La migraine de l'enfant - Le Moniteur des Pharmacies n° 2607 du 10/12/2005 - Revues - Le Moniteur des pharmacies.fr
 
Le Moniteur des Pharmacies n° 2607 du 10/12/2005
 

Cahier formation

l'essentiel Les migraines peuvent débuter dès l'âge de un an et touchent 8 à 9 % des enfants, la plupart du temps dans un contexte d'antécédents familiaux. Les crises ne diffèrent de celles de l'adulte que par une durée généralement plus courte (parfois une heure) et une localisation de la céphalée plus souvent bilatérale qu'unilatérale. La pâleur et les troubles digestifs sont généralement au premier plan. Des auras auditives ou visuelles précèdent la migraine chez 30 % des enfants. Le traitement des migraines de l'enfant repose en première intention sur l'ibuprofène, pris le plus tôt possible après le début de la céphalée. Le sumatriptan nasal peut être prescrit chez l'enfant à partir de 12 ans. Si la fréquence des crises nécessite un traitement de fond, celui-ci est avant tout basé sur la relaxation, l'hypnose ou le biofeedback. En cas d'échec, différentes molécules utilisées chez l'adulte peuvent être essayées, notamment la flunarizine ou le pizotifène.

ORDONNANCE : Marie, 12 ans souffre de crises de migraine depuis six mois

Marie N. présente, depuis 6 mois, des épisodes de céphalées intenses et durables, accompagnés parfois de vomissements. Devant la récurrence des crises, sa mère décide de consulter le médecin généraliste qui évoque le diagnostic de migraine. La mère de Marie est étonnée par la posologie d'Advil prescrite par le médecin.

L'ORDONNANCE

Docteur Jacques Marty

Généraliste

2, place du Manoir

60500 Chantilly

Tél. : 03 44 57 25 38

60 3 99999 8

Le 2 décembre 2005

Mlle Marie N.

12 ans, 42 kilos, 1 m 51

-#gt; Advil 200 mg

2 comprimés en 1 prise dès le début de la crise. 1 boîte de 30

-#gt; Imigrane spray 10 mg

1 pulvérisation nasale si la crise persiste et n'a pas été soulagée par Advil (au maximum 2 pulvérisations par jour). 1 boîte

A renouveler

LE CAS

Ce que vous savez de la patiente

- Marie N. est une jeune patiente de douze ans n'ayant aucun antécédent particulier. Elle se présente avec sa mère à la pharmacie. Elle pèse 42 kg pour 1 m 51.

Ce dont la patiente se plaint

- Depuis plusieurs mois, Marie se plaint de maux de tête. Pendant ces crises, elle devient très pâle, parfois vomit et s'évanouit pratiquement.

Lorsque la crise a lieu à la maison, Marie se couche dans l'obscurité et souvent s'endort. La douleur a généralement disparu au réveil. Depuis la rentrée, Marie est au collège. Elle a du mal à s'habituer au changement de rythme et au travail scolaire plus soutenu. Lorsqu'une crise a lieu au collège, elle prend du paracétamol ou un comprimé d'Advil 200 mg, mais sans grande efficacité.

Ce que le médecin généraliste lui a dit

- Le médecin a confirmé qu'il s'agissait de migraine typique. Il a expliqué à Marie et à sa mère que l'Advil devrait être efficace mais qu'il fallait prendre deux comprimés et non pas un. A la pharmacie, madame N. s'étonne de cette dose qu'elle trouve très forte compte tenu de l'âge de Marie.

Le médecin a également prescrit de l'Imigrane en pulvérisation nasale au cas où l'Advil ne serait pas efficace, et a demandé à Marie de tenir un agenda des crises. Il doit la revoir dans un mois. Madame N., inquiète, aurait préféré qu'il prescrive un scanner à sa fille.

DÉTECTION DES INTERACTIONS

Il n'y a pas d'interaction médicamenteuse cliniquement significative dans cette ordonnance.

ANALYSE DES POSOLOGIES

Toutes les posologies de l'ordonnance sont correctes.

-#gt; Advil : la posologie conseillée par les spécialistes de la migraine de l'enfant pour traiter la crise est de 10 mg/kg, ce qui correspond bien à 2 comprimés d'Advil 200 mg pour une adolescente de 42 kilos. Il faut rassurer Mme N. sur cette posologie qui lui paraît importante, en lui expliquant que c'est davantage le poids que l'âge de Marie qui est déterminant, et il faut inciter Marie à prendre effectivement les 2 comprimés le plus tôt possible dès le début de la crise.

-#gt; Imigrane : le traitement est à prendre en cas d'échec de l'Advil. Il consiste en une pulvérisation unique dans une seule narine.

AVIS PHARMACEUTIQUE

Le diagnostic de migraine est avant tout clinique. Les crises sont en général plus courtes chez l'enfant que chez l'adulte, et la douleur est plus souvent bilatérale que frontale, mais la pâleur au moment des crises, les signes digestifs et la photophobie sont des signes révélateurs. Le médecin a également interrogé Mme N. sur les antécédents migraineux familiaux. Mme N. s'est souvenue de maux de tête violents dont elle souffrait étant jeune, jamais diagnostiqués en tant que migraine mais qui en présentaient toutes les caractéristiques. Cette notion d'antécédents familiaux est un argument en faveur du diagnostic.

Il est donc justifié que le médecin n'ait pas envisagé d'examens complémentaires, comme le souhaitait la mère de Marie, très anxieuse. Il faut avant tout la rassurer sur la bénignité des symptômes.

- Traitement de la crise

Marie a un traitement conforme à la stratégie thérapeutique proposée par l'ANAES : prescription d'ibuprofène à une dose suffisante en première intention, et de sumatriptan en spray nasal si l'ibuprofène est inefficace. Imigrane en spray nasal a une AMM chez l'enfant de plus de 12 ans depuis novembre 2003. La forme galénique en spray nasal est particulièrement intéressante pour les patients qui sont sujets à des nausées et vomissements lors des crises (cas de Marie) et qui, de ce fait, sont dans l'incapacité d'avaler des comprimés.

