quelles ont été les grandes étapes ayant contribué à une meilleure connaissance et à une optimisation de la prise en charge de la pathologie ?

Les différents chapitres consacrés à l'agent responsable de l'amibiase, aux signes cliniques de la maladie, à l'épidémiologie, à la thérapeutique (où l'on apprend qu'ont été utilisés l'émétine, dépourvue d'action sur les kystes, la conessine dès les années 30 et les dérivés nitro-imidazolés seulement à partir de 1966, mais avec à la clé une révolution dans la prise en charge) ou à la lutte contre le péril fécal montrent bien le chemin parcouru depuis la découverte du parasite à Saint-Pétersbourg, en 1875.

Amibes libres

Nægleria, Acanthamoeba et Balamuthia sont les noms de genre d'amibes dites « libres », c'est-à-dire vivant en dehors d'un hôte parasité, mais qui peuvent être associées à des pathologies humaines.

Ces amibes sont retrouvées très largement dans l'environnement, essentiellement dans l'eau chaude ou réchauffée par une pollution thermique locale comme l'eau des centrales nucléaires, y compris l'eau de boisson traitée. Ces parasites peuvent être responsables de méningoencéphalites et de kératites extrêmement graves, mais la fréquence des atteintes de l'homme est heureusement très faible par rapport à la circulation de ces amibes libres.

Ces parasites n'entrent pas dans la classification des amibiases.

Amibes non pathogènes

La plupart des autres amibes du tube digestif peuvent être considérées comme non pathogènes pour l'homme dans des conditions habituelles d'infestation.

La liste non exhaustive regroupe Entamoeba coli, E. hartmanni, E. polecki, Endolimax nanus, Pseudolimax butschlii.

Même si elles ne sont pas dangereuses, leur identification à l'occasion d'un examen parasitologique des selles doit alerter sur l'existence d'un déficit d'hygiène et d'une exposition au péril fécal.

Dientamoeba fragilis est considérée par certains comme responsable de troubles tels que diarrhée bénigne, flatulence, fatigue et anorexie. Cependant, l'imputabilité de ces symptômes à la présence du parasite dans le tube digestif reste à démontrer.

Diagnostic différentiel

Les principaux diagnostics différentiels à évoquer sont au nombre de trois :

- l'abcès à pyogènes (des micro-organismes comme les streptocoques et les staphylocoques sont à l'origine de la formation de pus). Cet abcès est moins fréquent et souvent secondaire à une porte d'entrée biliaire ou gastrique ;

- le kyste hydatique du foie (renfermant le scolex d'Echinococcus granulosus) en cas de surinfection après fissuration ;

- le cancer primitif du foie.

Effets indésirables les plus fréquents

Nitro-5-imidazolés : nausées, troubles digestifs, dysgueusie (goût métallique), sécheresse buccale et langue pâteuse, glossite, anorexie, somnolence, vertiges.

Hydroxyquinoléine : réactions cutanées, élévation des transaminases.

Chloroquine : arythmies, troubles de la vision, rétinopathie, ototoxicité, neuropathies périphériques.

Les contre-indications absolues

- Nitro-5-imidazolés : allaitement.

- Intétrix : acrodermatite entéropathique.

- Chloroquine : enfant de moins de 12 ans, rétinopathie, maladie coeliaque.

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