En cas de nausées importantes gênant l'administration orale d'Advil, l'administration d'un AINS par voie rectale (diclofénac) aurait pu être envisagée, mais Marie est opposée à ce traitement qu'elle juge peu pratique en dehors de chez elle.

- Analyse des facteurs déclenchants

Il est primordial d'analyser quels sont les facteurs déclenchants des crises de migraine afin de les éviter dans la mesure du possible. Il peut s'agir de facteurs émotionnels comme le stress, ce qui semble le cas pour Marie, depuis son entrée au collège, mais aussi du sport, de la chaleur, de l'hypoglycémie, de l'excès ou du manque de sommeil.

La tenue d'un agenda des crises facilite la détection des facteurs déclenchants.

Marie révèle qu'effectivement les crises surviennent souvent en fin de matinée si elle n'a rien mangé le matin au petit déjeuner, ou les jours où elle s'est couchée plus tard que d'habitude.

La migraine doit également être différenciée de la céphalée dite de tension (moins intense, non pulsatile, non aggravée par l'effort) qui pourrait survenir de façon occasionnelle. En particulier le traitement par sumatriptan doit être réservé au traitement de la crise migraineuse.

INITIATION DU TRAITEMENT

Lors d'une crise, Marie doit commencer par prendre l'AINS.

Imigrane ne doit être utilisé qu'en cas d'inefficacité avérée d'Advil après environ trois quarts d'heure ou une heure, ou si la migraine est d'emblée accompagnée de vomissements empêchant la prise de comprimés.

Il faut s'assurer que Marie pourra effectivement prendre ses médicaments au collège, en accord avec le règlement, et qu'elle peut conserver les médicaments sur elle ou les déposer à l'infirmerie avec l'ordonnance. Veiller à ce qu'elle ait un double du traitement à la maison.

VALIDATION DU CHOIX DES MÉDICAMENTS

-#gt; Advil 200 mg (ibuprofène)

- Anti-inflammatoire non stéroïdien du groupe des acides arylcarboxyliques inhibant la synthèse des prostaglandines.

- Indiqué notamment dans le traitement symptomatique des affections douloureuses (palier I de l'OMS) et/ou fébriles.

- La posologie usuelle est de 20 à 30 mg/kg/jour en trois prises. Dans la crise de migraine, la posologie usuelle est de une dose de 10 mg/kg, à renouveler au maximum 3 fois par jour.

-#gt; Imigrane spray 10 mg/0,1 ml (sumatriptan)

- Vasoconstricteur artériel, agoniste sérotoninergique sélectif des récepteurs 5HT1-like présents surtout au niveau de la circulation artérielle carotidienne.

- Indiqué dans le traitement de la crise migraineuse avec ou sans aura.

- Dans la crise migraineuse, une pulvérisation est à effectuer dès le début de la crise (si migraine commune) ou après la phase de l'aura.

SUIVI DU TRAITEMENT

Il passe avant tout par la tenue de l'agenda des crises : dates, durée et intensité, traitements pris, événements déclenchants. Il permettra au médecin, à la prochaine consultation, d'évaluer la sévérité de la migraine, son retentissement sur la vie courante de Marie (notamment absentéisme scolaire) ainsi que l'efficacité du traitement.

Un traitement de fond n'est envisagé aussi bien chez l'enfant que chez l'adulte que lorsque le patient est amené à prendre plus de trois traitements de crise par semaine.

CONSEILS À LA PATIENTE

Il est utile de rassurer la mère de Marie en lui expliquant que les migraines sont une pathologie bénigne et qu'il est normal de ne pas entreprendre d'examens complémentaires dans un premier temps.

PLAN DE PRISE CONSEILLÉ -#gt; Advil 200 mg : dès le début de la crise, prendre les deux comprimés avec un grand verre d'eau. -#gt; Imigrane spray 10 mg/0,1 ml : une pulvérisation nasale dans une seule narine si la crise migraineuse n'est pas soulagée environ trois quarts d'heure après la prise d'Advil.

Se renseigner sur la migraine de l'enfant

De nombreux renseignements à l'usage de l'enfant et de sa famille sont disponibles sur le site Internet http://www.migraine-enfant.org.

Un livret explicatif sur la douleur, édité par l'association Sparadrap, à l'usage des jeunes patients et un agenda de la migraine peuvent y être téléchargés.

Apprendre à la patiente à gérer son traitement

-#gt; Respecter les posologies prescrites et consulter le médecin si le traitement ne s'avère pas assez efficace.

-#gt; Eviter l'automédication : autres anti-inflammatoires non stéroïdiens ou salicylés, antalgiques avec codéine...

-#gt; Bien différencier les céphalées de tension de la migraine et réserver la prise médicamenteuse à la migraine seule. La céphalée de tension, si elle survient, s'estompe généralement grâce au repos.

-#gt; Prendre le traitement le plus précocement possible en début de crise, dès que Marie sent que son mal de tête va devenir très fort, même au collège. La mère de Marie doit informer les enseignants et remettre un certificat médical si nécessaire. Ce certificat est à demander d'emblée au médecin généraliste.

Expliquer les modalités d'administration d'Imigrane

-#gt; Adopter une position confortable, debout ou assis.

-#gt; Expirer lentement par la bouche.

-#gt; Se moucher en cas de rhume ou de nez bouché.

-#gt; Presser fermement une narine et introduire l'embout du spray dans l'autre narine d'environ 1 cm tout en gardant la tête droite.

-#gt; Inspirer lentement par le nez et en même temps presser fermement le poussoir avec le pouce.

-#gt; Expirer par la bouche.

-#gt; Après utilisation du pulvérisateur, le nez peut sembler pris et l'on peut également ressentir un léger goût dans la bouche.

-#gt; Jeter le pulvérisateur d'Imigrane qui ne contient qu'une seule dose de sumatriptan.

Surveiller les effets indésirables du traitement

- Pour l'Advil

-#gt; Les troubles digestifs (gastralgies, dyspepsies...) sont les effets indésirables les plus fréquents décrits. Ils peuvent être atténués par une prise accompagnée d'une collation, mais cela retarde l'effet antalgique.

-#gt; S'assurer que Marie a déjà eu la varicelle (ce qui est le cas), contre-indiquée avec l'ibuprofène.

- Pour l'Imigrane spray

-#gt; Des cas rares de sensations d'oppression thoracique et de lourdeurs ont été décrits suite à la prise de triptans.

-#gt; Des altérations du goût et un inconfort nasal (irritations) sont souvent rapportés.

Bien tenir l'agenda des crises

-#gt; A chaque crise migraineuse, bien noter le jour et le moment de survenue, les caractéristiques de la douleur ainsi que le traitement utilisé et son efficacité, le temps au bout duquel l'effet bénéfique est perçu et l'apparition d'éventuels effets indésirables.

-#gt; Tenter de détecter les facteurs déclenchants.

-#gt; Mettre en garde Marie contre le tabagisme, avant qu'elle ne soit tentée de fumer, car c'est un facteur favorisant et déclenchant des crises.

Par Cédric Socquet Juglard, Lilia Bakir-Khodja-Chorfa, et le Pr Jean Calop, service de pharmacie clinique, CEEPPPO, CHU de Grenoble

PATHOLOGIE : Qu'est-ce que la migraine de l'enfant ?

La migraine de l'enfant se manifeste par des céphalées sévères, évoluant par crises stéréotypées. Par rapport à celles de l'adulte, les crises sont plus courtes, les troubles digestifs au premier plan, la pâleur inaugurale fréquente. La céphalée est souvent frontale, plus souvent bilatérale qu'unilatérale, parfois précédée d'aura.

Les dernières recommandations sur la prise en charge diagnostique et thérapeutique de la migraine chez l'adulte et chez l'enfant ont été publiées par l'ANAES en octobre 2002. En 2004, l'International Headache Society (IHS) publiait une nouvelle classification internationale précisant les particularités de la migraine de l'enfant.

ÉPIDÉMIOLOGIE

La pathologie migraineuse est la première cause de céphalée récurrente de l'enfant.

Le taux de prévalence de la migraine infantile en France se situe entre 5 et 10 %, certainement plus proche de 8-9 % d'après les enquêtes les plus récentes. Les mêmes chiffres de prévalence se retrouvent dans d'autres pays (Finlande, Grande-Bretagne, Iran, Turquie, Grèce, Italie...). On constate une augmentation de la prévalence des céphalées depuis les années 70. Les principales causes invoquées - mais non démontrées - sont les modifications de style de vie (stress...), la télévision, les jeux vidéo, la consommation de caféine (sodas)...

La migraine peut survenir à tout âge, même dès la première année de vie de l'enfant. A cet âge, le diagnostic de migraine peut être évoqué devant un enfant abattu, pâle, qui vomit, surtout s'il existe des antécédents familiaux de migraine.

Le risque pour un enfant de souffrir de migraine est estimé à 75 % si les deux parents sont affectés, à 45 % si un seul parent est migraineux.

Avant la puberté, garçons et filles sont également touchés, mais les garçons souffrent de migraine plus tôt. Après la puberté, la proportion passe à 3 ou 4 filles pour 1 garçon. Le pic d'incidence varie selon la présence d'aura et le sexe :

-#gt; migraine avec aura : vers 5 ans pour les garçons et vers 12 ans chez les filles ;

-#gt; migraine sans aura : vers 10 ans chez les garçons et vers 14 ans chez les filles.

La migraine est une pathologie sous-estimée chez l'enfant en raison des difficultés diagnostiques (brièveté des crises, signes cliniques digestifs) et de son origine pseudo-psychologique.

PHYSIO-PATHOLOGIE

Première idée fausse à combattre : la migraine n'est pas une maladie psychologique, même si certains facteurs déclenchants sont de nature psychologique.

La migraine est une maladie neurovasculaire polygénique multifactorielle complexe, intriquant des facteurs génétiques et environnementaux. La genèse familiale apparaît évidente lorsque plusieurs générations sont touchées. Certains gènes ont été identifiés (3 gènes de susceptibilité codant pour un canal calcique ou sodique ont été trouvés sur les chromosomes 1, 19 et 2), mais ils concernent une forme rare de migraine (migraine hémiplégique familiale).

De nombreuses incertitudes subsistent sur la physiopathologie de la maladie migraineuse. Aujourd'hui, la théorie qui prévaut est une stimulation associée à une inflammation du système trigéminovasculaire. Le processus se déroule en 3 phases.

-#gt; Divers facteurs (hormonaux, psychologiques...) stimulent les fibres du nerf trijumeau, ce qui provoque la libération de neuropeptides vasoactifs au contact des vaisseaux méningés.

-#gt; Ces neuropeptides entraînent une dilatation des vaisseaux méningés et le passage de protéines à travers les parois des vaisseaux, conduisant à une inflammation méningée.

-#gt; L'inflammation stimule en retour les fibres nerveuses vers les aires corticales de la douleur et vers les noyaux hypothalamiques, expliquant les céphalées et les signes digestifs de la migraine.

SIGNES CLINIQUES

- Signes spécifiques à l'enfant

Les signes cliniques de la maladie migraineuse de l'enfant sont proches de ceux de l'adulte. Les critères diagnostiques de l'IHS pour la migraine ont été actualisés en 2004 et mettent en évidence deux différences chez l'enfant : une durée minimale des crises plus courte que celles des adultes (1 heure versus 4 heures) et une localisation frontale et bilatérale, contrairement à l'unilatéralité de l'adulte.

- Céphalée et signes accompagnateurs

Schématiquement, la migraine se traduit par des céphalées sévères stéréotypées souvent accompagnées de signes digestifs (nausées, vomissements), d'une douleur pulsatile et d'une pâleur importante avec des cernes. Photophobie et phonophobie sont souvent présentes.

Durant les crises, de violentes douleurs abdominales surviennent parfois, ainsi que des vertiges. Le sommeil est la plupart du temps réparateur. Le retentissement sur la vie sociale et la qualité de vie des enfants est important, la migraine étant associée à un fort absentéisme scolaire.

- Auras

Rarement évoquées spontanément par l'enfant, les auras accompagnent la migraine dans 30 à 40 % des cas (elles augmentent en fréquence avec l'âge) et surviennent avant ou pendant la céphalée.

L'aura est un trouble neurologique focal réversible dont l'expression varie selon la zone cérébrale touchée. On distingue des troubles :

-#gt; Visuels, les plus fréquents : phosphènes, scotome brillant, zone floue, taches colorées, images déformées.

-#gt; Sensitifs à type de paresthésie ou fourmillements des mains, des pieds ou des membres.

-#gt; Moteurs : engourdissement, diminution de la force musculaire.

-#gt; Auditifs : bourdonnements, sifflements, hallucinations auditives (« voix qui appellent l'enfant »).

Provoquant parfois une véritable anxiété, ces troubles bizarres à type de translation d'objet, de troubles de l'équilibre, voire de la conscience, de vision scintillante, peuvent parfois aller jusqu'au « syndrome d'Alice au pays des merveilles ».

- Formes rares

Il existe également des formes de migraine avec perte de connaissance initiale ou s'accompagnant de trouble de la régulation thermique avec hypo- ou hyperthermie. Plus rarement, des formes spectaculaires ataxiques, hémiplégiques, parétiques, confusionnelles, apraxiques sont observées et nécessitent une investigation approfondie pour éliminer une lésion sous-jacente.

FACTEURS DÉCLENCHANTS

A ne pas confondre avec les causes, les facteurs déclenchants sont recherchés systématiquement lors de la consultation afin d'apprendre aux enfants et à la famille à les identifier et les éviter si possible. Les facteurs déclenchants diffèrent un peu de ceux de l'adulte, les aliments étant exceptionnellement en cause (le chocolat est très rarement incriminé). Parmi les plus fréquents :

-#gt; Hygiène de vie : sauter un repas, alimentation déséquilibrée, les boissons à base de cola, un sommeil insuffisant...

-#gt; Activités et efforts : l'endurance, l'effort physique intense, l'agitation, la piscine, les chocs sur la tête (judo, football...), les roulades.

-#gt; Facteurs émotionnels : charge scolaire, contrariétés, excitation...

-#gt; Stimulations sensorielles : chaleur, bruit, lumière, froid, odeurs fortes...

DIAGNOSTIC

Il est essentiellement clinique, basé sur l'anamnèse et sur un examen clinique rigoureux, et ne nécessite pas de voir l'enfant pendant une crise de migraine. La notion d'antécédents de migraine actuelle ou passée chez l'un des parents est un argument évocateur de poids.

Cependant, certains signes cliniques peuvent égarer et retarder la démarche diagnostique. Ainsi les troubles de la vision, la photophobie de la crise orientent parfois - à tort - vers une consultation ophtalmologique. Les vomissements ou les douleurs abdominales peuvent être diagnostiqués « gastroentérite ».

Il est donc indispensable de rechercher les antécédents familiaux de migraine et de traiter d'office comme une migraine dès que le diagnostic est suspecté.

Chez les moins de 6 ans où l'interrogatoire et la clinique sont moins aisés, une imagerie cérébrale (scanner avec injection, IRM) est plus facilement réalisée, sauf si la migraine est typique. La prudence est de règle à cet âge, qui est la période de plus grande fréquence des tumeurs cérébrales.

ÉVOLUTION

Malgré la rareté des données, le pronostic semble le plus souvent favorable. Toutefois, près de 30 à 40 % des enfants migraineux le restent à l'âge adulte, avec une fréquence de crises très variable qui peut aller de une par an à deux par semaine.

Par Christine Julien, pharmacienne, en collaboration avec le Dr Jean-Christophe Cuvellier, neuropédiatre.

L'AVIS DU SPÉCIALISTE : « Se méfier des équivalents migraineux chez l'enfant »

Jean-Christophe Cuvellier, neuropédiatre, praticien hospitalier (CHU de Lille)

Qu'est-ce qu'un équivalent migraineux ?

Il existe un certain nombre de syndromes méconnus, considérés comme des précurseurs ou des équivalents de la migraine. Ces équivalents migraineux, pro-pres à l'enfant, tendent à disparaître spontanément avec l'âge mais sont remplacés dans environ la moitié des cas par des accès migraineux typiques. C'est un diagnostic difficile (l'examen clinique intercritique et les examens paracliniques sont normaux), peu connu des médecins et qui repose sur la connaissance que le praticien en a et sur la notion d'antécédents de migraine chez les parents.

Comment se manifestent ces équivalents migraineux ?

Vous avez des enfants de quelques mois qui font un torticolis paroxystique bénin durant quelques heures, qui se reproduit de façon régulière sur une base mensuelle et disparaît vers l'âge de 3 ou 4 ans. La moitié des enfants évolue ultérieurement vers la migraine. Vers 2-4 ans, certains enfants subissent des crises de vertige paroxystique bénin de quelques minutes à quelques heures, de résolution spontanée.

D'autres présentent des vomissements cycliques, qui évoluent par périodes de un à trois jours pendant lesquelles ils sont très fréquents, plusieurs fois par heure. D'autres subissent des crises de migraine abdominale, se présentant comme des douleurs abdominales sourdes ou irritatives, parfois accompagnées de troubles digestifs plus ou moins périodiques.

Enfin, moins connu est le syndrome des douleurs des membres inférieurs. Les enfants présentent des accès douloureux dans les membres inférieurs, survenant de façon plus ou moins régulière, souvent la nuit.

Dr Jean-Christophe Cuvellier, interrogé par Christine Julien

THÉRAPEUTIQUE : Comment traiter la migraine de l'enfant ?

Le traitement comprend d'une part des médicaments destinés à traiter la crise, et d'autre part des traitements de fond parmi lesquels les moyens non pharmacologiques sont préférés aux médicaments, ceci afin de réduire le nombre et l'intensité des crises.

Les thérapeutiques de la prise en charge de la migraine de l'enfant sont issues d'un travail publié par l'ANAES en 2002. En l'absence de niveau de preuve, les recommandations proposées sont fondées sur un accord professionnel entre les membres des groupes de travail et de lecture. La rareté des études ou leur faiblesse ne signifient pas pour autant que ces recommandations ne soient pas pertinentes ou utiles, mais justifient la réalisation d'études complémentaires. Les thérapeutiques proposées par l'ANAES sont basées sur l'analyse d'études internationales et la pratique clinique d'experts.

TRAITEMENT DE LA CRISE

Il existe un biais important pour évaluer l'efficacité des traitements de la crise migraineuse chez l'enfant, ceci pour deux raisons : d'une part, parce que la durée de la crise est parfois plus courte que le temps au bout duquel le médicament est efficace, d'autre part parce que l'enfant en crise recherche le sommeil, très souvent réparateur. En outre, le taux de réponse placebo est très élevé, surtout chez l'adolescent.

Symptomatique, le traitement médicamenteux fait appel à des antalgiques, des anti-inflammatoires ou au sumatriptan par voie nasale. Le choix est guidé par l'efficacité, l'âge de l'enfant et les éventuelles contre-indications et effets secondaires.

Antalgiques classiques

- Ibuprofène

C'est la molécule de première intention chez l'enfant de plus de 6 mois. Son efficacité et sa sécurité ont été prouvées. La dose préconisée - absente des recommandations de l'ANAES - est le fruit de deux études (finlandaise et américaine) qui concluent à l'efficacité d'une dose d'au moins 7,5 mg/kg/prise.

Les médecins spécialisés recommandent la dose de 10 mg/kg/prise, à renouveler si nécessaire au maximum trois fois par 24 heures.

L'ibuprofène doit être donné dès le début de la crise sous peine d'inefficacité ou d'efficacité moindre.

- Diclofénac

Utilisé chez l'enfant de plus de six ans ou dont le poids est supérieur à 16 kg, le diclofénac sous forme suppositoire est à privilégier en cas de nausées et/ou de vomissements.

- Naproxène

Chez l'enfant de plus de 6 ans ou dont le poids est supérieur à 25 kg, le naproxène est une alternative intéressante en cas d'inefficacité des autres anti-inflammatoires non stéroïdiens.

- Aspirine

L'aspirine fait partie des recommandations de l'ANAES, mais aucune étude n'est disponible pour confirmer son efficacité. Ses effets secondaires (troubles digestifs, sensibilisation, syndrome de Reye...) limitent parfois son utilisation.

- Paracétamol

Une seule étude montre que le paracétamol est efficace dans le traitement de la crise migraineuse à la dose de 15 mg/kg/prise. Très utilisé car considéré comme inoffensif, il peut entraîner des abus médicamenteux et des céphalées chroniques quotidiennes.

Sumatriptan nasal

Agoniste sélectif des récepteurs 5-HT1B/1D, le sumatriptan exerce une action vasoconstrictrice sélective de la circulation artérielle carotidienne et inhiberait l'activité du nerf trijumeau. Le sumatriptan en pulvérisations nasales est indiqué dans le traitement de la crise de migraine avec ou sans aura chez l'adolescent à partir de 12 ans. Son efficacité semble identique quel que soit le stade de la crise durant lequel il est administré. La dose de 10 mg peut être utilisée en première intention. Si le patient n'est pas soulagé, la dose de 20 mg peut s'avérer nécessaire lors de la crise suivante. Chaque pulvérisateur contient une dose unique de sumatriptan, à pulvériser dans une seule narine.

Certains praticiens hospitaliers prescrivent le sumatriptan hors AMM chez de plus jeunes enfants (dès 8 ans parfois) en l'absence d'autre solution.

Le produit ne doit pas être inhalé mais absorbé par la muqueuse nasale. Pour cela, on recommande une inspiration lente.

Deux pulvérisations par 24 heures sont autorisées, espacées d'au moins 2 heures. Toutefois, en l'absence de soulagement après la première dose, il n'est pas recommandé d'administrer une deuxième dose.

Les associations avec les dérivés de l'ergot de seigle et les IMAO sont contre-indiquées, celles avec les IRSS et le millepertuis surveillées (augmentation possible des effets indésirables). Les effets secondaires rapportés sont des perturbations transitoires du goût à type d'amertume (un tiers des cas), de faibles irritations locales, des sensation de fourmillement, des vertiges, des vomissements, de la fatigue et de la somnolence.

Autres molécules

- Métoclopramide

Seul ou associé à l'aspirine ou au paracétamol, le métoclopramide est utilisé pour ses propriétés antiémétiques, accélératrices de la motricité digestive et stimulantes de la motricité intestinale. Ses effets secondaires (syndromes extrapyramidaux avec dyskinésie et dystonie aiguë), plus fréquents chez les tout-petits, en font une molécule peu prescrite et peu appréciée des neuropédiatres et des pharmacologues.

- Tartrate d'ergotamine

Indiqué chez l'enfant de plus de 10 ans, le tartrate d'ergotamine - l'utilisation est basée sur celle de l'adulte - est peu employé en raison d'un manque de preuve d'efficacité et à cause de ses effets secondaires (ergotisme, nausées, vomissements). Le tartrate d'ergotamine induit une vasoconstriction systémique prolongée. La dose recommandée est la moitié de celle de l'adulte (1 mg/j jusqu'à 3 mg/j et 5 mg maxi/semaine). Certains neurologues utilisent le Diergospray nasal qui a l'avantage d'être administrable facilement mais qui ne possède l'AMM qu'à partir de 16 ans.

- Opiacés et produits caféinés

Les produits contenant de la caféine sont à éviter car ils sont à l'origine de céphalées chroniques quotidiennes par rebond, plus fréquentes que chez l'adulte (attention aux sodas à base de cola !). Les produits contenant des opiacés (codéine, dextropropoxyphène, tramadol) sont à proscrire en raison de leur inefficacité et des risques d'abus potentiels dans le cadre d'une prescription chronique.

Quel que soit le traitement de crise, il ne faut pas dépasser 3 jours de prise par semaine, ce qui exposerait au risque de céphalées chroniques quotidiennes. Si la fréquence des accès y incite, il est préférable de passer à un traitement de fond.

TRAITEMENT DE FOND

Les thérapeutiques non médicamenteuses

L'apprentissage de méthodes telles la relaxation, l'hypnose, les thérapies cognitivocomportementales ou le biofeedback a un intérêt dans le traitement de fond des céphalées en général, notamment dans les cas où les facteurs émotionnels jouent un rôle important dans le déclenchement des crises. Plusieurs techniques sont particulièrement utilisées chez l'enfant migraineux dès l'âge de 4 ans, souvent en association. En général, environ 3 à 10 séances de 30 à 45 minutes sont nécessaires.

- Relaxation

Schématiquement, la relaxation s'occupe de l'aspect corporel en utilisant des techniques inspirées de Schultz et Jacobson, qui passent par la détente musculaire, un travail sur la respiration et sur la notion de pesanteur (l'enfant visualise sa respiration en voyant monter et descendre un objet posé sur son ventre).

- Thérapie cognitivocomportementale

C'est une thérapie fondée à la fois sur les théories de l'apprentissage et la modification des schémas cognitifs. En pratique, le thérapeute travaille par exemple la restructuration cognitive : on demande à l'enfant ce que représente la migraine pour lui : « La migraine ne s'arrêtera jamais » ou « La migraine peut me faire éclater la tête », pense le jeune enfant.

Le travail sur les émotions - souvent facteurs déclenchants - consiste, grâce à des jeux de rôle ou des mimes, à faire identifier les émotions.

- Hypnose

Dès 6-7 ans, l'hypnose consiste à travailler sur l'imagination, la visualisation, les sensations, la capacité d'être à la fois dans une pièce et ailleurs avec la notion de « lieu refuge ». On potentialise les capacités de rêverie naturelle de l'enfant. La technique de fixation de l'attention se fait sur une idée, un lieu agréable qui permet à l'enfant de s'y référer lors d'une tension afin d'éviter ou de gérer une crise.

- Biofeedback (ou rétrocontrôle)

C'est une méthode qui cherche à rendre conscientes un certain nombre d'activités physiologiques normalement inconscientes (surtout activité électromyographique, variations de température, de résistance électrique cutanée...). Ces activités sont recueillies grâce à des électrodes de contact, puis amplifiées, intégrées et visualisées. Chez l'enfant, on mesure essentiellement la conductance cutanée et la tension musculaire (électromyogramme) grâce à des capteurs posés sur deux doigts ou au niveau des muscles du bras ou des cervicales. En prononçant une certaine liste de mots à l'enfant, ceux chargés émotionnellement vont faire augmenter la conductance par exemple. L'enfant peut ainsi constater que son corps réagit à des émotions car le signal électrique va être visualisé sur un écran par un dessin qui se modifie. Plus il se détend, plus l'image se transforme.

Les coordonnées des thérapeutes spécialisés peuvent être obtenues auprès de l'hôpital Armand-Trousseau (01 44 73 65 19 ou 61 79).

Les thérapeutiques médicamenteuses

Les médicaments de fond sont appelés à la rescousse en cas d'échec des moyens non pharmacologiques chez les enfants ayant des crises fréquentes (plus de deux par semaine) mal soulagées par le traitement, mais aussi chez ceux dont les crises plus ou moins fréquentes ont un fort retentissement sur leur vie (absentéisme scolaire durant 2 ou 3 jours par exemple).

Les molécules utilisées (et préconisées par l'ANAES) sont issues de la pratique chez l'adulte : propranolol, amitriptyline, flunarizine, pizotifène, DHE, métoprolol, oxétorone. La flunarizine et le pizotifène sont les seuls à avoir une AMM chez l'enfant, respectivement de plus de 12 ans et de plus de 10 ans. Les posologies utilisées sont basées sur celles de l'adulte, parfois avec une simple diminution de 50 %.

En l'absence de preuve scientifique d'efficacité, le choix de la molécule est basé sur sa tolérance et les habitudes du médecin, certains prescrivant plus facilement l'amitriptyline lorsque les facteurs favorisants s'avèrent de composante anxieuse.

La règle est de les utiliser à faibles doses afin de limiter les effets indésirables à type de sédation et de prise de poids (peu appréciée chez les adolescentes) fréquents avec la flunarizine, l'amitriptyline et le pizotifène.

- Flunarizine (Sibélium)

La flunarizine est un inhibiteur calcique qui inhibe le spasme vasculaire au niveau des fibres musculaires lisses des parois artérielles, notamment au niveau des carotides, améliore la microcirculation et possède une activité anti-H1. Il est indiqué dans le traitement de fond de la migraine chez l'enfant de plus de 10 ans à la dose de 5 mg/j.

La durée de traitement ne doit pas excéder deux mois. Il est contre-indiqué en cas d'antécédents de troubles extrapyramidaux ou dépressifs. Il entraîne une somnolence et une sédation qui imposent une prise au coucher et peuvent gêner l'enfant dans ses activités, ainsi que des troubles digestifs.

- Pizotifène (Sanmigran)

Antagoniste sérotoninergique, le pizotifène est un antimigraineux de fond dont les propriétés anticholinergiques et antihistaminiques entraînent des effets secondaires non négligeables (prise de poids, somnolence, troubles visuels et mictionnels). Il peut être utilisé chez l'enfant dès 12 ans en augmentant progressivement la posologie en raison de la somnolence en début de traitement.

PERSPECTIVES

Elles suivent celles de la migraine de l'adulte. A court terme, il serait nécessaire d'entreprendre des études réalisées selon les critères actuels, qui permettent d'avoir des données sur l'efficacité des traitements de fond. Le topiramate, déjà indiqué chez l'adulte à la dose de 25 à 50 mg par jour en traitement prophylactique de la crise migraineuse, est à l'étude.

A plus long terme, on peut imaginer le développement de molécules plus ciblées d'un point de vue physiopathologique, comme la CGRP (calcitonin gene-releated peptide). Développer l'analyse sémiologique des formes de l'enfant est également nécessaire.

Par Christine Julien

CONSEILS AUX PATIENTS

Des indices pour consulter

-#gt; Des achats répétés d'antalgiques, des plaintes récurrentes (maux de tête et de ventre) témoignent d'un syndrome douloureux incorrectement pris en charge. La migraine de l'enfant présente souvent une sémiologie trompeuse.

-#gt; Tout enfant migraineux dont le traitement est peu ou pas efficace (fréquence des crises stable, mauvaise reprise des activités, pas ou peu de soulagement en deux heures...) doit consulter à nouveau.

Chasser les idées fausses

La migraine n'est pas une maladie psychologique. Le stress, l'anxiété, la charge scolaire ne sont que les facteurs déclenchants des crises. Ce n'est pas pour autant que l'enfant invente ou « exploite » ses céphalées. En aucun cas, l'enfant ne déclenche ses crises volontairement.

Rassurer sur la maladie

La migraine ne met jamais la vie de l'enfant en danger malgré l'expression impressionnante de certaines crises (vomissements, pâleur cadavérique...). Elle reste cependant une source de handicap (la douleur nuit aux activités sociales et ludiques).

Repérer les facteurs déclenchants

Conseiller quelques règles d'hygiène de vie pour éviter la survenue des facteurs déclenchants évitables : ne pas se coucher tard, ne pas sauter un repas ni boire trop de boissons au cola.

Tenir un agenda des crises

Conseiller aux parents ou à l'enfant de tenir un agenda des crises afin d'identifier les facteurs déclenchants, d'évaluer l'efficacité des traitements et de permettre au médecin d'apprécier la sévérité de la migraine et son retentissement sur la vie quotidienne (absentéisme scolaire). L'agenda permet de repérer les éventuels abus d'antalgiques ou la sous-utilisation du médicament de crise (téléchargeable sur http://www.migraine-enfant.org).

Calmer la crise

-#gt; Proscrire la prise de triptans et de dérivés de l'ergot de seigle en association.

-#gt; Si l'ibuprofène (ou autre) est prescrit en première intention, attendre au moins 45 minutes avant de recourir à l'Imigrane.

-#gt; Attendre la fin de l'aura pour prendre le triptan.

-#gt; En cas de vomissement, utiliser la voie rectale si possible.

Se traiter à l'école

L'abstention thérapeutique peut se justifier si la crise est peu sévère ou courte (une heure). Le sommeil, très souvent réparateur, est parfois la solution de choix : l'enfant doit pouvoir bénéficier d'un endroit à l'écart pour se détendre, voire s'isoler et dormir à l'école ou à la garderie (lit, infirmerie).

Prévoir un certificat médical pour la prise de traitement de crise. Il existe une circulaire qui autorise les traitements à l'école (Handiscol, tél. : 0 810 555 501).

Expliquer à l'enfant

S'adresser directement à l'enfant est un atout de l'observance : une bonne information lui permettra de gérer son traitement de crise à l'école ou chez la nourrice. S'asseoir au niveau de l'enfant et utiliser un langage adapté à son développement cognitif.

-#gt; Un enfant de 1 à 3 ans commence à désigner où il a mal. Il n'a pas la notion de temps et ne comprend qu'une consigne à la fois.

-#gt; Entre 3 et 6 ans, il a besoin d'aide pour désigner sa douleur, dont il attribue la cause à des personnes ou des événements extérieurs objectivables. La douleur est souvent vécue comme une punition ; ses peurs sont diffuses et il a besoin d'être rassuré sur son intégrité corporelle.

-#gt; Ce n'est qu'à partir de 6 ans qu'il peut faire le lien entre la douleur et sa cause et qu'il apprécie les explications.

-#gt; Chez l'adolescent, bien souvent la douleur est vécue comme une injustice l'excluant des autres.

Parler de l'objectif de la prescription (« Sais-tu pourquoi le médecin t'a prescrit un médicament ? ») en précisant que « c'est pour enlever la douleur ». Favoriser sa participation : « Tu prends le médicament dès que tu as mal. » Indiquer comment avaler un comprimé : « Bois un grand verre d'eau en te mettant debout ou assis, jamais allongé. »

Prévenir les crises

Certaines méthodes non médicamenteuses (relaxation, biofeedback, hypnose...) ont montré leur efficacité dans la gestion et la diminution des crises de migraine. Elles sont conseillées avant le recours aux traitements de fond médicamenteux.

Effectuées par des psychologues cliniciens libéraux (non pris en charge) ou hospitaliers (pris en charge), ces méthodes relèvent aussi du choix de l'enfant.

Les parents ne doivent pas intervenir dans les exercices faits à domicile ni les imposer : l'enfant s'approprie la technique, qui n'est en aucun cas un « devoir » à faire.

Par Christine Julien

POUR EN SAVOIR PLUS

INTERNET

http://www.migraine-enfant.org

Ce site est réalisé par le centre de la migraine de l'enfant créé en 2002 à l'hôpital d'enfants Armand-Trousseau (Paris). Depuis près de 10 ans, il prend en charge plus de 2 000 enfants migraineux. Ouvert à tous, son objectif est clair : en savoir plus sur la migraine. L'accès professionnel permet d'aborder la migraine de l'enfant de façon concise : épidémiologie, diagnostic, mais aussi traitements, avec un guide de prescription et un article de synthèse très clair. Il est également possible de télécharger un agenda de la migraine et de consulter le livret « Migraine » destiné aux patients.

http://www.pediadol.org

Site incontournable sur la douleur pédiatrique depuis 10 ans : la richesse et la qualité des articles proposés, la pertinence du ton et la fonctionnalité sont vraiment à la hdiv. Les pathologies douloureuses sont envisagées à la fois dans leur aspect clinique, thérapeutique et psychologique. Recommandations, stratégies, évaluations, protocoles, sédation mais aussi divs officiels, bibliographie, formation, congrès, rien ne manque. Ce site permet de comprendre l'importance de l'évaluation de la douleur, aborde les difficultés inhérentes à l'enfant et encourage tout professionnel de santé à ne plus considérer la douleur de l'enfant comme une fatalité. A la tête de Pediadol.org, des médecins et des infirmières spécialisés dans la douleur.

LIVRES

La douleur chez l'enfant

Daniel Annequin, Editions Masson, 2002

Ecrit par Daniel Annequin, responsable du centre antidouleur de l'hôpital d'enfants Armand-Trousseau et coordinateur du Centre national de ressources antidouleur, cet ouvrage fait un tour d'horizon sur la douleur chez l'enfant : évaluation, techniques d'analgésie, prescriptions, rôle de l'infirmier, traitements pharmacologiques et non médicamenteux... Les données pointues alternent avec des conseils très pratiques et un chapitre est consacré à la migraine de l'enfant. Un livre de référence pour acquérir une culture de base sur la douleur de l'enfant

Diagnostic différentiel

- Céphalées de tension : moins fréquentes chez l'enfant, elles associent douleur moins intense, plutôt en fin de journée, sans photo- ni phonophobie, sur un terrain de « stress » psychologique. Elles peuvent être associées à des crises migraineuses et forment alors un tableau mixte, source de confusion diagnostique, d'erreur de prise en charge et d'abus d'antalgiques.

- Infection méningée : les céphalées sont associées à une raideur de la nuque et une fièvre.

- Hypertension intracrânienne : céphalées récentes, sans facteur déclenchant, horaire matinal ou nocturne, exacerbées par un changement de position, une modification de l'humeur, du comportement, des difficultés scolaires récentes...

- Traumatisme crânien, troubles vasomoteurs (HTA, phéochromocytome, malformation artérioveineuse), tumeur, hématome intracrânien, ponction lombaire, intoxication au CO2, abus d'antalgiques, phobie scolaire ou dépression chez l'adolescent peuvent générer des céphalées chroniques ou récurrentes.

- Epilepsie : la perte de connaissance brutale pose le problème du diagnostic différentiel avec l'épilepsie. En pratique, la perte de connaissance de l'épilepsie survient sur un cortège de signes.

Les examens complémentaires

En cas de migraine, l'électroencéphalogramme est normal en dehors des crises. Un scanner ou un IRM peuvent être motivés par des signes qui ne font pas partie de ceux de la migraine : examen neurologique anormal, modification ou aggravation des crises, changement de l'humeur, baisse des résultats scolaires, cassure de la courbe de croissance, signes d'hypertension intracrânienne, signes endocriniens, jeune âge de l'enfant. La forte inquiétude des parents, notamment en cas d'antécédents familiaux de tumeur, peut être un élément déterminant.

Contre-indications et interactions chez l'enfant

- Contre-indications

Les traitements de crise ou de fond de la migraine de l'enfant possèdent des contre-indications qui a priori ne concernent pas l'enfant (glaucome, adénome prostatique, insuffisance cardiaque...), sauf la flunarizine, contre-indiquée en cas de syndrome dépressif et les bêtabloquants en cas d'asthme.

- Interactions

De même, la seule interaction que l'on pourrait retrouver chez l'enfant est celle entre sumatriptan et tartrate d'ergotamine qui est à proscrire : risque d'hypertension artérielle et de vasoconstriction artérielle coronaire.

La stratégie thérapeutique

Une fois le diagnostic posé, le médecin informe l'enfant et la famille sur la maladie et incite à tenir un agenda de la migraine afin de noter les caractéristiques de la douleur, les facteurs déclenchants et la consommation médicamenteuse pour détecter un éventuel abus. L'observance thérapeutique est ainsi facilitée.

L'objectif thérapeutique est de diminuer de moitié l'intensité et la fréquence des crises. En général, une prise en charge correcte permet d'atteindre cet objectif en 6 mois, la migraine étant plus facile à traiter chez l'enfant que chez l'adulte. En traitement prophylactique, on donne la préférence à des moyens non pharmacologiques (relaxation, hypnose, techniques cognitivocomportementales, biofeedback). Ce n'est qu'en cas de crises fréquentes, à fort retentissement sociofamilial, qu'on utilise les thérapeutiques préconisées chez l'adulte, le plus souvent hors AMM et aux effets secondaires non négligeables (prise de poids et somnolence).

En cas de crise :

- Prendre le traitement de la crise le plus précocement possible.

- Utiliser l'ibuprofène en première intention dès l'âge de 6 mois et le sumatriptan spray nasal en cas d'échec du paracétamol, de l'aspirine et des AINS chez les enfants dès 12 ans.

- En cas de nausées intenses et de vomissements, on utilise les voies rectale (diclofénac) ou nasale (sumatriptan).

- Attendre l'apparition de la céphalée pour traiter une crise avec aura pour le sumatriptan et les dérivés ergotés.

- En cas d'inefficacité de la première molécule prescrite, un autre antalgique doit être donné, après un délai de 1 heure. En cas d'échec, une troisième molécule sera prescrite.

- En l'absence d'efficacité, ne pas dériver vers l'abus d'antalgiques qui risquent de ne faire qu'aggraver les choses, mais envisager un traitement de fond.

- Un médicament est maintenu s'il soulage la crise en moins de 1 à 2 heures, s'il est bien toléré, s'il ne nécessite qu'une seule prise et s'il permet une reprise normale et rapide des activités. Le traitement est modifié si l'un de ces quatre critères n'est pas rempli.

Bien utiliser le spray nasal d'Imigrane

- Adopter une position confortable, debout ou assis, se moucher en cas de rhume ou de nez bouché.

- Retirer le pulvérisateur nasal de son blister, le maintenir avec précaution, sans appuyer sur le poussoir bleu. Attention : le poussoir bleu ne fonctionne qu'une fois !

- Presser fermement sur une narine pour la boucher.

- Expirer lentement par la bouche.

- Introduire l'embout dans l'autre narine d'environ 1 cm.

- Incliner légèrement la tête vers l'arrière et fermer la bouche.

- Inspirer lentement par le nez tout en pressant fermement le poussoir bleu avec le pouce (le poussoir peut opposer une légère résistance et on peut entendre un déclic lors de son utilisation).

- Retirer le pulvérisateur du nez ainsi que l'index qui maintient l'autre narine bouchée.

- Inspirer doucement par le nez pour permettre au produit de bien rester dans la narine.

- Expirer par la bouche.

- Après usage, il est possible de ressentir un léger goût dans la bouche, avec la sensation d'avoir le « nez pris ». Cela est normal et disparaît rapidement.

- Après une seule utilisation, le pulvérisateur est vide. Une boîte traite deux crises.

Pourrez-vous respecter la minute de silence en mémoire de votre consœur de Guyane le samedi 20 avril ?


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